Question de Mme GUHL Antoinette (Paris - GEST) publiée le 12/10/2023

Mme Antoinette Guhl attire l'attention de Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche sur la situation de précarité des étudiantes et des étudiants en cette rentrée 2023.

La précarité étudiante explose et c'était prévisible.

Dans la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023, la revalorisation de 4 % du montant des bourses sur critères sociaux de la rentrée 2022 était maintenue en l'état. Les rapporteurs avaient noté que cela ne permettrait pas « de couvrir l'érosion du pouvoir d'achat découlant de l'inflation constatée en 2022 et 2023 ». Le programme 231 de la vie étudiante 2023 est resté stable sans qu'il soit tenu compte du contexte économique et social de notre pays qui frappe brutalement notre jeunesse.

Pour cette rentrée 2023, 56 % des étudiants rencontrent des difficultés financières au point de réduire leur alimentation et le dispositif « repas à un euro » déployé dans les centres régionaux des oeuvres universitaires et scolaires (CROUS) ne touche que les étudiants boursiers. Ils ne sont malheureusement plus les seuls à être précaires.

La crise du logement les touche également plus particulièrement, ils et elles ne sont que 35 % à vivre chez leurs parents et 7 % dans les résidences CROUS, les autres sont dans le parc privé et 38 % peinent à payer leur loyer.

Toutes ces difficultés ne sont pas que matérielles, elles touchent aussi leur santé et notamment leur santé mentale. Quelle société laisse sa jeunesse se poser la question de se loger ou de se soigner, voire de se nourrir ?

Face à l'urgence d'agir pour toute une génération d'étudiantes et d'étudiants précarisés en cette rentrée 2023, ce qui porte atteinte au principe d'égalité d'accès à l'enseignement supérieur, elle lui demande si et quand elle compte mettre en oeuvre une réforme structurelle du système des bourses.

Enfin, elle lui demande si elle a prévu de donner suite à l'appel de plusieurs présidents d'université, le 19 septembre 2023, pour la mise en place d'une allocation d'études pour l'ensemble des étudiants.

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Réponse du Ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche publiée le 01/11/2023

Réponse apportée en séance publique le 31/10/2023

M. le président. La parole est à Mme Antoinette Guhl, auteure de la question n° 834, adressée à Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Mme Antoinette Guhl. Madame la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, la précarité explose à un tel niveau que nous en appelons à la protection de la jeunesse, car une société qui ne prend pas soin de sa jeunesse est une société qui n'a pas d'avenir.

Je rappelle un chiffre, édifiant, issu d'une enquête menée par Linkee en cette rentrée 2023 : 76 % des étudiants interrogés ont un « reste à vivre » de moins de 100 euros par mois, soit 3,33 euros par jour, une fois leurs factures payées.

Quel pays laisse sa jeunesse se poser la question de se loger, de se soigner ou de se nourrir ? Je le dis avec tristesse, la réponse à cette question est la France, madame la ministre.

Cette situation de précarité était pourtant bien prévisible.

La revalorisation de 4 % du montant des bourses sur critères sociaux, prévue pour la rentrée 2022, a été maintenue dans la loi de finances pour 2023. Pourtant, les rapporteurs avaient souligné que cela ne permettrait pas de « couvrir l'érosion du pouvoir d'achat découlant de l'inflation constatée en 2022 et 2023 ». C'était donc bien prévisible.

Madame la ministre, face à l'urgence d'agir pour toute une génération d'étudiantes et d'étudiants, face à l'atteinte portée au principe d'égalité d'accès à l'enseignement supérieur, quand et comment comptez-vous mettre en oeuvre une réforme structurelle du système des bourses ?

Avez-vous prévu de donner suite à l'appel de plusieurs présidents d'université pour la mise en place d'une allocation d'études pour l'ensemble des étudiants ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Sylvie Retailleau, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche. Madame la sénatrice Antoinette Guhl, je vous remercie de votre question.

Le Gouvernement, de même qu'il a très vite porté attention à la protection des Français, n'a pas attendu pour proposer des mesures de protection du pouvoir d'achat des étudiants en particulier, en agissant dès la crise sanitaire, avec, par exemple, la création du repas à 1 euro, en présentant des mesures d'urgence pour la rentrée universitaire 2022 - je ne les rappellerai pas toutes -, dont une première revalorisation des bourses de 4 %, et en apportant, dès cette rentrée 2023, plusieurs améliorations au système de bourses sur critères sociaux, avec une augmentation de près de 20 % du budget dédié aux bourses.

Ces dispositions consistent à revaloriser tous les niveaux des bourses, à réintégrer près de 35 000 boursiers qui n'étaient pas éligibles, à reclasser 140 000 boursiers à un échelon supérieur et à neutraliser les effets de seuil.

Nous avons pour la quatrième année consécutive gelé la tarification des repas au centre régional des oeuvres universitaires et scolaires (Crous), à 1 euro pour les boursiers, ainsi - j'y insiste - que pour les non-boursiers précaires, et à 3,30 euros pour tous les autres étudiants, sans condition de ressources.

Nous gelons également de nouveau pour cette année universitaire les loyers en résidence Crous et les frais d'inscription.

Cette première étape de la réforme des bourses, nous l'avons décidée selon deux principes : la responsabilité et la justice sociale.

Agir en responsabilité, c'était n'engager que des mesures que nous savions pouvoir mettre en oeuvre dès cette rentrée 2023. Agir pour la justice sociale,...

M. le président. Veuillez conclure, madame la ministre.

Mme Sylvie Retailleau, ministre. ... c'était renforcer le système redistributif.

Nous avons également agi sur la question des Crous, en recrutant 70 personnes, et sur celle de la santé mentale des étudiants, qui est un point important.

Notre action se traduit par un demi-milliard d'euros supplémentaires dans le budget 2024.

M. le président. La parole est à Mme Antoinette Guhl, pour la réplique.

Mme Antoinette Guhl. Madame la ministre, je ne souhaite pas que le titre du livre de Salomé Saqué, Sois jeune et tais-toi (L'oratrice brandit l'ouvrage évoqué.), demeure une réalité.

Aussi, madame la ministre, mes chers collègues, je vous invite à venir au séminaire jeunesse intitulé Pour une fois, écoutons-les !,...

M. le président. Il faut conclure, ma chère collègue.

Mme Antoinette Guhl. ... que j'organiserai prochainement au Sénat avec mes collègues Monique de Marco et Mathilde Ollivier.

Mme Sylvie Retailleau, ministre. Merci !

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