M. le président. Nous poursuivons l'examen des dispositions du projet de loi concernant l'agriculture, la pêche et l'alimentation.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Soucaret.
M. Raymond Soucaret. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'exercice du débat budgétaire, surtout quand il se place dans un cadre volontairement contraint, pourrait paraître décevant, en particulier lorsqu'il s'agit des crédits de l'agriculture.
Les marges de manoeuvre sont étroites, et l'on pourrait avoir le sentiment que les leviers sont ailleurs, à Bruxelles ou dans la fiscalité.
La place prépondérante de la politique agricole commune doit justement conduire à relativiser quelque peu l'examen de ce projet de budget pour 1997 : les retours communautaires, qui ont atteint 61 milliards de francs en 1995, constituent la majeure partie des concours publics à l'agriculture productive.
Votre présence à Bruxelles, monsieur le ministre, où vous savez vous montrer déterminé et pugnace, comme en atteste le combat victorieux que vous avez mené dans la crise de la vache folle, est donc extrêmement importante.
Avec un total de 35,22 milliards de francs, le budget du ministère de l'agriculture pour 1997 enregistre une légère diminution de 0,8 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1996. Hors subvention d'équilibre au BAPSA, il s'élève à 27,37 milliards, de francs, soit une baisse de 3,9 % ou de 1,1 milliard de francs en volume de crédits.
On peut évidemment regretter certaines suppressions de crédits, constater la très grande pesanteur des dépenses de fonctionnement ou des prélèvements forcés qui obère la capacité d'accompagnement économique de l'agriculture.
Mais il n'est pas de budget idéal, c'est-à-dire suffisant pour satisfaire toutes les demandes.
Celui-ci a le mérite de s'inscrire dans l'objectif de stabilité des dépenses de l'Etat, tout en respectant globalement les engagements pris lors de la conférence annuelle agricole et à l'occasion de la signature de la charte nationale de l'installation.
Lors de la première lecture à l'Assemblée nationale, les députés ont déjà amélioré le projet gouvernemental en abondant les crédits relatifs à la préretraite, à hauteur de 50 millions de francs, à la prime d'orientation agricole, à hauteur de 20 millions de francs, et en dotant le Fonds de gestion de l'espace rural de 100 millions de francs.
Néanmoins, il reste des points sur lesquels je souhaiterais présenter des observations.
Le premier point concerne le soutien à l'installation des jeunes, enjeu majeur pour le monde agricole.
Les crédits correspondent pour l'essentiel à la politique engagée, mais, dans un contexte de reprise des installations, il faudra veiller à conforter, dans les années à venir, les efforts en faveur du Fonds pour l'installation et le développement des initiatives locales et de la dotation aux jeunes agriculteurs.
Par ailleurs, on peut s'interroger sur la cohérence de la réduction des crédits destinés aux opérations groupées d'aménagement foncier, les OGAF, avec la priorité affichée pour l'installation. Ces derniers passent de 71,1 millions de francs en 1996 à 45,2 millions de francs, accusant ainsi une diminution de 37 %.
Or les OGAF sont l'occasion d'actions de restructuration profonde, qui facilitent et orientent la transmission des exploitations, ainsi que d'expériences innovantes, notamment en matière d'installation.
Cette nouvelle baisse pourrait remettre en cause l'émergence et la valorisation d'actions dont l'intérêt n'est plus à démontrer : les fermes relais, le fonds d'avance au fermage, les contrats de préinstallation, autant d'expériences nées dans le cadre des OGAF.
Enfin, l'atténuation du coût de la transmission des exploitations reste un dossier ouvert.
Le deuxième point que je souhaite développer constitue un autre enjeu important pour l'agriculture et répond à une demande sociale forte : il s'agit de la valorisation de l'espace rural.
Chacun s'accorde, en effet, à reconnaître que l'agriculture n'a plus pour seule mission de nourrir les hommes, mais de préserver les richesses naturelles, qu'il s'agisse de la qualité de l'eau, de la structuration des paysages, du maintien de la biodiversité ou de l'ouverture au public, et d'occuper le territoire en contribuant au développement rural.
