M. le président. La parole est à M. Eckenspieller.
M. Daniel Eckenspieller. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question porte sur la préparation du projet de budget pour 1999. (Exclamations sur les travées du RPR.)
Notre collègue Chrisitian Poncelet, président de la commission des finances, n'eût pas manqué de la poser s'il n'avait été retenu par une réunion de la commission mixte paritaire sur la Banque de France.
Le Premier ministre a décidé de « lâcher la bride » sur les dépenses publiques, qui devraient progresser l'année prochaine d'un point de plus que l'inflation, soit de 2,2 %.
Cette orientation contredit à l'évidence les plus récentes analyses de la Banque de France, qui constate que « la poursuite de la consolidation budgétaire devrait, à l'avenir, passer par la réduction de la dépense publique ».
Autre autorité, contre l'analyse de laquelle va la politique préconisée par le Gouvernement, l'Institut monétaire européen, qui, dans son dernier rapport, préconise « de nouveaux progrès substantiels en matière d'assainissement des finances publiques ».
Selon les statistiques de la Commission européenne, la France est le plus mauvais élève avec un déficit structurel, c'est-à-dire hors effet de la croissance, de 2,6 % du produit intérieur brut, pour une moyenne communautaire de 1,7 %.
Pour le moment, le Gouvernement repousse, grâce au retour de la croissance, toute action volontariste, pourtant indispensable, sur les dépenses structurelles des administrations.
De plus, la France est le pays européen où le besoin de financement des administrations publiques est le plus élevé parmi les onze pays qui seront qualifiés pour l'euro dans quelques jours.
Dans ces conditions, pouvez-vous nous indiquer comment la France parviendra à concilier ses engagements européens en adoptant une politique budgétaire contraire à celle de ses principaux partenaires ? Comment la France, en mettant en place une telle politique, peut-elle espérer parvenir rapidement à l'équilibre budgétaire, voire à un excédent, tel que cela est préconisé par le pacte de stabilité, auquel elle a elle-même adhéré ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget. Monsieur le sénateur, M. Dominique Strauss-Kahn aurait aimé répondre à cette question que le président Poncelet aurait pu lui poser.
Pour vous répondre, permettez-moi de faire un bref retour en arrière.
A un moment, la France fut clairement en queue du peloton européen, c'était l'été dernier. (Exclamations sur les travées du RPR), au moment où les perspectives de déficit indiquées par des experts tout à fait indépendants, sans parler du Premier ministre sortant lui-même, étaient de 3,5 % à 3,7 % du produit intérieur brut.
M. Jean Chérioux. Héritage de Bérégovoy !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Paix à son âme !
Grâce aux efforts qu'elle a consentis, la France a retrouvé, d'une part, le chemin de la croissance et, d'autre part, celui d'un équilibre de ses finances publiques compatible avec son entrée dans le groupe de l'euro.
M. Alain Vasselle. Ce n'est pas grâce à vous !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Pour l'année 1998, la Haute Assemblée a eu l'occasion d'examiner le budget et de le critiquer sur certains points. Pour l'année 1999, nous allons poursuivre la même politique sous l'égide d'une autorité qui n'est peut-être pas celle de la Banque de France, qui n'est peut-être pas celle de l'Institut monétaire européen, mais qui est celle du peuple telle qu'il l'a exprimée au mois de juin dernier.
M. Claude Estier. Très bien !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Nous allons donc continuer à soutenir la croissance. Nous allons continuer à lutter contre les exclusions et les plaies sociales de notre pays. Nous allons continuer à utiliser une partie des fruits de la croissance revenue pour réduire nos déficits.
Je veux maintenant citer quelques chiffres.
Le solde des administrations, c'est-à-dire Etat - sécurité sociale, qui était de 3 % en 1998, descendrait à 2,3 % en 1999. C'est un progrès tout à fait sensible, mais c'est aussi un progrès qui écarte les deux risques du rigorisme et du laxisme, comme l'a dit le Premier ministre.
Les dépenses publiques croîtront effectivement de 1 % en francs constants, c'est-à-dire à un taux sensiblement inférieur à celui de la croissance de la richesse nationale, qui est de 3 %.
Cela nous permettra, en procédant en plus à quelques redéploiements, de financer les priorités du Gouvernement qui, me semble-t-il, sont celles de la nation : l'éducation, la recherche, l'emploi, la lutte contre l'exclusion, la justice, la sécurité, la culture, bref tout ce qui concourt à rendre la vie quotidienne de nos concitoyens meilleure qu'elle ne l'était voilà quelques années. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d'actualité au Gouvernement.
Le Sénat va maintenant interrompre ses travaux pendant quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures quinze.)