Question de M. DARRAS Jérôme (Pas-de-Calais - SER) publiée le 19/10/2023

Question posée en séance publique le 18/10/2023

M. le président. La parole est à M. Jérôme Darras, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. - Mme Cathy Apourceau-Poly applaudit également.)

M. Jérôme Darras. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Vendredi dernier, à Arras, alors que les manifestants quittaient tranquillement la place des Héros, au terme de leur défilé, dans le cadre du débat démocratique qui fait l'identité et la grandeur de notre pays, les rues de la ville retentissaient des sirènes hurlantes des forces de police et de secours.

À quelques dizaines de mètres, Dominique Bernard tombait sous les coups de couteau d'un individu animé par une idéologie terroriste islamiste. Arras, le Pas-de-Calais et la France entière étaient cruellement frappés par la barbarie, au coeur de la mission la plus noble de la République : l'éducation de ses enfants.

L'horreur absolue s'abattait sur nous, nous replongeant dans les funèbres souvenirs des attentats de janvier et novembre 2015, faisant écho à l'assassinat de Samuel Paty, et nous rappelant qu'il est encore possible, en 2023, de mourir par le seul fait de transmettre le savoir.

La République est en deuil.

Je veux ici rendre hommage au courage de Dominique Bernard et saluer sa mémoire, assurer sa famille de notre soutien, former des voeux de rétablissement aux blessés et exprimer notre entière solidarité avec les élèves et les membres de la communauté éducative. Permettez-moi également de saluer la réactivité et le courage de nos forces de sécurité et de nos services de secours.

En ce temps de deuil, prenons la mesure de ce qui nous rassemble autour de ce que nous avons de plus cher, les valeurs de notre République : la liberté, l'égalité, la fraternité et la laïcité. Rappelons avec détermination que la République et la Nation doivent faire bloc face au fanatisme.

Monsieur le ministre, vous avez établi un lien entre les événements qui se sont déroulés en Israël et cet attentat.

Faisiez-vous allusion au climat de haine et à l'effet de contagion suscités par ces événements ou avez-vous connaissance d'une entreprise organisée et coordonnée, au-delà des cellules terroristes familiales ou isolées, sur le territoire national ou en dehors de celui-ci, qui viserait particulièrement notre pays ?

Alors que, en matière d'alerte, nous sommes passés au niveau urgence attentat, pouvez-vous nous éclairer sur la bonne manière de résoudre la redoutable équation qui permet de concilier la fermeté contre le terrorisme et le respect de l'État de droit, inventé par nos Lumières et marqueur des démocraties adultes telles que la nôtre ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées du groupe CRCE-K. - MM. Jacques Fernique et Bernard Fialaire applaudissent également.)

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Réponse du Ministère de l'intérieur et des outre-mer publiée le 19/10/2023

Réponse apportée en séance publique le 18/10/2023

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer.

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer. Monsieur le sénateur, depuis que je suis ministre de l'intérieur, je n'ai de cesse de rappeler aux Français que la menace terroriste, singulièrement islamiste, est extrêmement importante.

Quelque 43 attentats islamistes ont été déjoués par les services de mon ministère, soit un tous les un mois et demi. Au cours des cinq dernières années, quelque 1 500 personnes ont été interpellées pour avoir des liens directs avec l'apologie du terrorisme ou la préparation d'un attentat. Et, chaque année, nous utilisons nos techniques de renseignement à l'encontre de 6 500 personnes.

Nous avons expulsé 922 fichés S qui se trouvaient en situation irrégulière sur le territoire national. En cinq ans, nous avons fait passer le nombre de fichés S de 1 142 à 449. Plus de la moitié sont en prison, les autres étant en centre de rétention administrative, assignés à résidence ou en contentieux juridique. Et nous espérons que le projet de loi sur l'immigration nous permettra d'agir plus rapidement et de manière plus déterminée.

Monsieur le sénateur, même s'il n'y a pas, à notre connaissance, de menace organisée exogène, le risque persiste en raison de la situation au Sahel, au Proche-Orient, en Afghanistan et au Levant : des cellules pourraient se reconstituer en Europe.

Cependant, la principale menace demeure endogène, avec une ubérisation du terrorisme, si j'ose dire, favorisée par la propagation de théories complotistes sur internet. La publication de caricatures, de prétendus blasphèmes ou les difficultés particulières de telle ou telle communauté fantasmée sont autant de prétextes pour passer à l'acte : oui, un djihadisme d'atmosphère existe, alimenté par un écosystème islamiste, et nous devons le combattre.

Le Gouvernement s'est engagé dans cette lutte, avec la loi Séparatisme, avec la loi relative à la prévention d'actes de terrorisme et avec les textes relatifs au renseignement - je salue d'ailleurs le courage de nos services de renseignement dans ce combat.

Ainsi, monsieur le sénateur, bien qu'il n'y ait pas actuellement de menace caractérisée et organisée, les attaques terroristes islamistes contre Israël créent à l'évidence un climat négatif.

La menace est très forte. J'ai une pensée particulière pour nos compatriotes de confession juive, qui ont peur : la République les protège chaque jour et chaque nuit. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées du groupe INDEP.)

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