Question de Mme BONNEFOY Nicole (Charente - SER) publiée le 07/12/2023

Mme Nicole Bonnefoy attire l'attention de M. le ministre de la santé et de la prévention sur la présence du chlorothalonil-R471811 dans l'eau potable en Charente.

Il convient tout d'abord de souligner que le chlorothalonil est un fongicide largement utilisé en agriculture depuis les années 1960, pour sa polyvalence car il protège céréales, fruits et légumes contre moisissures et rouilles. Le chlorothalonil est considéré comme un cancérogène probable depuis 2006. En France, son usage en tant que biocide n'est plus autorisé depuis 2010, et depuis 2019 en tant que substance active phytosanitaire, à la suite du non-renouvellement de son approbation par l'Europe. En pratique, l'utilisation des stocks a été tolérée jusqu'en mai 2020.

Le chlorothalonil-R471811 est un métabolite, ou produit de la dégradation du chlorothalonil. La substance active du chlorothalonil est très peu soluble dans l'eau, contrairement à son métabolite chlorothalonil-R471811 qui est très rémanent et facilement entraîné par les eaux de ruissellement vers les cours d'eau ou les nappes.
Dans son rapport du 6 avril 2023, l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) a révélé la présence d'une vaste contamination de l'eau par des résidus de pesticides sur l'ensemble du territoire national. Ce rapport évoque notamment la présence du chlorothalonil-R471811 dans plus d'un prélèvement sur deux des 136 000 analyses réalisées sur l'ensemble du territoire français.

L'eau peut être consommée entre 0,1 et 3 microgrammes de chlorothalonil-R471811 par litre. Au-dessus de 3 microgrammes par litre (seuil dit sanitaire), l'eau ne peut plus être bue, par mesure de précaution. Cette valeur fait référence jusqu'à ce que l'ANSES ait terminé la réévaluation de la pertinence du chlorothalonil-R471811 et statué sur une valeur sanitaire maximale si nécessaire.

En Charente et selon l'agence régionale de santé de Nouvelle-Aquitaine, le chlorothalonil-R471811 a été détecté dans 49 captages sur les 56 testés à ce jour. Actuellement, la Charente comptabilise 89 points de prélèvements opérationnels.
Alors que l'on sait que la molécule provoque des tumeurs rénales chez les souris et que les recherches sur la santé humaine demeurent lacunaires, ces résultats paraissent inquiétants voire alarmants compte tenu du principe de précaution.

Aussi, elle souhaiterait savoir quelles mesures le Gouvernement compte prendre pour évaluer précisément les risques sanitaires de la contamination de l'eau potable par le métabolite du chlorothalonil et pour dépolluer les nappes phréatiques et les cours d'eau.

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Transmise au Ministère du travail, de la santé et des solidarités


Réponse du Ministère auprès du Premier ministre, chargé de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations publiée le 07/02/2024

Réponse apportée en séance publique le 06/02/2024

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, auteure de la question n° 962, adressée à Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités.

Mme Nicole Bonnefoy. Madame la ministre, dans un rapport du 6 avril 2023, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) a révélé une vaste contamination de l'eau par des résidus de pesticides ; le chlorothalonil-R471811 est notamment présent dans plus d'un prélèvement sur deux.

Ce métabolite est directement issu de la dégradation d'un fongicide qui, bien qu'il soit interdit en France depuis 2019, demeure présent dans les sols et dans l'eau. Au-dessus du seuil sanitaire de 3 microgrammes par litre défini par le Haut Conseil de la santé publique, l'eau ne peut plus être bue.

Cette valeur fait référence jusqu'à ce que l'Anses ait terminé sa réévaluation de la pertinence de cette molécule et statué, si nécessaire, sur une valeur sanitaire maximale. Où en est-on, madame la ministre ?

Dans mon département de la Charente, selon l'agence régionale de santé (ARS) de Nouvelle-Aquitaine, le métabolite précité a été détecté dans 49 captages sur les 56 qui ont été testés à ce jour. Dès qu'on le cherche, on le trouve !

Ce métabolite est classé cancérogène probable. Aussi, madame la ministre, entendez-vous prendre des mesures d'urgence sanitaire, mais aussi soutenir les collectivités confrontées à la nécessaire dépollution de l'eau ?

En effet, il y a un réel risque de fracture territoriale de la qualité de l'eau, les territoires se trouvant plus ou moins bien dotés pour faire face à ces pollutions. Comment comptez-vous répondre à cette potentielle crise de l'eau ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Aurore Bergé, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations. Madame la sénatrice, vous avez évidemment raison d'évoquer ces enjeux de santé publique ; c'est bien pour les prendre en considération que l'ARS a agi, dans l'ensemble de la région de Nouvelle-Aquitaine et, en particulier, dans votre département de la Charente, de manière que des contrôles puissent être réalisés.

Ils l'ont été, et 89 captages ont été analysés : aucun ne présente de trace de la molécule mère du chlorothalonil ni une concentration de ses métabolites supérieure à 3 microgrammes par litre, soit la valeur sanitaire qui nécessiterait une intervention urgente, en particulier une restriction de la consommation. J'insiste sur ce point : les évaluations sont claires, et aucune restriction n'apparaît nécessaire au vu des résultats.

M. Daniel Salmon. Tout va bien...

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, pour la réplique.

Mme Nicole Bonnefoy. Madame la ministre, alors que l'ensemble des filières agricoles, à la faveur de la crise, demandent une levée massive des interdictions de pesticides, la question de l'eau doit ramener le Gouvernement à la raison et l'inciter à privilégier la santé humaine.

Par ailleurs, madame la ministre, il est impossible de laisser les collectivités seules face à ce problème environnemental et de santé publique !

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