Question de M. BOURGI Hussein (Hérault - SER) publiée le 09/11/2023

Question posée en séance publique le 08/11/2023

M. le président. La parole est à M. Hussein Bourgi, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Hussein Bourgi. Monsieur le président, madame la Première ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, l'écrivain martiniquais Frantz Fanon écrivait voilà soixante-dix ans : « Quand vous entendez dire du mal des Juifs, dressez l'oreille, on parle de vous. »

Madame la Première ministre, cela fait cinq semaines que les Françaises et les Français dressent l'oreille. Ils sont inquiets, horrifiés, scandalisés par la résurgence de l'antisémitisme en France. Pas un jour ne passe sans que notre pays connaisse une nouvelle agression, une nouvelle menace, une nouvelle dégradation, une nouvelle mise en cause contre nos compatriotes de confession juive.

Cette réalité-là nous scandalise. L'antisémitisme, qui n'a jamais disparu de la société française, redouble d'acuité. Il s'étale sans complexe. Il menace, il sévit, il empoisonne la vie de nos concitoyens, de nos compatriotes.

Madame la Première ministre, toutes les forces politiques républicaines et démocratiques se mobilisent, se dressent - votre gouvernement aussi. Le Président du Sénat et la Présidente de l'Assemblée nationale ont appelé à une manifestation dimanche prochain. C'est une heureuse initiative. Merci, monsieur le président ! (Applaudissements.)

Madame la Première ministre, nous avons besoin de savoir quelle est la genèse de ces faits, quels moyens sont mobilisés pour les empêcher et quelle est la volonté du Gouvernement de lutter contre la résurgence de l'antisémitisme, afin que chacune et chacun d'entre nous prenne sa part, toute sa part, sa juste part, dans la lutte contre ce fléau. (Applaudissements.)

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Réponse du Ministère de l'intérieur et des outre-mer publiée le 09/11/2023

Réponse apportée en séance publique le 08/11/2023

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Pourquoi pas à la Première ministre ?

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, comme je viens de le dire en réponse à la question de M. de Legge, plus de 11 000 policiers et gendarmes sont mobilisés, dans le cadre de l'opération Sentinelle, pour protéger les 950 sites où les Français de confession juive ont l'habitude de se rendre.

Une interdiction de manifester a été prise dans les heures qui ont suivi les attaques terroristes islamistes du Hamas contre les populations israéliennes, ce qui a empêché, me semble-t-il, qu'en France, à Paris, comme en 2013 et 2014, on entende crier : « Mort aux Juifs ! » Voyez ce qui s'est passé dans d'autres grandes villes européennes : à Berlin, on a attaqué des synagogues à coups de cocktails Molotov. Fort heureusement, grâce à la fermeté de l'État, grâce à la présence des policiers et des gendarmes, cela n'est pas arrivé chez nous.

Monsieur le sénateur Bourgi, vous demandez qui sont les personnes qui sont passées à l'acte. Malheureusement, elles sont souvent très jeunes. Comme je l'ai dit au président de la commission des lois de votre assemblée, je suis tout à fait prêt à répondre à des questions sur la sociologie de ces personnes. Parmi elles, 120 sont d'origine étrangère, une quarantaine sont en situation irrégulière et trois sont fichées S.

Sur les quelque 500 interpellations réalisées, la moyenne d'âge est extrêmement faible, puisqu'il s'agit souvent de mineurs, comme ceux que l'on a vus chanter des chants nazis et de haine des Juifs dans le métro parisien ; ceux-ci ont été identifiés par la Préfecture de police ; je ne peux vous révéler ici leur identité, du fait des nécessités de l'enquête, mais je vous assure que ce dossier est suivi de très près.

Chaque acte antisémite, qu'il soit commis sur internet ou dans le monde physique, entraîne l'ouverture d'une procédure judiciaire et mobilise des services de police technique et scientifique sur l'ensemble du territoire national, y compris pour un graffiti, qui veut dire bien d'autres choses et, souvent, annonce le passage à l'acte.

Je sais que la sévérité de la justice frappera tous ceux qui profèrent des menaces de mort, notamment contre des rabbins ou des personnes sensibles pour la communauté. Je pense, monsieur Karoutchi, à Levallois-Perret, où la police a su, en moins de vingt minutes et avec l'aide de la plateforme TikTok, arrêter la personne incriminée et la déférer à la justice.

La haine sévit avant tout sur les plateformes. Nous devons donc, collectivement, réfléchir à notre accès à ces plateformes. (MM. Pierre Jean Rochette et Michel Savin applaudissent.) Quand 75 % des contenus antisémites signalés à la police viennent de Twitter, le ministre de l'intérieur se dit que les policiers ne peuvent pas tout faire : tout le monde doit prendre sa part. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes INDEP, RDSE, SER, UC et Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Hussein Bourgi, pour la réplique.

M. Hussein Bourgi. Merci de votre réponse, monsieur le ministre. Je crois pouvoir vous dire que sur ce sujet, quels que soient nos groupes politiques, quelles que soient les travées que nous occupons au sein de cette assemblée, vous nous trouverez toujours mobilisés à vos côtés, dimanche prochain comme à l'avenir. Nous sommes, toutes et tous, dépositaires de cette phrase qui circulait voilà quelques décennies en France, en Europe et dans le monde : « Heureux comme un juif en France. » Cette phrase nous oblige, pour aujourd'hui et pour demain ! (Applaudissements.)

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