Question de M. GILLÉ Hervé (Gironde - SER) publiée le 08/02/2024

Question posée en séance publique le 07/02/2024

M. le président. La parole est à M. Hervé Gillé, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Hervé Gillé. Rétention d'informations auprès de la Commission européenne, dissimulation, fraude au consommateur, non-respect de la loi, vaste tromperie : voilà les faits qui sont reprochés au Gouvernement à la suite des révélations de Radio France et du journal Le Monde à la fin du mois de janvier.

Cette enquête nous informe qu'un rendez-vous s'est tenu en 2021 entre Nestlé Waters et le cabinet de Mme Pannier-Runacher, alors ministre déléguée chargée de l'industrie.

À la suite de cette réunion, un rapport de l'inspection générale des affaires sociales (Igas) a été remis au Gouvernement en 2022. Ce rapport, accablant, n'a jamais été rendu public.

Le Gouvernement a donc eu connaissance des pratiques frauduleuses de certains grands groupes industriels ayant recours à des traitements non conformes pour commercialiser leurs eaux minérales et de source, sans en avoir informé - a priori - ni la justice ni les consommateurs.

Sur une initiative de mon collègue Alexandre Ouizille, nous avons alerté Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités dès le 31 janvier afin de lever les doutes sur ce dossier. Nous sommes toujours en attente d'une réponse de sa part. Nous sommes d'ailleurs impatients de connaître enfin son éclairage.

Confirme-t-elle les accusations contenues dans le rapport d'enquête ? Pourquoi n'a-t-elle pas rendu public le rapport de l'Igas ? Va-t-elle désormais le faire ? Le Gouvernement a-t-il informé la Commission européenne de cette situation, comme il en avait l'obligation ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées du groupe GEST.)

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Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique publiée le 08/02/2024

Réponse apportée en séance publique le 07/02/2024

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Monsieur le sénateur, je vous répondrai à la place de Mme Catherine Vautrin.

Comme je l'ai souligné à l'instant, une enquête judiciaire est en cours. Les agences régionales de santé (ARS) ont saisi, au titre de l'article 40 du code de procédure pénale, le procureur de la République. Cette enquête doit déterminer si les industriels de l'agroalimentaire - je partage totalement votre avis sur la gravité des faits qui leur sont reprochés - ont respecté ou non les réglementations relatives aux eaux minérales. Il s'agit donc de savoir si ces eaux peuvent toujours être qualifiées de « minérales » et si les procédés employés répondent bien au cahier des charges fixé pour les eaux minérales. C'est un enjeu majeur en matière de tromperie du consommateur, comme l'a rappelé Mme Doineau.

L'enquête judiciaire est ouverte. La justice a été saisie par les ARS au titre de l'article 40 du code de procédure pénale. La direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes va apporter son expertise pour déterminer la conformité ou non de ce qui a été décidé par les industriels, et la justice rendra sa décision dans les semaines ou dans les mois qui viennent.

Laissons la justice mener son enquête jusqu'au bout : elle est la seule à même, désormais, à pouvoir apporter des réponses à vos questions.

M. le président. La parole est à M. Hervé Gillé, pour la réplique.

M. Hervé Gillé. Monsieur le ministre, il convient, dans cette affaire, d'observer la chronologie des faits. Le Gouvernement était informé depuis bien longtemps déjà de cette situation. Les ARS, quant à elles, se sont mobilisées beaucoup plus tardivement, et peut-être s'apercevra-t-on, à l'analyse, qu'elles ne l'ont pas nécessairement fait sur votre injonction.

Ces faits sont particulièrement dommageables pour notre démocratie, à la fois en termes de connivence avec des intérêts privés, mais surtout en termes de confiance entre les citoyens et leurs gouvernants. Vous créez, en quelque sorte, les conditions d'une société de défiance et de suspicion. Pis, ce type de comportement peut alimenter les théories du complot.

Si vous souhaitez clarifier la situation, vous ne pourrez que soutenir la création d'une commission d'enquête parlementaire sur le sujet. Nous jugerons donc sur les actes. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées du groupe GEST.)

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