2. Selon les principales études aux coûts complets, le solde serait à peu près équilibré

Les trois principales études coûts-bénéfices

• Le tableau ci-après indique les résultats de trois des principales de ces études coûts-bénéfices (réalisées au coût complet), relatives à l'ensemble des transports routiers.

Les analyses coûts-bénéfices de l'ensemble du transport routier (au coût complet) : les différences entre les trois principales études françaises (en milliards de francs)

INRETS (1)

CGPC, coût complet (2)

CCFA (3)

Année concernée

1997

2001 (4)

1997

2001 (4)

1997

2001 (4)

Coûts

195 à 246

226,9 à 288,8

165

187,9

44,5 à 152

44,3 à 160,5

dont :

valorisation des infrastructures

100,4

134,1

101,4

114,9

0

0

Bénéfices (recettes fiscales) (5)

157

259,2

190

221,0

264,3

296,6

dont :

taxes sur les carburants

100

178

147,7

178

185,7

211,3

taxes sur les assurances

11,5

22,8

0

0

21,6

22,8

Solde

-38 à -89

- 29,6 à - 32,2

+ 25

+ 32,2

+112 à + 220

+136,0 à + 253,3

(1) Jean-Pierre ORFEUIL, Les coûts externes de la circulation routière , Institut national de recherche sur les transports et leur sécurité, 1997.

(2) Christian BROSSIER, André LEUXE, Imputation des charges d'infrastructures routières pour l'année 1997 , Conseil général des ponts et chaussées, 1999.

(3) Christian MORY, Les coûts externes ou la difficulté d'estimer équitablement ce que représente l'automobile pour la collectivité , Comité des constructeurs français d'automobiles, 2000.

(4) Actualisation réalisée par le Service des études du Sénat à l'aide d'un tableur fourni par le BIPE.

(5) L'actualisation peut conduire à une différence assez grande par rapport à l'étude initiale, les chiffres indiqués pour l'année 2001 pour chacune des différentes recettes ne correspondant pas forcément exactement à la même notion que celle retenue pour l'actualisation (les définitions retenues pour les différentes actualisations étant en revanche identiques).

Ces études indiquent un solde légèrement négatif dans le cas de celle de l'INRETS et positif dans celui de celles du Conseil général des Ponts et Chaussées et du Comité des constructeurs français d'automobiles.

Cependant, un solde de quelques dizaines de milliards de francs, quel que soit son signe, n'a guère de signification, compte tenu des incertitudes liées à l'évaluation des nuisances.

Au total, ces travaux suggèrent donc que le solde coûts-bénéfices du transport routier est à peu près équilibré. Les usagers de la route paieraient donc à peu près, par la fiscalité, les nuisances qu'ils suscitent pour les non usagers.

• Il convient de préciser que la situation diffère selon les modes de transport.

En effet, s'il n'y a pas de consensus sur le caractère équilibré du solde du transport de voyageurs (constitué en quasi-totalité par les déplacements en automobile), les principales études s'accordent sur un solde négatif du transport par poids lourds. Ainsi, ces derniers ne paieraient pas, par la fiscalité, leurs coûts externes, comme l'indique le tableau ci-après.

Les analyses coûts-bénéfices du transport routier : solde des différents modes

(en milliards de francs)

INRETS (1)

CGPC, coût complet (2)

Année prise en compte

1997

Transport de voyageurs

Automobiles et deux roues

- 8,8 à - 52,0

+ 38,1

Cars et bus

+ 0,3 à - 0,9

+ 0,7

Transport de marchandises

Véhicules utilitaires légers

- 7,1 à - 23,0

+ 2,9

Poids lourds

- 9,0 à - 18,0

-19,7

Total

- 6,0 à - 15,0

+ 25,0

(1) Jean-Pierre ORFEUIL, Les coûts externes de la circulation routière , Institut national de recherche sur les transports et leur sécurité, 1997.

(2) Christian BROSSIER, André LEUXE, Imputation des charges d'infrastructures routières pour l'année 1997 , Conseil général des ponts et chaussées, 1999.

