Séance du 18 juin 1998







M. le président. La parole est à M. Revol.
M. Henri Revol. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.
Depuis la loi d'orientation de 1992 sur l'administration territoriale de la République, la coopération intercommunale s'est considérablement développée.
Vous avez présenté, le 4 juin dernier, monsieur le ministre, devant le comité des finances locales, une ébauche de projet de loi relatif à l'organisation et à la simplification de la coopération intercommunale. Une telle réforme est en effet utile et très attendue par tous. Un renforcement de l'intercommunalité apparaît comme une nécessité impérieuse. Il semble d'ailleurs que ce soit l'intercommunalité en milieu urbain plutôt qu'en milieu rural qui bénéficie des faveurs du Gouvernement.
Ce texte prévoit la création d'une nouvelle structure : la communauté d'agglomérations, qui serait soumise, à titre obligatoire, au régime de la taxe professionnelle unique. D'autres groupements seraient par ailleurs incités à avoir recours à ce régime.
Vous avez ainsi estimé à 2,5 milliards de francs sur cinq ans le coût de cette réforme pour l'Etat, compte tenu du coût des incitations versées aux agglomérations qui mettront en place la taxe professionnelle unique.
Diverses pistes ont été évoquées concernant le financement de l'enveloppe autonome de DGF qui serait réservé aux communautés d'agglomérations : taxe professsionnelle de France Télécom, économies sur la compensation des exonérations fiscales, etc.
En aucun cas le financement de l'intercommunalité existante, et surtout pas celui des communes les plus défavorisées, ne doit être touché. En conséquence, monsieur le ministre, prouvez-vous nous préciser comment vous envisagez de financer cette réforme ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur, vous avez à juste tite évoqué les progrès de l'intercommunalité dans notre pays depuis la loi de février 1992 relative à l'organisation territoriale de la République.
Si le Gouvernement a l'intention de proposer au Parlement un projet de loi sur la simplifiction de l'intercommunalité et sur la promotion des communautés d'agglomérations c'est, il faut bien le dire, parce que depuis 1992 l'intercommunalité a progressé beaucoup plus en milieu rural qu'en milieu urbain. Or plus de 75 % des Français vivent en zone urbaine. C'est là que la crise sociale se trouve amplifiée par une ségrégation spatiale. C'est là aussi que s'impose la nécessité de politiques conçues et mises en oeuvre au niveau pertinent, ce niveau pertinent étant, bien souvent, cela va de soi, celui de l'agglomération. Il convient donc de faire en sorte que l'intercommunalité se développe aussi en milieu urbain.
Ai-je besoin de souligner que plus de 1 000 communautés de communes ont été créées, la plupart en milieu rural ou autour de petites villes, et seulement cinq communautés de villes ?
Il se trouve que les sommes consacrées à l'intercommunalité ont également beaucoup crû ; elles sont passées de 3,5 milliards de francs en 1992 à 5,5 milliards de francs en 1997.
Par conséquent, pour promouvoir l'intercommunalité en milieu urbain, notamment pour promouvoir la taxe professionnelle unique dans les aires urbaines de plus de 50 000 habitants constituées autour d'une ville-centre concentrant 75 % de la taxe professionnelle, le Gouvernement envisage plusieurs mesures qui seront soumises évidemment à la discussion des assemblées.
La première concerne la mise en oeuvre de la taxe professionnelle unique ; elle ne saurait se réaliser que de manière progressive et nous envisageons qu'elle puisse être mise en place sur deux mandats, soit sur douze ans.
S'agissant des compétences, elles devront naturellement toucher tout ce qui concerne la politique de l'habitat, tout ce qui, en même temps, concerne la politique de la ville mise en oeuvre par M. Bartolone avec une grande variété de moyens.
Quelle incitation est prévue ? L'attribution d'une dotation globale de fonctionnement de 250 francs par habitant, soit plus du double de celle qui est accordée aux groupements existants.
La décision a donc été prise, comme vous l'avez rappelé, de réserver une dotation de 500 millions de francs par an sur cinq ans pour les nouvelles communautés d'agglomérations.
M. Christian Poncelet. Financée comment ?
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Je vais répondre à votre question, monsieur le président de la commission des finances, qui rejoint d'ailleurs celle de M. Revol.
Vous serez satisfait d'apprendre qu'il s'agira d'une ressource supplémentaire, d'une mesure d'abondement de la DGF des groupements qui sera donc financée en complément des ressources comprises dans le périmètre du pacte de stabilité. Il n'est donc pas question de toucher à la dotation globale forfaitaire des communes, sur laquelle s'impute, comme vous le savez, la DGF des groupements actuelle, par laquelle a été financé le progrès de l'intercommunalité, notamment en milieu rural, que j'évoquais tout à l'heure.
Quant aux modalités précises, plusieurs pistes que vous avez évoquées ont été explorées. Elles seront précisées dans l'optique de la sortie du pacte de stabilité. Le Premier ministre m'a demandé, ainsi qu'à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, à M. le secrétaire d'Etat au budget et à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation, de mener une concertation avec les représentants des grandes associations d'élus, le président du Comité des finances locales et les présidents et les rapporteurs généraux des commissions des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat. Cette première réunion se tiendra lundi prochain.
Cet apport de 500 millions de francs permettra donc de préserver la DGF, notamment les dotations de péréquation versées aux communes les plus défavorisées. En effet, il ne s'agit en aucune manière de financer les groupements au détriment de la dotation de solidarité rurale ou de la dotation de solidarité urbaine. Que cela soit tout à fait clair ! (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur certaines travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Christian Poncelet. Très bien !
M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d'actualité au Gouvernement.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pendant quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures dix, est reprise à seize heures quinze, sous la présidence de M. Paul Girod.)