M. le président. M. André Dulait souhaite appeler l'attention de M. le ministre de l'aménagement du territoire, de la ville et de l'intégration sur l'engagement pris dans la loi d'orientation du 4 février 1995.
Dans son article 61, relatif à des mesures spécifiques à certaines zones prioritaires, il est précisé que dans un délai de dix-huit mois - aujourd'hui écoulé - une loi doit compléter les mesures prévues en faveur des zones de revitalisation rurale.
En effet, après la promulgation de la loi du 14 novembre 1996 relative à la mise en place du pacte de relance pour la ville, il apparaît plus que jamais nécessaire, pour les représentants du territoire, d'engager rapidement des actions permettant d'assurer aux habitants des zones de revitalisation rurale des conditions de vie équivalentes à celles qui ont cours sur les autres parties du territoire.
Toutefois, il s'interroge sur les multiples mesures d'exonération de charges, notamment de la taxe professionnelle, qui tendent à faire de notre pays une vaste zone franche avec quelques territoires ruraux soumis à la loi commune. C'est ainsi que le quatorzième rapport du conseil des impôts constate une réelle inégalité devant l'impôt entre communes riches et communes pauvres, à laquelle s'ajoute une multiplicité de dérogations.
Ce même rapport indique que 2,1 millions d'entreprises sont redevables de la taxe professionnelle, tandis que 1,5 million en sont exonérées.
C'est la raison pour laquelle il souhaite savoir, d'une part, si une véritable réforme de la fiscalité préservant les libertés communales et l'esprit de la décentralisation va enfin voir le jour et, d'autre part, quelles mesures incitatives sont envisagées pour défendre et maintenir les activités en zone rurale. (N° 570.)
La parole est à M. Dulait.
M. André Dulait. Avant d'exposer ma question, je souhaite faire une brève citation : « On ne peut pas faire un pas dans ce pays sans y trouver des lois différentes, des usages contraires, des privilèges, des exemptions, des affranchissements, des droits et des prétentions de toute espèce, et cette dissonnance, digne des siècles de la barbarie et de l'anarchie, complique l'administration, interrompt son cours, embarrasse ses ressorts et multiplie partout les frais et les désordres. » Voilà ce que disait Alexandre de Calonne, contrôleur général du Trésor, en... 1787. (Sourires.)
La promulgation de la loi du 14 novembre 1996 relative à la mise en place du pacte de relance pour la ville est de plus en plus nécessaire.
Il convient également d'engager rapidement des actions permettant d'assurer aux habitants des zones de revitalisation rurale des conditions équivalentes à celles qui ont cours sur les autres parties du territoire. Cela était prévu par l'article 61 de la loi, qui précisait que, dans un délai de dix-huit mois - aujourd'hui écoulé - il convenait de compléter les mesures figurant dans le texte.
Toutefois, je ne peux m'empêcher à mon tour de m'interroger sur les multiples mesures d'exonération de charges qui tendent à faire de notre pays une vaste zone franche, avec seulement quelques territoires soumis à la loi commune.
A l'appui de ma réflexion, le quatorzième rapport du Conseil des impôts constate une réelle inégalité devant l'impôt, en particulier en ce qui concerne la taxe professionnelle. Il relève à cet égard que 2,1 millions d'entreprises sont redevables de cette taxe, alors que 1,5 million en sont exonérées.
C'est la raison pour laquelle je souhaiterais savoir, d'une part, si une véritable réforme de la fiscalité préservant les libertés communales et l'esprit de la décentralisation va voir le jour et, d'autre part, quelles mesures incitatives votre ministère envisage de prendre pour défendre et maintenir les activités en zone rurale.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gaudin, ministre de l'aménagement du territoire, de la ville et de l'intégration. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, dès mon arrivée au Gouvernement, je me suis employé à ce que toutes les mesures prévues par la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire du 4 février 1995 en faveur de nos zones rurales entrent en vigueur.
Cet objectif est aujourd'hui atteint et représente, pour la seule année 1997, un effort de l'Etat estimé à un milliard de francs pour les zones de revitalisation rurale, auquel s'ajoute 1,5 milliard de francs pour les territoires ruraux de développement prioritaire.
Je précise à cet égard que, constatant que le dispositif de la loi du 4 février 1995 comportait des lacunes - que la Haute Assemblée et vous-même aviez d'ailleurs signalées - j'ai étendu l'exonération des cotisations de sécurité sociale pour l'embauche du premier au cinquantième salarié en l'élargissant à l'ensemble des entreprises, quel que soit leur statut juridique.
