M. le président. Sur le texte proposé pour l'article L. 34-8 du code des postes et télécommunications, je suis saisi d'un certain nombre d'amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune. Mais, pour la clarté du débat, je les appellerai séparément.
Par amendement n° 101, MM. Billard, Leyzour, Minetti et Ralite, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de supprimer le texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 34-8 du code des postes et télécommunications.
La parole est à M. Bécart.
M. Jean-Luc Bécart. Cet amendement vise à supprimer le texte proposé pour l'article L. 34-8 du code des postes et télécommunications. Vous comprendrez, mes chers collègues, que, par cette proposition qui a le mérite de la clarté, nous nous opposons aux modalités d'interconnexion et d'accès des opérateurs au réseau de France Télécom.
Derrière des dispositions de caractère souvent technique, difficilement compréhensibles par le commun des mortels, se cache en fait la volonté d'ouvrir le réseau de France Télécom à la concurrence sauvage sous la houlette d'une autorité dépourvue de toute légitimité : l'Autorité de régulation des télécommunications.
M. le rapporteur explique très clairement, une fois de plus, la procédure dans son rapport écrit puisqu'il indique que « le projet de loi impose aux exploitants de réseaux ouverts au public de faire droit aux demandes d'interconnexion des personnes titulaires d'une licence de réseau ouvert au public. L'autorité de régulation des télécommunications pourra, si cela est indispensable pour garantir l'égalité de la concurrence et l'interopérabilité des services, demander la modification des conventions déjà conclues, après avis du Conseil de concurrence ».
Comme vous le constatez, mes chers collègues, le mot « concurrence » devient le maître mot au détriment des termes « intérêt général ». Nous vous proposons donc de supprimer le texte présenté pour l'article L. 34-8 du code des postes et télécommunications car, outre les implications techniques qu'il suppose, il regroupe l'ensemble des caractéristiques selon nous néfastes de ce projet de loi, à savoir un libéralisme effréné et une atteinte, dans une certaine mesure, à la démocratie.
M. le président. Par amendement n° 102, MM. Billard, Leyzour, Minetti et Ralite, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, dans le premier alinéa du paragraphe I du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 34-8 du code des postes et télécommunications, de remplacer le mot : « font » par les mots : « peuvent accepter de faire ».
La parole est à M. Billard.
M. Claude Billard. Cet amendement vise à revenir sur une disposition particulièrement contestable et dangereuse pour le service public.
En effet, la rédaction qui nous est proposée pour le premier alinéa du paragraphe I de l'article L. 34-8 du code des postes et télécommunications prévoit que « les exploitants de réseaux ouverts au public font droit, dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires, aux demandes d'interconnexion des titulaires d'une autorisation... ».
L'amendement n° 102, en remplaçant « font droit » par « peuvent accepter de faire droit » aux demandes d'interconnexions, tend à permettre aux exploitants de réseaux ouverts au public de décider librement d'accéder aux demandes d'interconnexions émanant d'autres opérateurs.
En effet, si l'opérateur ne peut s'opposer à l'interconnexion, une entreprise qui décide de faire simplement de la revente de trafic téléphonique peut bénéficier des mêmes tarifs d'interconnexions qu'un opérateur à part entière. Ainsi, cette entreprise pourrait se nicher dans les créneaux les plus rentables en profitant des infrastructures mises à sa disposition.
Cette confusion entre exploitants de réseaux et fournisseurs de réseaux risque de favoriser l'entrée de véritables « entreprises-prédateurs » dans le secteur.
Dans le cadre qui leur est proposé, les nouveaux entrants pourraient se retirer à n'importe quel moment, après avoir réalisé un bénéfice substantiel, ces entreprises n'ayant pas à rentabiliser des investissements sur le long terme, laissés à la charge de l'opérateur principal.
Cela risque de créer des nuisances importantes pour les consommateurs : ceux-ci ne disposeraient pas, en effet, d'une certitude quant à la continuité du service.
Plutôt que de favoriser une concurrence déstructurée, mieux vaut, à notre sens, favoriser la coopération entre opérateurs et établir ces derniers en fonction des intérêts communs et pour la satisfaction des besoins du public.
Comment oser prétendre que les déréglementations tous azimuts, la mise en concurrence des entreprises, la dislocation des services publics puissent répondre aux besoins considérables d'équipement, d'accès du plus grand nombre d'usagers aux moyens de communication, d'information et de culture ?
Au contraire, les défis économiques et démocratiques posés par les nouvelles technologies informationnelles exigent d'une coopération.
Il s'agira d'abord d'une coopération franco-française entre entreprises publiques jouant un rôle moteur et secteur privé, puis et d'une coopération à l'échelle européenne, qui est indispensable en matière de recherche, de production et de développement des services.
Tel est l'objet, mes chers collègues, de cet amendement.
M. le président. Je vous invite, mes chers collègues, à bien suivre le déroulement du débat, de telle sorte que les auteurs des amendementss ne perdent pas de temps pour présenter ceux-ci quand je les appelle en discussion.
Par amendement n° 155, Mme Pourtaud, MM. Charzat, Delfau, Pastor et Saunier, les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de compléter in fine le premier alinéa du paragraphe I du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 34-8 du code des postes et télécommunications par les mots : « dont l'activité n'est pas limitée à une simple revente de capacité. »
La parole est à Mme Pourtaud.
Mme Danièle Pourtaud. Cet amendement vise à priver du droit d'interconnexion les entreprises qui ne feraient que de la simple revente de capacité.
Les raisons de cette interdiction viennent d'être brillamment exposées par mon collègue Claude Billard. Nous craignons en effet que des opérateurs qui ne feraient que de la revente de capacité n'exercent en fait une concurrence déloyale vis-à-vis des opérateurs qui prendraient le risque d'investir dans les réseaux ou qui, à l'instar de France Télécom, ont d'ores et déjà lourdement investi dans ceux-ci.
