Question de M. MARIE Didier (Seine-Maritime - SER) publiée le 07/03/2024

M. Didier Marie attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, à propos de la situation inquiétante de la maison d'arrêt de Rouen, construite en 1860. Sa vétusté fait courir un risque pour les conditions de travail des agents et de vie des détenus.
Lorsqu'il a visité l'établissement le 16 février 2024, il a pu constater de nombreuses infiltrations, moisissures et effondrements partiels causés par une dégradation rapide de la structure des bâtiments. Cela a contraint la direction de la maison d'arrêt à fermer des cellules et réorienter près de 150 détenus vers d'autres centres pénitentiaires.
Par ailleurs, pour des raisons de sécurité, plusieurs lieux importants dans le parcours de réinsertion des détenus ne sont également plus accessibles : bibliothèque, foyer socio-culturel, bureaux de l'éducation nationale, salle de sport, salle de formation professionnelle, atelier de métallurgie et d'autres espaces sont menacés par une fermeture prochaine à l'instar de la cuisine centrale.
À cette situation, s'ajoute un sureffectif de l'ordre de 120 % de l'établissement quand seulement 90 % des postes de personnels sont pourvus. Cela met la maison d'arrêt sous une tension permanente à laquelle doit faire face le personnel pénitentiaire.
Pour rappel, la France a été condamné par la Cour européenne des droits de l'Homme le 6 avril 2023 pour violation des articles 3 et 13 de la Convention européenne des droits de l'homme.
Il y a urgence. Il ne s'agit plus de gérer au cas par cas les désordres mais d'entreprendre une réhabilitation complète du site. Il lui demande quelles mesures il compte prendre pour améliorer l'environnement de travail des agents et assurer des conditions de détention dignes.

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Réponse du Ministère auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, de la ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse et du garde des sceaux, ministre de la justice, chargé de l'enfance, de la jeunesse et des familles publiée le 20/03/2024

Réponse apportée en séance publique le 19/03/2024

Mme la présidente. La parole est à M. Didier Marie, auteur de la question n° 1139, adressée à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.

M. Didier Marie. Madame la ministre, le 16 février dernier, avec le député Gérard Leseul et le maire de Rouen, Nicolas Mayer-Rossignol, je me suis rendu à la maison d'arrêt de Rouen, à la suite, notamment, d'une alerte des organisations représentatives des personnels pénitentiaires.

Cet établissement, construit en 1860, est dans une situation alarmante. Nous avons pu constater de nombreuses infiltrations, moisissures, mais surtout l'effondrement partiel de murs ; les pignons de plusieurs bâtiments menacent de s'effondrer, contraignant la direction à prendre des mesures d'urgence.

Une cinquantaine de détenus ont été transférés, la section des mineurs, fermée, de nombreuses cellules, désinfectées. Plusieurs lieux importants du parcours de réinsertion - bibliothèque, foyer socioculturel, bureaux de l'éducation nationale, salle de sport, espace de formation professionnelle, ateliers de métallurgie - sont également fermés. La cuisine centrale est elle-même désormais menacée.

À cette situation critique s'ajoute une surpopulation carcérale persistante. Après le déplacement des détenus, le taux d'occupation de l'établissement est toujours de 120 %, alors que le taux d'encadrement n'est, lui, que de 90 %. Cela crée, vous l'imaginez, une tension permanente.

Pour rappel, la France a été condamnée par la Cour européenne des droits de l'homme le 6 juillet 2023 pour violation des articles 3 et 13 de la Convention européenne des droits de l'homme.

Si la situation des prisons en France pose de grandes difficultés, il y a, pour celle de Rouen, une urgence absolue. Il s'agit non plus de gérer les désordres au cas par cas, mais d'entreprendre une réhabilitation complète.

Quelles mesures, madame la ministre, M. le garde des sceaux entend-il prendre pour régler cette situation ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Sarah El Haïry, ministre déléguée auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, de la ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse et du garde des sceaux, ministre de la justice, chargée de l'enfance, de la jeunesse et des familles. Monsieur le sénateur Didier Marie, je vous réponds au nom de M. le garde des sceaux.

La prison est nécessaire, elle est là pour punir les criminels et protéger nos concitoyens, mais l'incarcération, comme vous l'avez rappelé, doit se faire dans des conditions dignes ; c'est ce à quoi s'emploie d'ailleurs, chaque jour, M. le garde des sceaux. Il y va de la bonne santé de notre démocratie autant que du quotidien de nos agents pénitentiaires, qui accomplissent un travail remarquable et auxquels je veux ici rendre hommage.

Depuis 2010, quelque 6 millions de travaux de maintenance ont été engagés pour la maison d'arrêt de Rouen, mais certaines parties de la structure ont vieilli précipitamment, en raison, entre autres, d'infiltrations d'eau. Sans attendre, le ministère de la justice a décidé d'attribuer une enveloppe de 3,5 millions d'euros pour l'année 2024, afin que les opérations de maintenance les plus urgentes puissent être réalisées.

Une opération de renforcement de certains murs pignons détériorés et d'éléments de la charpente en bois va effectivement être entreprise en priorité. Dans l'attente de l'achèvement du diagnostic du bâtiment, des mesures conservatoires seront mises en oeuvre à court terme, afin, tout d'abord, de garantir la sécurité des personnes détenues et des personnels, ensuite, de mettre en place les prérequis à l'opération de renforcement structurel.

La population pénale de l'établissement a été réduite provisoirement. Cette baisse des effectifs a également permis d'intervenir, en février dernier, sur la structure des coursives d'une des ailes de l'établissement.

Les travaux de rénovation proprement dits concerneront en premier lieu la réfection complète de la couverture, le rejointoiement des façades en briques, le remplacement des menuiseries extérieures et la reprise intégrale des installations de plomberie sanitaire, de la ventilation et de l'électricité, ainsi que la réfection des cours de promenade et du mur d'enceinte. Un comité de suivi a été mis en oeuvre en vue de contrôler l'état d'avancement de ce plan d'action.

Vous le savez, monsieur le sénateur, les budgets de rénovation ont augmenté significativement, avec près de 140 millions d'euros par an depuis plus de cinq ans. Vous pouvez compter sur la mobilisation de M. le garde des sceaux pour poursuivre ces travaux.

Mme la présidente. La parole est à M. Didier Marie, pour la réplique.

M. Didier Marie. Madame la ministre, le Gouvernement, dites-vous, a pris conscience de la situation de cet établissement. Malheureusement, les moyens mis en oeuvre ne sont pas à la hauteur des besoins : les travaux qui seront engagés ne régleront pas les problèmes de fond !

C'est une restructuration complète dont l'établissement a besoin. Je parle bien d'une restructuration sur site et non d'une reconstruction, car cet établissement est idéalement situé, tant pour les personnels que pour les familles.

Nous attendons donc des décisions plus importantes que celles que vous venez d'annoncer.

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