M. le président. « Art. 18 bis . _ Il est inséré, dans le code général des impôts, un article 302 bis MA ainsi rédigé :
« Art. 302 bis MA . _ I. _ Il est institué à compter du 1er janvier 1998 une taxe sur certaines dépenses de publicité.
« II. _ Cette taxe est due par tout redevable de la taxe sur la valeur ajoutée soumis de plein droit au régime réel normal d'imposition.
« III. _ Elle est assise sur les dépenses engagées au cours de l'année civile précédente et ayant pour objet :
« 1° L'édition ou la distribution d'imprimés publicitaires à l'exception des publications touristiques ;
« 2° Les annonces et insertions dans les journaux mis gratuitement à la dispositions du public.
« IV. _ Le taux de la taxe est fixé à 1 % du montant hors taxe sur la valeur ajoutée de ces dépenses.
« V. _ La taxe est déclarée et liquidée sur l'annexe à la déclaration des opérations du mois de mars de l'année au titre de laquelle la taxe est due, déposée en application de l'article 287.
« Elle est acquittée au plus tard lors du dépôt de cette déclaration.
« VI. _ La taxe est constatée, recouvrée et contrôlée selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanctions, garanties et privilèges que la taxe sur la valeur ajoutée.
« Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à cette même taxe. »
Par amendement n° I-67, M. du Luart propose de supprimer cet article.
La parole est à M. du Luart.
M. Roland du Luart. Je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° I-67 est retiré.
Par amendement n° I-44, M. Gérard, au nom de la commission des affaires culturelles, propose, dans le I du texte présenté par cet article pour l'article 302 bis MA du code général des impôts, après les mots : « 1er janvier 1998 », d'ajouter les mots : « et jusqu'au 31 décembre 2002 ».
La parole est à M. Gérard.
M. Alain Gérard, au nom de la commission des affaires culturelles. Cet amendement vise à faire coïncider la durée d'application de la taxe sur le hors-média et celle du plan de modernisation de la presse quotidienne et de la presse hebdomadaire régionale annoncé par le Gouvernement. Les recettes de la taxe sont en effet destinées à financer l'exécution du plan.
Il convient de prévenir une pérennisation qui amorcerait inévitablement la débudgétisation des aides directes de l'Etat à la presse.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n ° I-44, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° I-128, MM. Mauroy, Allouche, Raoult, Mme Derycke, les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de compléter le paragraphe II du texte présenté par l'article 18 bis pour l'article 302 bis MA à insérer dans le code général des impôts par les mots suivants : « à l'exception des sociétés de vente par correspondance ».
La parole est à M. Mauroy.
M. Pierre Mauroy. Cet amendement répond à des préoccupations d'ordre économique et social, mais aussi à un souci de justice.
La création d'un fonds d'aide à la modernisation de la presse quotidienne est tout à fait légitime : les difficultés de cette presse nous sont connues et nous préoccupent. Mais il est tout aussi légitime de retirer les sociétés de vente par correspondance de l'assiette de la taxe en question. Les y inclure serait à la fois injuste et pénalisant.
Une telle mesure serait injuste parce que la vente par correspondance n'est pas un média ; c'est un mode de vente. Elle ne concurrence aucun média. En outre, les documents commerciaux, mailings et catalogues adressés aux clients ne sont pas des imprimés publicitaires ; ce sont des « lieux de vente », qui remplacent à la fois les magasins, les rayons et les vendeurs.
Cette mesure serait également pénalisante, car la taxation des sociétés de vente par correspondance alourdirait les charges d'exploitation de ces entreprises, qui consacrent entre 15 % et 30 % de leur chiffre d'affaires aux catalogues et mailings , avec le risque d'un report de coût sur le consommateur. Elle créerait, de surcroît, une distorsion de concurrence, avec d'évidentes répercussions sur l'emploi.
Si le groupe socialiste propose, en conséquence, qu'il soit clairement précisé que les sociétés de vente par correspondance sont exclues de la taxe sur les imprimés publicitaires, c'est parce qu'il y va, croyons-nous, de l'avenir d'un secteur économique qui constitue un marché de 50 milliards de francs pour la vente aux consommateurs, de 13 millions de francs pour la vente aux entreprises et de 12 milliards de francs pour la vente à l'étranger, sous enseigne française.
