M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 200 le Gouvernement propose, après l'article 11, d'insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, sont insérés les articles 43-1, 43-2 et 43-3 ainsi rédigés :
« Art. 43-1. - Toute personne dont l'activité est d'offrir un service de connexion à un ou plusieurs services de communication audiovisuelle mentionnés au 1° de l'article 43 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication est tenue de proposer à ses clients un moyen technique leur permettant de restreindre l'accès à certains services ou de les sélectionner. »
« Art. 43-2. - Le comité supérieur de la télématique, placé auprès du Conseil supérieur de l'audiovisuel, est chargé d'élaborer des recommandations propres à assurer le respect, par les services de communication audiovisuelle mentionnés au 1° de l'article 43 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, des règles déontologiques adaptées à la nature des services proposés. Le Conseil supérieur de l'audiovisuel adopte, sur proposition du comité, les recommandations qui sont publiées au Journal officiel de la République française.
« Le comité supérieur de la télématique comporte en son sein une instance chargée d'émettre, à la demande de tout utilisateur, de tout opérateur, de tout fournisseur de service, ou de toute organisation professionnelle ou association d'usagers, un avis sur le respect des recommandations susvisées par un service mentionné au 1° de l'article 43 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication pour lequel il a été saisi. Cet avis est notifié aux intéressés. Lorsque le comité estime que le service ne respecte pas ces recommandations, son avis est publié au Journal officiel de la République française.
« Le comité peut également être saisi par les mêmes personnes de toute réclamation concernant un service. Lorsqu'il a connaissance, à la suite de réclamations ou de demande d'avis, de faits de nature à motiver des poursuites pénales, le président du Conseil supérieur de l'audiovisuel, sur proposition du comité, est tenu d'en informer sans délai au procureur de la République.
« Le comité supérieur de la télématique mène toute étude et action d'information sur ces services. Il coordonne son activité avec les organismes étrangers exerçant des compétences analogues aux siennes et participe à l'élaboration de règles déontologiques communes dans le cadre de la coopération internationale. Il propose toute mesure de nature à favoriser le développement et la diversité des services.
« Le comité comprend pour moitié des professionnels représentant les fournisseurs d'accès aux services, les éditeurs de services et les éditeurs de presse, et pour l'autre moitié des représentants des utilisateurs et des personnalités qualifiées nommés par les ministres chargés des télécommunications et de la communication. Le président du comité est désigné par le Conseil supérieur de l'audiovisuel parmi les personnalités qualifiées.
« Un décret, pris après avis du Conseil supérieur de l'audiovisuel, précise la composition et les modalités de fonctionnement de ce comité. Il précise notamment les attributions exercées par le comité supérieur de la télématique en matière de services offerts sur des accès télématiques anonymes. »
« Art. 43-3 . - Les personnes mentionnées à l'article 43-1 ne sont pas pénalement responsables des infractions résultant du contenu des messages diffusés par un service de communication audiovisuelle sauf si elles n'ont pas respecté les dispositions de l'article 43-1, ou si elles ont donné accès à un service ayant fait l'objet d'un avis défavorable publié au Journal officiel en application de l'article 43-2, ou s'il est établi qu'elles ont, en connaissance de cause, personnellement commis l'infraction ou participé à sa commission. »
Par amendement n° 201, M. Gérard Larcher, au nom de la commission, propose, après l'article 11, d'insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, sont insérés, après l'article 43, trois articles additionnels nouveaux ainsi rédigés :
« Art. 43-1. - Toute personne dont l'activité est d'offrir un service de connexion à un ou plusieurs services de communication audiovisuelle mentionnés au 1° de l'article 43 est tenue de proposer à ses clients un moyen technique leur permettant de restreindre l'accès à certains services ou de les sélectionner. »
« Art. 43-2. - Le comité supérieur de la télématique, placé auprès du Conseil supérieur de l'audiovisuel, est chargé d'élaborer des recommandations propres à assurer le respect, par les services de communication audiovisuelle mentionnés au 1° de l'article 43 des règles déontologiques adaptées à la nature des services proposés. Le Conseil supérieur de l'audiovisuel adopte, sur proposition du comité, les recommandations qui sont publiées au Journal officiel de la République française.
