Question de M. CADEC Alain (Côtes-d'Armor - Les Républicains-A) publiée le 15/02/2024

Question posée en séance publique le 14/02/2024

M. le président. La parole est à M. Alain Cadec, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Alain Cadec. Ma question s'adressait à M. le secrétaire d'État chargé de la mer et de la biodiversité, qui devait être absent, mais qui vient de nous rejoindre. Peut-être me répondra-t-il, plutôt que M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, qui était prévu pour répondre à sa place. Quoi qu'il en soit, ce sera parfait ! (Sourires.)

Je souhaite interpeller le Gouvernement sur la fermeture spatiotemporelle de certains métiers de la pêche dans le golfe de Gascogne pendant un mois, fermeture du reste théoriquement reconductible dès l'année prochaine.

Cette fermeture a été obtenue par certaines ONG devant le Conseil d'État, alors même que le Gouvernement avait décidé de surseoir à cet oukase.

Si nous sommes tous convaincus, les pêcheurs les premiers, que nous devons protéger les cétacés, nous devons aussi la protection à l'espèce en voie de disparition que sont les pêcheurs eux-mêmes. (Très bien ! sur quelques travées du groupe Les Républicains. - Exclamations ironiques sur des travées du groupe GEST.)

Après le plan de sortie de flotte post-Brexit, cette interdiction spatiotemporelle contraint notre capacité à produire.

Certes, l'État indemnisera les marins à hauteur de 80 % de leurs pertes, soit environ 80 millions d'euros, mais avec quel argent ? En appliquant une fois de plus le principe du « quoi qu'il en coûte », vous creusez le déficit, messieurs les ministres !

Je rappelle par ailleurs que le domaine maritime européen est déjà le plus réglementé du monde et que nous importons 70 % des produits de la mer que nous consommons. Cette fermeture, qui affecte 450 navires et 1 500 marins, aura pour conséquence d'amoindrir de 8 000 tonnes l'apport de nos criées, qui sont déjà dans le rouge. Où est la souveraineté alimentaire que vous brandissez comme un étendard ?

Dans le même temps, les observations réalisées ces dernières années par les scientifiques européens démontrent que la population de cétacés dans le golfe est au moins stable, et sans doute en hausse.

Nos pêcheurs, pas plus que nos agriculteurs, ne demandent l'aumône, messieurs les ministres : ils veulent simplement pouvoir exercer leur métier et en vivre.

Quelle drôle de démocratie que la nôtre, quand le Conseil constitutionnel et le Conseil d'État décident en lieu et place du Gouvernement et du Parlement ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Prenez vos responsabilités, messieurs les ministres ! Allez-vous mettre en oeuvre tout ce que vous pouvez pour que cette fermeture arbitraire ne soit pas reconduite en 2025 ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Philippe Mouiller. Très bien !

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Réponse du Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires publiée le 15/02/2024

Réponse apportée en séance publique le 14/02/2024

M. le président. La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. (Ah ! sur diverses travées.)

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Monsieur le sénateur Cadec, si le règlement intérieur de cette maison le permettait, c'est non pas un ministre, mais un duo de ministres qui vous répondrait, d'autant qu'il faudrait à la fois répondre au sénateur des Côtes-d'Armor que vous êtes, mais aussi à l'ancien président de la commission de la pêche du Parlement européen - trop peu le savent dans cet hémicycle -, qui connaît à ce titre parfaitement les politiques de décarbonation, d'électrification des bateaux et d'accompagnement de la pêche.

Mme Audrey Linkenheld. Quel flatteur ! (Sourires sur les travées du groupe SER.)

M. Christophe Béchu, ministre. Comme vous l'avez rappelé, monsieur le sénateur, le point de départ est, non pas la position du Gouvernement, mais la décision du Conseil d'État du 22 décembre dernier, dont l'effet se termine le 20 février prochain, c'est-à-dire dans quelques jours.

Face à cette situation, qu'a fait le Gouvernement ?

Nous nous sommes tout d'abord assurés que cette décision d'une juridiction française s'appliquerait à tous les navires étrangers. Nous avons donc contrôlé cette fermeture spatiotemporelle. Je tiens à saluer le ministre des armées pour la participation de la marine nationale et de nos patrouilleurs à ces contrôles. Je puis du reste vous assurer, monsieur le sénateur, même si tel n'était pas l'objet de votre question, qu'à cette heure aucun manquement à cette fermeture n'a été constaté.

Je ne peux pas imaginer, ensuite, que vous opposiez les dauphins et les pêcheurs ni que vous considériez qu'il ne convienne pas de les accompagner à la hauteur de leur préjudice.

M. Rachid Temal. Les dauphins ? (Sourires sur les travées du groupe SER.)

M. Christophe Béchu, ministre. Après la tenue du Comité national des pêches le 1er février dernier, nous avons obtenu l'accord de la Commission européenne le 5 février, de sorte que la plateforme qui permettra aux pêcheurs d'être indemnisés à hauteur de 80 % à 85 % de leurs pertes sera ouverte dès la semaine prochaine. J'ajoute que, comme cela a été demandé, les mareyeurs, les ports et les criées seront également accompagnés.

Enfin, dès la semaine prochaine, Hervé Berville, qui est pleinement mobilisé sur cette question, et moi-même irons à la rencontre des pêcheurs pour tirer le bilan de cette année et réfléchir aux moyens d'éviter que l'on ne se retrouve dans la même situation l'année prochaine.

Le Gouvernement ne conteste pas que, avec près de 2 500 échouages, nous avons un niveau de capture élevé, même si cela peut par ailleurs faire débat. Les estimations selon lesquelles entre 5 000 et 10 000 dauphins communs ont été capturés de manière accidentelle nous interpellent sur la survie de l'espèce.

En tout état de cause, dès la semaine prochaine, la fin de cette fermeture sera l'occasion de regarder ensemble vers l'avenir. En effet, nous croyons à la filière de la pêche et à sa participation pleine et entière à la souveraineté alimentaire de notre pays. Alors même que la surpêche reflue, nous devons aller encore plus loin pour accompagner la reconstitution des stocks. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

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