Par ailleurs, nous avions cru comprendre que l'objet de cette nouvelle réglementation était de promouvoir le développement du secteur des télécommunications, et donc de susciter de nouveaux investissements et un accroissement de la production de richesses dans ce secteur.
Or nous estimons que les revendeurs de capacité de trafic ne contribueraient pas à la réalisation de cet objectif.
M. le président. Par amendement n° 103, MM. Billard, Leyzour, Minetti et Ralite, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de rédiger comme suit la première phrase du deuxième alinéa du paragraphe I du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 34-8 du code des postes et télécommunications :
« La demande d'interconnexion peut être refusée si elle n'est pas raisonnable au regard, d'une part, des capacités de l'exploitant à la satisfaire et, d'autre part, des possibilités de développement des services de telle communication qu'elle représente pour les consommateurs. »
La parole est à Mme Fraysse-Cazalis.
Mme Jacqueline Fraysse-Cazalis. Cet amendement vise, contrairement au texte du projet de loi, à permettre aux opérateurs de refuser les demandes d'interconnexion formulées par d'autres opérateurs lorsqu'elles ne pourraient être techniquement ou financièrement satisfaites par l'opérateur principal ou lorsqu'elles ne s'inscrivent pas dans une logique de complémentarité propice au développement des services de télécommunications pouvant être offerts aux consommateurs.
Nous privilégions en effet, dans le secteur des télécommunications, une logique de complémentarité pour mieux répondre à des besoins multiformes, plutôt qu'une concurrence effrénée, se concentrant sur les services les plus rentables.
La concurrence dans les télécommunications, c'est évidemment la guerre pour s'accaparer les secteurs les plus rentables, au détriment des autres. C'est faire pression sur tout ce qui peut empêcher la réalisation de profits maximaux, c'est-à-dire les salaires, la protection sociale, les droits statutaires, l'emploi et la desserte de tout le territoire.
La concurrence produit déjà ses effets dévastateurs : à France Télécom, les tarifs et le coût des services augmentent pour la grande majorité des usagers et des PME-PMI afin de financer les communications des multinationales, à tel point qu'en 1994 la consommation téléphonique grand public a reculé.
On nous dit que la concurrence fait baisser les prix. Sans doute, mais pour qui ? Les plus grandes entreprises voient leurs factures diminuer, alors que les résidentiels, constatant les augmentations, réduisent leur consommation !
Le Gouvernement assure que la concurrence n'est pas la privatisation. Ce qui compte, c'est moins le discours que les actes, les faits qui vont dans le sens de la privatisation.
Je vous invite donc, mes chers collègues, à adopter cet amendement, qui vise à contribuer au rejet de ces choix politiques.
M. le président. Par amendement n° 10, M. Gérard Larcher, au nom de la commission, propose de remplacer, dans le deuxième alinéa du I du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 34-8 du code des postes et télécommunications, les mots : « si la demande », par les mots : « si elle ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Cet amendement est purement rédactionnel ; il vise à supprimer une répétition.
Cela étant, monsieur le président, je voudrais maintenant faire le point en réponse à l'appel que vous avez lancé tout à l'heure.
Fort de votre connaissance d'un sujet qui vous est cher, les télécommunications - je rappelle qu'en 1990 vous avez été l'acteur central du débat qui a eu lieu sur cette question au Sénat ; nous avions alors une complicité particulière : je débutais, et c'est vous qui avez guidé mes premiers pas, ce dont je vous remercie - fort de cette connaissance, donc, vous avez lancé un appel à une commutation rapide dans le cadre des terminaux que nous sommes tous, nous les membres de la Haute Assemblée. (Sourires.)
Faisons donc le point.
Il reste 130 amendements à examiner. Ce matin, nous pouvons espérer siéger jusqu'à treize heures. Etant donné l'ordre du jour de cet après-midi - questions d'actualité puis déclaration du Gouvernement suivie d'un débat sur la Corse ! - nous reprendrons le présent débat au mieux à vingt-deux heures, ce qui risque de nous entraîner fort tard dans la nuit. Or nous sommes le 6 juin ! Je vous laisse, les uns et les autres, imaginer les conséquences que cela peut avoir sur la journée de demain...
M. le président. Monsieur le rapporteur, je vous remercie de nous rappeler l'urgence qu'il y a à débattre, et c'est la raison pour laquelle, sans plus attendre, je « branche » M. Bécart pour défendre l'amendement n° 104 (Nouveaux sourires) qui, présenté par MM. Billard, Leyzour, Minetti, Ralite et par les membres du groupe communiste républicain et citoyen, tend à compléter in fine la deuxième phrase du troisième alinéa du I du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 34-8 du code des postes et télécommunications par les mots : « qui respectent les moyens techniques de l'opérateur principal et sont à la charge de l'opérateur qui en fait la demande ».
La parole est donc à M. Bécart.
M. Jean-Luc Bécart. Nous sommes opposés, vous le savez, à l'ensemble du texte proposé pour l'article L. 34-8.
Néanmoins, nous présentons un amendement de repli qui vise à corriger certaines dispositions particulièrement néfastes.
Le troisième alinéa du nouvel article L. 34-8 prévoit ainsi, dans sa rédaction actuelle, que l'interconnexion fera l'objet d'une convention de droit privé entre les parties concernées.
Nous proposons que, dans cette convention qui « détermine, dans le respect des dispositions du présent code et des décisions prises pour son application, les conditions techniques et financières de l'interconnexion », celles-ci respectent les moyens techniques de l'opérateur principal et qu'elle soient à la charge de l'opérateur qui en fait la demande.
Cet amendement répond à un souci de justice et d'équité en matière d'interconnexion des réseaux. En effet, les mesures envisagées visent à mettre en place une réglementation asymétrique au détriment de l'opérateur public.
