Question de M. MASSET Michel (Lot-et-Garonne - RDSE) publiée le 08/02/2024

M. Michel Masset attire l'attention de Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités sur les conséquences de la baisse du soutien de l'État à la formation professionnelle pour les métiers traditionnels et de l'artisanat.
Le Gouvernement a placé l'objectif louable du million d'apprentis à l'horizon 2027. Après des hausses historiques, le nombre d'élèves en apprentissage a atteint ce seuil à la fin 2023, notamment grâce aux avancées dues à la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel.
Toutefois, il est a noter que ces nouvelles dispositions législatives ont particulièrement favorisé l'émergence des diplômes du supérieur dans l'apprentissage, qui représentent 60 % des effectifs. Cette prééminence de l'enseignement supérieur s'est également fait ressentir dans la prise en charge du coût de formation par France Compétences. Cette prise en charge est bien au-dessus de celle des formations aux métiers dits traditionnels, notamment du bâtiment et des travaux publics (BTP).
Le déficit important connu par France Compétences a justifié des baisses drastiques de la prise en charge du coût de formation, qui touchent d'abord les métiers de l'artisanat, pour lesquels ces coûts sont incompressibles. En effet, les acteurs historiques de l'apprentissage forment sur des outils techniques très coûteux, à l'inverse des formations du secteur tertiaire. Alors même que les métiers de l'artisanat sont les plus en tension, et que l'insertion professionnelle des élèves formés est quasi-certaine, ce sont ces formations qui sont le plus pénalisées. La perte de ce soutien de l'État est un non-sens pour notre marché du travail, notamment à l'aune des ambitions affichées par le Gouvernement. Surtout, elle constitue une incompréhension pour les centres de formation d'apprentis (CFA) qui oeuvrent à former les travailleurs nécessaires de demain, qui feront vivre les territoires.
Les centres de formation par apprentissage dans le secteur du BTP en Nouvelle-Aquitaine prévoient déjà de réduire la voilure pour baisser le coût de formation d'un apprenti. Le CFA BTP du Lot-et-Garonne évalue un impact financier de 300 000 euros à l'horizon 2025. Les élus sont alertés par ces acteurs dans toute la France comme en témoigne le nombre important de questions posées sur le sujet.
Il lui demande donc quels sont les moyens prévus par le Gouvernement pour garantir la soutenabilité des coûts de formation des apprentis dans les métiers dont la France a besoin.

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Réponse du Ministère auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, chargé des personnes âgées et des personnes handicapées publiée le 08/03/2024

Réponse apportée en séance publique le 07/03/2024

M. le président. La parole est à M. Michel Masset, auteur de la question n° 1078, adressée à Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités.

M. Michel Masset. Madame la ministre, le Gouvernement a fixé l'objectif d'un million d'apprentis pour 2027.

Après des hausses historiques, le nombre d'élèves en apprentissage a atteint ce seuil à la fin de l'année 2023, notamment grâce aux avancées permises par la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel.

Ces nouvelles dispositions législatives ont toutefois particulièrement favorisé l'émergence des diplômes du supérieur dans l'apprentissage, ces derniers représentant désormais 60 % des effectifs.

Pour ces diplômes, la prise en charge par France Compétences est bien supérieure à celle dont bénéficient les formations aux métiers dits traditionnels, notamment du bâtiment et des travaux publics (BTP). Toutefois, le déficit important de France Compétences a justifié des baisses drastiques de la prise en charge du coût de formation qui touchent d'abord les métiers de l'artisanat, pour lesquels ces coûts sont incompressibles.

En effet, les acteurs historiques de l'apprentissage forment leurs élèves sur des outils techniques très coûteux, ce qui n'est pas le cas dans les formations du secteur tertiaire.

À titre d'exemple, le centre de formation d'apprentis (CFA) du BTP du Lot-et-Garonne évalue l'impact financier à près de 300 000 euros dès l'année prochaine.

Je rappelle que les métiers de l'artisanat connaissent la tension la plus forte sur le marché du travail, ce qui rend l'insertion professionnelle des élèves formés quasi certaine.

Aussi défavoriser ces formations est-il un non-sens. Cela plonge d'ailleurs dans l'incompréhension les responsables des CFA, eux qui oeuvrent à former les travailleurs indispensables qui, demain, feront vivre nos territoires.

Madame la ministre, quels sont les moyens prévus par le Gouvernement pour garantir la soutenabilité des coûts de formation des apprentis dans les métiers dont la France a besoin ? Quel est l'avenir de la formation professionnelle des métiers de l'artisanat ? Enfin, comment justifier que l'on donne priorité aux métiers du tertiaire ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, chargée des personnes âgées et des personnes handicapées. Monsieur le sénateur Masset, l'apprentissage constitue une réponse efficace aux tensions de recrutement que nous connaissons partout sur le territoire, y compris dans l'artisanat, historiquement tourné vers cette voie d'entrée dans les métiers.

Ayant moi-même été enseignante dans un CFA pendant vingt-neuf ans, je ne peux que soutenir l'apprentissage, véritable voie de réussite et d'immersion professionnelles.

Depuis 2018, le Gouvernement a considérablement favorisé le développement de l'apprentissage, grâce à des moyens inédits et exceptionnels. Ces moyens visent non seulement les jeunes, bien sûr, au travers de la garantie d'une formation gratuite de qualité, mais également l'ensemble des entreprises, notamment les très petites et moyennes entreprises, au travers de l'aide à l'embauche d'alternants, qui permet de maintenir une dynamique importante.

Vous l'avez souligné, monsieur le sénateur : le supérieur en a largement bénéficié. Il faut dire que nous partions de très loin, compte tenu du nombre très faible d'alternants dans le supérieur à l'époque.

Je vous l'accorde néanmoins : cela ne doit pas se faire au détriment des niveaux certificat d'aptitude professionnelle (CAP), bac professionnel et brevet de technicien supérieur (BTS). (M. Michel Masset acquiesce.)

Par ailleurs, grâce à son opérateur France Compétences, l'État est chargé d'assurer un travail de régulation des niveaux de financement de l'apprentissage. Ce travail repose sur l'analyse annuelle des données de la comptabilité des CFA, qui permet de déterminer les coûts réels de formation.

À ce titre, il est de notre responsabilité, notamment de celle de France Compétences, de garantir un juste niveau de financement au regard des coûts réels constatés.

Lorsque les niveaux de prise en charge des coûts contrats ont été revus en 2022 et 2023, les règles des procédures pour les déterminer ont été les mêmes pour tous les diplômes et tous les acteurs.

Notre objectif, au travers cette recherche du juste prix des contrats d'apprentissage, est donc bien d'assurer la soutenabilité du système de financement de l'alternance.

L'État continue d'assurer un soutien massif en la matière. L'objectif est bien d'atteindre le million d'apprentis d'ici à quelques années.

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