« Le comité supérieur de la télématique comporte en son sein une instance chargée d'émettre, à la demande de tout utilisateur, de tout opérateur, de tout fournisseur de services ou de toute organisation professionnelle ou association d'usagers, un avis sur le respect des recommandations susvisées par un service mentionné au 1° de l'article 43 pour lequel il a été saisi. Cet avis est notifié aux intéressés. Lorsque le comité estime que le service ne respecte pas ces recommandations, son avis est publié au Journal officiel de la République française.
« Le comité peut également être saisi par les mêmes personnes de toute réclamation concernant des services mentionnés à l'alinéa précédent. Lorsqu'il a connaissance, à la suite de réclamations ou de demandes d'avis, de faits de nature à motiver des poursuites pénales, le président du Conseil supérieur de l'audiovisuel, sur proposition du comité, est tenu d'en informer sans délai le procureur de la République.
« Le comité supérieur de la télématique mène toute étude et action d'information sur ces services. Il coordonne son activité avec les organismes étrangers exerçant des compétences analogues aux siennes et participe à l'élaboration de règles déontologiques communes dans le cadre de la coopération internationale. Il propose toute mesure de nature à favoriser le développement et la diversité des services.
« Le comité comprend pour moitié des professionnels représentant les fournisseurs d'accès aux services, les éditeurs de services et les éditeurs de presse et, pour l'autre moitié, des représentants des utilisateurs et des personnalités qualifiées nommés par les ministres chargés des télécommunications et de la communication. Le président du comité est désigné par le Conseil supérieur de l'audiovisuel parmi les personnalités qualifiées.
« Un décret, pris après avis du Conseil supérieur de l'audiovisuel, précise la composition et les modalités de fonctionnement de ce comité. Il précise notamment les attributions exercées par le comité supérieur de la télématique en matière de services offerts sur des accès télématiques anonymes. »
« Art. 43-3. - Les personnes mentionnées à l'article 43-1 ne sont pas pénalement responsables des infractions résultant du contenu des messages diffusés par un service de communication audiovisuelle sauf si elles n'ont pas respecté les dispositions de l'article 43-1, ou si elles ont donné accès à un service ayant fait l'objet d'un avis défavorable publié au Journal officiel en application de l'article 43-2, ou s'il est établi qu'elles ont, en connaissance de cause, personnellement commis l'infraction ou participé à sa commission. »
La parole est à M. le ministre, pour défendre l'amendement n° 200.
M. François Fillon, ministre délégué. Cet amendement vise à adapter notre législation à l'arrivée d'un certain nombre de nouvelles technologies qui posent, en particulier, des problèmes de responsabilité et d'éthique.
Au cours des semaines passées, des affaires concernant le réseau Internet ont défrayé la chronique. Or la législation française est aujourd'hui inadaptée devant l'existence d'un réseau qui est un réseau mondial, qui n'appartient à personne et sur lequel circulent librement des informations de toutes sortes.
Si, pour l'essentiel, ces informations sont à caractère académique, commercial, etc., il en est quelques-unes qui se trouvent en contravention manifeste avec la loi pénale française. Je pense en particulier aux serveurs révisionnistes ou à ceux qui mettent en cause l'intégrité de la personne humaine.
Récemment, deux chefs d'entreprise qui ont pour métier d'offrir des accès à ce réseau ont été mis en examen au motif que des informations à caractère pédophile avaient transité par la porte d'accès au réseau Internet qu'ils offrent à leurs clients.
Je crois que leur mise en examen - j'avais d'ailleurs eu l'occasion de le dire - résultait d'une sorte de contresens. En effet, ce sont non ceux qui transportent les informations ou ceux qui offrent des accès au réseau Internet mais bien les éditeurs des services qui doivent être considérés comme responsables de la nature de ces informations.