Enfin, conformément à l'article 61 de la loi d'orientation, je prépare un plan pour l'avenir du monde rural. Ce plan est une nécessité. Je ne suis pas de ceux qui considèrent que la concentration urbaine doit se poursuivre. Je ne suis pas non plus de ceux qui considèrent que le déclin de nos campagnes est irréversible.
Le plan que j'ai préparé s'articule autour de quatre thèmes principaux : premièrement, maintien et développement des activités économiques au moyen de discriminations fiscales et sociales destinées particulièrement aux petites entreprises, quel que soit leur secteur d'activité ; deuxièmement, amélioration de l'offre de logements par la réhabilitation du bâti existant ; troisièmement, présence de services publics de qualité ; quatrièmement, organisation du territoire, notamment par les pays - démarche souple et volontaire permettant de fédérer les initiatives autour d'un projet de développement local - et soutien aux petites villes, qui forment l'armature des espaces ruraux.
Ce n'est pas une loi-cadre, ce n'est pas une loi similaire à la loi d'orientation du 4 février 1995. Il s'agit d'apporter un certain nombre d'avantages au monde rural. Compte tenu de l'effort que le Gouvernement a réalisé en faveur des banlieues défavorisées de nos grandes villes, un effort doit être fait en faveur de la France rurale. En tout cas, c'est ma conception.
Je ne vous cache pas que j'ai du mal à obtenir les crédits nécessaires, eu égard à la situation dans laquelle nous nous trouvons, pour faire avancer mon projet de plan en faveur du monde rural et que je compte sur l'appui de la Haute Assemblée pour que tout le monde soit bien conscient de cette nécessité.
Quant aux inégalités dans la répartition de l'assiette de la taxe professionnelle chacun sait qu'elles se répercutent sur les taux, elles confèrent aux collectivités riches la possibilité d'attirer de façon privilégiée des activités.
Pour traiter cette question, le Gouvernement a décidé de mettre en place un groupe de travail, qui sera présidé par votre collègue M. Christian Poncelet.
Je suis pour ma part persuadé que la solution consiste à favoriser l'unification des taux de taxe professionnelle sur des territoires économiquement pertinents. Cela me paraît être la meilleure façon de favoriser la mutualisation des recettes fiscales. Mais, pour préserver les libertés communales et les principes de la décentralisation, auxquels vous êtes attaché, monsieur le sénateur, cette solution devra reposer sur le volontariat et l'initiative des élus locaux, en évitant toutefois que les conservatismes ne conduisent à l'immobilisme.
En effet, il est des exemples où l'on a pu constater une telle dérive.
Quittons la France rurale, qui nous est chère, et considérons un instant les grandes cités urbaines. Le général de Gaulle avait voulu, en 1966, que soient mises en place quatre communautés urbaines. Or le maire de Marseille de l'époque - personnage politique connu - s'était obstinément refusé à créer une communauté urbaine, parce qu'il lui déplaisait de siéger aux côtés des maires des communes voisines de la grande ville de Marseille, qui étaient soit de droite, comme on dit communément, soit communistes, ce qui lui déplaisait encore davantage ! (Sourires.) Moyennant quoi, on n'a pas créé de communauté urbaine à Marseille !
Savez-vous, monsieur Dulait, que, de 1966 à aujourd'hui, on a mis en place seulement onze communautés urbaines ?
On parle beaucoup du volontariat, on est toujours pour, mais il ne faudrait pas que, sans cesse, dans ce pays, le volontariat serve d'alibi à l'immobilisme !
Telle n'est pas votre conception ; telle n'est pas la conception de la Haute Assemblée. Si l'on veut trouver les conservateurs, c'est quelquefois ailleurs qu'il faut les chercher,...
M. Claude Billard. Faux !
M. Jean-Claude Gaudin, ministre de l'aménagement du territoire, de la ville et de l'intégration. ce n'est pas forcément à la Haute Assemblée ! (Rires et applaudissements sur les travées de l'Union centriste et du RPR.)
M. André Dulait. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Dulait.
M. André Dulait. Je vous remercie, monsieur le ministre, de l'ensemble de ces informations, en particulier concernant le plan qui est en préparation et dont j'espère que nous aurons l'occasion de débattre.
Soyez assuré que, pour ma part, et avec le groupe de l'Union centriste, je défendrai ces positions.
Quant au conservatisme et au volontariat, sachez que le volontariat existe, particulièrement dans les zones rurales ; c'est en elles que vous trouverez des partenaires efficaces soit parce qu'elles sont peut-être plus concernées par le développement, soit parce qu'elles sont peut-être plus inquiètes que certaines zones urbaines où les questions se posent différemment. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste et du RPR.)

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