La vente par correspondance représente ainsi trente mille emplois directs et soixante mille emplois chez ses partenaires et fournisseurs. Dès lors qu'un foyer français sur deux apprécie les prestations de ces sociétés de vente par correspondance et que tant d'emplois sont concernés, il s'agit d'un enjeu économique et social majeur. Aussi comprendrai-je mal qu'on puisse maintenir une taxe sur des documents qui ne sont pas des imprimés commerciaux normaux.
M. Emmanuel Hamel. Bonne suggestion !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Monsieur le président, j'ai été un peu perturbé, tout à l'heure, parce que je m'attendais à une discussion commune de tous ces amendements, ce qui m'a fait émettre un avis défavorable sur l'amendement n° I-44 de M. Gérard.
Cela me conduit également à émettre un avis défavorable sur l'amendement n° I-128, étant entendu que la commission des finances vous proposera tout à l'heure un amendement qui satisfait totalement vos préoccupations, monsieur Mauroy ; il rassemblera un peu, me semble-t-il, les préoccupations des uns et des autres.
La commission des finances s'est retrouvée sous une pluie d'amendements qui comportaient des dispositions légèrement différentes. Elle s'est efforcée de synthétiser les diverses préoccupations. Je vous donnerai toutes les explications nécessaires lorsque je défendrai l'amendement n° I-20 rectifié.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. M. Mauroy a posé une vraie question. Le secteur des entreprises de ventes par correspondance revêt, en effet, une très grande importance pour l'économie nationale. Il faut donc veiller à ce qu'une taxation des imprimés publicitaires adressés à leurs clients ne porte pas atteinte à leur développement.
Le Gouvernement est donc en accord avec le sens de la démarche de M. Mauroy. C'est la raison pour laquelle il étudie des mesures qui permettraient d'éviter que la perception de cette nouvelle taxe ne pénalise cette forme particulière de vente.
Cela dit, il est apparu que d'autres dispositions du texte adopté par l'Assemblée nationale nécessitaient également des aménagements. Leur réexamen est d'ailleurs en cours et je peux vous dire, monsieur Mauroy, que vos préoccupations seront complètement prises en compte.
Dans ces conditions, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.
M. René Régnault. Bonne réponse !
M. le président. Monsieur Mauroy, l'amendement n° I-128 est-il maintenu ?
M. Pierre Mauroy. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° I-128 est retiré.
Je suis maintenant saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° I-20 rectifié est présenté par M. Lambert, au nom de la commission des finances.
L'amendement n° I-166 est déposé par MM. Gérard, Vasselle et les membres du groupe du Rassemblement pour la République.
Tous deux tendent, dans le 2e alinéa (1°) du III du texte proposé par l'article 18 bis pour l'article 302 bis MA du code général des impôts, après les mots : « L'édition ou la distribution d'imprimés publicitaires » à insérer les mots : « non adressés ».
Par amendement n° I-45, M. Gérard, au nom de la commission des affaires culturelles, propose :
I. Dans le deuxième alinéa (1°) du III du texte présenté par l'article 18 bis pour l'article 302 bis MA du code général des impôts, de remplacer les mots : « à l'exception des publications touristiques » par les mots : « à l'exception des catalogues des entreprises de vente par correspondance » ;
II. De compléter in fine le III dudit texte par un alinéa ainsi rédigé :
« Les dépenses de promotion effectuées par les personnes morales de droit public ou par les organismes sans but lucratif ne sont pas soumises à la taxe. »
Par amendement n° I-23 rectifié, MM. Foy, Schumann, Diligent, Dulait, Legendre, Habert et Turk proposent, au 1° du paragraphe III du texte présenté par l'article 18 bis pour l'article 302 bis MA du code général des impôts, après les mots : « publications touristiques » d'ajouter les mots : « ainsi que des catalogues et documents distribués pour des opérations de vente à distance ; ».
La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre l'amendement n° I-20 rectifié.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je vais essayer de synthétiser les préoccupations qui ont été exprimées depuis le début de la discussion de cet article. Elles sont tout à fait légitimes et vous verrez que la commission des finances les partage totalement.
Je souhaite convaincre le Gouvernement que le Sénat sait, lui aussi, élaborer une bonne législation fiscale et qu'il n'y a pas que l'autre assemblée qui soit apte à le faire. Monsieur le secrétaire d'Etat, nous allons apporter notre contribution et nous espérons qu'elle vous sera utile.