Afin de clarifier la situation et de permettre à ces entreprises de continuer à développer les accès sur le réseau Internet dans notre pays, le Gouvernement propose un amendement qui tend à clarifier cette question de responsabilité.
Cet amendement prévoit trois dispositions.
La première fait obligation à tous ceux qui offrent des accès au réseau Internet de fournir un logiciel dit « de contrôle parental » et permettant aux familles, dans le cadre de l'exercice normal de la responsabilité individuelle, de décider des informations qu'elles laissent en libre accès aux mineurs.
La deuxième disposition vise à placer auprès du Conseil supérieur de l'audiovisuel le comité supérieur de la télématique, composé de représentants des professionnels et des associations d'usagers, qui aura pour mission non seulement de faire un certain nombre de recommandations d'ordre déontologique, mais aussi de donner un avis sur des serveurs qui seraient contraires à la loi française.
Le comité supérieur de la télématique exerce cette fonction pour le Minitel. Il s'agit là de lui permettre d'exercer une fonction identique pour les informations circulant sur le réseau Internet, et il nous a semblé naturel de le placer auprès du Conseil supérieur de l'audiovisuel, de manière à harmoniser la fonction de contrôle des contenus.
La troisième disposition vise à exonérer de leur responsabilité pénale les offreurs d'accès à Internet sous réserve qu'ils satisfassent aux deux obligations que je viens de présenter : d'une part, qu'ils fournissent un logiciel de contrôle parental, et, d'autre part, qu'ils ne laissent pas en libre accès des serveurs qui auraient fait l'objet d'un avis défavorable de la part de ce comité supérieur de la télématique.
Comme vous le voyez, mesdames, messieurs les sénateurs, il s'agit d'un dispositif simple, qui ne crée pas un organisme nouveau et qui vise non à introduire une censure sur le réseau Internet mais à sécuriser la situation des entreprises qui offrent des accès, tout en permettant aux usagers de se tourner vers le comité supérieur de la télématique lorsqu'ils ont le sentiment que des informations circulant sur le réseau sont en contradiction totale avec la législation française sur trois points essentiels : l'incitation à la haine raciale, l'atteinte à l'intégrité de la personne humaine, le négationnisme et le révisionnisme.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 201.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Si nous avions pu déposer conjointement avec le Gouvernement cet amendement, nous l'aurions fait - mais cela n'est pas possible en vertu de la séparation des pouvoirs - car il est le fruit d'une réflexion conduite en commun lors des travaux préparatoires de ce projet de loi.
En fait, cet amendement a un triple objet. Il vise, tout d'abord, à fixer les obligations que doit respecter un fournisseur d'accès à un réseau télé-informatique ou télématique pour permettre à ses abonnés d'exclure les services qu'ils ne souhaitent pas voir consultés. Je pense, par exemple, aux parents qui souhaitent interdire l'accès de leur terminal à leurs enfants.
Il tend, ensuite, à créer par la loi, ce qui n'existait pour le kiosque que par un décret, au travers du Conseil supérieur de l'audiovisuel et du comité supérieur de la télématique, un organisme compétent pour contrôler le contenu des services proposés sur les réseaux précités et proposer aux autorités de régulation la prise éventuelle de sanctions adaptées si lesdits services portaient atteinte, notamment, à la dignité de la personne humaine. Cet organisme sera placé sous l'autorité du Conseil supérieur de l'audiovisuel.
Enfin, il tend à définir les conditions d'exonération de responsabilité des prestataires d'accès aux réseaux télé-informatiques et télématiques lorsque ces réseaux sont utilisés pour la diffusion d'informations portant atteinte à la dignité de la personne humaine.
Nous estimons que le rapide développement de l'ensemble de ces réseaux et les informations qui y sont diffusées doivent parallèlement faire l'objet d'une réflexion sur le contenu.
