Question de Mme CUKIERMAN Cécile (Loire - CRCE-K) publiée le 18/01/2024

Question posée en séance publique le 17/01/2024

M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K, ainsi que sur des travées du groupe SER.)

Mme Cécile Cukierman. Monsieur le Premier ministre, vous tentez d'incarner un changement, mais la seule nouveauté, c'est que ce remaniement ancre la casse du service public dans votre nouveau monde, un monde fait pour les riches, un monde d'oppression pour les salariés, un monde qui exclut au lieu de rassembler.

Cette politique engendre une crise démocratique profonde. D'ailleurs, le Président de la République n'a toujours pas de majorité absolue à l'Assemblée nationale. Cette question n'est ni politicienne ni secondaire : c'est le socle du fonctionnement de nos institutions.

Vous ne pouvez plus faire jouer l'autoritarisme, en abusant du 49.3 comme en 2023. Continuerez-vous d'user de cet article de la Constitution ou vous engagez-vous à laisser vivre le débat parlementaire ?

Monsieur le Premier ministre, selon l'article 20 de la Constitution, c'est le Gouvernement qui détermine et conduit la politique de la Nation et non le Président de la République ! C'est fondamental, car si le Gouvernement se mue en un cabinet d'exécutants, sans vote de confiance du Parlement, c'est l'édifice institutionnel qui s'effondre.

Emmanuel Macron prend tout en main, des rencontres de Saint-Denis à sa conférence de politique générale hier, mais il n'est pas responsable devant le Parlement. Monsieur le Premier ministre, vous devez donc demander un vote de confiance à l'Assemblée nationale, comme le prévoit le premier alinéa de l'article 49 de la Constitution.

Au vu du rôle du Sénat face au blocage de l'Assemblée nationale, en particulier au regard de la place qu'il a prise ces derniers temps en commission mixte paritaire, vous devez aussi vous soumettre à son vote, en déclenchant le quatrième alinéa de ce même article 49.

Aujourd'hui, c'est la confusion, la gesticulation médiatique pour masquer l'accélération autoritaire de la politique libérale. Notre peuple doit reprendre la main : il a besoin de clarté et a soif de justice. Votre mandat doit être soumis au vote des représentants du peuple ; à défaut, vous ne serez qu'illusion.

Je vous repose donc la question, monsieur le Premier ministre : allez-vous demander la confiance du Parlement ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K, ainsi que sur des travées du groupe SER. - Mme Raymonde Poncet Monge applaudit également.)

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Réponse du Premier ministre publiée le 18/01/2024

Réponse apportée en séance publique le 17/01/2024

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Gabriel Attal, Premier ministre. Madame la présidente Cukierman, c'est la première fois que j'ai l'occasion de m'exprimer devant le Sénat en tant que Premier ministre. Vous me permettrez donc de vous dire - j'ai d'ailleurs dit la même chose au président Larcher, lorsque je l'ai eu au téléphone le soir de ma nomination - que j'ai un très grand respect et même une très grande admiration pour le travail qui est mené ici, au Sénat. (Sourires.)

M. Christian Cambon. Merci !

M. Marc-Philippe Daubresse. J'espère bien !

M. Gabriel Attal, Premier ministre. J'ai pu en mesurer la qualité dans les différentes fonctions gouvernementales que j'ai occupées ces dernières années, que ce soit en tant que secrétaire d'État à la jeunesse, porte-parole du Gouvernement, ministre délégué chargé des comptes publics - nous avons passé de longues nuits ensemble, en particulier avec le rapporteur général, Jean-François Husson, (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.) et le président de la commission des finances, Claude Raynal, à examiner les projets de lois de finances - ou encore en tant que ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse - j'ai beaucoup travaillé avec le président de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, Laurent Lafon, et les nombreux sénateurs qui sont extrêmement mobilisés sur ces questions.

J'ai toujours été, je le crois, très à l'écoute de ce que vous défendez toutes et tous, notamment du fait de votre expérience et de votre représentativité - vous êtes les élus de territoires d'une très grande diversité - et de vos propositions, parfois détonantes, mais toujours constructives.

M. Marc-Philippe Daubresse. C'est vrai !

M. Gabriel Attal, Premier ministre. Voilà l'état d'esprit qui m'a animé et qui continuera de m'animer.

J'ai eu l'occasion de le dire, je ferai ma déclaration de politique générale à l'Assemblée nationale le 30 janvier prochain, parce que je souhaite, d'ici là, rencontrer des représentants de l'ensemble des groupes parlementaires, des forces vives de la Nation, des organisations syndicales ou encore des associations d'élus locaux.

Je souhaite aussi me rendre sur le terrain pour échanger de manière très directe avec les Français avant cette déclaration de politique générale.

Vous m'interrogez, madame la présidente, sur des questions qui relèvent de l'Assemblée nationale, mais je vais bien évidemment vous répondre.

Y a-t-il une majorité absolue à l'Assemblée nationale ? Non, nous le savons. Y a-t-il besoin d'un vote pour le démontrer ? Non, je ne le crois pas. Des Français se lèvent-ils le matin, en se demandant s'il y aura ou pas un vote sur la déclaration de politique générale du Premier ministre ? Non, je ne le crois pas non plus. (Protestations sur les travées du groupe CRCE-K.)

Je pense que les Français se lèvent en attendant de savoir ce que nous allons faire pour valoriser le travail des classes moyennes, qui sont toujours au rendez-vous de leurs responsabilités et qui attendent que l'on agisse pour elles, pour réarmer nos services publics, notamment l'école et la santé (Exclamations ironiques sur les travées des groupes SER et GEST.), pour assurer la sécurité en tout lieu sur le territoire et pour agir en faveur de la transition écologique. Voilà les préoccupations des Français !

Je peux d'ores et déjà vous révéler que ces sujets seront au coeur de la déclaration de politique générale que je ferai à l'Assemblée nationale.

Selon l'usage, cette déclaration sera lue simultanément au Sénat, mais j'ai proposé au président Larcher - c'est peut-être moins l'usage - de prononcer devant vous, dans la foulée de cette déclaration de politique générale, une intervention propre à la Haute Assemblée sur les enjeux que je viens d'évoquer, qui concernent tous les Français. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP, RDSE et UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains. - Mmes Marie-Pierre de La Gontrie et Laurence Rossignol applaudissement également.)

M. Roger Karoutchi. C'est l'usage !

M. Gabriel Attal, Premier ministre. Je crois que la situation que connaît notre pays et les défis que traverse le monde commandent que nous ayons un débat au Sénat. Voilà mon état d'esprit et l'engagement que je prends devant vous ! (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP, ainsi que sur des travées des groupes UC et RDSE.)

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