LIVRE VII DU CODE RURAL

Adoption d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 397, 1996-1997) relatif à la partie législative du livre VII du code rural.
Rapport n° 353 (1997-1998).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Louis Le Pensec, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi concernant la partie législative du livre VII du code rural relatif aux « dispositions sociales » a pour objet, dans le souci de fournir aux usagers un document de référence clair et sans ambiguïtés, de clarifier l'ordonnancement actuel sans y apporter de modification ou de complément. A l'exception de dispositions qui ne sont plus d'actualité et qui n'ont pas été reprises dans ce livre, ces articles ne sont donc pas codifiés mais ne sont cependant pas abrogés, leurs effets n'étant pas épuisés. Sous cette réserve, il s'agit d'une codification à droit constant.
L'actuel livre VII a beaucoup vieilli et l'intégration successive de textes nombreux l'a rendu peu maniable. Par ailleurs, des dispositions plus récentes, dont certaines sont d'ailleurs postérieures à la date de dépôt de ce livre devant votre Haute Assemblée, ont été prises sous forme non codifiée. L'ordonnancement juridique actuel est de ce fait hétérogène ; une refonte complète du livre VII était donc indispensable.
La loi n° 58-346 du 3 avril 1958 relative aux conditions d'application de certains codes a donné force de loi aux dispositions annexées aux décrets n° 55-433 du 16 avril 1955 et n° 55-1265 du 27 septembre 1955 portant codification, sous le nom de code rural, des textes législatifs concernant l'agriculture.
L'évolution du droit rural rendait nécessaire une rénovation de ce code qui comprendra, au stade final, neuf livres, dont le livre II nouveau destiné à être repris dans le projet de code de l'environnement.
Sous l'égide de la commission supérieure de codification ont été élaborés et adoptés par le Parlement : en 1991, les livres II, IV et V, portant respectivement sur « la protection de la nature » , « les baux ruraux » et « les organisations agricoles » ; en 1992, le livre Ier relatif à « l'aménagement et à l'équipement de l'espace rural » ; en 1993, le livre III sur « l'exploitation agricole » ainsi que le livre VIII sur « l'enseignement, la formation professionnelle et le développement agricoles - la recherche agronomique ». Le livre VI « production et marchés » a été adopté en première lecture par votre Haute Assemblée le 18 septembre 1997 et par l'Assemblée nationale le 3 mars dernier. Le livre IX « santé publique vétérinaire et protection des végétaux » doit être examiné par le Conseil d'Etat très prochainement, avant d'être soumis au Parlement. Ce livre marquera l'achèvement des travaux de rénovation du code rural.
J'ai l'honneur, mesdames, messieurs les sénateurs, de soumettre aujourd'hui à votre approbation le projet de livre VII nouveau relatif aux « dispositions sociales ».
Ce livre comprend sept titres.
Le titre Ier concerne « la réglementation du travail salarié ».
Le titre II se rapporte à « l'organisation générale des régimes de protection sociale des professions agricoles ».
Le titre III traite de « la protection sociale des personnes non salariées des professions agricoles ».
Le titre IV intéresse « la protection sociale des personnes salariées des professions agricoles ».
Le titre V porte sur « les accidents du travail, maladies professionnelles et accidents de la vie privée ».
Le titre VI regroupe des « dispositions spéciales » concernant les département du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle, la protection sociale des non-salariés et des salariés des professions agricoles dans les départements d'outre-mer, ainsi que la protection sociale des salariés et des non-salariés des professions agricoles résidant à l'étranger.
Enfin, le titre VII concerne « les organismes d'assurance et de réassurance mutuelles agricoles ».
S'agissant du contenu du projet de loi, l'article 1er donne force de loi aux dispositions contenues dans la partie législative du livre VII nouveau du code rural, annexée à la loi.
L'article 2 prévoit quant à lui de substituer aux références faites à des dispositions abrogées des références aux dispositions qui les remplacent.
L'article 3 abroge les dispositions législatives auxquelles se substituent les dispositions codifiées.
L'article 4 abroge, à compter de l'entrée en vigueur de la partie réglementaire du livre VII, les dispositions qui, devant figurer dans cette partie en raison de leur caractère réglementaire, mais prises en la forme législative postérieurement à 1958, ne pouvaient être déclassées par le Conseil d'Etat.
L'article 5 abroge deux articles du livre III, lesquels sont repris dans le livre VII, dans un souci de cohérence et de clarté.
L'ensemble de ce texte n'introduit donc pas d'éléments nouveaux : nous opérons à droit constant. Nous disposerons ainsi d'outils juridiques plus opérationnels et plus accessibles aux usagers.
La récente communication gouvernementale sur la réforme de l'Etat fixe notamment pour objectif de rendre plus accessibles les normes juridiques en regroupant les règles de droit applicables dans chaque domaine par la codification. Le projet de loi soumis aujourd'hui à l'approbation de la Haute Assemblée répond à cette ambition.
