Question de M. KANNER Patrick (Nord - SER) publiée le 09/11/2023

Question posée en séance publique le 08/11/2023

M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Patrick Kanner. Madame la Première ministre, depuis la mise en place de l'aide médicale de l'État (AME) par Lionel Jospin en 1999, les détracteurs de cette mesure sont toujours les mêmes : les extrêmes droites, de Le Pen à Zemmour.

Hier soir, le Sénat a voté sa suppression, sans opposition de votre Gouvernement. C'est une digue de plus qui vient de sauter. (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.)

Cette suppression s'est faite sur fond de cacophonie gouvernementale. Le 7 octobre dernier, M. le ministre Darmanin se déclarait favorable à la suppression de l'AME.

Ce lundi, vous avez vous-même déclaré, madame la Première ministre, y être défavorable, dans l'attente du rapport de MM. Stefanini et Évin, l'AME étant selon vous « un enjeu d'humanité et de santé publique ».

Ce mardi, ici même, après avoir prononcé un plaidoyer émouvant, ou presque, pour l'AME, après avoir indiqué l'attachement du Gouvernement à ce dispositif, après avoir marqué son opposition à la droite sénatoriale, Mme la ministre Firmin Le Bodo s'est totalement dédite en émettant un avis de sagesse, synonyme de blanc-seing pour cette même droite sénatoriale. (Marques d'ironie sur les travées du groupe Les Républicains.)

Le soir même, son ministre de tutelle, M. Aurélien Rousseau la désavouait, en regrettant cette suppression, qu'il qualifiait de « grave erreur ». (Mêmes mouvements.)

Nous partageons l'avis de votre ministre - je précise : celui de ce dernier ! (Rires.)

Nous nous élevons contre cette posture politicienne de la droite sénatoriale, prête à sacrifier la santé des étrangers et les enjeux de santé publique dans un calcul électoral cynique. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains. - Applaudissements nourris sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST, ainsi que sur des travées du groupe RDSE.)

L'ensemble du corps médical est révolté. Nos hôpitaux s'en trouvent fragilisés. Une certaine idée de la République sociale est bafouée. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Madame la Première ministre, à quelques heures de la suppression prévisible des articles 3 et 4 du projet de loi pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration, nous n'y comprenons plus rien, sauf à constater la recomposition de la droite, avec votre ministre de l'intérieur à la manoeuvre ! (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)

Alors, madame la Première ministre, quelle est la position officielle de votre gouvernement sur le devenir de l'AME ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST, ainsi que sur des travées du groupe RDSE.)

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Réponse du Première ministre publiée le 09/11/2023

Réponse apportée en séance publique le 08/11/2023

M. le président. La parole est à Mme la Première ministre.

Mme Élisabeth Borne, Première ministre. Monsieur le sénateur Patrick Kanner, vous avez entamé, ce lundi, l'examen du projet de loi défendu par le ministre de l'intérieur, Gérald Darmanin.

Ce projet de loi vise à atteindre un double objectif : d'une part, éloigner plus rapidement ceux qui n'ont pas vocation à rester sur notre sol ; d'autre part, mieux intégrer ceux que nous choisissons d'accueillir.

M. Patrick Kanner. C'est mal parti !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre. Vous m'interrogez spécifiquement sur l'AME.

Ma position est sans ambiguïté. C'est celle de mon gouvernement et elle a été exprimée très clairement hier. (Exclamations et marques d'ironie sur les travées du groupe SER.)

M. Rachid Temal. Par qui ?

Mme Élisabeth Borne, Première ministre. L'AME est un dispositif nécessaire, qui répond à un impératif de santé publique.

Mme Audrey Linkenheld. Ah !

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Voilà !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre. Elle doit permettre de soigner les personnes malades qui sont sur notre sol. Elle constitue aussi une protection pour l'ensemble de nos concitoyens, car elle permet de prévenir la propagation de certaines maladies. (Exclamations ironiques et applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K, SER et GEST, ainsi que sur des travées du groupe RDSE.)

M. Rachid Temal. Et contre la peste brune ?

Mme Élisabeth Borne, Première ministre. La prise en charge, au plus tôt, des infections respiratoires, des hépatites ou encore du VIH est une nécessité.

Je veux ensuite souligner que l'AME est un dispositif très encadré et surveillé. C'est même le dispositif le plus contrôlé de l'assurance maladie. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et RDSE, ainsi que sur des travées des groupes SER, GEST et CRCE-K. - Marques d'ironie sur les travées des groupes SER, GEST et CRCE-K, et de scepticisme sur celles du groupe Les Républicains.)

Pour débattre de ce sujet, nous avons besoin d'un diagnostic précis, objectif et actualisé. C'est l'objet de la mission qui a été confiée à Patrick Stefanini et Claude Évin par le ministre de l'intérieur, le ministre de la santé et la ministre déléguée Firmin le Bodo.

M. Rachid Temal. Ils ne sont pas d'accord entre eux !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre. Cette dernière a eu l'occasion de vous le dire hier : cet état des lieux est indispensable. Il permettra, le cas échéant, de proposer des évolutions de l'AME.

Nous attendons les conclusions de la mission, qui doivent être rendues d'ici au début du mois de décembre. (M. Fabien Gay s'exclame.)

Elles seront naturellement rendues publiques et le Gouvernement en tirera les conséquences dans la suite du débat parlementaire.

Je veux cependant rappeler que l'AME a déjà été réformée en 2019, dans le cadre naturel qu'est une loi de financement de la sécurité sociale.

M. Cyril Pellevat. Sortez les rames !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre. Monsieur Kanner, ma méthode est constante : les faits, le débat, la recherche d'efficacité. C'est l'inverse même du dogmatisme et des postures. (M. Fabien Gay s'exclame.)

Mme Raymonde Poncet Monge. Dites-le à la droite !

M. Stéphane Ravier. Et le 49.3 !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre. Cette méthode, c'est celle de mon Gouvernement, sur ce texte comme sur les autres. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe UC. - Exclamations ironiques sur des travées des groupes SER, GEST et CRCE-K.)

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