Ici, les dotations prévues pour la gestion de l'espace et l'environnement ne sont pas à la hauteur de cet enjeu.
Je me féilicite de voir que le Fonds de gestion de l'équipement rural a été recadré dans une vocation exclusivement agricole et redoté de moyens, en première lecture, à l'Assemblée nationale.
En revanche, la décision d'abaisser de 57 % les crédits prévus au titre des mesures agri-envrironnementales ne permettra d'engager aucune action nouvelle pour 1997. S'il est vrai que les crédits n'ont été que partiellement consommés les années précédentes, il n'en reste pas moins qu'une dynamique est née, à laquelle les agriculteurs adhèrent aujourd'hui. Il serait important, dans l'avenir, de ne pas la décourager.
Pour ce qui concerne les crédits de mise aux normes des bâtiments d'élevage, les besoins de financement sont devenus tels, si l'on en juge la nouvelle estimation de l'INRA, et les retards dans la mise en oeuvre du programme se sont tant accumulés que l'on voit mal comment les moyens dont on s'est doté pourront permettre d'atteindre cet objectif avant des décennies. C'est la crédibilité d'un dispositif qui est en jeu alors que les éleveurs se sont massivement engagés dans ce progamme !
Enfin, j'en viens au troisième point qui doit faire la force de notre agriculture et lui donner confiance en elle-même : la valorisation de la production.
Cette politique a fait l'objet d'une priorité réaffirmée dans le projet de budget pour 1997 : les crédits consacrés aux contrôles et à la santé animale ainsi qu'à la maîtrise de la qualité des produits sont globalement reconduits. En outre, les moyens de la politique agroalimentaire, par le biais de la POA, ont été rehaussés de 20 millions de francs en première lecture à l'Assemblée nationale.
Cela sera-t-il suffisant, notamment en matière d'identification des bovins, compte tenu de l'enjeu pour l'élevage français dans la situation actuelle liée à la crise de l'ESB ?
Il y a aussi du travail en dehors des étables pour rassurer le consommateur échaudé ! Comment renforcer la traçabilité des produits de la ferme à l'assiette ? La transparence de l'information au consommateur est aujourd'hui un élément incontournable de la reconquête du marché.
La volonté de qualité et de fiabilité, le développement et la promotion des garanties officielles de qualité et d'origine doivent être accompagnés d'un réel effort budgétaire et d'une meilleure mobilisation des crédits des offices.
Malheureusement, le temps qui m'est imparti ne me permet pas d'aborder tous les sujets. Mon collègue Bernard Joly a traité d'autres domaines, en particulier celui des retraites, qui me tient à coeur. A ce propos, je tiens, monsieur le ministre, à vous remercier des propositions qui ont été formulées ce matin en réponse aux préoccupations évoquées par mon collègue, et cela sans charges supplémentaires.
Je terminerai en évoquant d'un mot le développement rural et l'enseignement privé agricole.
Les campagnes ne doivent pas devenir la cour de récréation des villes. C'est bien une dynamique pour un milieu qui a son identité propre que nous devons instaurer : nous voulons une campagne vivante.
Mais faire de la campagne un espace viable pour tous ses habitants exige que soient mises en place des activités diversifiées : installation de PME, maintien et implantation de services publics en matière d'enseignement, de santé ou de poste - par exemple, Itinéris devrait être accessible à tous, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui - réalisation ou entretien d'infrastructures de communication et de transport.
Nous devons veiller à ce que les crédits correspondants soient ouverts.
Pour ce qui concerne, enfin, le développement des établissements privés d'enseignement agricole, je m'inquiète de la limitation de la croissance des effectifs, qui devrait porter, semble-t-il, sur plusieurs années.
Cela paraît d'autant plus regrettable que René Rémond et Roger Fauroux ont souligné récemment la qualité et les bons résultats de cet enseignement, qui pourrait pourtant être remis en cause.