Les tarifs d'interconnexion seront évalués sur la base de « l'usage effectif du réseau de transport et de desserte ». Ne sont donc pas pris en compte les coûts dus à la mise en place des infrastructures, qui ont été et qui continuent d'être payées par les usagers.
Plus grave encore, les coûts de renouvellement et de modernisation du réseau ne sont pas pris en compte, France Télécom, serait le seul opérateur à payer pour cela.
Il pourrait en résulter un sous-investissement technique dans le secteur des télécommunications au cours de la prochaine décennie.
Les nouveaux entrants n'auront aucun intérêt à investir, puisqu'un réseau performant sera mis à leur disposition à des tarifs plus bas que les coûts réels auxquels ils auraient à faire face s'ils construisaient leur propre réseau. France Télécom hésitera à investir dans son réseau puisque ses investissements profiteraient aussi à ses concurrents.
Ces sous-investissements auraient évidemment, à terme, des conséquences sur l'offre future et la qualité du réseau.
Notre amendement vise à résoudre ces problèmes. Nous proposons que les opérateurs qui se connectent sur le réseau France Télécom adoptent ses normes et moyens techniques. Il n'y a, en effet, aucune raison que le petit opérateur privé impose ses exigences à l'opérateur public. Il doit payer les coûts réels de son interconnexion et non pas un simple droit de passage à coût minime.
En votant cet amendement, mes chers collègues, vous contribuerez à écarter les dangers que je viens d'exposer.
M. le président. Par amendement n° 11, M. Gérard Larcher, au nom de la commission, propose de supprimer la troisième phrase du troisième alinéa du I du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 34-8 du code des postes et télécommunications.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination avec un amendement que nous examinerons ultérieurement ; nous proposons de déplacer une disposition du texte, sous réserve, naturellement, de l'adoption de l'amendement auquel je viens de faire allusion.
M. le président. Par amendement n° 105, MM. Billard, Leyzour, Minetti et Ralite, les membres du groupe communiste, républicain et citoyen proposent de supprimer le quatrième alinéa du paragraphe I du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 34-8 du code des postes et télécommunications.
La parole est à M. Billard.
M. Claude Billard. Nous proposons, par cet amendement, de supprimer la disposition suivante, que je rappelle par souci de clarté : « Lorsque cela est indispensable pour garantir l'égalité des conditions de concurrence ou l'interopérabilité des services, l'autorité de régulation des télécommunications peut, après avis du conseil de la concurrence, demander la modification des conventions déjà conclues. »
Dissimulés derrière un vocabulaire technique, cet alinéa pose, à notre sens, deux problèmes fondamentaux.
Tout d'abord, il confirme une nouvelle fois le poids de la future autorité de régulation des télécommunications instaurée par le présent texte.
Nous avons déjà plusieurs fois contesté le transfert à une commission dite indépendante des prérogatives régaliennes de l'Etat.
A l'instar de ce qui a été fait dans d'autres domaines - je pense notamment à la communication avec le CSA - le Gouvernement met en place un paravent pour se dégager de certaines responsabilités vis-à-vis de l'opinion publique. Cette autorité de régulation sera, en fait, l'institution chargée de la privatisation de France Télécom et de l'instauration du libéralisme commercial en matière de télécommunications. C'est cette autorité qui sera chargée d'imposer aux usagers et aux partenaires sociaux les règles sauvages de la libre concurrence, qui privilégient la rentabilité sur l'intérêt général.
Le second problème que soulève cet alinéa, c'est justement l'instauration des règles de cette concurrence comme règles suprêmes, supérieures aux conventions passées entre les parties.
Nous retrouvons donc, au sein de cet alinéa à l'apparence technique, la logique du fond du projet de loi : un Etat qui se dégage de ses responsabilités, l'avènement des règles de libre concurrence imposées par Bruxelles.
Les règles établies un jour pourront ainsi être remises en cause le lendemain, selon les fluctuations du marché.
Qui pâtira de cette situation ? Les consommateurs, la société tout entière.
Qui en profitera ? Les opérateurs privés, dont l'objectif essentiel sera l'accumulation d'un profit toujours plus grand, au détriment de l'intérêt général.
Pour cet ensemble de raisons, les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen vous proposent de supprimer ce quatrième alinéa du texte présenté pour un nouvel article L. 34-8 du code des postes et télécommunications, qui, je le répète, est symbolique de la démarche générale.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 59 rectifié ter est présenté par MM. Cabanel, Laffitte, Rausch et Joly.
L'amendement n° 169 est déposé par M. Trégouët.
Tous deux tendent à rédiger comme suit le début du cinquième alinéa du paragraphe I du texte proposé par l'article 5 pour l'article L. 34-8 du code des postes et télécommunications :
« Un décret, pris après avis de l'autorité de régulation des télécommunications, détermine les conditions... »
L'amendement n° 59 rectifié ter est-il soutenu ?...
La parole est à M. Trégouët, pour défendre l'amendement n° 169.
M. René Trégouët. Le projet de loi prévoit qu'un décret fixera les conditions générales de l'interconnexion ainsi que les principes de tarification auxquels les accords d'interconnexion doivent satisfaire. Or il est prévu, aux articles L. 34-8-I et L. 36-8-I, que l'autorité de régulation des télécommunications pourra être saisie de toute question relative à l'interconnexion, en particulier des différends entre les opérateurs.
Il est donc souhaitable, par mesure de cohérence, que l'autorité de régulation puisse donner un avis sur le texte qui définira les conditions générales auxquelles les accords d'interconnexion doivent satisfaire.
Permettez-moi, monsieur le ministre, de vous poser à ce sujet une question d'ordre général. Certes, tout décret sera soumis préalablement à l'ART ; mais, comme nous savons que cette autorité ne sera créée qu'à partir du 1er janvier 1997, cela signifie-t-il qu'aucun décret ne sera pris avant cette date ?
M. le président. Par amendement n° 106, MM. Billard, Leyzour, Minetti et Ralite, les membres du groupe communiste, républicain et citoyen proposent de supprimer le paragraphe II du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 34-8 du code des postes et télécommunications.
