M. le président. Par amendement n° 9 rectifié, M. Peyronnet et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de rédiger ainsi le texte présenté par l'article 6 et pour l'article L. 2213-6-2 du code général des collectivités territoriales :
« Art. L. 2213-6-2. - Lorsque le stationnement irrégulier de caravanes est de nature à porter une atteinte grave à la salubrité, à la sécurité ou à la tranquillité publique, le maire peut saisir le président du tribunal de grande instance statuant en la forme des référés aux fins de faire ordonner l'évacuation desdites caravanes. »
La parole est à M. Peyronnet.
M. Jean-Claude Peyronnet. Cet amendement tend à préciser que le maire ne peut saisir le tribunal pour demander l'expulsion de caravanes stationnées sur un terrain privé qu'en cas d'atteinte grave à la sécurité.
Je n'ignore pas qu'il reviendra au juge de se prononcer sur le caractère grave ou non. Ce texte me paraît toutefois plus conforme à la jurisprudence habituelle. De ce point de vue, il serait donc plus satisfaisant de faire référence à la gravité de l'atteinte.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement, pour deux raisons. M. Peyronnet vient d'ailleurs lui-même de s'expliquer sur l'une d'elles.
La première concerne la différence entre « atteinte » et « atteinte grave ». Il n'est pas nécessaire, selon nous, de qualifier la nature de l'atteinte. C'est au maire qu'il appartiendra d'apprécier, à partir des éléments de fait, l'existence d'une telle atteinte. De plus, et c'est ce qui nous paraît important, l'appréciation se fera sous le contrôle du juge, qui déterminera si le maire a commis un excès de pouvoir ou si, effectivement, il y a bien atteinte à la sécurité ou à la tranquillité publiques.
La seconde raison me paraît plus importante. Ce texte ne doit en aucun cas constituer un recul en matière de protection de la propriété privée. Nous avons donc souhaité que le propriétaire reçoive une assignation afin qu'il puisse exposer au tribunal son point de vue et contester, le cas échéant, le motif d'ordre public invoqué par le maire.
Telles sont les raisons pour lesquelles la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement et préfère en rester à son texte.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Le souci du Gouvernement est de bien faire ressortir l'esprit des dispositions qui seront prises.
Globalement, s'agissant de l'article 6, nous souhaitons que les besoins soient pris en compte à la bonne échelle, en l'occurrence le département. A ce niveau, si l'application de la loi s'impose aux autorités publiques, elle doit s'imposer aussi aux autorités de police et de justice. En effet, le respect de l'obligation de création d'aires d'accueil doit permettre d'empêcher le stationnement illicite. Dans l'esprit du Gouvernement, les deux choses sont liées.
S'agissant de la question de l'atteinte, à la salubrité, par exemple, le point de notre discussion qui est intéressant et qui restera dans le procès-verbal de nos travaux est l'adjectif « grave », qui traduit le souci de tenir compte de la spécificité du mode de vie des personnes concernées.
Prenons un exemple élémentaire : celui des sanitaires. Aujourd'hui, les caravanes sont pour la plupart équipées de toilettes chimiques. En l'absence de toilettes publiques, il ne faudrait pas considérer qu'il y a atteinte à la salubrité si ce dispositif adapté au mode de vie des gens du voyage existe.
Encore une fois, il est bon que nous précisions l'esprit de cette disposition, même si nous pouvons faire confiance au juge saisi pour apprécier, en dernier ressort, la réalité de la situation.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 9 rectifié.
M. Louis Boyer. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Louis Boyer.
M. Louis Boyer. Une ambiguïté subsiste dans le texte. Fréquemment, les gens du voyage ont l'habitude de brancher leurs caravanes sur l'éclairage public. C'est très facile, il suffit de soulever une petite plaquette et quatre ou cinq caravanes peuvent alors avoir de l'électricité le temps de leur séjour. S'agit-il d'une atteinte grave ou non ?
M. Jean-Jacques Hyest. C'est du vol !
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Mon cher collègue, il ne s'agit pas du tout d'une atteinte grave à la salubrité ou à la tranquillité publiques. Il s'agit plutôt de grivèlerie ou de vol, ce qui relève d'une autre procédure.
Votre remarque est judicieuse. Vous auriez même pu poser la question pour le branchement d'eau, etc. Mais l'amendement n° 9 rectifié n'a pas été conçu dans cet esprit.
M. Philippe Marini. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. Je ne voterai pas cet amendement, car le texte de la commission me semble suffisamment précis : bien entendu, il s'agit d'une atteinte que le maire invoque et qui est soumise à l'appréciation du tribunal. Il ne faut pas confondre, comme je craignais de l'entendre voilà quelques instants dans le débat, les responsabilités du maire et celles du pouvoir judiciaire.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Tout à fait !
M. Philippe Marini. Le maire soumet une situation et le président du tribunal décide, en son âme et consicence, en fonction de la loi et des données de fait qu'il est seul à pouvoir interpréter.
Dans ces conditions, le texte de la commission me paraît largement suffisant et il est tout à fait clair qu'il n'est pas utile de l'encombrer de dispositions supplémentaires.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 9 rectifié, repoussé par la commission.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le texte proposé pour l'article L. 2213-6-2 du code général des collectivités territoriales.

(Ce texte est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de l'article 6.

(L'article 6 est adopté.)

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