Par ailleurs, le projet de loi de réglementation, qui traite d'abord, pardonnez-moi l'expression, de tuyaux et de contenant devait prendre en compte le contenu. Une réflexion en ce domaine devrait être engagée. Il ne s'agirait pas d'une sorte de censure brutale, mais elle tendrait à éviter la situation que nous avons connue pendant plusieurs années par le biais des questions des parlementaires sur le contenu du kiosque, notamment au travers de la consultation sur Minitel. C'est pourquoi nous nous rallions à l'amendement n° 200 du Gouvernement.
M. le président. L'amendement n° 201 est retiré.
Monsieur le ministre, il me semble qu'il conviendrait de rectifier votre amendement afin de rédiger ainsi la fin du troisième alinéa du texte proposé pour l'article 43-2 de la loi du 30 septembre 1986 : « d'en informer sans délai le procureur de la République ».
M. François Fillon, ministre délégué. Absolument, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 200 rectifié, présenté par le Gouvernement, et tendant à insérer, après l'article 11, un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, sont insérés les articles 43-1, 43-2 et 43-3 ainsi rédigés :
« Art. 43-1. - Toute personne dont l'activité est d'offrir un service de connexion à un ou plusieurs services de communication audiovisuelle mentionnés au 1° de l'article 43 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication est tenue de proposer à ses clients un moyen technique leur permettant de restreindre l'accès à certains services ou de les sélectionner.
« Art. 43-2 . - Le comité supérieur de la télématique, placé auprès du conseil supérieur de l'audiovisuel, est chargé d'élaborer des recommandations propres à assurer le respect, par les services de communication audiovisuelle mentionnés au 1° de l'article 43 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, des règles déontologiques adaptées à la nature des services proposés. Le Conseil supérieur de l'audiovisuel adopte, sur proposition du comité, les recommandations qui sont publiées au Journal officiel de la République française.
« Le comité supérieur de la télématique comporte en son sein une instance chargée d'émettre, à la demande de tout utilisateur, de tout opérateur, de tout fournisseur de services, ou de toute organisation professionnelle ou association d'usagers, un avis sur le respect des recommandations susvisées par un service mentionné au 1° de l'article 43 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication pour lequel il a été saisi. Cet avis est notifié aux intéressés. Lorsque le comité estime que le service ne respecte pas ces recommandations, son avis est publié au Journal officiel de la République française.
« Le comité peut également être saisi par les mêmes personnes de toute réclamation concernant un service. Lorsqu'il a connaissance, à la suite de réclamations ou de demandes d'avis, de faits de nature à motiver des poursuites pénales, le président du Conseil supérieur de l'audiovisuel, sur proposition du comité, est tenu d'en informer sans délai le procureur de la République.
« Le comité supérieur de la télématique mène toute étude et action d'information sur ces services. Il coordonne son activité avec les organismes étrangers exerçant des compétences analogues aux siennes et participe à l'élaboration de règles déontologiques communes dans le cadre de la coopération internationale. Il propose toute mesure de nature à favoriser le développement et la diversité des services.
« Le comité comprend pour moitié des professionnels représentant les fournisseurs d'accès aux services, les éditeurs de services et les éditeurs de presse, et pour l'autre moitié des représentants des utilisateurs et des personnalités qualifiées nommés par les ministres chargés des télécommunications et de la communication. Le président du comité est désigné par le Conseil supérieur de l'audiovisuel parmi les personnalités qualifiées.
« Un décret, pris après avis du Conseil supérieur de l'audiovisuel, précise la composition et les modalités de fonctionnement de ce comité. Il précise notamment les attributions exercées par le comité supérieur de la télématique en matière de services offerts sur des accès télématiques anonymes.
« Art. 43-3 . - Les personnes mentionnées à l'article 43-1 ne sont pas pénalement responsables des infractions résultant du contenu des messages diffusés par un service de communication audiovisuelle sauf si elles n'ont pas respecté les dispositions de l'article 43-1, ou si elles ont donné accès à un service ayant fait l'objet d'un avis défavorable publié au Journal officiel en application de l'article 43-2, ou s'il est établi qu'elles ont, en connaissance de cause, personnellement commis l'infraction ou participé à sa commission. »
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 200 rectifié.
