Séance du 12 juin 1998







M. le président. Par amendement n° 450, MM. Darniche, Durand-Chastel, Habert et Maman proposent d'insérer, après l'article 78, une division additionnelle ainsi rédigée : « Chapitre. - La lutte contre l'illettrisme. »
La parole est à M. Maman.
M. André Maman. L'illettrisme est un facteur suprême d'exclusion. Fléau réel, il empêche l'exercice de la citoyenneté et la participation à la vie sociale. Plus que l'argent, l'exclusion par le savoir est la pire de toute les formes d'exclusion, de par les conséquences multiples qu'elle engendre.
Dans notre société, l'exclusion par le « non-partage » des savoirs et de la connaissance est flagrante. Il est indispensable que cette « bataille nationale » contre l'illettrisme figure dans le « volet de prévention » de ce texte, car le problème doit être traité dès la petite enfance.
Le présent amendement a pour objet d'insérer, au sein du projet de loi, un chapitre qui soit consacré exclusivement à la lutte contre l'illettrisme, puisque, selon l'article 78 bis, ce fléau social est érigé en une véritable « priorité nationale ».
En effet, le projet de loi reste très insuffisant sur ce sujet, qui n'est évoqué que sous la forme d'une déclaration de principe dénuée de toute mesure concrète. Il ne traite de la lutte contre l'illettrisme que dans un seul de ses quatre-vingt-deux articles, à savoir l'article 12. Or la lutte contre l'illettrisme dépasse largement le champ de la formation professionnelle, auquel elle est rattachée dans cet article qui, dans la pratique, ne fait de cette lutte qu'une composante de l'éducation permanente et laisse de côté le problème de l'illettrisme chez les jeunes, qui est pourtant si inquiétant aujourd'hui.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. Cet amendement vise à insérer une division additionnelle intitulée « La lutte contre l'illettrisme ». Cette proposition ne me semble pas pouvoir être retenue, puisque la division ainsi créée ne comprendrait que le seul article 78 bis. Je souhaiterais donc que M. Maman accepte de retirer son amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement partage l'avis de M. le rapporteur.
Je voudrais dire aux auteurs de l'amendement que le Gouvernement comprend tout à fait leur souci de renforcer l'action publique contre l'illettrisme. Cependant, celle-ci doit à nos yeux être organisée en associant l'ensemble des parties prenantes pouvant exercer une action, quelle qu'elle soit, dans le champ de la lutte contre l'illettrisme.
C'est pourquoi, lors de la première lecture du projet de loi, le Gouvernement a accepté, au terme d'une longue discussion à l'Assemblée nationale où étaient évoquées des préoccupations voisines de celles que vous formuliez à l'instant, un amendement de MM. Barrot et Jacquat.
C'est cet amendement qui a créé l'article 78 bis. Celui-ci érige en priorité nationale la lutte contre l'illéttrisme, à laquelle doivent concourir de façon coordonnée l'ensemble des services publics, dont le service public de l'éducation.
L'article 78 bis devrait, me semble-t-il, répondre aux souhaits des auteurs de l'amendement dont nous discutons, puisque, avec cet article, ce sont bien toutes les dimensions de la lutte contre l'illettrisme, notamment la prévention dès la petite enfance, qui sont prises en compte par l'action coordonnée de l'Etat.
Dans ce contexte, il ne semble pas opportun au Gouvernement de créer une nouvelle division consacrée à la lutte contre l'illettrisme.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur. J'ai oublié de souligner dans l'exposé un peu brutal de l'avis de la commission que l'argument majeur contre cet amendement - dont je relève l'intérêt pour la lutte contre l'illettrisme - est qu'un autre article, l'article 12, traite de ce sujet.
M. le président. Monsieur Maman, l'amendement n° 450 est-il maintenu ?
M. André Maman. Après les explications de M. le secrétaire d'Etat et de M. le rapporteur, je retire l'amendement n° 450, en espérant toutefois qu'on engagera enfin une véritable lutte contre l'illettrisme.
Année après année, on répète que l'on va lutter contre ce fléau. Pourtant, non seulement en France mais dans tous les pays développés, on constate que l'illettrisme ne fait qu'augmenter.
La lutte est viciée à la base, car, plutôt que de faire tous les efforts nécessaires, puisqu'il s'agit d'un mal national que l'on essaie d'éradiquer, on s'endort en prenant des mesures provisoires et répétées.
Je retire donc cet amendement de mauvais coeur, car je tiens vraiment à ce qu'on lutte tous ensemble, au-delà des clivages politiques, contre ce mal qui est si grave pour la nation.
M. le président. L'amendement n° 450 est retiré.

Article additionnel avant l'article 78 bis