De nombreux amendements avaient été présentés : un amendement de suppression de M. du Luart, mais il n'a pas été défendu ; un amendement de M. Gérard limitant la durée d'application de la taxe ; un amendement de Mme Beaudeau et de M. Loridant - il sera présenté tout à l'heure - augmentant le taux de la taxe en le portant de 1 % à 1,25 % ; enfin, des amendements, ce qui rend l'examen difficile, portant sur l'assiette elle-même et tendant à ne plus exclure a priori les imprimés touristiques - c'était le cas de l'amendement de M. Gérard - à exclure, au contraire, les administrations et les associations, ce qui rendait inutile l'exclusion a priori des imprimés touristiques - il s'agissait toujours d'un amendement de M. Gérard - et à exclure la vente par correspondance, mais sous trois formes différentes.
Pour exclure la vente par correspondance - cette préoccupation est largement partagée, me semble-t-il - trois formules sont possibles : une option large, qui exclut tous les courriers adressés - c'est l'option qui a été adoptée par la commission des finances ; une option médiane, qui exclut les catalogues et documents distribués pour les opérations de vente par correspondance - c'est celle qui est présentée par MM. Foy et M. Schumann ; enfin, une option étroite, qui n'exclut que les catalogues des entreprises de vente par correspondance - c'est celle qui est proposé par M. Gérard.
Mes chers collègues, il nous faut arbitrer : ou bien nous préserverons un certain rendement à cette taxe, si nous la pensons utile ; ou bien nous essayons de ne pas entraver l'activité des entreprises de vente par correspondance, en particulier.
Peut-être le moment est-il venu de préciser ce qu'il adviendra du produit de cette taxe.
La commission des finances ne s'est pas opposée au principe de la taxe, puisqu'il s'agit de la presse. Mais un fait nouveau serait intervenu - je m'adresse au Gouvernement : il s'agit de l'admission au bénéfice du fonds de l'AFP. Dans cette hypothèse, les besoins de cet organisme étant apparus importants à la commission des finances, ils pourraient peut-être « absorber » la totalité des crédits, ce qui rend le dispositif assez aléatoire.
Mes chers collègues, nous devons choisir entre une option large, une option médiane ou une option étroite. Je crois avoir marqué assez souvent mon souci d'élaborer une législation fiscale facilement applicable.
Je pense pouvoir dire à M. Mauroy que l'option de la commission des finances est sans doute celle qui, sur le plan rédactionnel, donne le plus de sécurité fiscale et permet aux agents économiques, auxquels nous voulons épargner des coûts trop élevés, de savoir où ils vont.
Bien sûr - c'est mon devoir de le dire ! - cela a pour effet de faire baisser le produit de la taxe. Mais, la politique, c'est faire des choix, et, en la circonstance, faire le choix d'une taxe puisque le principe de son institution a été décidé.
Toutefois, faire ce choix ne doit pas nous amener à fragiliser nos entreprises de vente par correspondance, d'une part, parce qu'elles ont une importance considérable en termes d'emplois, d'autre part, parce que, étant donné leur situation géographique, nous pourrions facilement les tenter d'aller s'installer sous d'autres cieux.
Par ailleurs, le coût des éléments compris dans l'assiette fiscale représente un montant considérable dans leurs postes de charge, ce qui a conduit la commission des finances à préférer à tous les autres amendements, y compris ceux qui seront présentés tout à l'heure, cet amendement n° I-20 rectifié.
Monsieur le secrétaire d'Etat, c'est avec humilité, mais avec l'espoir d'être utile au Gouvernement, que la commission des finances vous fait cette proposition.
M. le président. La parole est à M. Gérard, pour défendre l'amendement n° I-166.
M. Alain Gérard. Je ne peux rien ajouter aux explications qui viennent d'être données par M. le rapporteur général. Je retire donc cet amendement, qui n'a plus lieu d'être.
M. le président. L'amendement n° I-166 est retiré.
La parole est à M. Gérard, pour défendre l'amendement n° I-45.
M. Alain Gérard, au nom de la commission des affaires culturelles. L'objet de cet amendement est, d'abord, d'intégrer, dans l'assiette de la taxe sur le hors-média, les dépenses publicitaires des professionnels du tourisme ; M. le rapporteur général l'a fait remarquer.
Il s'agit, ensuite, d'exclure de l'assiette les catalogues des entreprises de vente par correspondance - ce qui rejoint la préoccupation commune - qui, à vrai dire, ne sont pas des imprimés publicitaires, mais constituent le mode d'activité commerciale de ces entreprises.
