M. le président. La parole est à M. Lombard.
M. Maurice Lombard. Ma question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères, qui, je le regrette, n'a pu être présent parmi nous, et porte sur la situation en Israël et dans les territoires palestiniens.
Au moment de la signature de l'accord d'Hébron, qui avait un caractère symbolique, pour les questions qui se posaient entre M. Arafat et le gouvernement israélien, il est apparu une détente dans les relations entre ces deux parties, alors que la situation est extrêmement préoccupante pour la paix, dans cette partie du monde.
Or, depuis, nous nous sommes aperçus que ces espoirs étaient en grande partie menacés, d'abord, par la réalisation d'une importante colonie juive par le gouvernement israélien entre la partie palestinienne de Jérusalem-Est et Bethléem, qui crée une sorte de coupure entre deux zones palestiniennes.
On peut donc désormais craindre que ne se produisent à nouveau des affrontements sanglants entre les deux communautés.
Pouvez-vous dire, monsieur le ministre, comment la France suit l'évolution de la situation ?
Peut-on, par ailleurs, espérer que la pression internationale conduise M. Netanyahou à abandonner le projet dont je viens de parler ?
M. René Régnault. C'est une bonne question !
M. Maurice Lombard. Peut-on espérer, en outre, que l'armée et la police israéliennes abandonneront prochainement le blocus des villes qui ont été confiées à l'Autorité palestienne par les accords d'Oslo et qu'elles évacueront les territoires ruraux.
Enfin, est-il permis d'espérer, toujours dans le même esprit de détente, monsieur le ministre, que le gouvernement israélien accepte de lever les obstacles qu'il a dressés à l'exploitation de l'aéroport de Gaza...
Mme Marie-Claude Beaudeau. Très bien !
M. Maurice Lombard. ... ainsi qu'à la construction du port de Gaza, à laquelle la France, avec d'autres partenaires, s'est engagée à participer financièrement ? (Applaudissements sur quelques travées du RPR, de l'Union centriste et du RDSE, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste et du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. le ministre. M. Michel Barnier, ministre délégué aux affaires européennes. Monsieur le sénateur, votre question me permet de faire le point sur une situation qui, bien qu'elle soit plus lointaine que d'autres, concerne notre pays et l'ensemble de l'Union européenne.
Il est clair qu'il existe à la fois des risques d'instabilité tout autour de la Méditerranée, et des chances de stabilité, car ce sont effectivement des chances pour nous, de ce côté-ci de l'Europe.
Vous avez fait part de votre inquiétude, monsieur Lombard, et il est vrai qu'il existe aujourd'hui davantage de motifs d'inquiétude que de raisons d'espérer.
Et pourtant ! l'espoir doit être préservé, au moins à terme, puisque, au fond, le processus de paix est irréversible. En effet, tous les protagonistes, qu'ils soient Syriens, Libanais, Israéliens ou Palestiniens, nous le savons bien, veulent, ils le disent, que ce processus de paix aboutisse.
Mais, pour le court terme, il y a tout ce que vous avez dit, en particulier la grande inquiétude engendrée par la décision du Premier ministre, M. Netanyah ou, de construire une nouvelle colonie de peuplement à Har Homa.
Cette décision est tout à fait dommageable, malheureuse, non seulement parce qu'elle remet en cause un statu quo, parce qu'elle nous paraît contraire à la légalité internationale, mais encore parce qu'elle crée un climat dont nous n'avions pas vraiment besoin et, surtout, comme vous l'avez souligné, parce qu'elle brise un élan qui avait été créé, il y a quelques semaines, par l'accord d'Hébron.
C'est le premier et le plus grave de nos sujets de préoccupation. Au-delà, et à côté, monsieur Lombard, il y a le problème de la Syrie et du Liban.
Là aussi, nous avons des sujets de préoccupations, puisque les négociations n'ont pas repris, que la tension reste vive au Sud-Liban et qu'en dépit du travail tout à fait remarquable du groupe de surveillance qui a été institué par l'arrangement du 26 avril 1996 - et vous connaissez le rôle de la France dans ce sens - des risques existent. Rien ne peut remplacer, là aussi, une vraie paix. Nous ne devons pas pour autant nous décourager, mesdames, messieurs les sénateurs.
Vous m'avez en outre interrogé sur ce que fait la France, monsieur le sénateur. Elle le fait directement, vous le savez, sous l'impulsion du chef de l'Etat, par les visites du ministre des affaires étrangères dans cette zone à plusieurs reprises ; elle le fait aussi par le biais de l'Union européenne, dont le représentant sur place accomplit un bon travail. Nous continuerons à agir en ce sens, pour préserver le processus de paix en dépit des difficultés.
Votre dernière question, monsieur Lombard, portait sur un sujet très important : le développement économique des territoires palestiniens, notamment de Gaza. La réouverture de l'aéroport n'a pas été autorisée et des problèmes se posent quant au port. Quelles que soient les difficultés, il me semble qu'une entente est possible et que le souci de sécurité des Israéliens, qui est légitime, ne doit pas, là non plus, servir de prétexte pour retarder les discussions.
A ce propos, je me souviendrai longtemps d'une conversation que j'ai eue à Gaza avec M. Yasser Arafat. Il me disait alors : « Si les jeunes Palestiniens n'ont pas une perspective, une raison d'espérer, le sentiment que ce que j'ai fait avec Israël pour le processus de paix sert à améliorer leur vie quotidienne, à leur donner une raison de bonheur personnel, le terrorisme reprendra le dessus. »
Là comme ailleurs, le terrorisme est nourri par la misère. Il faut donc casser ce cycle de la misère et celui du terrorisme.
C'est dans cette optique que les deux outils que vous avez évoqués - l'aéroport et le port - sont très importants et que nous ferons tout ce que nous pouvons faire, pour qu'ils fonctionnent afin de donner une chance de développement économique aux territoires palestiniens. (Applaudissements sur les travées du RPR, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

COMMÉMORATION DE LA FIN DE LA GUERRE D'ALGÉRIE