Pour l'heure, ce budget de l'agriculture répond à peu près globalement aux exigences de la situation, mais la loi d'orientation est très attendue. Monsieur le ministre, mes ches collègues, nous ne devons pas décevoir les agriculteurs, qui comptent sur nous. En tout état de cause, je voterai votre budget. (Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Grandon.
M. Jean Grandon. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, bien des orateurs ont déjà exposé en détail - et bien d'autres le feront sans doute après moi - l'évolution des crédits du ministère de l'agriculture.
Dans le temps qui m'est imparti, je voudrais d'abord vous dire que le projet de budget qui nous est présenté s'inscrit dans un objectif d'ensemble que nous partageons tous : il s'agit de répondre le plus souvent et le mieux possible aux problèmes de fond que rencontre notre agriculture.
Pour l'essentiel, d'ailleurs, ce budget reflète les décisions prises lors de la conférence annuelle agricole et de la signature de la charte d'installation.
Il ne résout pas pour autant toutes les préoccupations. Ce serait illusoire de le croire et de vous le faire croire, monsieur le ministre. Comment pourrait-il d'ailleurs en être autrement ?
Je reviendrai donc brièvement sur deux ou trois aspects qui, à mon sens, représentent la force et les enjeux de l'agriculture de demain.
J'évoquerai d'abord le problème de l'installation, dont la finalité est bien d'assurer la pérennité de notre tissu agricole.
Si les crédits prévus pour la dotation aux jeunes agriculteurs nous paraissent satisfaisants, si les moyens prévus au titre du FIDIL semblent, pour la première année de mise en place de cet outil, conformes à vos engagements, ils ne doivent pas être considérés sur le plan budgétaire comme un seuil plafond. Ils auront nécessairement à être abondés dans les années qui viennent si l'on veut que les actions de soutien à l'installation des jeunes s'inscrivent dans un objectif politique fort.
Un objectif politique fort, si l'on veut assurer, à terme, notre présence, notre compétitivité sur les marchés mondiaux et à l'intérieur de nos frontières, cela passe par un aménagement équilibré du territoire, la création d'emplois en milieu rural, et donc la valorisation de notre espace rural.
Mais, alors que nous dessinons les contours de l'agriculture souhaitée pour demain, comment ne pas évoquer celles et ceux qui ont exercé la profession et qui ont le sentiment d'être oubliés de tous ? Je veux parler de la retraite des agriculteurs et du niveau de ses prestations, notoirement insatisfaisant.
Chacun comprend qu'en pareil cas les attentes légitimes des uns ne correspondent pas aux contraintes financières du budget de l'Etat !
Chacun sait aussi que des efforts de rationalisation ont été menés par le ministère de l'agriculture dans ce domaine au cours des deux ou trois années écoulées.
En attestent l'exécution et la constante amélioration du budget annexe des prestations sociales agricoles depuis 1994, ainsi que les chiffres connus de 1996 : les dépenses seraient en léger retrait par rapport aux prévisions initiales, avec des recettes pratiquement stables.
Des progrès ont été réalisés. Ils existent avec, par exemple, l'augmentation des points acquis, qui profitera aux futurs retraités agricoles.
Mais que dire des autres, de la génération d'agriculteurs qui sont déjà en retraite et auxquels on oppose la modestie de leur cotisation pour justifier la faiblesse de leur allocation ? Nous avons envers eux un devoir de solidarité !
J'aborderai enfin, monsieur le ministre, le volet de l'hygiène et de la qualité alimentaires : votre projet de budget révèle l'importance et la priorité que vous entendez lui accorder.
La lutte contre les maladies des animaux, la promotion et le contrôle de la qualité sont érigés en principes et les crédits à cette fin confortés.
Qui se serait douté, il y a un an, à la même époque, que la France - et pas seulement elle - serait secouée par la crise de l'ESB ?