Enfin, nous souhaitons exclure de l'assiette les dépenses de promotion des personnes morales de droit public - telles les dépenses de promotion touristique des offices de tourisme et syndicats d'initiative - ainsi que les dépenses de promotion des organismes sans but lucratif, comme les appels à contribution lancés par les organismes caritatifs. Dans les deux cas, en effet, il ne s'agit pas de véritables dépenses publicitaires, dans la mesure où elles ne sont pas liées à la réalisation d'opérations commerciales.
Cela étant dit, je veux bien me rallier aux explications données par M. le rapporteur général et, par conséquent, je retire cet amendement.
M. le président. L'amendement n° I-45 est retiré.
La parole est à M. Diligent, pour défendre l'amendement n° I-23 rectifié.
M. André Diligent. Nous nous rallions à la position adoptée par M. le rapporteur général et nous faisons également confiance au Gouvernement pour trouver la meilleure des solutions possible dans une affaire où, évidemment, la concertation est indispensable. Or la preuve a été apportée que l'on peut parvenir à un large accord dans cet hémicycle.
Je retire donc cet amendement.
M. le président. L'amendement n° I-23 rectifié est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° I-20 rectifié ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement. En effet, autant la proposition présentée par M. Mauroy est ciblée sur une activité précise, à savoir la vente par correspondance, autant - vous l'avez dit et je respecte votre choix - le fait de couvrir un champ assez large, c'est-à-dire de ne soumettre à la taxe que les dépenses de publipostage non personnalisé, prive la mesure de la moitié de son efficacité. Ce sont autant de recettes qui ne financeront pas la modernisation de la presse.
J'ajoute que la mesure ne contrarierait pas ce qui se trouve à l'origine même de la proposition qui a été avancée par l'Assemblée nationale et reprise par le Gouvernement, à savoir lutter contre la publicité hors média, qui fait concurrence, chacun le sait, à la presse écrite.
Parce que votre amendement a un champ trop large, monsieur le rapporteur général, le Gouvernement suggère de le repousser.
M. Gérard a évoqué la question des publications d'associations de tourisme. Comme celles-ci ne sont pas assujetties à la TVA, elles ne seraient pas concernées par cette taxe.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-20 rectifié.
M. Michel Charasse. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse. Sauf erreur de ma part, l'article 18 bis est une disposition d'initiative parlementaire. S'il fut un temps où l'essentiel de la fiscalité émanait du Parlement - c'est d'ailleurs ce qui a donné lieu aux meilleurs textes depuis la Révolution française - la complexité des choses a conduit peu à peu à transférer la réalité de l'initiative fiscale à l'exécutif.
C'est la raison pour laquelle je suis réservé à l'égard de ce genre de taxes, non pas sur le fond - après tout, ce n'est pas une mauvaise idée ! - mais sur le dispositif. Je me souviens, en effet, du succès d'un certain nombre d'initiatives semblables, prises un soir de discussion de projet de loi de finances.
Monsieur le rapporteur général, la longue expérience du Parlement qui est la mienne - elle a commencé dans une autre assemblée, alors que j'étais très jeune et que j'exerçais d'autres fonctions - fait que je me souviens de la taxe sur la force de frappe, inapplicable et qui ne rapporte rien, de la « serisette », qui n'a jamais été appliquée et, monsieur le secrétaire d'Etat, de la taxe que je commentais à votre place il fut un certain temps sur le Minitel rose, qui n'a jamais été appliquée parce qu'elle est inapplicable.
Quand je lis le texte qui nous vient de l'Assemblée nationale, tout en rendant hommage à ses auteurs, je me pose un certain nombre de questions et je crains beaucoup de difficultés d'application et de nombreuses contestations.
J'ai bien entendu M. le secrétaire d'Etat nous dire : on va essayer de mettre le texte au point. Toutefois, pour l'instant, celui-ci a une portée tellement générale qu'au fond on ne sait pas trop ce qui est visé et ce qui ne l'est pas.
Qu'en est-il des publicités électorales, politiques, professionnelles, syndicales ou associatives ?
Quid des affiches électorales ? Ce sont des imprimés, publicitaires s'il en est : « Votez pour ma tête, c'est la plus belle ! »
M. Emmanuel Hamel. Dans votre cas, c'est vrai ! (Rires.)
M. Michel Charasse. Merci, monsieur Hamel ! C'est à dessein que je l'ai dit, pour voir si quelqu'un allait relever. Je pensais à cette dame... ou à celle-là. (L'orateur se tourne vers Mme Olin puis vers Mme Printz.) Mais peu importe !