Enfin, je tiens à remercier pour leur travail tous ceux qui ont participé à l'élaboration de ce projet de loi. Je suppose que, comme à l'habitude, la durée de son examen en séance sera très courte. (M. Fischer marque son étonnement.)
Cela dit, je ne préjuge pas le débat ni les éventuelles interventions qui pourraient l'allonger, monsieur le sénateur ! (Sourires.) En tout cas, la durée de la séance risque d'être inversement proportionnelle au temps qu'il a fallu investir pour cette tâche, parfois écrasante, de codification.
Il a donc fallu une somme de travail considérable pour arriver à ce résultat, de la part de la commission supérieure de codification, des services du ministère de l'agriculture et de la pêche, de l'administration du Sénat et, bien sûr, du rapporteur, que je félicite. Je les remercie tous de la qualité de leurs travaux.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi relatif à la partie législative du livre VII du code rural a pour objet de rassembler dans un seul instrument juridique l'ensemble des textes relatifs aux dispositions sociales applicables au monde agricole. Il procède à une refonte très importante de l'actuel du livre VII du code rural, selon le principe de la codification à droit constant.
Les nouvelles règles applicables depuis 1989 en matière de codification des textes législatifs confèrent désormais au Parlement un rôle essentiel : celui-ci n'est plus chargé, comme auparavant, de procéder à une validation législative de textes réglementaires antérieurs, il examine directement les projets de loi de codification présentés par le Gouvernement.
La codification par voie législative présente l'avantage de donner immédiatement force de loi au nouveau code et d'abroger simultanément les dispositions auxquelles celui-ci se substitue. Elle permet également un véritable contrôle par le législateur du texte ainsi codifié.
Le rôle du législateur en matière de codification demeure cependant limité. La codification doit en effet s'effectuer à droit constant, de manière à éviter que l'adoption d'un code, qui constitue une procédure essentiellement formelle, ne puisse donner lieu à une réouverture du débat sur le fond du droit.
Le livre VII nouveau s'inscrit dans le plan du nouveau code rural arrêté par la commission supérieure de codification, le 6 mars 1990. Le Parlement a ainsi déjà donné force de loi aux parties législatives suivantes : livre premier nouveau : « Aménagement et équipement de l'espace rural », livre II nouveau : « Protection de la nature », livre III nouveau : « L'exploitation agricole », livre IV nouveau : « Baux ruraux », livre V nouveau : « Organismes professionnels agricoles », livre VIII nouveau : « Enseignement, formation professionnelle et développement agricoles, recherche agronomique ». Le livre VI nouveau : « Production et marchés » est actuellement en cours d'examen par le Parlement et le livre IX nouveau : « Santé publique vétérinaire et protection des végétaux » devrait bientôt être examiné par le Conseil d'Etat.
Les travaux de rénovation du code rural devraient ainsi être achevés avant l'an 2000.
Même s'il ne comprend donc pas de dispositions nouvelles sur le fond, ce projet de loi est particulièrement bienvenu : il contribue en effet à clarifier le droit social applicable au monde agricole et facilite la compréhension des règles juridiques par les citoyens, les praticiens et l'administration.
L'ancien livre VII du code rural était devenu, au fil du temps, particulièrement illisible et, de l'avis de tous les utilisateurs, parfois difficile à interpréter. Il comportait en outre nombre de dispositions obsolètes ou caduques, qui n'avaient pourtant jamais été abrogées. Enfin, certaines dispositions sociales applicables au monde agricole avaient parallèlement vu le jour sans être intégrées ou mentionnées dans l'ancien livre VII du code rural.
Il faut donc se féliciter du dépôt de ce nouveau livre VII du code rural, qui constitue le résultat d'une oeuvre utile de clarification et de rationalisation du droit social applicable au monde agricole.
Le nouveau livre VII du code rural, intitulé « Dispositions sociales » comme l'ancien livre VII, comporte sept titres organisés selon un plan clair et nettement structuré qui permet de distinguer désormais aisément les dispositions applicables aux non-salariés et les dispositions applicables aux salariés.
En outre, et de manière très opportune, le livre VII nouveau traite dans des titres différents des organismes de mutualité sociale agricole - MSA - et des assurances mutuelles agricoles - AMA - auparavant regroupés sous l'appellation d'organismes de mutualité agricole. Il y a là un progrès significatif en termes de lisibilité et de clarification des compétences respectives des deux branches de la mutualité agricole.
Sur ce projet de loi d'un type un peu particulier, les travaux de votre rapporteur ont consisté tout à la fois en une vérification de l'application du principe de codification à droit constant, et notamment du champ des abrogations ; en un contrôle de la pertinence des déclassements des dispositions de forme législative, mais de nature réglementaire ; enfin, en une vérification de la cohérence interne des dispositions contenues dans le livre VII nouveau et de leur cohérence avec le reste de la législation en vigueur.