En frappant le secteur de la viande bovine, la maladie dite de la « vache folle » a généré des comportements différents chez le consommateur, qui entend maintenant connaître l'origine et le mode de fabrication de ce qu'il achète.
Elle a par ailleurs atteint de plein fouet l'une de nos grandes filières agricoles : la production bovine. Quelles garanties pouvons-nous apporter aux éleveurs afin de les aider à passer cette période difficile ?
Elle a, en outre, posé le problème de la fabrication des farines pour l'alimentation animale et, partant, du service de l'équarrissage.
En proposant de créer un service public déconcentré, en prévoyant de ne pas répercuter son coût de fonctionnement sur les éleveurs, en fixant l'application de cette mesure dès le 1er janvier prochain, vous répondez dans une large mesure à l'attente des acteurs de la filière bovine, qui n'auront pas - et ce n'est que justice - à supporter ou à partager une charge supplémentaire.
A partir de ces remarques, monsieur le ministre, et dans un souci bien compris de maîtrise de la dépense publique - maîtrise à laquelle nous souscrivons et à laquelle le ministère que vous dirigez apporte lui aussi son écot -, la réunion administrative des non-inscrits, au nom de qui je m'exprime, vous apportera son soutien et votera le projet de budget qui lui est soumis.
Il le fera parce qu'il reconnaît l'efficacité dont vous avez su faire preuve dans votre action depuis votre arrivée rue de Varenne, en particulier dans la gestion des dossiers les plus délicats.
Il le fera aussi parce que nous avons la conviction que les priorités de votre ministère s'inscrivent dans la dynamisation de notre agriculture au moment où elle s'apprête à franchir, dans un contexte de concurrence et de rigueur mêlés, le cap du troisième millénaire.
Il le fera, enfin, parce qu'il ne saurait y avoir de véritable politique d'aménagement du territoire, c'est-à-dire d'équilibre de développement entre les territoires de l'hexagone, sans la prise en compte de la spécificité et sans la préservation de notre espace rural, qui constitue, à bien des égards, notre héritage le plus précieux. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
(M. Jean Delaneau remplace M. René Monory au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. JEAN DELANEAU
vice-président

M. le président. La parole est à M. Mathieu.
M. Serge Mathieu. Monsieur le ministre, permettez-moi, tout d'abord, de rendre hommage à la pertinence des choix qui ont guidé la préparation de votre budget. Vous êtes en effet parvenu à concilier deux actions a priori difficiles à mener de pair : contribuer à la maîtrise des dépenses publiques et confirmer les priorités de l'action du Gouvernement en matière de politique agricole.
Le budget de votre ministère s'élève au total à 35,22 milliards de francs, soit une légère baisse de 0,8 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1996. Hors subvention d'équilibre au BAPSA, le budget de l'agriculture atteint 27,37 milliards de francs, en baisse de 3,9 %, ce qui apporte une contribution de 1,1 milliard de francs à l'effort de limitation des dépenses de l'Etat.
Encore convient-il de prendre en compte le report ou l'achèvement de certains programmes et la baisse des charges de la bonification des prêts, ces mesures aboutissant à ce que le budget de votre administration progresse de 0,8 % et marque une baisse limitée à 2,4 %, si l'on ne tient pas compte de la subvention d'équilibre au BAPSA !
Je tiens à souligner que la contribution de votre ministère à la maîtrise des dépenses budgétaires s'accompagne d'un allégement des prélèvements obligatoires, tels que les taxes prélevées sur les produits au profit du BAPSA et la suppression de part départementale de la taxe sur le foncier non bâti.
Il convient, en outre, de préciser que les crédits du ministère de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation ne représentent que 22,5 % des concours publics affectés à l'agriculture ; il faut en effet tenir compte des versements effectués au bénéfice de la France par l'Union européenne, qui ont atteint 61 milliards de francs en 1995.