Qu'en est-il des professions de foi, des journaux électoraux gratuits, puisqu'on vise aussi les journaux gratuits ? Il existe des journaux électoraux gratuits !
Quid des ventes sur catalogue ou des ventes aux enchères ? Comment voulez-vous procéder à des ventes aux enchères, notamment dans le domaine des oeuvres d'art, sans un catalogue d'information et de publicité ? Quid des imprimés des ventes de charité, dont les produits sont versés à telle ou telle oeuvre ?
Qu'en est-il des imprimés publicitaires que l'on trouve, par exemple, dans les avions des compagnies aériennes et qui sont édités pour leur propre compte ? Quid des objets qui sont en vente avec une publicité au dos ? En effet, souvent, un ticket de théâtre ou de cinéma comporte au dos une publicité pour une marque quelconque. J'arrête là mon énumération, car je lasserais l'attention du Sénat. A l'occasion de la navette, il faudra préciser le champ d'application.
Le deuxième point que je voudrais aborder est le suivant : quid du paragraphe VI ? Je ne comprends peut-être plus rien à la fiscalité, mais cela signifie-t-il que cette taxe nouvelle, puisqu'elle suit le même sort que la TVA, est déductible ? En effet, elle est « recouvrée et contrôlée selon les mêmes procédures que la taxe sur la valeur ajoutée ». Or, dans la procédure de la TVA, il y a déductibilité de la taxe payée antérieurement. En outre, cet article précise que « les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à cette même taxe ». Ces réclamations relèveront-elles des tribunaux de l'ordre judiciaire ? Si tel est le cas, ce n'est pas du tout la même chose que les tribunaux de l'ordre administratif.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je n'attends pas que vous m'apportiez des précisions sur tous ces points. Je ne veux pas entrer dans les détails. S'agissant de ce dispositif, je suis plutôt réservé, non pas sur l'idée elle-même dont nous sentons tous l'utilité, voire l'ingéniosité, pour alimenter un certain nombre d'activités de presse, mais sur des modalités arrêtées à la va-vite.
M. Joël Bourdin. Très bien !
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. J'envie la capacité pédagogique de notre éminent collègue Michel Charasse.
M. Emmanuel Hamel. Elle est immense !
M. Alain Lambert, rapporteur général. En effet, il vient d'expliquer beaucoup plus éloquemment que je n'ai su le faire les raisons pour lesquelles nous avons choisi une solution juridiquement sûre.
Certes, nous avons un peu dégradé le produit de la taxe - le Gouvernement me l'a reproché voilà un instant - mais au moins c'est applicable.
Mes chers collègues, je vous dis en toute humilité que, parmi tous les amendements qui vous sont proposés, celui de la commission des finances sera celui qui donnera le moins de difficulté d'application.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Ce texte comporte, certes, quelques imperfections, qui devront être corrigées au cours de la navette. Je voudrais tout de même rassurer M. Charasse sur un certain nombre de points.
M. Michel Charasse. Les cartes de voeux de l'UNESCO ? (Sourires.)
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Les partis politiques ou les associations de financement électoral n'étant pas soumis à la TVA, ils ne seront pas concernés par ce texte.
M. Michel Charasse. Ceux qui fabriquent les documents si !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Le contentieux relèvera des tribunaux administratifs. Enfin, cette taxe sera déductible du bénéfice imposable.
Je ne vais pas répondre à toutes les questions fort judicieuses que M. Charasse a posées. Je veux tout de même lui montrer que la rédaction, si elle mérite d'être perfectionnée, n'est pas aussi défectueuse qu'il a, avec la sagacité que chacun lui connaît, voulu le prouver.
M. Emmanuel Hamel. Il y est parvenu !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-20 rectifié, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° I-93, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, dans le IV du texte présenté par l'article 18 bis pour l'article 302 bis A du code général des impôts, de remplacer le taux : « 1 % » par le taux : « 1,25 % ».
La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. Il s'agit de porter le taux de la taxe qui vient d'être créée à la suite du vote qui est intervenu à l'instant de 1 % à 1,25 %, non pas pour le plaisir de l'augmenter, mais parce que nous préconisons une utilisation ponctuelle de cette taxe.
Je souhaite attirer votre attention, mes chers collègues, et celle du Gouvernement sur l'avenir des télévisions de proximité.
Nous sommes tous attachés au développement du pluralisme, et donc aux mécanismes d'aides à ce secteur essentiel pour la vitalité de notre démocratie que représentent les médias. Pourtant, curieusement, les télévisions de proximité n'ont jamais été intégrées dans le dispositif de soutien aux médias.
