Question de M. LOZACH Jean-Jacques (Creuse - SER) publiée le 14/12/2023

M. Jean-Jacques Lozach interroge M. le ministre de la santé et de la prévention quant aux obstacles entravant le déploiement de l'expérimentation des antennes d'officines pharmaceutiques en France, notamment dans les zones rurales largement sous dotées.

La commission spéciale du Sénat a pris sa part en mettant en place, lors de la loi d'accélération et de simplification de l'action publique (dite « ASAP ») votée en 2020, la création d'antennes d'officine pour assurer l'accès aux produits de santé dans les communes à très faible population.

Cependant, force est de constater que le lancement de l'expérimentation des antennes d'officine n'est toujours pas effectif dans le sens où le décret relatif aux territoires fragiles en matière d'offre pharmaceutique, attendu depuis de nombreux mois, n'a toujours pas été publié.

Il observe même que la caisse nationale d'assurance maladie (Cnam) a invité le Gouvernement à prêter à ce sujet la plus grande attention en préconisant de « soutenir les pharmacies de proximité pour préserver l'accès aux soins » (Cnam, Améliorer la qualité du système de santé et maîtriser les dépenses, propositions de l'assurance maladie pour 2024, juillet 2023, proposition n° 16.)

Il souscrit pleinement à l'objectif poursuivi par cette expérimentation permettant de maintenir une offre pharmaceutique dans des communes très faiblement peuplées qui en seraient, sinon, dépourvues. Tout comme il a pleinement conscience des enjeux attachés à la réorganisation du réseau officinal et au maintien de l'offre pharmaceutique dans les territoires ruraux.

Il est regrettable que, trois ans après sa promulgation, ce dispositif n'ait trouvé aucune application effective, puisqu'un seul projet d'antenne de pharmacie avait, en octobre 2023, été autorisé dans les Alpes-Maritimes qui, confronté à plusieurs obstacles juridiques et à des difficultés de recrutement, n'a pas donné lieu à l'ouverture de l'antenne prévue.

Plusieurs points d'achoppement sont identifiés, que le prochain décret se devra de résoudre afin de faciliter la mise en oeuvre de ces expérimentations.
D'une part, le champ des dérogations prévues se révèle être insuffisant ; il n'a pas permis de clarifier le statut juridique des antennes et leur lien avec l'officine de rattachement. En outre, l'expérimentation prévoyait seulement la possibilité pour le pharmacien de dispenser des médicaments au sein de l'antenne, sans lui permettre d'y exercer les autres missions des pharmaciens d'officine : éducation thérapeutique et accompagnement de patients, conseils et prestations destinés à favoriser l'amélioration ou le maintien de l'état de santé, prescription et administration de certains vaccins.
D'autre part, la facturation dans les antennes s'est avérée impossible, les pharmaciens adjoints ne disposant pas d'une carte professionnelle de santé (CPS) le permettant.

Aussi l'interroge-t-il sur les intentions du Gouvernement à ce sujet, ainsi que sur la date et le contenu du prochain décret.

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Réponse du Ministère auprès de la ministre des solidarités et des familles, chargé des personnes handicapées publiée le 20/12/2023

Réponse apportée en séance publique le 19/12/2023

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Lozach, auteur de la question n° 978, adressée à M. le ministre de la santé et de la prévention.

M. Jean-Jacques Lozach. Madame la ministre, sur l'initiative de la commission spéciale du Sénat, la loi d'accélération et de simplification de l'action publique, dite loi Asap, votée en 2020, a prévu la création d'antennes d'officines pour assurer l'accès aux produits de santé dans les communes à très faible population.

Force est de constater que le lancement de ce dispositif n'est toujours pas effectif, car le décret relatif aux territoires fragiles en matière d'offre pharmaceutique, attendu depuis de nombreux mois, n'a toujours pas été publié.

Il est regrettable que, trois ans après sa promulgation, ce dispositif n'ait trouvé aucune application effective. Les services du ministère de la santé ont récemment confirmé que seul un projet d'antenne de pharmacie avait été autorisé - c'était en octobre 2023 dans les Alpes-Maritimes -, mais face à plusieurs obstacles juridiques et à des difficultés de recrutement, il n'a pas été possible d'ouvrir l'antenne prévue.

Je souscris pleinement à l'objectif visé par cette expérimentation, qui permet de maintenir une offre pharmaceutique dans des communes très faiblement peuplées qui en seraient, sinon, dépourvues. Par ailleurs, j'ai pleinement conscience des enjeux attachés à la réorganisation du réseau officinal et au maintien de l'offre pharmaceutique dans nos territoires ruraux.

L'article 2 decies de la proposition de loi visant à améliorer l'accès aux soins par l'engagement territorial des professionnels, qui a été définitivement adoptée hier par le Sénat, permettra-t-il enfin de lever les principaux obstacles identifiés ?

Le Gouvernement prévoit-il d'étendre le champ des dérogations et de clarifier le statut juridique des antennes et leur lien avec l'officine de rattachement ?

Outre la possibilité pour le pharmacien de dispenser des médicaments au sein de l'antenne, lui permettrez-vous d'y exercer les autres missions essentielles réalisées par les pharmaciens d'officine : éducation thérapeutique et accompagnement de patients, conseils et prestations destinés à favoriser l'amélioration ou le maintien de l'état de santé, prescription et administration de certains vaccins ?

Enfin, la facturation dans les antennes sera-t-elle autorisée pour les pharmaciens adjoints ne disposant pas d'une carte professionnelle de santé ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée auprès de la ministre des solidarités et des familles, chargée des personnes handicapées. Monsieur le sénateur Lozach, la France compte en moyenne, pour 100 000 habitants, trente officines, dont plus d'un tiers sont installées dans des communes de moins de 5 000 habitants. Les règles relatives au maillage des officines ont donc permis d'assurer une bonne couverture pharmaceutique sur le territoire.

L'expérimentation relative aux antennes de pharmacie vise à permettre une adaptation locale pour répondre aux besoins de la population dans certaines zones moins desservies.

Dans le cas où la seule officine du village cesse son activité sans avoir trouvé de repreneur - en Côte-d'Or, où je vis, ce cas existe malheureusement -, l'agence régionale de santé (ARS) pourra autoriser une antenne de pharmacie qui sera rattachée à une pharmacie à proximité.

Toutefois, en raison de difficultés juridiques et techniques, l'expérimentation n'avait pas pu être mise en oeuvre. C'est pourquoi elle a été réintroduite dans le cadre de la proposition de loi visant à améliorer l'accès aux soins par l'engagement territorial des professionnels, que vous avez adoptée. Une mesure prévoit ainsi d'étendre le champ des dérogations permettant de mettre en oeuvre les antennes et précise leur statut juridique.

Les antennes pourront ainsi proposer l'intégralité des missions qui sont habituellement réalisées dans les officines, facturation incluse. Les conditions seront donc très prochainement réunies pour lancer concrètement cette expérimentation dans les régions concernées.

Je le précise, l'expérimentation des antennes est à distinguer du décret sur l'identification des territoires fragiles. En effet, l'ordonnance du 3 janvier 2018 prévoit qu'un décret détermine les conditions dans lesquelles sont définis les territoires pour lesquels l'accès aux médicaments n'est pas assuré de manière satisfaisante. Les transferts et les regroupements de pharmacie y seront donc facilités. Au début de l'année 2024, une nouvelle version de ce décret sera présentée. Les ARS seront chargées de fixer par arrêté la liste des territoires concernés au sein de leurs régions.

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