La parole est à Mme Fraysse-Cazalins.
Mme Jacqueline Fraysse-Cazalis. Nous proposons, par cet amendement, de supprimer le paragraphe II du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 34-8 du code des postes et télécommunications. Ces dispositions, de fait, obligeraient l'opérateur historique qu'est France Télécom à inciter des opérateurs privés à venir le concurrencer.
Ces dispositions sont très claires. Il s'agit de « répondre aux besoins d'accès au réseau des fournisseurs de services téléphoniques au public ».
Le troisième alinéa de ce paragraphe II précise même que les exploitants de réseaux ouverts au public doivent, « dans des conditions objectives transparentes et non discriminatoires, assurer un accès à leur réseau aux utilisateurs et fournisseurs de services de télécommunications autres que le service téléphonique au public, ainsi qu'aux services de communication audiovisuelle déclarés en application » de la loi du 30 septembre 1986.
La concurrence commerciale est ainsi confirmée comme le principe supérieur qui fonde ce projet de loi.
Nous sommes bien loin des conclusions de M. Borotra qui, encore député, affirmait, dans son rapport sur « le service public dans le cadre de l'Union européenne », publié le 5 octobre 1995 : « La démarche de la Commission devient cependant inacceptable dès lors qu'elle repose sur le primat absolu d'une vision élémentaire de la concurrence et, corollairement, d'une Europe des seuls consommateurs favorisant la désindustrialisation, la délocalisation et le chômage ».
M. Borotra enfonçait le clou en indiquant que « la politique de la Commission revient, en fait, à remettre en cause ce qui fonctionne bien, EDF par exemple - mais France Télécom est également une entreprise très performante - au profit de solutions qui n'ont pas fait leur preuve ».
Nous pourrions indiquer à M. Borotra que la concurrence anarchique, la recherche du profit maximum ont, elles, fait leurs preuves : elles pénalisent l'intérêt général, qui n'est manifestement pas l'objectif poursuivi.
Nous contestons donc fondamentalement la logique de concurrence qui sous-tend ces dispositions.
C'est pourquoi nous vous proposons de les supprimer par cet amendement n° 106.
M. le président. Les deux amendements suivants sont présentés par Mme Pourtaud, MM. Charzat, Delfau, Pastor, Saunier et les membres du groupe socialiste et apparentés.
L'amendement n° 156 tend à rédiger comme suit la première phrase du premier alinéa du II du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 34-8 du code des postes et télécommunications :
« Les exploitants de réseaux ouverts au public sont tenus de publier, dans les conditions déterminées par leur cahier des charges, une offre technique et tarifaire d'interconnexion approuvée préalablement par le ministre chargé des télécommunications, après avis public de l'autorité de régulation des télécommunications. »
L'amendement n° 157 vise à rédiger ainsi la dernière phrase du premier alinéa du II du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 34-8 du code des postes et télécommunications :
« Les tarifs d'interconnexion sont évalués sur la base des coûts des réseaux de transport et de desserte et intègrent une juste rémunération des investissements réalisés. »
La parole est à Mme Pourtaud.
Mme Danièle Pourtaud. Avec l'amendement n° 156, nous vous proposons une nouvelle rédaction pour la première phrase du premier alinéa du paragraphe II du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 34-8 du code des postes et télécommunications.
Cet amendement a un double objectif.
Il vise, tout d'abord, à rendre générale l'obligation de publier une offre technique et tarifaire d'interconnexion. Il n'y a en effet aucune raison de limiter cette obligation à certains exploitants de réseaux, c'est-à-dire à ceux qui détiennent plus de 25 p. 100 du marché, c'est-à-dire, pour l'instant, France Télécom.
Le projet de directive « interconnexion », qui est en discussion à l'échelon européen, ne le prévoit d'ailleurs pas. En effet, l'article 7 de cette proposition de directive dispose que « les autorités réglementaires nationales veillent à la publication, conformément à l'article 14 du paragraphe I, d'une offre d'interconnexion de référence ».
Le droit européen exige donc de tous les opérateurs de réseaux ouverts au public non seulement d'établir des offres techniques et tarifaires d'interconnexion, mais aussi de les publier.
Il s'agit d'une règle de transparence qui trouve son équivalent dans le droit de la concurrence en matière de conditions générales de vente.
Certes, me direz-vous, il ne s'agit que d'un projet de directive, susceptible d'être encore modifié. Si tel est le cas, j'aimerais, monsieur le ministre, que vous nous disiez quelle est votre position sur ce projet de directive ; si tel n'est pas le cas, j'en déduis que le projet de loi doit respecter les dispositions de la directive.
A tout le moins, le groupe socialiste considère que la publication par tous les exploitants de leur tarif est non seulement la meilleure manière de garantir le caractère transparent et non discriminatoire des offres, mais aussi une condition pour ne pas fragiliser notre opérateur national en lui imposant des contraintes supplémentaires par rapport à ses concurrents.
Le second objet de cet amendement est de faire approuver les tarifs d'interconnexion non par l'autorité de régulation, mais par le ministre chargé des télécommunications. Ceux-ci nous semblent relever explicitement des compétences devant prioritairement revenir à l'Etat, puisqu'ils ont pour objet de rendre effectif le bon fonctionnement du service universel, qui est une mission d'intérêt général.
En ce qui concerne l'amendement n° 157, je ne reviendrai pas sur l'importance extrême des tarifs d'interconnexion dans la gestion de la concurrence et le maintien du service public, qui a déjà été exposée plusieurs fois par mes collègues du groupe communiste républicain et citoyen.
Avec cet amendement, nous proposons de préciser qu'ils seront évalués sur la base des coûts de transport et de desserte et qu'ils intégreront une juste rémunération des investissements réalisés.
