Séance du 12 juin 1998







M. le président. « Art. 34 bis . - I. - L'article L. 302-8 du code de la construction et de l'habitation est ainsi modifié :
« 1° Le 1° est ainsi rédigé :
« 1° Les logements locatifs sociaux au sens du 3° de l'article L. 351-2 ; ».
« 2° Après le 3° , il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 4° Les logements-foyers dénommés résidences sociales. » ;
« 3° Le neuvième alinéa est supprimé.
« II. - Ces dispositions s'appliquent à partir du 1er janvier 1999. »
Sur cet article, je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 84 est présenté par M. Seillier, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 232 est déposé par M. Braun, au nom de la commission des affaires économiques.
Tous deux tendent à supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 84.
M. Bernard Seillier, rapporteur. La loi du 21 janvier 1995 relative à la diversité de l'habitat avait permis de trouver un équilibre satisfaisant dans l'application de l'obligation de construction de logements sociaux.
L'article 34 bis revient sur cet équilibre et bouleverse la nature des engagements mis en oeuvre par les collectivités locales : parmi les logements sociaux décomptés au titre de la DGF, ne sont plus retenus que les logements financés par des prêts PLA. Les logements HLM en accession à la propriété et les logements financés en PLI ont été retirés.
Ce texte, qui s'appliquera dès le 1er janvier 1999, remet en cause les perspectives sur lesquelles les communes concernées avaient bâti leurs hypothèses de construction de logements sociaux.
Mais surtout, il revient sur la mesure prise en 1995 qui visait, de manière pragmatique, à obliger à la construction de logements sociaux tout en permettant aux communes de faciliter la mise en oeuvre de la mixité sociale.
C'est pourquoi, mes chers collègues, la commission des affaires sociales vous invite à voter un amendement de suppression de l'article 34 bis et à maintenir ainsi la position qu'elle avait adoptée dans son rapport pour avis de décembre 1994.
M. le président. La parole est à M. Lauret, rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° 232.
M. Edmond Lauret, rapporteur pour avis. L'amendement de la commission des affaires économiques a le même objet que celui qui a été déposé par la commission des affaires sociales.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 84 et 232 ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est très défavorable à ces deux amendements. En effet, la loi d'orientation pour la ville fixait des principes éminemment souhaitables pour éviter que ne se développe cette ségrégation urbaine à partir de laquelle naissent toutes les tensions que l'on ne peut que déplorer. Elle ne pouvait évidemment pas produire d'effets sur le stock de logements. Il fallait donc du temps pour qu'elle ait des conséquences lisibles puisqu'elle ne pouvait jouer que sur le flux des constructions nouvelles.
Or, les amendements adoptés lors de l'examen du projet de loi d'orientation pour la ville, sur l'initiative de M. le député Carrez, ont à deux égards vidé de sa substance ce texte : d'une part, ils ont éliminé les petites communes des obligations que la loi d'orientation pour la ville avait créées pour toutes les communes des agglomérations en cause, alors que ce sont souvent ces petites communes qui, parce qu'elles ont une population moindre, ont plus de disponibilités foncières ; d'autre part, ils ont compté comme logements sociaux les logements en accession et les PLI, ce qui, bien évidemment, n'était pas du tout dans l'esprit de la loi d'orientation pour la ville qui voulait corriger la situation de ségrégation existante pour le logement locatif social.
Le Gouvernement s'est donc montré favorable au rétablissement de la loi d'orientation pour la ville dans sa rédaction initiale. Tel était l'objet des deux amendements que l'Assemblée nationale avait votés en première lecture.
Le Gouvernement ne peut qu'être défavorable à la suppression des deux articles qui en résultent, d'autant que le bilan que nous avons pu tirer de l'application de la LOV fait ressortir qu'ont été construits, dans les communes qui avaient trop peu de logements locatifs sociaux, 28 000 logements sur la période de sept ans qui s'est écoulée depuis l'adoption de ladite loi. On voit bien que le correctif, s'il est intéressant, a été instillé à dose homéopathique. Il faut donc au moins retrouver le rythme que permettait la rédaction initiale de la LOV.
M. le président. Je vais mettre aux voix les amendemnts identiques n°s 84 et 232.
Mme Odette Terrade. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade. Nous partagerons les arguments que vient d'exposer M. le secrétaire d'Etat.
L'article 34 bis rétablit une définition du logement social prise en compte pour les quotas de construction de logements sociaux. La modification intervenue à l'Assemblée nationale nous semble essentielle. Depuis plusieurs années déjà, nous oeuvrons pour la voir modifiée dans le sens proposé par le Gouvernement.
Effectivement, la loi d'orientation sur la ville retenait les prêts locatifs intermédiaires, les PLI, et les logements en accession à la propriété acquis à l'aide du prêt à taux zéro. Or, tout le monde sait - mais certains ferment les yeux - que les personnes défavorisées n'ont absolument pas la possibilité d'accéder à ce type de logements, où les loyers de base restent élevés. Retenir comme critère de contribution de l'ensemble des communes à la mixité sociale ce type de logements, c'est se moquer du monde.
Vous proposez, mes chers collègues, de supprimer cet article. Cela ne nous étonne pas. C'est dans la droite ligne des intérêts que vous avez l'habitude de défendre.
Au-delà de la mixité sociale, c'est la diversité géographique et la répartition des logements sociaux que vous remettez en cause.
Nous, nous sommes convaincus que les problèmes de logement des personnes en difficulté se règlent infiniment mieux quand chaque commune prend sa part des efforts à réaliser.
Par conséquent, nous voterons contre les amendements de suppression que vous proposez.
M. Serge Lagauche. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lagauche.
M. Serge Lagauche. Il s'agit ni plus ni moins de supprimer un des apports majeurs de la discussion à l'Assemblée nationale.
L'Assemblée nationale, partant du principe que l'on ne peut travailler à une bonne insertion par le logement des plus démunis sans par ailleurs promouvoir la mixité sociale, c'est-à-dire la diversité, a souhaité supprimer une des dispositions les plus critiquables de la loi, mal nommée, relative à la diversité de l'habitat du 21 janvier 1995, qui a intégré, dans la définition du logement social, le logement intermédiaire et le logement étudiant.
Cette mesure a permis à nombre de communes situées dans les agglomérations de plus de 200 000 habitants de s'exonérer totalement ou en partie de leur obligation triennale de construire des logements sociaux.
Adopter cet amendement de suppression, c'est refuser la politique de mixité territoriale du logement, c'est conforter les égoïsmes locaux, c'est refuser une politique de développement solidaire des territoires. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 84 et 232, repoussés par le Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission des affaires sociales.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 104:

Nombre de votants 317
Nombre de suffrages exprimés 316
Majorité absolue des suffrages 159
Pour l'adoption 219
Contre 97

En conséquence, l'article 34 bis est supprimé.

Article 34 ter