Parmi les priorités de la politique agricole qui sont confirmées par les choix budgétaires, je relève, bien entendu, la poursuite de l'effort en faveur de l'installation des jeunes et de leur formation. Les crédits correspondants s'élèvent à 874 millions de francs, soit une progression de 2,2 %, qui devrait permettre l'installation de 9 500 jeunes agriculteurs bénéficiaires de la dotation aux jeunes agriculteurs, la DJA.
Toujours en matière d'installation, je me félicite que le fonds pour l'installation et le développement des initiatives locales, le FIDIL, soit doté de 150 millions de francs, ce crédit pouvant être abondé par les collectivités territoriales.
Autre priorité de l'action de votre ministère, l'enseignement agricole et la formation professionnelle, qui mobilisent 6 138 millions de francs, soit une augmentation de 2,3 %, dont 5 979 millions de francs, soit une hausse de 2,6 %, pour le seul enseignement agricole.
Le secteur public bénéficie de quatre-vingt créations de postes de professeurs et de sept créations de postes d'autres fonctionnaires.
L'enseignement agricole privé perçoit une dotation de 2 656 millions de francs, dont le rythme d'augmentation réalise le dispositif de rattrapage conduit sur la période 1996-1999, conformément aux dispositions de la loi de 1984 sur l'enseignement agricole.
Au cours de votre audition, le 22 octobre 1996, par la commission des affaires économiques et du plan, vous avez, monsieur le ministre, regretté une dérive qui pourrait conduire, à terme, à la disparition de la spécificité de l'enseignement agricole. Je ne partage pas totalement ce point de vue ; je ne souscris pas non plus à la limitation à 2 % de la progression des effectifs de l'enseignement agricole.
Je constate dans ma région que les anciens élèves des établissements agricoles, tant publics que privés, trouvent facilement un emploi dans le secteur agricole et agroalimentaire et dans les métiers de l'animation et de l'aménagement rural.
Je souscris à l'objectif que vous avez exprimé, tendant à la conclusion de contrats sur l'évolution des effectifs et sur les filières dans un cadre régional ou même dans chaque établissement.
Dans le secteur de l'enseignement agricole privé, je tiens à saluer l'action des maisons familiales rurales, fondée sur un enseignement en alternance qui permet de maintenir les élèves au contact de leur milieu d'origine. Il est nécessaire, à cet égard, qu'en matière de formation des enseignants et de bourses d'études les maisons familiales soient traitées à parité avec les autres établissements d'enseignement agricole.
Votre projet de budget avait soulevé certaines inquiétudes qui ont été levées, lors du débat à l'Assemblée nationale, grâce à l'adoption d'amendements auxquels vous avez bien voulu donner votre accord.
Je citerai, à cet égard, les 50 millions de francs supplémentaires attribués au financement des préretraites agricoles, ce qui permettra de maintenir le dispositif actuel, c'est-à-dire l'âge de cinquante-cinq ans requis des bénéficiaires, jusqu'au 15 octobre 1997.
Je me réjouis, en outre, que nos collègues députés aient rétabli 100 millions de francs au bénéfice du fonds de gestion de l'espace rural, le FGER, qui, dans le projet de budget initial, ne comportait pas de dotation.
Enfin, j'enregistre comme une mesure particulièrement favorable pour le secteur agroalimentaire l'affectation de 20 millions de francs supplémentaires au financement des primes d'orientation agricoles.
Je relève que les crédits affectés aux offices agricoles dans le budget de 1997 se montent à 3,1 milliards de francs, soit une diminution de 6,2 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1996. Cette diminution résulte de l'étalement des contrats de plan sur une année supplémentaire, pour un montant de 176,3 millions de francs, et de la diminution des crédits affectés à la cessation de production laitière.
S'agissant de l'office national interprofessionnel des vins, l'ONIVINS, je rappelle que les crédits versés se sont élevés à 846 millions de francs en 1993, à 668 millions de francs, en 1994, et à 489 millions de francs en 1995.
Je forme le voeu que ce tassement des crédits affectés aux offices, en particulier à l'office des vins, ne compromette pas les actions de restructuration du vignoble et d'organisation du marché mises en oeuvre par l'ONIVINS.