Contrairement à ce que vous avez dit à l'Assemblée nationale, monsieur le ministre, je maintiens que la notion d'usage effectif renvoie bien implicitement à la méthode du coût marginal, excluant donc la couverture des coûts fixes supportés par le propriétaire des réseaux.
Or comme il m'apparaît nécessaire de prendre en compte une juste rémunération des capitaux - investis, je le rappelle, par l'ensemble de la collectivité nationale à travers France Télécom : dans le seul réseau câblé, il a été investi 25 milliards de francs -...
M. Gérard Larcher, rapporteur. Ce n'est pas le plus réussi !
Mme Danièle Pourtaud. Peut-être, monsieur le rapporteur, mais il est certain que ces milliards ont été investis et que, aujourd'hui, au lieu de les jeter par dessus bord, il vaut mieux essayer de les amortir !
M. Gérard Larcher, rapporteur. On ne les jette pas !
Mme Danièle Pourtaud. Je demande donc à la Haute Assemblée de bien vouloir adopter notre amendement.
M. le président. Par amendement n° 107, MM. Billard, Leyzour, Minetti et Ralite, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, dans la seconde phrase du premier alinéa du paragraphe II du texte présenté par l'article L. 34-8 du code des postes et télécommunications, après le mot : « desserte », d'ajouter les mots : « de son entretien et de son amortissement ».
La parole est à M. Bécart.
M. Jean-Luc Bécart. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cet amendement n° 107 porte sur la question essentielle du financement des infrastructures de télécommunications. Au cours de ce débat, nous avons eu l'occasion de signaler à plusieurs reprises - et en l'espèce, mieux vaut deux fois qu'une - que le développement de notre équipement téléphonique avait été largement piloté, dans le passé et le présent, par l'intervention de l'exploitant public.
Dans notre amendement, nous reposons la question de l'effort industriel de la nation dans le cadre du schéma national des télécommunications et de l'atteinte des objectifs de la démarche de planification.
En effet, au travers de l'utilisation de sa très importante marge brute d'autofinancement, découlant d'ailleurs de la haute valeur ajoutée que produit son activité de prestation de services, France Télécom assume aujourd'hui pleinement l'effort d'équipement et de développement des infrastructures.
Cet effort s'accomplit par le biais d'une importante activité de recherche - développement, résultant de choix technologiques et financiers clairs.
Devons-nous oublier que les principes mêmes du service public font de la recherche et de l'innovation technologique une composante fondamentale de l'activité des services publics, ce que l'initiative privée n'est en général pas en mesure de faire ?
L'innovation technologique dans le secteur marchand est par habitude instrumentalisée soit pour dégager des économies de coûts de production, soit pour générer des gains de productivité qui permettent ensuite de mieux rémunérer le capital investi.
C'est l'innovation technologique au sein du service public, et parfois grâce à la coopération avec le secteur privé, qui a permis l'automatisation du réseau dans les années soixante, puis le Minitel, mais aussi la politique spatiale et le développement des liaisons satellite, etc.
Même aux Etats-Unis, monsieur le rapporteur, c'est l'initiative publique qui est à la base du développement des technologies.
Le réseau Internet, qui fait aujourd'hui l'actualité, n'a pas d'autre origine qu'une origine publique. Le réseau international est en effet le produit d'une initiative du ministère américain de la défense qui a constitué un réseau spécifique de transmission d'informations et de données pour les besoins de la politique extérieure du gouvernement des Etats-Unis. Ce n'est pas un investisseur privé qui aurait pu, dans les faits, se décider à concevoir et développer un tel outil, dont les usages sont, bien évidemment, aujourd'hui légèrement différents des objectifs initiaux.
France Télécom est aujourd'hui dépositaire de l'ensemble des capacités de numérotation et des fréquences disponibles pour développer les nouveaux produits.
C'est France Télécom qui, au travers de la dette qu'elle supporte, de manière autonome au regard des deniers publics, seul et à taux d'intérêt globalement plus élevé que celui de la dette de l'Etat, a financé et continue de payer ces infrastructures. Elle devra demain assurer le service de cette dette en voyant son périmètre d'intervention réduit par la mise en place du service universel et par l'ouverture à la concurrence des prestations les plus susceptibles de dégager de la valeur ajoutée.
Il est donc tout à fait naturel de solliciter des autres opérateurs un droit d'usage sur les capacités de connexion et de numérotation existantes qui inclut l'amortissement des charges de constitution de ces capacités, et ce d'autant plus dans un contexte où lesdites capacités vont être sensiblement accrues par le zonage prochain du pays et la nouvelle numérotation à dix chiffres.
Voilà exposé, malheureusement trop rapidement, le sens de notre amendement.
M. le président. Par amendement n° 12, M. Gérard Larcher, au nom de la commission, propose de compléter in fine le deuxième alinéa du II du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 34-8 du code des postes et télécommunications par la phrase suivante : « Ces conditions doivent être suffisamment détaillées pour faire apparaître les divers éléments propres à répondre aux demandes spécifiques. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Il s'agit pour nous d'un amendement de clarification visant à faire figurer au deuxième alinéa de l'article L. 34-8 du code des postes et télécommunications une disposition insérée par l'Assemblée nationale au troisième alinéa. C'est la suite logique de notre amendement précédent.
M. le président. Par amendement n° 108, MM. Billard, Leyzour, Minetti et Ralite, les membres du groupe communiste, républicain et citoyen proposent, après le mot : « d'accès » de rédiger comme suit la fin du paragraphe III du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 34-8 du code des postes et télécommunications : « relèvent du tribunal de grande instance, territorialement compétent. »
La parole est à Mme Fraysse-Cazalis.
Mme Jacqueline Fraysse-Cazalis. Le paragraphe III du texte proposé pour l'article L. 34-8 du code des postes et télécommunications évoque la question importante des litiges. Il dispose que « les litiges relatifs au refus d'interconnexion, aux conventions d'interconnexion et aux conditions d'accès peuvent être soumis à l'autorité de régulation des télécommunications conformément à l'article L. 36-8 ».