La commission des affaires sociales vous propose donc soixante-douze amendements qui portent pour l'essentiel sur la forme. Ces amendements corrigent des erreurs matérielles, des erreurs de renvoi ou de référence, rectifient des appellations ou des intitulés et, d'une manière générale, améliorent, clarifient et précisent la rédaction.
Un certain nombre d'amendements procèdent à des renumérotations de décomptes d'alinéas selon la pratique parlementaire, qui diffère sensiblement de la pratique du Conseil d'Etat.
Votre commission vous propose également cinq amendements qui, d'une part, abrogent certains articles de l'ancien livre VII du code rural, désormais intégrés dans le nouveau livre VII et, d'autre part, restaurent certains articles de loi abrogés par erreur.
Il a en outre fallu intégrer dans le nouveau livre VII du code rural les dispositions intervenues depuis le dépôt du projet de loi, en juillet 1997.
Deux amendements tirent, par exemple, les conséquences de l'entrée des pêcheurs maritimes à pied professionnels dans le champ d'application du régime agricole et de l'autorisation donnée aux caisses de mutualité sociale agricole de conclure des conventions avec des entreprises d'assurance sur la vie et des caisses autonomes mutualistes pour la gestion de contrats d'assurance de groupe, dispositions toutes deux prévues par la loi du 18 novembre 1997 d'orientation sur la pêche maritime et les cultures marines.
Les dispositions de la loi des finances pour 1998 applicables au monde agricole ont également été codifiées sous forme d'articles additionnels, prévoyant ainsi la pérennisation du système de la ristourne dégressive sur les cotisations sociales des bas salaires et la revalorisation des retraites forfaitaires les plus modestes des personnes non salariées de l'agriculture.
Enfin, je souhaite attirer l'attention de la Haute Assemblée sur la question des incompatibilités de fonctions au sein des caisses de mutualité sociale agricole et des caisses d'assurances mutuelles agricoles, qui a suscité une inquiétude légitime au sein du monde agricole.
Dans l'état du droit en vigueur, il n'existe aucune incompatibilité entre les fonctions remplies au sein des caisses de mutualité sociale agricole, et les fonctions exercées au sein des caisses d'assurances mutuelles agricoles. Il était juridiquement possible d'être directeur de l'une et directeur de l'autre, administrateur de l'une et de l'autre. Cette situation venait du regroupement, sous le terme d'organismes de mutualité agricole, des caisses de mutualité sociale agricole et des caisses assurances mutuelles agricoles. Ces deux types d'organismes étant assimilés, il n'existait, dès lors, aucune incompatibilité entre eux.
La disjonction des dispositions relatives aux caisses de mutualité sociale agricole, d'une part, et des dispositions relatives aux caisses d'assurances mutuelles agricoles, d'autre part, a créé dans le nouveau livre VII une incompatiblité entre les fonctions d'administrateur, de directeur et d'agent comptable des caisses de mutualité sociale agricole et les mêmes fonctions au sein des caisses d'assurances mutuelles agricoles. Un administrateur d'une caisse de mutualité sociale agricole ne pouvait donc plus être administrateur d'une caisse d'assurances mutuelles agricoles.
Une telle rédaction, d'ailleurs contraire au principe de la codification à droit constant, eût été dangeureuse pour l'avenir du monde agricole. A l'échelon local, faute de candidats, ce sont souvent les mêmes personnes qui remplissent les fonctions d'administrateur au sein des caisses de mutualité sociale agricole et des caisses d'assurances mutuelles agricoles. Une incompatibilité aussi absolue aurait également risqué de porter atteinte à l'unité de la mutualité agricole.
Après concertation avec les différentes parties intéressées, la commission des affaires sociales vous propose, sous la forme de deux amendements aux articles L. 723-42 et L. 771-4 du code rural, une solution de compromis qui recueille l'assentiment général : le cumul des fonctions d'administrateur de caisse de mutualité sociale agricole et de caisse d'assurances mutuelles agricoles resterait possible, tout comme le cumul de fonctions exécutives - directeur, agent comptable - dans les caisses de mutualité sociale agricole et de fonctions d'administrateur dans les caisses d'assurances mutuelles agricoles, et inversement.
En revanche, le cumul de fonctions exécutives dans les deux organisations serait, quant à lui, prohibé, sauf dérogation expresse accordée par le ministre chargé de l'agriculture.
Telles sont les observations que je souhaitais formuler sur ce texte. Je remercie les services de la commission des affaires sociales du concours précieux qu'ils ont apporté.
Sous réserve de l'adoption de ces amendements, je vous demande donc, mes chers collègues, de bien vouloir adopter ce projet de loi. (Applaudissements.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.

Article 1er et dispositions annexées