Question de M. RAYNAL Claude (Haute-Garonne - SER) publiée le 28/03/2024

Question posée en séance publique le 27/03/2024

M. le président. La parole est à M. Claude Raynal, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. - M. Fabien Gay applaudit également.)

M. Claude Raynal. Si j'osais, mes chers collègues, je dirais que, depuis 2022, nous vivons une époque formidable. (Exclamations amusées.) Une époque où, par la magie du 49.3, le Parlement peut au mieux soumettre ses propositions, sans pour autant peser en quoi que ce soit sur les équilibres budgétaires présentés par l'exécutif.

Au moins pouvait-on espérer que, en maîtrisant de bout en bout l'exercice budgétaire, le Gouvernement tiendrait les finances du pays, comme il s'y est engagé auprès des Français et de ses partenaires européens.

Aujourd'hui, les faits sont là. En 2023, le déficit attendu était de l'ordre de 4,9 % du PIB ; le déficit réel a finalement atteint 5,5 %. Pour 2024, la croissance était estimée à 1,4 % ; or elle a été revue à 1 % et s'établira probablement à 0,7 %.

La loi de programmation des finances publiques (LPFP) qu'on nous appelait à voter sans délai au mois de décembre se révèle déjà totalement caduque trois mois plus tard. Pour ramener le déficit à 4,4 % du PIB en 2024, l'impasse budgétaire est non plus de 10 milliards d'euros, mais de 30 milliards, ce qui est évidemment inatteignable !

Les trois textes financiers présentés par le Gouvernement, avec une belle assurance, ont des conséquences majeures : un retour à la procédure de déficit excessif, que nous avions quittée grâce au travail de vos prédécesseurs, monsieur le ministre ; un risque amplifié de dégradation de la note de la France, que personne ne souhaite ici ; une révision obligatoire de la loi de programmation, afin de retrouver un peu de crédibilité internationale.

Une époque formidable, disais-je...

Monsieur le ministre, vos coups de rabot n'ont aucun sens. Êtes-vous prêt à rouvrir avec le Parlement le débat sur le budget dans son ensemble, tant sur les dépenses que sur les recettes ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur des travées du groupe Les Républicains. - M. Christian Bilhac applaudit également.)

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Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique publiée le 28/03/2024

Réponse apportée en séance publique le 27/03/2024

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Si je puis me permettre, celui qui avait réussi à nous faire sortir de la procédure pour déficit public excessif en 2017, c'était en effet mon prédécesseur, c'est-à-dire moi ! (M. Martin Lévrier applaudit. - Rires et exclamations sur les travées des groupes SER, CRCE-K et Les Républicains.)

M. Fabien Genet. Le déficit, c'est moi ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Bruno Le Maire, ministre. Oui, nous avons rétabli les comptes publics en 2017, en 2018 et en 2019 ! Nous sommes ainsi parvenus à ramener le déficit public sous les 3 % : c'est un fait. (Nouvelles exclamations.)

Ensuite, nous avons fait face à deux crises majeures - la crise du covid et la crise inflationniste -, grâce au soutien de beaucoup de sénateurs et de sénatrices ici présents. Aujourd'hui, les comptes publics doivent être de nouveau rétablis. Je le confirme devant vous : mon objectif est de parvenir à ramener le déficit public sous les 3 % en 2027.

M. Jean-François Husson. C'est impossible !

M. Bruno Le Maire, ministre. Cela demandera-t-il des efforts plus importants ? Oui ! Ainsi, nous devrons parvenir à faire en trois ans ce que nous étions supposés faire en quatre ans.

Avons-nous commencé à le faire ? Oui ! Il y a quelques semaines, nous avons engagé 10 milliards d'euros de réduction des dépenses de l'État pour immédiatement corriger ce déficit plus élevé que prévu.

Suis-je ouvert à la discussion ? Évidemment ! Ma porte vous sera ouverte dès demain - je sais que plusieurs d'entre vous participeront à la réunion que je tiendrai au ministère de l'économie et des finances.

Monsieur le sénateur Raynal, je salue votre esprit constructif et républicain. Visiblement, il n'est pas partagé par ceux qui, dans cette assemblée, refusent de participer à la discussion sur la réduction de la dépense publique. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains. - M. Fabien Gay proteste.)

M. Jean-François Husson. Commencez par venir un peu plus souvent au Sénat ! Un peu de respect !

M. Bruno Le Maire, ministre. Comment parviendrons-nous à atteindre cet objectif ? Par la réduction des dépenses et en maintenant la croissance.

Je le rappelle, notre prévision de croissance pour 2023 a été la plus exacte de toutes celles qui ont été présentées. Nous avions tablé sur un taux de 1 % ; il est finalement de l'ordre de 1 % à 0,9 %.

Certes, nous avons révisé notre prévision de croissance pour 2024, mais c'est le cas dans tous les pays européens. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Nous avons tous subi le choc géopolitique et le ralentissement de l'économie chinoise. Songez que, au mois de février - soit au même moment que nous -, l'Allemagne a révisé sa croissance de 1,3 % à 0,2 %. Soit 1,1 point de moins !

M. le président. Il faut conclure !

M. Bruno Le Maire, ministre. Au-delà des réductions de dépenses, je suis convaincu que, en 2024, en 2025 et en 2026, nous aurons une croissance solide, c'est-à-dire à la hauteur de la solidité de l'économie française. (Applaudissements sur les travées du groupe RPDI. - Exclamations sur les travées des groupes SER et Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Claude Raynal, pour la réplique - il vous reste treize secondes, mon cher collègue.

M. Claude Raynal. Monsieur le ministre, il suffit d'y croire !... (Rires.) À ce niveau de correction budgétaire, on dépasse des questions simplement financières.

Ce dont notre société a besoin avant tout, c'est de discuter des priorités qu'elle doit se fixer. Notre groupe a d'ailleurs demandé au Gouvernement qu'il organise un débat sur ce sujet, dans le cadre de l'article 50-1 de la Constitution.

M. Patrick Kanner. Pas de réponse !

M. Claude Raynal. En effet, nous attendons toujours sa réponse ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER ainsi que sur des travées des groupes Les Républicains et CRCE-K.)

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