Question de M. CHAIZE Patrick (Ain - Les Républicains) publiée le 02/11/2023

M. Patrick Chaize appelle l'attention de M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur les difficultés qu'engendre pour la filière bois, la mise en application de la responsabilité élargie des producteurs (REP) pour les produits et matériaux de construction du secteur bâtiment (PMCB).
La REP bâtiment est l'obligation désormais faite aux metteurs sur le marché de produits et matériaux de construction du bâtiment, dont l'usage génère des déchets, d'en assurer leur fin de vie. Les acteurs de la filière bois déploient depuis de nombreux mois, beaucoup d'énergie afin que la REP PMCB soit supportable et loyale pour les entreprises.
Toutefois, force est de constater que le compte n'y est pas alors qu'il reste encore trois années de montée en charge du dispositif.
Tout d'abord, il s'avère que davantage d'entreprises sont non affiliées à un éco-organisme que d'entreprises disposant d'un agrément. D'aucuns s'interrogent alors sur les actions engagées pour corriger la situation alors que la REP PMCB est effective depuis le 1er mai 2023, ainsi que sur les moyens de contrôle mis en place.
Par ailleurs, les premiers mois de mise en application de la REP 2023 démontrent qu'elle s'exerce dans des conditions déloyales avec une distorsion de concurrence entre les matériaux de construction au détriment du bois et biosourcé.
Alors que le montant de l'éco-contribution entre tous les acteurs des éco-organismes, sur la base du cahier des charges, va entamer une montée en charge à compter de 2024 et jusqu'en 2027, il est à craindre que la filière bois ne puisse pas la supporter. L'effet prix généré par cet accroissement des barèmes de l'éco-organisme entraînera logiquement une préférence pour le béton et l'acier, d'où une forme d'incohérence avec les objectifs de décarbonation du secteur du bâtiment. En effet, le coût de traitement des déchets du bâtiment dans la REP PMCB est de 23 euros pour le bois quand il est de 3,50 euros pour le béton.
Pour les entreprises de la première transformation du bois (scieurs, trancheurs et dérouleurs de bois) qui subissent déjà durement les frais d'une conjoncture économique difficile, l'acquittement de l'éco-contribution constitue une nouvelle taxe dont la montée en charge les mettra en sérieuses difficultés.
Dans ce contexte, et alors que le bois est un matériau vertueux et renouvelable, il lui demande s'il envisage d'une part, de prendre des mesures pour corriger la faible recouvrabilité des éco-contributions et, d'autre part, de restaurer des conditions loyales sur le marché afin que chaque entreprise prenne part à la décarbonation du secteur du bâtiment dans des conditions qui soient justes et équilibrées.

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Transmise au Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires


Réponse du Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires publiée le 07/12/2023

La loi anti-gaspillage de février 2020 a créé la filière à responsabilité élargie des producteurs de produits et matériaux de construction du bâtiment. En effet, compte tenu de l'absence d'exutoires pour les déchets de chantiers des professionnels du bâtiment, et de la multiplication des dépôts sauvages de déchets, qui avait conduit au tragique décès du maire de Signes dans le Var le 5 août 2019, le Parlement avait décidé de soumettre la collecte, le tri et la valorisation des déchets du bâtiment à la responsabilité élargie des producteurs. S'agissant d'une filière comportant de très nombreux acteurs, la définition du cahier des charges de la filière, et l'agrément des 4 éco-organismes qui à la fois collectent les éco-contributions des entreprises metteurs en marché des produits et matériaux de construction et organisent la collecte et soutiennent les collectivités locales participant à la collecte de ces déchets pour les particuliers ou les professionnels, a été pleinement effective au début de l'année 2023. Si dans un premier temps, les éco-organismes avaient défini en septembre 2022 le montant des éco-contributions qu'ils appellent, en tenant compte de la trajectoire de montée en puissance des soutiens à accorder aux nouvelles installations de collecte et de tri à mettre en oeuvre, plusieurs d'entre eux ont finalement décidé de revoir à la baisse ce montant fin 2022, remettant en cause leurs engagements de déployer des points de collecte des déchets triés comme ils s'y étaient engagés. De fait, alors que les points de collecte et les actions à mener en 2024 nécessitent des moyens supplémentaires, ces éco-organismes n'ont d'autre choix que d'augmenter le montant de l'éco-contribution à appeler pour 2024. C'est effectivement une augmentation d'éco-contribution plus importante qui est demandée à l'ensemble des producteurs de produits et matériaux de construction, sachant que la collecte et le recyclage du bois est l'un des postes les plus coûteux aujourd'hui dans cette filière. Elle a conduit au moins un des éco-organismes à augmenter l'éco-contribution des acteurs de la filière bois, tout en prévoyant, comme la loi le lui permet, de répartir cette augmentation de contribution sur les producteurs d'autres matériaux, comme l'acier ou le plâtre. La décision de faire contribuer les producteurs de matériaux très en amont de la filière, qu'ils soient produits en France ou importés, au lieu de faire contribuer des producteurs de produits finis, par exemple les charpentiers qui livrent des éléments préfabriqués sur les chantiers, conduit en termes d'affichage à une augmentation potentielle du prix des produits plus importante. Ce choix a été motivé par la très forte opposition des professionnels du bâtiment d'eux-mêmes de contribuer au financement de la filière, ce qui est regrettable car ils en sont avant tout les principaux bénéficiaires en mettant à leur disposition toute une infrastructure qui manque cruellement aujourd'hui. Les éco-organismes ont le devoir vis-à-vis de leurs adhérents, de rechercher et de relancer les entreprises non-contributrices. Or, à ce stade, aucun effort n'a été entrepris pour identifier ces non contributeurs, contrairement au fonctionnement normal de ces éco-organismes. De fait, s'il y a des entreprises non-contributrices, il est difficile pour les services de contrôle de l'Etat de les poursuivre. Des discussions sont en cours avec les metteurs en marché et les éco-organismes, mais les solutions proposées à ce stade par ces derniers ne sont pas suffisantes pour permettre une juste sanction des non contributeurs. Il importe avant tout que la filière à responsabilité élargie des producteurs de la filière des produits et matériaux de construction monte en puissance selon le calendrier prévu, afin de pleinement lutter contre les dépôts sauvages, et que l'ensemble des acteurs concernés se mobilisent pour atteindre cet objectif.

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