Question de Mme HERZOG Christine (Moselle - UC-R) publiée le 10/08/2023

Mme Christine Herzog rappelle à M. le garde des sceaux, ministre de la justice les termes de sa question n°07050 posée le 01/06/2023 sous le titre : " Modalités de reprise des terrains de centre-bourg constructibles ", qui n'a pas obtenu de réponse à ce jour. Elle s'étonne tout particulièrement de ce retard important et elle souhaiterait qu'il lui indique les raisons d'une telle carence.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 28/09/2023

La propriété est protégée par les articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, qui subordonnent l'atteinte au droit de propriété à la poursuite d'un motif d'intérêt général, et la privation de propriété à la nécessité publique et la condition d'une indemnité préalable. L'article 545 du code civil précise ainsi que « nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n'est pour cause d'utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité. » Ces principes posent le cadre juridique applicable aux aliénations forcées de la propriété privée par l'Etat, s'agissant des deux instruments privilégiés des politiques publiques : le droit de préemption, qui permet à la collectivité publique de se substituer à l'acquéreur dans le cadre d'une vente immobilière, et l'expropriation pour cause d'utilité publique, qui permet à la puissance publique de forcer le propriétaire à céder son bien. C'est donc ce dernier dispositif qui répond à la situation du propriétaire qui ne souhaite pas vendre. La nécessité publique implique que le législateur ou l'autorité publique constate une utilité publique, laquelle peut consister, notamment dans la prévention de risques - insalubrité (articles L. 511-1 et suivants du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique) ou (L. 561-1 et suivants du code de l'environnement) - ou la réalisation d'une opération d'intérêt public - équipements publics, ou concourant au fonctionnement du service public. A cet égard, l'article 191 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et le renforcement de la résilience face à ses effets, a fixé un objectif national d'absence d'artificialisation nette des sols à l'horizon 2050. Il prévoit que le rythme de l'artificialisation des sols dans les dix années suivant la promulgation de la loi doit être tel que, « sur cette période, la consommation totale d'espace observée à l'échelle nationale soit inférieure à la moitié de celle observée sur les dix années précédant cette date ». Il précise que « ces objectifs sont appliqués de manière différenciée et territorialisée, dans les conditions fixées par la loi. » Les articles L. 101-2 et L. 101-2-1 du code de l'urbanisme issus de la même loi précisent que la lutte contre l'artificialisation des sols constitue un des objectifs de l'action des collectivités publiques, et ajoutent que la « maîtrise de l'étalement urbain », le « renouvellement urbain » et « l'optimisation de la densité des espaces urbanisés » participent de l'équilibre nécessaire pour atteindre l'objectif de l'absence d'artificialisation nette. Il y a donc lieu de relever que la lutte contre l'artificialisation des sols est susceptible de contribuer à la définition de l'utilité publique au sens des règles qui gouvernent l'expropriation. Cependant, cette dernière sera appréciée au regard de la nécessité de l'opération (possibilité de réaliser l'opération projetée dans des conditions équivalentes) et de son économie générale (bilan entre les inconvénients et les avantages de l'opération), étant observé qu'à ce jour, le délai de cinq ans ouvert par la loi du 22 août 2021 précitée pour adapter les documents d'urbanismes à l'objectif de sobriété foncière n'est pas échu. Des lors, les éléments qui sont de nature à asseoir une utilité publique tirée de la lutte contre l'artificialisation des sols n'apparaissent pas consolidés à l'échelle locale.

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