Vous l'aurez compris à la lecture de notre amendement, nous nous opposons à ce que ces litiges soient soumis à cette autorité particulière et nous proposons que ce soit le droit commun qui s'applique. C'est pourquoi nous disons que ces litiges relèvent de la compétence du tribunal de grande instance, territorialement compétent.
Nous l'avons déjà indiqué à plusieurs reprises, nous estimons que l'instauration d'une nouvelle autorité dite indépendante constitue un moyen de masquer une véritable désertion de l'Etat. De la Banque de France au CSA, l'indépendance prétendue ouvre la voie au libéralisme le plus acharné.
La raison d'être de cette nouvelle autorité est en effet unique : garantir que les normes libérales élaborées à Bruxelles seront respectées à Paris dans les mois et les années à venir.
C'est, encore une fois, le droit à la concurrence et non l'intérêt général qui guidera les interventions futures de l'autorité de régulation des télécommunications.
C'est le dessaisissement de l'Etat qui est ainsi organisé méthodiquement et dans la plus grande hypocrisie. Sont en effet abandonnées à cette instance dépourvue de toute légitimité démocratique des prérogatives de puissances publiques que seuls les élus, les membres d'un gouvernement mandatés par les citoyens devraient conserver dans leurs mains.
Ainsi, l'intérêt général ne sera-t-il plus défini dans le cadre d'un débat public contradictoire, même si ce devrait être le cas, en théorie, mais sera à l'avenir délégué à quelques sages qui n'auront de compte à rendre à personne.
Avec ce projet de loi et l'instauration de cette nouvelle autorité, vous confisquez la démocratie. On peut même se demander, monsieur le ministre, quel sera votre rôle à l'avenir, et quel sera celui des services de la direction générale des postes et télécommunications.
Nous estimons tout à fait inacceptable que cette instance supplée la justice à l'avenir.
Tel est l'objet de notre amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'ensemble de ces amendements ?
M. Gérard Larcher, rapporteur. Nous sommes défavorables à l'amendement n° 101, car supprimer le texte proposé pour l'article L. 34-8, c'est supprimer l'interconnexion, donc un des principaux leviers de l'ouverture à la concurrence.
Nous sommes également défavorables à l'amendement n° 102, car il laisserait à la discrétion des opérateurs en place la possibilité d'une réelle concurrence. Ce serait une entrave majeure à la loyauté de la concurrence.
S'agissant de l'amendement n° 155, je rappelle que les conditions d'interconnexion seront « différentes » selon qu'il s'agira d'exploitants de réseaux ou de simples prestataires de services, ce qui implique que des tarifs différents seront pratiqués.
N'oublions pas, en outre, que l'activité des revendeurs de capacités permettra, par le biais de la rémunération additionnelle à l'interconnexion, de financer le service universel.
Enfin, je ne comprends pas pourquoi il conviendrait d'interdire dans le secteur des télécommunications les activités de grossiste qui devraient, en définitive, avoir des effets favorables pour les consommateurs.
Voilà pourquoi nous sommes défavorables à l'amendement n° 155.
Nous sommes également défavorables à l'amendement n° 103, car il tend à renverser la charge de la preuve entre les nouveaux entrants sur le marché et les opérateurs existants. Il introduit un motif subjectif de refus d'interconnexion, ce qui est contraire à l'esprit du texte et à celui de la concurrence. En effet, cette disposition, si elle était adoptée, permettrait aux opérateurs dominants de multiplier les entraves à l'arrivée de nouveaux concurrents.
Nous ne sommes pas davantage favorables à l'amendement n° 104, car nous pensons que le texte répond déjà aux deux préoccupations qu'il exprime.
En effet, la première de ces préoccupations est prise en compte au deuxième alinéa du paragraphe I de l'article L. 34-8 du code des postes et télécommunications : la demande d'interconnexion ne peut être refusée que si elle n'est pas raisonnable au regard des capacités de l'exploitant à la satisfaire.
Il est également répondu à la seconde préoccupation : l'interconnexion est à la charge de l'opérateur qui en fait la demande. Le texte le prévoit déjà, la convention d'interconnexion sera soumise à l'autorité de régulation. Le texte prévoit même qu'à l'occasion de l'interconnexion sera versée une rémunération pour le service universel.
La commission est également défavorable à l'amendement n° 105, car il dépouille l'autorité de régulation de ses compétences dans le domaine central qu'est l'interconnexion.
L'amendement n° 169, présenté par notre collègue René Trégouët, pose un problème de conflit de dates pour les décrets.M. le ministre nous donnera certainement, dans quelques instants, l'agenda qu'il prévoit. Si nous retenions cet amendement, un problème de fond se poserait, car l'autorité de régulation ne sera point encore créée.
Quant à l'amendement n° 106, il vise à supprimer les dispositions qui obligent les opérateurs, exerçant une influence significative sur le marché, à publier une offre tarifaire d'interconnexion. Or cela nous paraît être un élément essentiel du texte. L'avis de la commision est donc défavorable.
La commission est également défavorable à l'amendement n° 156, présenté par Mme Pourtaud. Je voudrais rappeler à ce stade du débat que, dans le texte qui est présenté par le Gouvernement et que nous proposons d'adopter une fois modifié, en France, nous avons fait le choix de faire contribuer les nouveaux entrants, si petits soient-ils, au service universel. Tel n'a pas été le choix dans d'autres pays, en Allemagne par exemple. N'allons donc pas trop loin dans le sens des obligations pesant sur les nouveaux entrants. Sur le sujet, notre texte est, semble-t-il équilibré.
Avec l'amendement n° 157, deux aspects sont abordés, et notamment le problème des coûts effectifs dont je rappelle qu'ils recouvrent non pas seulement les coûts marginaux, mais aussi un certain nombre de coûts fixes.
