RAPPELS AU RÈGLEMENT

M. Daniel Millaud. Je demande la parole pour un rappel au règlement.
M. le président. La parole est à M. Millaud.
M. Daniel Millaud. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, lors de la séance de vendredi dernier, j'ai commencé l'intervention que j'ai prononcée par les mots suivants : « Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers trois collègues... ».
Quelle ne fut pas ma surprise, ce matin, en prenant connaissance du compte rendu intégral, publié dans le Journal officiel de la République française, de constater que mon intervention avait été amputée, mes premiers mots étant devenus : « Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues... » La mention du nombre trois avait disparu !
Nous étions en effet, en ce vendredi matin, quatre sénateurs présents dans l'hémicycle, soit 1,25 p. 100 des trois cent dix-neuf membres de cette assemblée, puisqu'on ne décompte jamais ni le président du Sénat ni le président de séance.
Je ne sais pas pourquoi on a pratiqué cette censure, d'autant plus surprenante que, quelques minutes après mon intervention, s'est déroulé un scrutin public de droit sur un projet de loi organique et que l'annonce des résultats fait état de trois cents votants.
Alors, je cherche la raison de cette censure, que je trouve inadmissible.
Certes, il nous a été dit qu'un hémicycle pouvait être vide quand la commission était pleine, mais ce n'est pas une raison !
M. le président. Monsieur Millaud. le mot « censure » est probablement quelque peu excessif, même si quelques mots ont disparu d'un compte rendu de nos débats. Mais il va de soi que je ferai part au bureau de votre observation.
S'agissant de l'appréciation que vous portez sur la présence de nos collègues dans l'hémicycle, je rappelle que chacun est libre de s'y trouver ou non...
M. René-Pierre Signé. Et M. le Premier ministre a vanté les bienfaits de la session unique !
M. le président... et que le Sénat est toujours en mesure de délibérer quel que soit le nombre des présents.
M. Daniel Millaud. Je n'ai pas dit le contraire, mais pourquoi a-t-on enlevé le chiffre « trois » quand nous sommes censés avoir été trois cents à voter ?
M. Emmanuel Hamel. Je demande la parole pour un rappel au règlement.
M. le président. La parole est à M. Hamel.
M. Emmanuel Hamel. Monsieur le président, c'est avec tristesse que je crois devoir dire quelques mots sur le thème que vient d'évoquer notre collègue M. Millaud.
J'ai écouté avec respect et attention M. le président du Sénat exprimer sa satisfaction devant l'amélioration que connaît l'organisation de nos travaux depuis un an. Mais, quelques minutes seulement après qu'il a achevé son propos, nous nous retrouvons fort peu nombreux dans l'hémicycle.
MM. Marc Massion et René-Pierre Signé. Les meilleurs !
M. Emmanuel Hamel. Ce sont surtout ceux qui peuvent être là !
En effet, monsieur le président, on ne pourra pas - et je vous demande de faire part de cette remarque au bureau de notre assemblée - prétendre qu'il y a amélioration des travaux du Sénat tant que nous serons écartelés entre le devoir de présence en séance publique et le devoir de présence en commission, c'est-à-dire tant que les séances publiques et les réunions de commission seront concomitantes.
Vous le savez, ceux d'entre nous qui n'assistent pas à une réunion de commission sont en quelque sorte signalés puisque, le lendemain, dans le compte rendu de la réunion, apparaissent les noms des présents, des absents et de ceux qui sont excusés.
En ce moment même, le président de la SNCF est entendu par la commission des finances avant que nous discutions le projet de loi relatif à cette très importante société nationale. Dans une heure, elle examinera un texte d'une portée majeure sur le budget communautaire et les perspectives financières. Alors, où faut-il être, ici ou en commission ?
Monsieur le président, il s'agit d'un sujet grave. Des journalistes éminents tirent argument de l'absence de nombreux sénateurs en séance - alors que nous sommes en commission - pour gloser sur l'absentéisme parlementaire. C'est donc l'image même du Parlement qui est atteinte du fait des conditions de travail qui nous sont imposées. Tant que ces dernières ne seront pas améliorées et qu'il ne nous sera pas possible d'échapper à ce dilemme, la présence soit en commission soit dans l'hémicycle, celui-ci sera vide, et l'opinion publique en déduira que le Parlement travaille peu ou mal. Et des journalistes de talent pourront parler d'absentéisme aggravé !
Après les propos très optimistes qu'a tenus tout à l'heure M. le président du Sénat, je vous demande très respectueusement, monsieur le président, d'inviter la prochaine conférence des présidents à réfléchir aux dispositions qu'il conviendrait de prendre, de manière que, dès la prochaine session, nous cessions d'être condamnés comme nous le sommes à ne pas être dans l'hémicycle, pour assister à la séance publique, à cause de la mauvaise organisation de nos travaux.
M. le président. Mon cher collège, bien sûr, je ferai part au bureau de vos propos, car c'est de lui que relèvent ces questions.
Je me permets simplement d'attirer votre attention sur le fait que, tout à l'heure, dans son intervention, le président du Sénat a précisément indiqué que ce problème de concomitance entre séance publique et réunions des commissions n'était pas réglé et qu'il fallait réfléchir aux moyens d'y remédier.

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