M. le président. La parole est à M. Fayolle.
M. Gérard Fayolle. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Les commissions administratives se réunissent actuellement dans les départements pour définir la nouvelle carte scolaire et statuer sur le nombre de postes d'enseignants à la prochaine rentrée.
Dans le même temps, l'inquiétude des parents d'élèves, des personnels de l'enseignement et des élus locaux se manifeste, comme chaque année à la même époque, à la perspective de nouvelles fermetures de classes.
Nous savons bien que vous devez, monsieur le ministre, tenir compte à la fois des impératifs budgétaires et de l'évolution démographique. Certes, le seuil des effectifs qui détermine les services du ministère de l'éducation nationale dans leurs appréciations a été abaissé à vingt-cinq élèves par classe.
Néanmoins, il apparaît que les fermetures de classes concernent particulièrement les zones rurales les moins favorisées. En disant cela, je me réfère aux dix-sept suppressions de postes envisagées pour la prochaine rentrée en Dordogne qui touchent, en majorité, des petites communes.
Les fermetures de classes évoquées risquent d'accentuer la désertification de nos campagnes, alors même que sont prises des initiatives tendant, par ailleurs, à revitaliser nos zones rurales.
Mme Hélène Luc. Il n'y a pas que dans les campagnes !
M. Gérard Fayolle. A l'instar de ce qui a été entrepris, dans certains cas, pour le maintien des bureaux de poste et des trésoreries, ne pourrait-on pas envisager le gel des décisions de fermetures de classes dans les communes les plus fragiles ? (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François Bayrou, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur Fayolle, permettez-moi, tout d'abord, de vous saluer, puisque c'est la première fois que j'ai l'occasion de vous répondre dans cette enceinte. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. Philippe François. Ce n'est pas la dernière !
M. François Bayrou, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Voilà qui explique aussi, monsieur Fayolle, que vous n'ayez pas pu assister aux précédents débats sur ce sujet. Vous ne pouvez donc pas savoir que la décision que vous évoquez a été prise depuis longtemps. En effet, depuis quatre ans, nous avons mis en place un moratoire pour les fermetures d'écoles dans le monde rural. Depuis lors, aucune école en France n'a été fermée contre l'avis des élus locaux. Il est vrai que ce moratoire coûte plus de six cents postes au ministère de l'éducation nationale. C'est dire qu'il est respecté et lourd de conséquences.
Aucun gouvernement, pas plus celui-ci que ceux qui l'ont précédé ou qui lui succéderont, ne peut aller à l'encontre des données démocraphiques. (Exclamations sur les travées socialistes.)
M. Jacques Mahéas. On n'en sait rien !
M. François Bayrou, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Or celles-ci se traduisent aujourd'hui par une diminution de plusieurs centaines de milliers d'élèves dans nos écoles. Ainsi, votre seul département enregistre une diminution de huit cents élèves en deux rentrées. Personne ne peut ignorer cette baisse démographique, ni l'impératif qui consiste à transférer à des départements qui connaissent une croissance démographique un certain nombre de moyens en provenance de départements qui, eux, enregistrent une baisse démographique.
Cela dit, nous veillons au respect de tous les impératifs. Après vous, j'en citerai quelques-uns.
Premièrement, à la rentrée prochaine, l'effectif des classes de maternelle en zone d'éducation prioritaire ne dépassera pas vingt-cinq élèves : la priorité est donc donnée aux zones d'éducation prioritaire.
Deuxièmement, nous pourrons également décharger de cours les directeurs des écoles qui comprennent six classes complètes. Nous pourrons même commencer de le faire pour les directeurs des écoles qui comptent cinq classes. Ainsi, les moyens offerts aux directeurs seront plus importants.
Troisièmement, l'encadrement continuera à être amélioré. Dans votre département, l'an prochain, on comptera un maître pour dix-sept élèves. Par conséquent, ce n'est pas l'encadrement qui diminue, puisqu'il ne suit pas la baisse démographique.
L'amélioration de l'encadrement qui est l'un de nos impératifs, est donc poursuivie en dépit de la baisse démographique dont nous devons tenir compte. Cette situation, vous l'avez vous-même reconnu, se reproduit tous les ans. Nous avons fait en sorte que le plus de moyens disponibles soient mobilisés pour les classes. C'est aussi un moyen d'assurer le service public. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et de Républicains et Indépendants ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme Marie-Claude Beaudeau. Les Périgourdins ne se satisfairont pas de votre réponse.
M. Josselin de Rohan. Occupez-vous d'abord de votre département !
Mme Hélène Luc. Justement, elle le fait bien !

