Question de M. BOULOUX Yves (Vienne - Les Républicains) publiée le 13/07/2023

M. Yves Bouloux attire l'attention de Mme la Première ministre sur la réparation des dommages causés à l'occasion des émeutes de juin 2023, en lien avec le décès du jeune Nahel.

L'article L.211-10 du code de la sécurité intérieure, issu de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l'État dite « loi DEFERRE », dispose que « l'État est civilement responsable des dégâts et dommages résultant des crimes et délits commis, à force ouverte ou par violence, par des attroupements ou rassemblements armés ou non armés, soit contre les personnes, soit contre les biens ».

Encourue de plein droit à raison du risque social lié à la dérive violente d'un rassemblement, la responsabilité instituée par ces dispositions intervient indépendamment de toute notion de faute ou justification d'un préjudice anormal et spécial, sous réserve de la réunion de trois conditions cumulatives : que les dégâts ou dommages résultent de crimes ou délits ; qu'ils aient été commis à force ouverte ou par violence ; qu'ils aient été causés par un attroupement ou un rassemblement.

La jurisprudence distingue le délit imputable à un attroupement ou un rassemblement et celui imputable à un groupe constitué et organisé à seul fin de commettre ce délit - ce que le Conseil d'État a appelé « commando » (CE 12 novembre 1997, compagnie d'assurances générales de France et autres, n°150224, publié aux tables p. 943). En d'autres termes, le juge administratif refuse d'engager la responsabilité de l'État du fait des attroupements lorsque les actions sont préméditées, que les auteurs ne se sont organisés que pour commettre ces délits (CE 28 octobre 2022, ministre de l'intérieur c/SANEF, n°451659). Le juge statue au cas par cas au vu des circonstances de chaque espèce.

S'agissant des émeutes de la semaine dernière, le Gouvernement ne semble pas vouloir indemniser les victimes sur ce fondement légal et appelle à la responsabilité des assureurs. Si cette décision venait à être confirmée par les tribunaux administratifs, elle pénaliserait fortement les petits commerces de quartier qui pourraient se voir appliquer des franchises et plafonds spécifiques par leurs assureurs et ne pas être indemnisés de leurs pertes d'exploitation.

Or, le lien entre les dégradations constatées et les attroupements liés au décès du jeune Nahel ne font aucun doute. Depuis la loi DEFERRE de 1983, la société a évolué et les rassemblements aussi. Le risque sociétal ne tient plus dans les débordements spontanés lors des rassemblements mais bien dans les violences et dégradations qui les accompagnent systématiquement.

Ainsi, il souhaite savoir si le Gouvernement envisage de revoir les conditions d'engagement de la responsabilité sans faute de l'État du fait des récentes émeutes dans un sens plus favorable aux victimes.

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Transmise au Ministère de l'intérieur et des outre-mer


La question a été retirée pour cause de fin de mandat.

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