M. René Trégouët. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Trégouët.
M. René Trégouët. Je voterai l'amendement n° 200 rectifié. Toutefois, celui-ci sera diffusé dans les prochaines heures sur l'ensemble du réseau Internet. Le terme de « télématique », qui était un très bel intitulé dans les années soixante-dix, ne correspond plus du tout à la terminologie qui est employée sur les réseaux.
Aussi souhaiterais-je déposer un sous-amendement tendant à remplacer les termes « comité supérieur de la télématique » par les termes « comité supérieur des réseaux informatiques ».
Cet intitulé aurait une tout autre dynamique. En outre, les termes « réseaux informatiques » recouvrent bien ce que nous voulons viser.
M. le président. Monsieur Trégouët, nous en sommes aux explications de vote. Vous ne pouvez donc plus déposer un sous-amendement. Mais cette question pourra être examinée par la commission mixte paritaire.
M. René Trégouët. Sans doute, mais cet amendement va circuler dès demain sur Internet !
M. François Fillon, ministre délégué. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François Fillon, ministre délégué. Je crois que les mots « réseaux informatiques » ne recouvrent pas tout à fait le même champ que les mots « services télématiques ». De plus, il s'agit là de services et non pas de réseaux.
Ce point précis a fait l'objet de longues et difficiles négociations avec les professionnels notamment, qui, à l'unanimité, ont adopté cette formulation. C'est la raison pour laquelle il me paraît difficile de la modifier. En tout cas, il ne faut pas la remplacer par les mots « réseaux informatiques », qui recouvrent une notion plus large que celle de la télématique.
Mme Danièle Pourtaud. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Pourtaud.
Mme Danièle Pourtaud. Cet amendement vise à insérer deux articles importants.
La disposition proposée pour l'article 43-1 nous surprend. D'une manière générale, nous ne sommes pas favorables à l'utilisation de puces ou, en l'occurrence, de logiciels de contrôle, même s'il s'agit de contrôle parental, dans la mesure où ces logiciels ou ces puces, puisqu'il est question de la puce anti-violence pour la télévision, aboutiraient en fait à donner bonne conscience au législateur et au Gouvernement, tout en conduisant à une déresponsabilisation des éditeurs de services, des fabricants de programmes ou, en matière de télévision, des programmateurs. Nous ne pensons pas qu'il s'agisse d'une bonne solution, d'autant que rien ne nous garantit l'efficacité de ces dispositifs.
S'agissant de l'article 43-2, nous ne pensons pas qu'il puisse résoudre le problème. Effectivement, on a pu assister au développement sur Internet de forums qui portaient atteinte à des secteurs que nous avions souhaité exclure de la liberté de communication en France. Pour autant, est-ce vraiment au détour d'un amendement qu'une question aussi délicate sera résolue ?
M. le ministre avait lui-même souligné à plusieurs reprises la complexité du sujet. Par ailleurs, M. Douste-Blazy, ministre de la culture, a prévu, me semble-t-il, de déposer un projet de loi en ce sens. M. Fillon a également souligné la nécessité de négociations internationales, qui me semblent effectivement mieux à même de résoudre le problème.
Par ailleurs, j'ai cru comprendre que la commission des lois envisageait la création d'une mission sur les questions juridiques afférentes aux autoroutes de l'information.
Pourquoi, dès lors, légiférer par un amendement ? Nous ne ferions que compliquer davantage le dispositif, qui se situe maintenant à la frontière entre les compétences du CSA et celles de l'autorité de régulation. Une telle attitude ne nous paraît pas acceptable.
Voilà deux mois, lors de l'examen du projet de loi sur les autoroutes de l'information, nous avons déjà beaucoup trop modifié la loi de 1986 sur la communication audiovisuelle. Il serait nécessaire de procéder à un toilettage de cette loi en se posant réellement les problèmes du contenu, y compris des autoroutes de l'information. Avant-hier, M. Cluzel a fait une très intéressante démonstration. Je pense qu'elle méritait mieux que cet amendement.
