Question de Mme VARAILLAS Marie-Claude (Dordogne - CRCE-K) publiée le 29/02/2024

Mme Marie-Claude Varaillas attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur le contentieux entre l'association d'organisations de producteurs (AOP) Sunlait et le groupe Savencia, suite à la dénonciation par ce dernier des accords-cadres relatif à la détermination du prix du lait.
Le conflit entre l'association d'organisations de producteurs (AOP) Sunlait et la laiterie Savencia s'enlise depuis maintenant deux ans, suite à la décision du collecteur de lait de dénoncer en mars 2022 l'ensemble des contrats-cadres avec effet au 8 mars 2024.
Suite à cette décision, l'AOP Sunlait a saisi le comité de règlement des différends commerciaux agricoles (CRDCA), issu de la loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (dite loi ÉGAlim), qui a rendu sa décision lundi 19 février 2024 dans le conflit qui oppose l'AOP à Savencia. Le CRDCA prolonge les contrats-cadres jusqu'au 31 octobre 2024 et impose à Savencia Ressources Laitières de conserver des prix conformes à la loi Egalim.
Si ce report d'échéance est une bonne nouvelle pour les producteurs qui subissaient des pressions intolérables à l'approche de l'échéance, elle doit également permettre la reprise des négociations pour une revalorisation du prix du lait et des modalités de révision automatique en fonction du coût de production.
Près de 100 exploitations laitières adhérentes à l'association des producteurs de lait Nord Aquitaine (APLNA), elles-mêmes adhérentes de l'AOP Sunlait, ont été concernées par la menace de Savencia de ne plus collecter leur production au 8 mars. Ce chantage à la collecte et les méthodes de Savencia pour court-circuiter les négociations tend à prouver que la structuration des producteurs laitiers en OP, elles-mêmes en AOP, représente un véritable levier de négociation et initie un début de rééquilibrage dans la relation entre les producteurs et le collecteur de lait.
Elle lui demande donc ce que le Gouvernement prévoit pour contribuer à rétablir la discussion entre producteurs laitiers et collecteur de lait et faire appliquer les lois ÉGAlim lors de la signature des prochains contrats-cadres.

- page 734


Réponse du Ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire publiée le 04/04/2024

La loi n° 2021-1357 du 18 octobre 2021 visant à protéger la rémunération des agriculteurs, dite « EGALIM 2 », est venue renforcer les dispositions portées par la loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, dite « EGALIM », notamment en ce qui concerne l'amont agricole. Ainsi, la loi EGALIM 2 rend obligatoire la conclusion d'un contrat sous forme écrite d'une durée de trois ans minimum (cinq ans dans le secteur laitier), pour la vente d'un produit agricole entre un producteur et son premier acheteur. Lorsque le producteur a donné mandat à une organisation de producteurs (OP) reconnue dont il est membre, ou à une association d'organisations de producteurs (AOP) reconnue à laquelle appartient l'OP dont il est membre, pour négocier la commercialisation de ses produits sans qu'il y ait transfert de leur propriété, la conclusion par lui d'un contrat écrit avec un acheteur pour la vente des produits en cause est précédée de la conclusion et est subordonnée au respect des stipulations de l'accord-cadre écrit avec cet acheteur par l'OP ou l'AOP. Il appartient aux producteurs, aux OP ou aux AOP estimant que l'acheteur auprès duquel ils vendent leur production ne respecte pas ces dispositions, d'effectuer un signalement auprès des autorités de contrôle. Par ailleurs, d'autres voies existent pour obtenir satisfaction, notamment la saisine du médiateur des relations commerciales agricoles et, en cas d'échec lorsque le litige concerne la conclusion ou l'exécution d'un contrat ou d'un accord-cadre ayant pour objet la vente de produits agricoles ou alimentaires, conclu entre un producteur agricole ou une OP et son premier acheteur, celle du comité de règlement des différends commerciaux agricoles (CRDCA), créé par la loi EGALIM 2, préalablement à une action en justice. Dans le conflit qui oppose l'AOP Sunlait et le groupe Savencia depuis la dénonciation il y a deux ans de l'accord cadre par Savencia, plusieurs centaines d'éleveurs risquaient de ne plus être collectés à partir de début mars 2024. Cette situation de contentieux est ancienne, et a fait l'objet d'une décision de la Cour d'appel de Caen le 5 décembre 2023, actant de la rupture des relations commerciales entre les parties. Le CRDCA a par ailleurs été saisi et a rendu le 19 février 2024 une décision exécutoire qui prolonge les contrats-cadre jusqu'au 31 octobre 2024 afin que les collectes de lait ne s'interrompent pas à la date du terme des contrats (le 8 mars pour certaines OP membres de Sunlait). Cette décision permet de donner de la visibilité aux éleveurs et à leurs organisations pour poursuivre et finaliser les discussions. En outre, la Commission d'examen des pratiques commerciales a rendu un avis n° 23-5 précisant que le fait pour un acheteur de conclure un contrat directement avec le producteur alors même que celui-ci a donné mandat à une OP ayant elle-même donné mandat à une AOP, sans avoir conclu d'accord-cadre, est prohibé et peut faire l'objet d'une sanction administrative conformément à l'article L. 631-25 du code rural et de la pêche maritime. Ainsi, le cadre législatif existant offre des solutions aux producteurs et à leurs organisations afin de rééquilibrer les relations commerciales, les contrôles diligentés par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ayant par ailleurs été renforcés. Pour autant, des améliorations sont nécessaires et le Gouvernement est pleinement mobilisé pour répondre aux attentes fortes exprimées par les agriculteurs d'une plus grande protection de leur rémunération. Une mission gouvernementale a été confiée en ce sens aux députés Anne-Laure Babault et Alexis Izard en vue de renforcer le cadre issu des lois EGALIM.

- page 1412

Page mise à jour le