DEUXIÈME PARTIE :

LE BUDGET DE LA CONSTRUCTION AÉRONAUTIQUE

I. L'INDUSTRIE AÉRONAUTIQUE FRANÇAISE TIRE SON EPINGLE DU JEU DANS UN CONTEXTE DÉFAVORABLE

A. LES RÉPERCUSSIONS DE LA CRISE DU TRANSPORT AÉRIEN

Le trafic aérien a été perturbé en 2003 par deux événements majeurs : la guerre en Irak et l'épidémie du virus SRAS (syndrome respiratoire aigu sévère). Ainsi, le trafic passagers a de nouveau reculé en 2003 (- 2,4 %), plus particulièrement en Asie (- 9,4 %), principale zone affectée par le virus SRAS. L'activité fret a enregistré un taux de croissance de 4,9 %, après une croissance de 6 % en 2002. Le résultat financier global des compagnies adhérentes de l'IATA (International Air Transport Association) est de nouveau négatif en 2003 (- 6,6 milliards de dollars).

Les conséquences commerciales et financières de cette période incertaine pour la construction aéronautique sont très importantes.

Les commandes d'avions de plus de 100 places, après avoir reculé de 38 % en 2001, 22 % en 2002, ont de nouveau reculé de 5 % en 2003 avec un total de 524 unités (240 Boeing et 284 Airbus). Airbus a enregistré une part de marché de 54 %. En déduisant les annulations, cette part, avec 254 appareils contre 239 pour Boeing, a atteint 51,5 %. Les prises de commandes civiles de l'avionneur européen ont représenté une valeur de 32,8 milliards d'euros.

Les livraisons ont en effet baissé de 14 % pour les avions de plus de 100 places en 2003 (après une baisse de 20 % en 2002), s'établissant à 584 unités (281 Boeing et 303 Airbus) contre 684 unités en 2002 (381 Boeing et 303 Airbus). Pour la première fois de son histoire, Airbus a livré plus d'appareils que son concurrent américain. Concernant les avions régionaux à réaction, les livraisons ont reculé de 3,5 % pour s'établir à 311 unités (214 Bombardier et 97 Embraer) contre 312 unités en 2002.

Le volume d'activité des deux côtés de l'Atlantique a évolué de la manière suivante en 2003.

Chiffre d'affaire de l'industrie aérospatiale

(en milliards d'euros)

 

CA 2003

2003/02 (%)

Effectifs directs

(en milliers)

Industrie aérospatiale américaine

dont aéronautique civile

147,1

33,7

- 4,1 %

- 20,3 %

575,4 (- 6,7 %)

Nd

Industrie aérospatiale européenne

dont aéronautique civile*

74,0

47,6

- 0,8 %

- 7 %

414,8 (1,7 %)

Nd

Industrie aérospatiale française

dont aéronautique civile

25,1

16,7

2 %

- 7 %

101,5 (0 %)

nd

Sources : AIA, AECMA, GIFAS

B. LES RÉSULTATS DE L'INDUSTRIE AÉRONAUTIQUE FRANÇAISE EN 2003

Au regard de ces chiffres, on constate pour l'industrie aéronautique française une stabilisation de son activité en 2003 grâce à la bonne tenue de secteur militaire. L'activité civile recule de 7 % à 16,7 milliards d'euros. Cependant, les commandes enregistrées (40,1 milliards d'euros, en hausse de 57 % par rapport en 2002) ont une nouvelle fois été supérieures au chiffre d'affaires, ce qui a constitué un signal positif pour l'avenir.

Les résultats des principaux groupes industriels français sont décrits ci-dessous.

EADS a réalisé en 2003 un chiffre d'affaires consolidé de 30,1 milliards d'euros, en hausse de 1 % (dont 19 milliards d'euros de chiffre d'affaires pour Airbus). Pour le groupe Snecma (moteurs et équipements aéronautiques), le chiffre d'affaires consolidé a atteint 6,4 milliards d'euros en 2003, en recul de 1 % par rapport à l'année précédente (6,5 milliards d'euros). Enfin, Dassault Aviation a enregistré en 2003 une diminution de son chiffre d'affaires (- 3 % par rapport à 2002) qui s'établit à 3,3 milliards d'euros, le recul de son activité civile étant compensé par le développement de son activité militaire.

Au 1 er semestre 2004, les commandes des constructeurs ont reculé par rapport à la même période de 2003 (période déjà en retrait par rapport à 2002) : - 32 % pour Boeing (75 unités), - 48 % pour Airbus (104 unités). Cependant, les commandes de Dassault Aviation ont augmenté de 67 % (30 unités), confirmant une reprise de l'activité dans l'aviation d'affaires, celles d'ATR sont passées de 2 unités en 2003 à 11 en 2004.

Lors du 1er semestre 2004, le rythme de livraisons des constructeurs est reparti à la hausse après avoir atteint un niveau plancher en 2002 : + 4 % pour Boeing (151 unités), + 8 % pour Airbus (161 unités), + 25 % pour ATR (5 unités) et + 53 % pour Dassault Aviation (23 unités). En conséquence, le niveau d'activité de nombreux équipementiers ou sous-traitants, et notamment français, devrait être positif en ce début d'année 2004.

C. LES PERSPECTIVES POUR 2004 ET LES ANNÉES À VENIR

D'après les estimations de l'IATA (International Air Transport Association), la croissance du trafic passagers à moyen terme, serait d'environ 5 % annuellement, aussi bien pour le fret que pour les passagers.

Lors de ce premier semestre 2004, les industriels se sont montrés, selon la DGAC, résolument optimistes, pour la première fois depuis 2001, quant aux perspectives de croissance du marché à partir de 2005. EADS estime que « la reprise du marché de l'aviation commerciale est déjà visible (...) en 2004 ». Le groupe prévoit donc de livrer 305 appareils en 2004 et a décidé d'augmenter progressivement sa capacité de production en 2005 (famille A330/A340) et 2006 (famille A320) afin de répondre à la reprise attendue du marché. On peut rappeler, à propos de EADS, que M. Philippe Camus, président exécutif de EADS , auditionné le 1 er octobre 2003 par votre commission des finances, avait rappelé que les perspectives de long terme étaient primordiales dans son secteur , et que la politique financière prudente du groupe lui permettait de traverser la crise actuelle sans relâcher ses efforts d'investissement, notamment dans les grands programmes engagés par la société comme l'A380 ou l'A400M.

Boeing prévoit une amélioration de la conjoncture similaire. Ses livraisons devraient s'établir entre 315 et 320 unités en 2005 au lieu de 305 initialement prévues, soit une augmentation de la production comprise entre 3 et 5 %. Le constructeur américain avait été plus durement touché par la crise du secteur aéronautique suite aux événements du 11 septembre 2001 et c'est la première fois, depuis cette date, qu'il annonce des prévisions d'activité revues à la hausse.

Les prévisions des constructeurs devraient bénéficier à l'ensemble des sous-traitants et équipementiers du secteur.