SORT DE DEUX FRANÇAIS DÉTENUS EN AFGHANISTAN

M. le président. La parole est à M. Gerbaud.
M. François Gerbaud. Ma question s'adresse à Mme le secrétaire d'Etat chargé de la francophonie.
Au-delà des agitations et des interrogations quotidiennes, ma question, madame le secrétaire d'Etat, nous conduit, au terme d'une sorte de « voyage au bout de la nuit », en un pays si cruellement étrange qu'on le voudrait emprunté à l'imaginaire.
M. Ivan Renar. Céline doit se retourner dans sa tombe !
M. François Gerbaud. Etrange, ce pays où, en dépit ou au-delà d'une religion et de ses rigueurs, les femmes qui ne portent pas le tchador sont considérées comme « à demi-vêtues », indécentes, et comme telles condamnées.
Etrange, ce pays où il leur est formellement interdit de fréquenter les étrangers, même lorsqu'ils y sont associés dans le cadre d'actions humanitaires.
Ce pays n'est pas imaginaire, c'est l'Afghanistan des Taliban, ces barbus de l'extrême et de l'excès. Nous aurions pu les laisser au jugement de l'Histoire si deux jeunes Français, membres de l'organisation humanitaire Action internationale contre la faim, dont le seul objectif est de venir en aide aux jeunes Afghans, n'avaient pas été pris en otage aux motifs qu'ils avaient transgressé ces interdits.
Ils ont en effet réuni, puis photographié des femmes afghanes, associées à leurs efforts. Le 22 février, ils ont été, pour ce crime, arrêtés, jetés en prison, et sur eux pèse l'inquiétante et lourde menace du verdict de la Cour suprême d'Afghanistan, devant laquelle ils sont appelés à comparaître.
Sur leur tête pèse la plus dramatique des menaces, lorsqu'on sait que le mollah Mohammed Rabbani, le numéro 2 du régime taliban, n'a pas hésité à déclarer mardi dernier : « Si j'exprime mon opinion personnelle, je ne vois aucune raison pour les exécuter. » Cette sentence en demi-teinte signifie-t-elle que d'autres pensent différemment ?
Il est choquant, et c'est le moins qu'on puisse dire, que l'arbitraire d'un régime conduise à la détention de deux jeunes Français, dont l'unique objectif est de lutter contre la malnutrition des enfants afghans ; c'est infiniment choquant lorsqu'on sait que ce régime a été mis en place pour soutenir des intérêts pétroliers et gaziers, ce qui explique, sans pour autant bien évidemment le justifier, le jeu dérisoire, illusoire et dangereux des Américains.
Madame le secrétaire d'Etat, je sais que le Gouvernement français, par le biais de notre chargé d'affaires à Kaboul, tente depuis deux semaines d'obtenir la libération de nos deux jeunes compatriotes.
Comment sont-ils traités et quelles sont les démarches entreprises par le Gouvernement pour faire cesser cette situation intolérable, inexplicable et humiliante pour la France ? (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Margie Sudre, secrétaire d'Etat chargé de la francophonie. Monsieur le sénateur, ainsi que vous l'avez souligné, notre chargé d'affaires à Kaboul ainsi que les services du ministère des affaires étrangères concernés sont très mobilisés par l'affaire de nos deux compatriotes membres de l'organisation non gouvernementale Action internationale contre la faim, l'AICF, qui nous préoccupe beaucoup.
A Paris, nous maintenons des contacts étroits avec les responsables de l'AICF. A Kaboul, notre chargé d'affaires rencontre nos deux compatriotes tous les deux jours. Il leur remet des rations alimentaires, des livres et des lettres. Ils sont en bonne santé et ont gardé un bon moral.
Ils peuvent écrire sans que le contenu de leurs lettres soit contrôlé. Ils n'ont pas été maltraités. Les deux dirigeants d'AICF, arrivés le lundi 3 mars, les ont également rencontrés. Ils reçoivent, par ailleurs, des visites de leurs collègues du Comité international de la Croix-Rouge, le CICR, des journalistes et de leurs amis des ONG. Nos deux compatriotes, selon des informations émanant de plusieurs sources, ne participaient pas à la réception qui avait été organisée par l'AICF.
Dès le début de cette affaire, la diplomatie française a été extrêmement active. Nous avons mobilisé tous les pays amis ainsi que toutes les organisations susceptibles de nous apporter leur concours. Nous restons en contact permanent avec les responsables talebs à Kaboul, de même qu'avec tous ceux qui pourraient avoir une influence sur eux pour parvenir à la libération la plus rapide possible et sans jugement de nos compatriotes car nous sommes convaincus que rien ne peut leur être reproché.
Le secrétaire général des Nations unies, son représentant spécial pour l'Afghanistan, l'Union européenne, à travers les démarches des membres de la troïka auprès des représentants des Talebs à Islamabad et celle de notre chargé d'affaires à Kaboul au nom des Quinze, sont intervenus auprès des Talebs en faveur de la libération de nos compatriotes. Nous avons des contacts réguliers avec les Talebs, par le biais notamment de notre chargé d'affaires à Kaboul.
Nous attendons maintenant une décision rapide des Talebs concernant la libération de nos compatriotes, mais je puis vous assurer que nous maintenons notre vigilance et poursuivons quotidiennement notre action. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

DROITS DE LA FEMME