M. Claude Billard. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Billard.
M. Claude Billard. Au cours de ces dernières semaines, la mise en examen de deux fournisseurs d'accès français au réseau Internet n'a pas été sans soulever une grande émotion parmi les utilisateurs de ce réseau.
La couverture médiatique de cette affaire, très souvent, trop souvent, sur le mode du sensationnel, n'est pas davantage de nature à permettre d'aborder la question du contenu d'Internet avec la sérénité nécessaire à un tel débat.
Le réseau Internet véhicule de très nombreuses informations, dont certaines ne sont effectivement pas conformes à notre législation.
Les problèmes des réseaux pédophiles, que nous condamnons fermement, ont été évoqués, avec le goût du sensationnel que je mentionnais à l'instant. Mais il a été beaucoup moins question, alors même que l'illégalité n'est pas moindre, des discussions sur les thèmes révisionnistes ou racistes, qui sont tout aussi préoccupants.
A raison, et pour avoir été interpellés, les fournisseurs d'accès demandent l'instauration d'un cadre juridique précis leur permetant d'exercer leur métier dans les meilleures conditions. L'amendement présenté par le Gouvernement tente de répondre à cette attente.
A ce propos, je souhaiterais rappeler, pour mémoire, l'article XI de la déclaration des Droits de l'homme et du citoyen, qui précise : « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'Homme : tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté, dans les cas déterminés par la Loi.»
Cet article pourrait et devrait, à lui seul, fournir un cadre juridique permettant de poursuivre les auteurs d'abus commis sur Internet.
En effet, par les principes auxquels il se rattache, cet article, qui met en avant la liberté fondamentale de communiquer, nous paraît satisfaire aux exigences de démocratie et de liberté propres à favoriser le développement de ce réseau.
Le comité chargé d'élaborer des recommandations déontologiques qui va être mis en place sera-t-il en mesure de garantir la liberté de communication ?
Aujourd'hui, la prostitution enfantine, la pédophilie, le racisme et le révisionnisme doivent être combattus avec détermination, et l'arsenal juridique existe.
Mais, demain, les discussions politiques, celles qui portent sur le thème de la grève, ne risquent-elles pas de faire l'objet d'un traitement semblable ? (Protestations sur les travées du RPR.) On connaît les possibilités de dérapages qui pourraient découler de l'existence d'un tel comité.
Nous condamnons fermement les responsables de délits sur Internet, notamment ceux qui délivrent des informations contraires à la législation de notre pays.
La protection de l'enfance, plus généralement celle des mineurs, est aussi une nécessité.
Pour autant, Internet et le réseau télématique sont bien différents à la fois par leur conception et par le mode des échanges qui s'y réalisent. La relative gratuité des informations échangées sur le réseau Internet, la règle étant celle de l'échange des savoirs, l'utilisateur est non seulement consommateur d'informations mais également distributeur, illustre à quel point les enjeux d'Internet et ceux du Minitel sont divergents dans leur essence. Ces différences suffisent à justifier, selon nous, un traitement juridique adapté à l'un et l'autre des réseaux.
La volonté de communiquer librement, celle d'échanger en dehors d'un cadre marchand des informations doit être encouragée. Le comité que vous prévoyez de mettre en place ne nous permet pas d'affirmer que la liberté de communiquer sera protégée.
L'exemple du Minitel est là qui laisse fleurir un peu partout dans notre pays des affiches sur lesquelles les hommes et les femmes sont présentés comme des biens de consommation ordinaires. La déontologie que vous évoquez sait se concilier les intérêts du commerce.
Internet fait appel à la liberté et en appelle à la responsabilité de ses utilisateurs. La pédophilie, le racisme et le révisionnisme sont punis par la loi, et les moyens existent bel et bien aujourd'hui de retrouver sur le réseau, et à la source, les auteurs de tels délits.
S'agissant des fournisseurs d'accès au réseau, dès lors que leur responsabilité ne peut être incriminée du fait même de la nature et des technologies du réseau, leur récente mise en examen dans deux affaires n'est vraisemblablement pas de nature à concilier liberté fondamentale et respect de notre législation.
