Question de M. TISSOT Jean-Claude (Loire - SER) publiée le 11/04/2024

Question posée en séance publique le 10/04/2024

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Tissot, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Jean-Claude Tissot. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.

Monsieur le ministre, le 26 mars dernier, une révision de la politique agricole commune (PAC) a été validée par les ministres européens de l'agriculture.

Une nouvelle fois, les ennemis de la PAC ont été rapidement identifiés : il s'agirait de la conditionnalité des aides et des mesures environnementales, pourtant déjà particulièrement timides.

Ce détricotage environnemental, pour lequel la France a oeuvré vaillamment, néglige pourtant deux constats majeurs.

En premier lieu, les agriculteurs sont et seront les premières victimes du dérèglement climatique. Il n'y a qu'à observer les risques pesant sur les régions viticoles pour le constater.

En second lieu, les agriculteurs demandent avant tout des revenus convenables, à la hauteur de leur travail.

Plutôt que ce terrible retour en arrière, la France devrait encourager une révision de cette PAC, qui est à bout de souffle, qui ne protège ni les agriculteurs ni les consommateurs contre la forte volatilité des prix, et qui n'incite pas suffisamment à lancer l'indispensable transition agroécologique.

Monsieur le ministre, il est essentiel de revoir le logiciel de la PAC, en commençant par le système des aides. Sortons des aides à l'hectare et au volume, pour passer à un système fondé sur l'actif agricole. (M. Laurent Duplomb proteste.) Fixons un plafonnement pour assurer une meilleure répartition entre les agriculteurs, comme le fait déjà l'Espagne. (Protestations sur des travées du groupe Les Républicains.) Mettons en place un système d'aides contracycliques plafonnées permettant de dégager des moyens pour soutenir les filières en crise.

Surtout, renforçons les mesures favorisant la transition agroécologique, avec des critères ambitieux et une valorisation des services environnementaux rendus par les paysans.

Alors que le Conseil d'État a sévèrement commenté le projet de loi d'orientation et d'avenir agricoles, et que le Conseil constitutionnel va devoir se prononcer sur la sincérité de l'étude d'impact élaborée par votre gouvernement, il est peut-être temps, monsieur le ministre, de changer de méthode.

La France va devoir adapter son plan stratégique national pour permettre cette révision, contrairement à ce que nous a indiqué Mme la ministre déléguée Pannier-Runacher à la fin du mois de février. Comptez-vous, monsieur le ministre, profiter de cette occasion pour inclure des mesures qui permettront vraiment de remettre du revenu dans les fermes ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST. - MM. Jean-Marc Boyer et Laurent Duplomb s'exclament.)

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire publiée le 11/04/2024

Réponse apportée en séance publique le 10/04/2024

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.

M. Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire. Monsieur le sénateur Tissot, je vous remercie de cette question, qui me permettra d'apporter diverses précisions.

Premièrement, je vous rappelle que nous n'en sommes qu'à la première année d'exécution de la PAC, puisque cette dernière a été mise en place en 2023. Il ne me semble pas judicieux de changer les règles en cours de route et de procéder à la grande réorientation que vous souhaitez, car les agriculteurs ont besoin de stabilité.

M. Mickaël Vallet. Tout comme le budget de l'État !

M. Marc Fesneau, ministre. En revanche, nos paysans ont besoin de simplification. C'est tout le sens des mesures prises sur l'initiative de la France. Je les assume, et je ne suis pas le seul, puisque ces dispositions ont été approuvées par vingt-six des vingt-sept pays membres, dans leur diversité et leur pluralisme. C'est dire si le besoin de simplification était grand ! Au sujet de la PAC, il nous faut faire preuve d'un peu de pragmatisme.

Nous n'en avons pas rabattu pour autant sur les objectifs environnementaux. (Exclamations sur les travées des groupes SER et GEST.) En ce qui concerne les jachères, nous maintenons les capacités de rotation des cultures, les infrastructures agroécologiques et les cultures captant des nitrates.

Vous avez raison, monsieur le sénateur, les agriculteurs ont besoin d'être accompagnés, car les défis liés aux transitions sont immenses.

Deuxièmement, conformément à ce que le Premier ministre et le Président de la République avaient annoncé, nous avons engagé un débat sur la rémunération des agriculteurs à l'échelle européenne. La Commission européenne s'est engagée à travailler à un « Égalim européen » sur le volet de la rémunération, afin d'éviter les distorsions entre pays membres. La commande publique doit également pouvoir soutenir la production bio et les produits sous d'autres signes de qualité.

Troisièmement - vous avez raison sur ce point -, nous devons préparer la PAC de 2027. Que devons-nous faire pour préparer l'agriculture aux chocs climatiques, géopolitiques et économiques qui sont devant nous ?

Nous devons réfléchir, dans ce cadre, aux meilleurs outils à mettre en place. Aujourd'hui, nous faisons en sorte que la PAC permette aux agriculteurs de faire face aux défis auxquels ils sont exposés. D'ici à 2027, nous aurons largement le temps d'en rediscuter.

M. Hervé Gillé. Quand ?

M. Marc Fesneau, ministre. Quatrième et dernier sujet, le projet de loi d'orientation et d'avenir agricoles comporte des dispositions en matière de transition écologique - nous aurons là encore l'occasion d'en parler. (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI.)

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