Cet amendement pourrait tendre à nous faire croire que le secteur des télécommunications n'a pas évolué depuis trente ans. Rendre prohibitif, les coûts d'interconnexion au réseau de l'opérateur historique reviendrait à favoriser le développement de réseaux surnuméraires à terme puisque les coûts seraient tellement élevés que la concurrence aurait intérêt à installer de nouveaux réseaux, ce qui priverait l'opérateur historique des rémunérations liées à l'interconnexion.
La commission est donc défavorable à l'amendement n° 157, dans l'intérêt même d'ailleurs de France Télécom.
Elle est également défavorable à l'amendement n° 107, pour les raisons que nous avons précédemment exposées.
S'agissant de l'amendement n° 108, je rappelle que l'interconnexion constitue le coeur des compétences de l'autorité de régulation des télécommunications ; lui retirer, comme vise à le faire cet amendement, un certain nombre de pouvoirs serait la dépouiller de la plupart de ses compétences. La commission y est donc défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'ensemble de ces amendements ?
M. François Fillon, ministre délégué. Je suis évidemment défavorable à l'amendement n° 101, puisqu'il revient à supprimer les dispositions sur l'interconnexion, qui est la clé de l'ouverture à la concurrence. J'ajoute que, en l'absence d'interconnexion, c'est à une sorte de jungle de réseaux, indépendants les uns des autres, que l'on aboutirait, ce qui, à l'évidence, n'irait pas dans le sens des intérêts des utilisateurs.
Je suis également défavorable à l'amendement n° 102.
L'amendement n° 155 vise à limiter le droit à l'interconnexion aux seuls exploitants d'infrastructures. Je voudrais faire remarquer à Mme Pourtaud que c'est le Gouvernement français qui a obtenu, à Bruxelles, que soit introduite dans la directive européenne la possibilité de fixer des tarifs d'interconnexion différenciés pour les prestataires de services et les opérateurs de réseaux. Grâce à cette évolution de la réglementation européenne, nous pourrons fixer des tarifs différents, les prestataires de services ne pouvant pas, à l'évidence, bénéficier des mêmes tarifs d'interconnexion que ceux qui investissent dans les réseaux. Je suis donc défavorable à cet amendement.
Je suis également défavorable à l'amendement n° 103, qui vise à élargir les possibilités de refuser de faire droit aux demandes d'interconnexion. Il s'agit là, en réalité, de refuser les nouveaux entrants et d'introduire une asymétrie dans la réglementation française que nous n'avons pas voulue.
Je suis en revanche favorable à l'amendement n° 10 de la commission, qui est rédactionnel.
Je suis défavorable à l'amendement n° 104, qui répond à une sorte de loi du plus fort et qui ne correspond en rien aux soucis de justice et d'équité dont se prévalent par ailleurs ses auteurs.
Je suis favorable à l'amendement n° 11.
Je suis défavorable à l'amendement n° 105, car il vise à supprimer une disposition qui reprend une obligation européenne à laquelle la France a donné son accord et qui constitue une clause de sauvegarde tout à fait utile puisqu'elle permet - lorsqu'une convention conclue est plus favorable ou, au contraire, moins favorable à un opérateur par rapport à une convention conclue avec ses concurrents -, d'en demander la modification pour faire respecter le principe de la non-discrimination.
Je suis défavorable à l'amendement n° 169, mais j'ai bien compris qu'il n'était déposé que pour me conduire à répondre sur le calendrier.
Le Gouvernement souhaite en effet que les décrets d'application de ce texte soient tous pris avant le 1er janvier 1997, de manière que nous puissions délivrer les premières licences dans la seconde partie de l'année 1997, afin que le 1er janvier 1998, à la date de l'ouverture à la concurrence, les premiers opérateurs soient présents sur le marché français.
Il est clair que l'adoption de cet amendement aboutirait, puisque l'autorité de régulation ne sera pas créée immédiatement, à retarder ce calendrier.
Je suis défavorable à l'amendement n° 106, qui vide de son sens une disposition du projet de loi en supprimant les obligations renforcées d'interconnexion.
Je suis également défavorable à l'amendement n° 156, présenté par le groupe socialiste.
S'agissant de la première partie de cet amendement, qui concerne l'obligation faite aux opérateurs puissants de publier une offre d'interconnexion, madame Pourtaud, c'est la « directive services », dans son article 4 bis, qui prévoit que les Etats membres veillent, notamment, à ce que les organismes de télécommunications publient, au plus tard le 1er janvier 1997, les termes et les conditions d'interconnexion. Or, les organismes de télécommunications qui sont définis par ailleurs dans cette directive sont les organismes puissants. Il est clair que le fait d'obliger tous les opérateurs à publier une offre d'interconnexion n'aurait pas de sens, notamment pour les petits opérateurs, pour lesquels les demandes d'interconnexion ne seront que des demandes spécifiques et très conjoncturelles.
Enfin, la compétence de l'autorité de régulation en matière d'interconnexion est cohérente avec l'ensemble du dispositif que nous proposons, car si l'autorité de régulation n'avait plus compétence pour décider des tarifs d'interconnexion, comme elle a quand même compétence pour arbitrer les conflits, nous introduirions alors une grande insécurité juridique pour les opérateurs, qui recevraient du Gouvernement - puisque c'est ce que vous souhaitez - une décision en matière d'interconnexion, mais qui verraient ensuite l'autorité de régulation, le cas échéant, se saisir de cette décision pour la remettre en cause.