Pour l'ensemble de ces raisons, pour les risques de censure arbitraire, pour la précipitation mise en oeuvre dans l'examen attentif que mériterait une telle question, le groupe communiste républicain et citoyen s'abstiendra sur cet amendement.
Mme Hélène Luc. Très bien !
M. François Fillon, ministre délégué. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François Fillon, ministre délégué. Je ne peux pas laisser dire que ce dispositif tendrait à réduire la liberté d'expression des citoyens sur le réseau Internet. En effet - mais peut-être me suis-je mal exprimé - le comité n'interdit rien. Il se contente de donner des avis. La législation actuelle, celle qui concerne l'ensemble des médias, continue de s'appliquer, c'est-à-dire que le juge pénal saisi décide si telle ou telle information viole la loi française. Le dispositif proposé, en introduisant un comité qui, lorsqu'il est saisi, émet des recommandations d'ordre déontologique et donne des avis sur la nature de tel ou tel serveur, prévoit en faveur des fournisseurs d'accès un régime d'exonération de leurs responsabilités pénales à partir du moment où ils se conforment aux avis du comité que M. Trégouët voulait rebaptiser « super comité de la télématique ».
Il n'y a donc pas de modification du dispositif pénal. Il s'agit simplement d'un comité qui émet des recommandations d'ordre déontologique et des avis sur le contenu des produits offerts par les serveurs dont vous avez évoqué vous-même les travers possibles. Il n'y a donc aucune atteinte à la liberté d'expression et le préambule de la Constitution que vous citiez tout à l'heure s'applique intégralement.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Mme Pourtaud a parlé tout à l'heure d'un amendement « préparé à la va-vite ». Elle faisait référence à M. Cluzel. Je trouve, moi, que M. Cluzel fait partie de ceux qui ont contribué à faire naître ce texte commun à la commission et au Gouvernement. Les réflexions et les enrichissements, qu'avec d'autres d'ailleurs il a pu apporter à ce travail mené, encore une fois, en commun, ont été pris en compte.
Ce n'est pas déresponsabiliser que de permettre à un fournisseur d'accès d'offrir à ses abonnés les moyens d'exclure l'accessibilité d'un certain nombre de services. Il appartiendra aux parents, s'il s'agit d'enfants mineurs, de prendre leurs responsabilités. C'est tout l'inverse de la description que vous avez faite, madame Pourtaud.
Ayons le courage de le dire, il faut aider les parents, face aux techniques modernes, à opérer un certain nombre de choix qui sont de leur responsabilité ; la déontologie est là pour les éclairer. Voilà pourquoi je pense que notre proposition s'inscrit bien, d'abord, dans une démarche de responsabilité personnelle et de déontologie.
M. Jean-Pierre Schosteck. Très bien !
Mme Hélène Luc. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Luc.
Mme Hélène Luc. Mon ami Claude Billard a très bien formulé les questions que nous nous posons. Ce sont de vraies questions, mais hélas ! aujourd'hui, personne n'a de vraies réponses à leur apporter.
J'insiste, monsieur le ministre, parce que nous touchons du doigt un problème important. C'est l'inconvénient de discuter de ce texte en urgence. Le problème méritait effectivement d'être débattu beaucoup plus longuement, en première et en deuxième lecture, et après consultation d'un certain nombre de personnes que nous n'avons pas entendues aussi longtemps que nous l'aurions voulu. Des solutions doivent être recherchées. Pour cette raison, je confirme l'abstention de notre groupe.
Mme Danièle Pourtaud. Je demande la parole.
M. le président. Je suis désolé, madame Pourtaud, mais vous avez déjà expliqué votre vote.
Mme Danièle Pourtaud. J'aurais vivement souhaité préciser que je n'avais pas voulu dire que l'amendement avait été préparé à la va-vite.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Merci !
Mme le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 200 rectifié, accepté par la commission.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 11.

Article 11 bis