Question de M. PAUMIER Jean-Gérard (Indre-et-Loire - Les Républicains) publiée le 01/02/2024

M. Jean-Gérard Paumier appelle l'attention de M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires à propos du transfert de gestion des digues domaniales aux « gémapiens ».
Le 28 janvier 2024, la gestion des digues domaniales sera transférée au communes et établissements publics de coopération intercommunales (EPCI) compétents, conformément aux dispositions de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (dite loi MAPTAM), qui attribue au bloc communal une compétence exclusive et obligatoire relative à la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations (GEMAPI).
Depuis plusieurs années, les territoires, intercommunalités et départements en tête, se sont fortement mobilisés pour réussir ce transfert. En Indre-et-Loire, par exemple, cette mobilisation se traduit par la construction d'un partenariat solide avec l'établissement public Loire (EPL), via la création d'une plateforme Tours regroupant 8 EPCI, ainsi que par l'impulsion, le financement et la conduite d'études sur les digues de second rang du Val de Bréhémont-Villandry où les influences hydrauliques sont complexes.
Toutefois, le dossier le plus délicat concerne la convention de fin de gestion à venir entre l'État, l'EPL et les EPCI que la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) avait soumise. Des intercommunalités de Maine-et-Loire, de Loir-et-Cher et d'Indre-et-Loire, dont la métropole de Tours, avaient ainsi proposé en mai 2023 aux services de l'État une version alternative où l'intérêt de chaque partie était respecté et compris.
Or il s'avère que cette version alternative et enrichie n'a fait l'objet d'aucune réponse en droit mais a donné lieu à la publication du décret n° 2023-1074 du 21 novembre 2023, qui ne prend aucunement en compte les demandes des territoires. Pourtant sur 1 000 km de digues domaniales, ce transfert de gestion a été assorti d'un transfert de compétences « exclusif et obligatoire » et d'une nouvelle taxe, intitulée taxe GEMAPI.
Plusieurs problèmes se posent alors.
D'abord, les EPCI devront assumer toutes les obligations du propriétaire, notamment de supporter la reconstruction de la ruine de l'ouvrage, alors qu'aucune garantie n'a été donnée à ce jour que cette éventualité ne soit pas la conséquence d'une mauvaise gestion de l'ouvrage de la part de l'État.
Ensuite, ce dernier entend ne pas verser la soulte acquise et ne pas permettre un report jusqu'en 2035 des travaux financés par les fonds de prévention des risques naturels majeurs (dit « fonds Barnier ») si les EPCI ne signent pas avant le 28 janvier 2024 la convention. Or cette exigence semble matériellement intenable, notamment du fait des délais de l'État à proposer une version stabilisée du projet de convention.
Enfin, les EPCI vont se retrouver à assumer, dans leur budget 2024, une charge financière liée à la gestion des digues qui n'est pas compensée par l'État. En cette période de crise, il n'est pas tolérable que les collectivités se retrouvent à assumer cette nouvelle charge liée à un transfert imposé par l'État.
Aussi, il interroge le Gouvernement sur les modalités de ce transfert, la période de transition de dix ans prévue par la loi ayant été notamment susceptible de permettre un état des lieux des digues domaniales, et sur la capacité de la taxe Gemapi à financer l'entretien et les travaux correspondants sans grever la fiscalité locale.

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Transmise au Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires


Réponse du Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires publiée le 09/05/2024

Face au constat que de nombreuses digues étaient sans réel gestionnaire identifié ou mal entretenues, ce qui a pu contribuer à des drames comme celui causé par la tempête Xynthia en 2010, la compétence de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations (compétence « GEMAPI ») a été créée par la loi MAPTAM du 27 janvier 2014 et confiée aux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre ou à leurs groupements. Cette compétence, en vigueur depuis le 1er janvier 2018, a été accompagnée de plusieurs outils à la main des collectivités « gémapiennes », notamment la mise à disposition des digues de droit public préexistantes et la possibilité de lever une taxe GEMAPI pour en assurer le financement. Dans le cas particulier des digues domaniales de l'État, qui représentent moins de 10 % des digues en France, la loi de 2014 a cadré les modalités du transfert de leur gestion, après une phase transitoire, qui a pris fin le 28 janvier 2024, visant à permettre aux gémapiens de se préparer. Pendant cette phase, l'État a continué d'entretenir ces digues pour le compte des gémapiens. Le décret n° 2023-1074 du 21 novembre 2023, pris après avis du Conseil d'État, a confirmé les modalités de transfert prévues depuis 2014 pour l'application de la loi MAPTAM et a ouvert une facilité aux gémapiens qui le souhaitent en permettant à l'État de continuer l'exécution des marchés publics (pour les engagements passés avant ou encore en cours au 28 janvier 2024) et d'en supporter intégralement la charge financière, allégeant d'autant la charge des collectivités. Il n'impose pas un niveau de protection aux collectivités qui décident librement de leurs stratégies de territoires, voire de ne pas reprendre des ouvrages qu'elles désaffectent de la mission de prévention des inondations. Après une phase d'échanges entre les services de l'Etat et les intercommunalités concernées par les digues domaniales de la Loire, ces collectivités ont signé les six conventions actant du transfert de la gestion de ces digues qui sera assurée pour leur compte par l'Établissement Public Loire (EPL). Ces conventions précisent les conditions financières qui accompagnent ce transfert. Elles tiennent compte du linéaire important de digues anciennement domaniales le long de la Loire ainsi que de leur état. Elles prévoient le versement d'une soulte par l'État à la signature, conformément au décret n° 2023-1075 du 21 novembre 2023 relatif au soutien du fonds de prévention des risques naturels majeurs aux travaux de mise en conformité des digues domaniales transférées.

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