Je suis défavorable à l'amendement n° 157, qui vise à aligner la rémunération de l'interconnexion sur les réseaux du plan câble. Si j'approuve, en réalité, l'objectif indiqué dans l'exposé des motifs de cet amendement, je crois qu'il contient une erreur d'analyse. Le terme d'« usage effectif » ne renvoie pas en effet aux coûts agrémentaux ; il vise simplement à indiquer que la rémunération ne concerne que les parties du réseau effectivement utilisées par l'opérateur concurrent. La notion d'usage effectif n'exclut pas, au contraire, que soient pris en compte les coûts d'investissement et, par exemple, ce que l'on appelle les coûts de congestion du réseau. Dès lors que cette interprétation est claire, la rédaction qui est proposée par le groupe socialiste présente l'inconvénient d'être plus imprécise que celle du projet de loi et suscitera par conséquent plus de recours auprès de l'autorité de régulation.
Je suis également défavorable à l'amendement n° 107, qui vise à rajouter des coûts d'entretien et d'amortissement dans la rémunération de l'interconnexion. C'est un amendement qui est non seulement inutile, mais en plus pervers. En effet, il cite deux catégories de coûts alors que la rédaction du projet de loi, parce qu'elle est générale, vise l'ensemble des coûts qui concernent l'entretien et le fonctionnement des réseaux.
Je suis favorable à l'amendement n° 12 de la commission, qui est un amendement rédactionnel.
Enfin, je suis évidemment défavorable à l'amendement n° 108, qui vise à retirer à l'autorité de régulation les pouvoirs d'arbitrage sur l'interconnexion.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 101, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 102, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 155.
Mme Danièle Pourtaud. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Pourtaud.
Mme Danièle Pourtaud. Cet amendement vise à supprimer la possibilité d'interconnexion pour les opérateurs qui se contenteraient de faire de la revente.
J'ai bien entendu les explications de M. le ministre sur la nécessité de permettre à des opérateurs d'entrer sur ce marché afin de faire baisser les tarifs, ainsi que l'argument de M. le rapporteur qui se demande pourquoi il n'y aurait pas de grossiste dans cette activité, et j'ai bien compris que tous deux étaient défavorables à cet amendement. Je voudrais néanmoins faire deux observations.
J'ai bien noté que les conditions seront différentes selon que les opérateurs rendront des services supplémentaires ou se contenteront de faire de la revente de capacité. Admettons que, sur ce point-là, mon amendement servira à exprimer le souhait que ce soit vraiment le cas et que les tarifs d'interconnexion soient réllement différents.
Mais je voudrais, répondant par là à M. le rapporteur, attirer l'attention de M. le ministre sur un point. Si les grossistes sont certainement utiles dans certains secteurs de l'économie, ils n'ont pas forcément - je citerai deux exemples sur lesquels chacun dans cette assemblée sera d'accord avec moi - une activité bénéfique pour d'autres.
Je pense d'abord à la publicité, secteur dans lequel les centrales d'achats, qui correspondent exactement à ce qu'on nous propose de faire avec les revendeurs de capacité, ne sont intervenues que pour bloquer des espaces publicitaires sur les médias ; chacun s'en souvient. Au bout de quelques années, ces centrales d'achat ont plongé à la fois les agences de publicité et surtout les médias dans une situation extrêmement difficile. C'est ainsi que la presse a traversé une situation économiquement extrêmement difficile.
Je pense ensuite à l'activité des revendeurs de capacité en matière de trafic aérien. Tout le monde le constate, la concurrence a été à l'origine d'une baisse sur les prix des transports aériens qui a conduit un certain nombre de citoyens du monde, abusés par des offres trop avantageuses, à voyager sur des avions qui ne sont plus suffisamment entretenus. C'est ainsi que, depuis le 1er janvier, se sont produits deux accidents extrêmement graves que tout le monde a encore en mémoire : l'un avec un charter allemand au large des Canaries, l'autre, plus récemment, aux Etats-Unis.
L'activité des revendeurs de capacité n'est donc pas forcément saine pour l'économie.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 155, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 103, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 10, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ? ...
Je mets aux voix l'amendement n° 104, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 11.
Mme Danièle Pourtaud. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Pourtaud.
Mme Danièle Pourtaud. Le groupe socialiste n'est pas favorable à cet amendement. Il y a en effet quelque chose d'illogique à vouloir supprimer dans les conventions les conditions effectives et détaillées de l'offre d'interconnexion sur laquelle elles portent et par ailleurs à exiger que les propriétaires de réseaux facturent uniquement les services effectivement rendus, ce qui semble résulter de l'avis défavorable du Gouvernement sur notre amendement n° 157, qui vise au contraire à rémunérer les propriétaires de réseaux sur la base des investissements effectués.
Comment peut-on prétendre donner à l'autorité de régulation les pouvoirs de contrôler la qualité et la justesse des tarifs proposés pour des services effectivement rendus si, par ailleurs, on ne prévoit pas que les conventions comporteront une offre détaillée ? Il me semble que c'est totalement incompatible. Par conséquent, si M. le ministre et M. le rapporteur n'acceptent pas l'amendement n° 157, nous ne voterons pas l'amendement n° 11.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Je ne pensais pas que l'amendement n° 11 susciterait un tel débat ! Je vous rassure, mes chers collègues, ni cet amendement ni l'amendement n° 12 ne provoqueront de grands bouleversements.
M. Jean Chérioux. Cela ne nous est pas destiné, c'est pour l'extérieur, monsieur le rapporteur !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 11, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 105, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 169.
M. René Trégouët. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Trégouët.
M. René Trégouët. M. le ministre venant de prendre l'engagement que les décrets essentiels seraient promulgués avant le 1er janvier 1997, c'est-à-dire avant la mise en place de l'ART - autorité de régulation des télécommunications - ce qui permettra à notre pays d'être prêt pour le 1er janvier 1998, je retire mon amendement.
M. le président. L'amendement n° 169 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 106, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 156, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 157, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 107, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 12, accepté par le Gouvernement.
M. Jean-Luc Bécart. Le groupe communiste républicain et citoyen vote contre.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 108, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article L. 34-8 du code des postes et télécommunications.
(Ce texte est adopté.)

ARTICLE L. 34-9 DU CODE DES POSTES
ET TÉLÉCOMMUNICATIONS