Je voudrais à présent, monsieur le ministre, attirer votre attention sur deux dispositions du projet de loi de finances pour 1997 relatives à la fiscalité agricole, et qui figurent à l'article 74.
En premier lieu, il est prévu de ne plus prendre en compte les exploitants sociétaires de GAEC, groupements agricoles d'exploitation en commun, âgés de plus de soixante ans dans le quotient qui permet de calculer si les sociétaires dudit GAEC atteignent ou non le seuil d'imposition au bénéfice réel ; cette mesure est contestable dès lors que certains sociétaires de GAEC âgés de plus de soixante ans qui ne réunissent pas assez d'années de cotisations pour percevoir une retraite suffisante ne souhaitent pas prendre leur retraite avant soixante-cinq ans. Elle est donc de nature à supprimer, dans certains cas, le principe de la transparence fiscale.
L'article 74 du projet de loi de finances prévoit, en outre, de rendre obligatoire l'imposition au bénéfice réel de tous les exploitants bailleurs ou preneurs qui concluent un bail à métayage, à partir du 1er janvier 1997.
Doit-on considérer que le renouvellement d'un bail à métayage peut être assimilé à la conclusion d'un tel bail, ce qui aboutirait à assujettir tous les bailleurs et tous les preneurs au régime du bénéfice réel à l'issue des neuf prochaines années ?
Il conviendrait donc, monsieur le ministre, de modifier, s'il en est encore temps, les dispositions de l'article 74 du projet de loi de finances.
Dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, il avait été prévu une augmentation de 17,1 % des droits de consommation applicables aux alcools forts, étant précisé que le vin n'était pas concerné. Je me réjouis que nos collègues députés, le 29 octobre dernier, aient ramené cette majoration à 4,97 %.
Sans méconnaître la nécessité de rétablir l'équilibre du budget social de la nation, je crois devoir souligner que la taxation des alcools forts doit rester modérée, surtout s'agissant du cognac et de l'armagnac, qui connaissent depuis plusieurs années un certain marasme. Il y a en effet sept ans de stocks dans les chais.
Dans le domaine de la politique agricole commune, nous sommes toujours dans l'attente de la réforme de l'organisation commune des marchés. J'ai bien noté, toutefois, monsieur le ministre, que, lors de la négociation du paquet-prix 1996-1997, en juillet dernier, vous aviez obtenu deux dispositions transitoires particulièrement importantes pour la viticulture française.
En premier lieu, le régime d'arrachage a été prolongé pour deux ans ; mais il n'est applicable qu'aux régions désignées par chaque Etat membre, la surface attribuée à la France étant de 3 895 hectares par an.
En second lieu, de nouvelles plantations ont été autorisées, au cours de la période transitoire, pour la production de vins de qualité et de vins de pays, la surface dont bénéficie la France à cet égard étant de 2 584 hectares pour les deux campagnes à venir.
Permettez-moi, monsieur le ministre, d'attirer votre attention sur la nécessaire adaptation de la fiscalité agricole. En ce qui concerne les fonds propres des exploitations, le dispositif de la réserve spéciale d'autofinancement ne présente guère d'intérêt dans les entreprises dont le bénéfice supporte un taux marginal de prélèvement proche de 33,33 % ou inférieur. Les simulations réalisées montrent en effet que cette mesure ne commence à être bénéfique qu'au-delà d'un seuil de 500 000 francs de résultats, dans le cas d'un exploitant soumis à l'impôt sur le revenu et bénéficiant d'un quotient familial de trois parts.
Le régime de la déduction fiscale doit être amélioré pour que lui soit assurée une plus grande efficacité. En effet, les investissements dans les entreprises agricoles ou viticoles sont peu rentables, tout particulièrement dans les petites entreprises faiblement compétitives.
