Question de M. WEBER Michaël (Moselle - SER) publiée le 26/10/2023

Question posée en séance publique le 25/10/2023

M. le président. La parole est à M. Michaël Weber, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Michaël Weber. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, les risques sanitaires liés à l'utilisation du glyphosate, mis en évidence dans plusieurs études scientifiques indépendantes, ont conduit l'Organisation mondiale de la santé (OMS) à qualifier cette substance de « cancérogène probable » dès 2015.

Dans son avis très controversé, l'Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa) cherche maladroitement à en relativiser les risques. À la suite de la publication de cet avis, la Commission européenne a proposé aux États membres de renouveler son autorisation pour une durée de dix ans, alors même que les dangers du glyphosate ne sont plus à démontrer. D'ailleurs, nos concitoyens ne s'y sont pas trompés : deux tiers des Français rejettent son utilisation.

En 2017, la France a voté pour la première fois contre la réautorisation de cet herbicide dans l'Union européenne pour une durée de cinq ans. La voix de la France n'a cependant pas suffi pour obtenir l'interdiction européenne. Le Président de la République s'était à l'époque engagé à sortir la France du glyphosate « au plus tard dans trois ans », engagement qu'il a lui-même enterré dès le fameux grand débat national.

En 2019, les autorités publiques ont mis en place un plan d'action de sortie du glyphosate ; l'efficacité de ce plan s'est révélée malheureusement très relative.

Voilà quelques jours, la France, par manque de courage, décide de s'abstenir lors du vote de la proposition de la Commission européenne sur le renouvellement de la licence d'utilisation du glyphosate pour dix ans dans l'Union ; il n'a manqué que deux voix pour obtenir son interdiction...

Dans quelques jours, un nouveau scrutin devra définir la position européenne. Nous savons qu'en l'absence de majorité la Commission prendra la main sur la décision. Nous devinons, le cas échéant, quelle sera l'issue.

Monsieur le ministre de l'agriculture, c'est une question de santé publique ! Quand comptez-vous prendre vos responsabilités et sortir du double discours ? En définitive, quelle est la position de la France ? Depuis 2015, quels moyens avez-vous mis en oeuvre pour accompagner le monde agricole dans la recherche de moyens de substitution ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST - M. Ludovic Haye applaudit également.)

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire publiée le 26/10/2023

Réponse apportée en séance publique le 25/10/2023

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.

M. Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire. Monsieur le sénateur Weber, je vous remercie de votre question, qui me permet de faire le point sur ce sujet du glyphosate, parfois un peu polémique et traité de façon caricaturale. (Protestations sur les travées des groupes SER et GEST.)

M. Rachid Temal. Ce n'est pas sérieux !

M. Marc Fesneau, ministre. Oui, ce sujet est polémique et caricaturé, je tiens à le redire !

Je vais vous dire quelle est la position de la France sur les produits phytosanitaires : elle est d'essayer de tenir une trajectoire de réduction de leur utilisation - une trajectoire que nous avons amorcée pour la première fois au cours du quinquennat précédent.

Pour ce qui est en particulier du glyphosate, je rappelle que depuis 2017 nous avons réduit les usages de près de 27 %, ce qu'aucun gouvernement n'avait été capable de faire avant nous, y compris ceux que vous soutenez, monsieur le sénateur, et y compris ceux, de par le monde, qui vous servent de référence ! Nous sommes le seul pays à avoir réussi à réduire les usages du glyphosate. (Protestations sur les travées du groupe GEST. - Mme Cécile Cukierman s'exclame.)

La position de la France s'est exprimée dans le cadre communautaire.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Macron a menti...

M. Marc Fesneau, ministre. Je rappelle qu'il s'agit d'une décision communautaire, prise à l'échelle de la Commission : (MM. Guillaume Gontard et Yannick Jadot protestent.) il a été décidé d'interdire le glyphosate partout où l'on peut trouver d'autres solutions.

Dans certaines situations, il n'y a pas d'autre solution, par exemple dans l'agriculture de conservation des sols. On peut se complaire dans d'inlassables « y'a qu'à, faut qu'on » ; on peut répéter en boucle qu'il y a des solutions de substitution. Mais il faut parfois reconnaître qu'il n'y en a pas, que la recherche est nécessaire, étant entendu que nous sommes bel et bien sur la trajectoire de la réduction.

Par ailleurs, s'il n'y a pas d'autre solution, il n'y a pas d'interdiction : telle est la ligne que nous nous sommes fixée et à laquelle nous nous tiendrons. (Exclamations sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST. - Applaudissements sur des travées des groupes INDEP et Les Républicains.)

Je reviens de la Somme. Des gens expliquent qu'il existe des solutions pour se passer des néonicotinoïdes ; la vérité est qu'elles restent introuvables.

M. Yannick Jadot. Cela s'appelle la bio !

M. Marc Fesneau, ministre. Nous maintenons la position de la France quant à l'interdiction : là n'est pas le sujet. Mais la substitution est beaucoup plus complexe que vous ne semblez le penser. Parlez-en à l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (Inrae) ! (Protestations sur des travées des groupes GEST et SER.)

Nous avons besoin d'y travailler ; tel est le sens des moyens que nous mobilisons pour la recherche et l'innovation, l'objectif étant de réduire progressivement l'utilisation de ces produits. En tout cas, la France est le seul pays au monde à tenir une position de réduction de l'usage du glyphosate, et c'est cette position que nous continuerons à défendre. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains. - M. Thomas Dossus manifeste son exaspération.)

M. le président. La parole est à M. Michaël Weber, pour la réplique.

M. Michaël Weber. Monsieur le ministre, je crois surtout que vous n'êtes pas au rendez-vous de l'histoire. Du courage, s'il vous plaît ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST, ainsi que sur des travées du groupe CRCE-K.)

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