Personne ne peut songer sérieusement à contester leur apport en matière de renforcement de la démocratie locale, notamment dans des régions où certains groupes de presse sont en situation de quasi-monopole.
Personne ne peut nier leur contribution en termes de cohésion sociale. En rapprochant les citoyens de leurs élus et de leurs institutions, elles participent à la consolidation d'un espace de citoyenneté. Par ailleurs, elles favorisent une meilleure intégration en développant le sentiment d'appartenance à une même collectivité.
Ces aspects positifs ne sauraient nous faire oublier les difficultés auxquelles ces télévisions locales sont confrontées.
En premier lieu, il convient de souligner l'attitude des opérateurs, partenaires des collectivités locales. Je suis moi-même président d'une télévision locale, et, comme bien d'autres maires, j'ai dû faire face aux défaillances financières ou aux réductions de financement de l'opérateur avec lequel la collectivité avait signé un accord.
Vous connaissez aussi bien que moi la situation financière de nos collectivités locales. Autant dire que l'avenir des télévisions locales, si nous ne faisons rien pour améliorer leur situation, est plein d'incertitudes.
Pour bien comprendre les difficultés des télévisions de proximité, il faut savoir que, à la différence de la presse écrite, elles ne bénéficient d'aucune exonération de taxe professionnelle, elle paient une TVA au taux normal de 20,6 %, y compris pour les financements des collectivités locales concernant le câble. Nous avons eu l'occasion, cet après-midi, d'examiner un amendement présenté par Mme Pourtaud et portant sur ce point.
De plus, les télévisions de proximité n'ont accès à aucun fonds de soutien comme il en existe pour les radios locales ou pour la presse écrite. Enfin, le seul gisement naturel de ressources, à savoir la publicité, leur est interdit, afin de protéger la presse écrite.
D'où notre idée de demander, tout naturellement, que les télévisions de proximité puissent bénéficier des financements créés par ce fonds issu d'une initiative prise, à l'Assemblée nationale, par notre collègue M. Le Guen.
La levée éventuelle de cette interdiction de recours à la publicité ne relève pas du projet de loi de finances et suppose une concertation avec tous les acteurs. Monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, vous savez combien la presse écrite, en particulier la presse régionale de province, est chatouilleuse à cet égard.
L'amendement que je vous propose d'adopter vise à faire passer de 1 % à 1,25 % le taux de la taxe assise sur les dépenses de publicité, c'est-à-dire l'édition ou la distribution d'imprimés publicitaires ou les journaux mis gratuitement à la disposition du public, la différence de 0,25 % servant à alimenter un fonds en faveur des télévisions de proximité. Cet amendement a, en outre, le mérite de mettre un terme à l'affrontement presse écrite-presse audiovisuelle, en faisant porter le financement sur le secteur du hors média.
Je proposerai, évidemment, lors de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances, un amendement pour répartir le surplus qui, je n'en doute pas un instant, mes chers collègues, va être voté.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Dans la mesure où les débats ont montré que l'impact de cette taxe sur les redevables était encore à peine maîtrisé, la commission des finances a considéré qu'il n'était pas souhaitable d'accroître le taux de ladite taxe. Elle émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement a déjà eu l'occasion de manifester tout l'intérêt qu'il porte aux télévisions de proximité. Cependant, je ne pense pas que ce soit par le recours à une majoration de cette taxe, encore balbutiante, que des moyens supplémentaires doivent leur être apportés. Cette taxe, qui vise les concurrents de la presse écrite, a pour objet d'apporter des moyens à cette dernière. J'estime qu'il faut garder à cette taxe la vocation qui est actuellement la sienne.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-93.
M. Paul Loridant. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. J'ai écouté attentivement les argumentations du Gouvernement et de la commission. Les télévisions de proximité sont des médias comme les autres et elles n'ont pas de soutien de financement.
J'ai bien noté, monsieur le secrétaire d'Etat, l'intérêt général, voire philosophique, que vous portez aux télévisions de proximité. J'eusse aimé que vous traciez quelques pistes pour que ces télévisions de proximité trouvent, au-delà de cette sympathie théorique, quelques résonance concrète leur permettant de passer le cap difficile auquel elles sont confrontées.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-93, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 18 bis , modifié.

(L'article 18 bis est adopté.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante-cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante, est reprise à vingt et une heures quarante-cinq, sous la présidence de M. Paul Girod.)