Ce manque de rentabilité doit être complété par un régime fiscal spécifique pour conforter la situation financière des exploitations viticoles ; les exploitants doivent être incités à placer leurs capitaux dans leur propre entreprise. A cet effet, la rémunération de ces capitaux ne doit pas être plus lourdement taxée que la rémunération des capitaux investis dans des placements financiers extérieurs. J'ai bien noté, à cet égard, que le projet de loi de finances pour 1997 comporte un accroissement de la portée de la déduction fiscale pour investissement en matière de bénéfices agricoles.
S'agissant de la transmission des exploitations, l'accent doit être mis sur la transmission à titre gratuit, mode traditionnel de transmission des exploitations viticoles, qui permet de sauvegarder le caractère familial. Dans cette perspective, la perception des droits de mutation sur la valeur vénale des biens transmis doit être exclusive de toute imposition au titre des plus-values.
Je citerai, enfin, la nécessité de favoriser dans les exploitations viticoles le développement d'activités accessoires de nature à conforter leur rentabilité, cette diversification ne devant pas être entravée par un formalisme lourd et coûteux.
Je sais, monsieur le ministre, que vous avez pris en compte cette demande déjà ancienne en déposant, en 1993, une proposition de loi.
Compte tenu du recours indispensable à des travailleurs occasionnels dans la viticulture - 189 000 en 1993 - il me semble nécessaire d'adapter les modalités de calcul des cotisations sociales affectées au financement de la retraite et du chômage telles qu'elles ont été fixées par un décret du 9 mai 1995.
La promotion de la qualité des vins français constitue une priorité, tant en ce qui concerne le marché intérieur que pour le développement de nos exportations. A cet égard, je tiens à saluer le rôle très complémentaire que remplissent l'INAO, d'une part, les syndicats de défense des appellations, d'autre part. S'agissant des syndicats de défense des appellations, je crois que les pouvoirs publics doivent reconnaître le rôle éminent, voire exclusif, des syndicats majoritaires. Une telle mesure pourrait figurer dans le projet de loi d'orientation agricole.
Monsieur le ministre, je crois devoir attirer une fois encore votre attention sur l'irritation persistante, au sein de la filière viticole, provoquée par la loi Evin.
Je passe sur ce sujet pour pouvoir respecter le temps de parole qui m'a été imparti.
J'en viens, monsieur le ministre, aux performances de notre viticulture à l'exportation en 1995.
Malgré le boycott occasionné par la reprise des essais nucléaires, les exportations de vins et spiritueux ont pratiquement atteint leur niveau de record de 1991, avec 34,5 milliards de francs, soit une hausse de 1,5 % par rapport à 1994. La fédération des exportateurs de vins et spiritueux évalue toutefois à 750 millions de francs les pertes occasionnées par le boycott des produits français. L'exportation des vins représente 22,5 milliards de francs, soit une hausse de 2,2 % et de 4,9 % en valeur.
Les ventes de spiritueux se sont élevées à 12 milliards de francs, soit une hausse de 17 % imputable au développement du marché des alcools à bas prix, comme le confirme la baisse de 4,7 % en valeur de ces mêmes exportations.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi d'évoquer la récolte de 1996.
Selon les estimations de l'ONIVINS, elle approcherait 59 millions d'hectolitres, contre 55,6 millions en 1995. La récolte de 1996 pourrait atteindre 24 millions d'hectolitres de vins de qualité, 22 millions d'hectolitres de vins de table et 12 millions d'hectolitres de vins destinés à la production de cognac et d'armagnac.
Il y a lieu de souligner que les autres pays européens bénéficient d'une récolte importante, ce qui permet de prévoir un excédent compris entre 15 millions et 20 millions d'hectolitres.
Les vendanges étant terminées - j'en termine moi aussi ! - on peut d'ores et déjà constater, pour s'en féliciter, que l'année 1996 sera un bon millésime, comparable à 1990.
Est-il besoin de souligner, monsieur le ministre, la contribution de la viticulture à l'équilibre de notre commerce extérieur et au rayonnement gastronomique et culturel de la France dans le monde ? (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)

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