Les différences entre ces trois études ne proviennent pas de divergences quant à l'évaluation des coûts externes

Comment expliquer que les études aboutissent à des soldes différents ?

Contrairement à ce que l'on pourrait imaginer, les différences entre ces trois études coûts-bénéfices proviennent pour l'essentiel non des divergences d'évaluation des coûts externes (c'est-à-dire principalement l'impact sur l'environnement, l'insécurité routière et la congestion), mais de l'évaluation des recettes fiscales (qui ont augmenté entre 1991 et 1997, et dont l'évaluation peut varier d'une étude à l'autre pour une même année) et de la décision de prendre ou non en compte les coûts d'infrastructure .

Les principales différences entre ces trois études sont synthétisées dans le tableau ci-avant (page 51 ).

Dans le cas de l'étude de l'INRETS, le solde négatif s'explique pour l'essentiel par le fait qu'en 1991 les recettes fiscales liées à l'automobile étaient moins importantes qu'aujourd'hui (en particulier dans le cas des taxes sur les carburants). Une fois cette différence prise en compte, le solde n'est plus que très faiblement négatif.

Dans le cas du Comité des constructeurs français d'automobiles, le solde nettement positif s'explique par des évaluations des recettes fiscales plus importantes que celles du Conseil général des Ponts et Chaussées (pour la même année 1997) et le choix, qui semble contestable à la Délégation 48 ( * ) , de ne pas prendre en compte le coût des investissements.

Une étude germano-suisse donne des évaluations bien supérieures des coûts externes

Le relatif consensus en France quant à l'évaluation des coûts externes ne doit pas masquer la diversité des méthodes utilisées.

En particulier, l'étude de l'Infras et de l'IWW, réalisée pour l'Union internationale des chemins de fer, évalue les coûts externes à 518,5 milliards de francs en 1995, comme l'indique le tableau ci-après.

Les coûts externes du transport routier selon l'étude INFRAS/IWW

(en milliards de francs)

Etude INFRAS / IWW

Fourchette des études INRETS, CGPC et CCFA

Année concernée

1995

2001 (1)

2001 (1)

Valorisation des infrastructures

0

0

0-134,1

Pollution de l'air

121,2

131,2

17,2-47,8

Effet de serre

89,6

99,6

3,8-21,0

Bruit

44,4

53,1

1,2-52,1

Accidents

150,5

130,2

22,0-41,3

Congestion

33,8

40,4

17,4-36,9

Autres

79,0

99,2

0

Total

518,5

553,7

44,3 à 288,8

(1) Actualisation réalisée par le Service des études du Sénat à l'aide d'un tableur fourni par le BIPE.

Source : INFRAS/IWW, External Costs of Transport (accident, environmental and congestion costs) in Western Europe , 2000. L'INFRAS est un organisme suisse d'étude des politiques publiques, l'IWW (Institut für Wirtschaftspolitik und Wirtschaftsforschung) un organisme allemand. Étude réalisée pour l'Union internationale des chemins de fer.

Ce chiffre élevé provient d'une évaluation des coûts externes presque toujours supérieure à celles avancées par les autres études, en particulier de la pollution de l'air, des accidents de la route et du réchauffement climatique.

Dans le cas de la pollution de l'air 49 ( * ) et des accidents de la route, il s'explique par le fait que l'INFRAS et l'IWW retiennent la valeur de la vie humaine proposée par le rapport BOITEUX de 2001 (contrairement aux études antérieures).

En ce qui concerne les coûts des émissions de dioxyde de carbone renforçant l'effet de serre, cette étude retient l'hypothèse que les pouvoirs publics chercheraient atteindre l'objectif de réduction des émissions de dioxyde de carbone recommandé par le GIEC (cf. page 40 ).

* 48 Certes, la construction et l'exploitation des autoroutes sont censées être couvertes par le recettes des péages, mais cela n'est pas le cas en pratique. Par ailleurs, le CCFA ne devrait pas alors comptabiliser les péages dans les bénéfices, ce qu'il fait pourtant.

* 49 Si l'on accepte les conclusions de l'étude de l'OMS, qui sont contestées (cf. page 27 ).

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