Séance du 18 juin 1998







M. le président. « Art. 20. - Il est inséré, après l'article 803 du code de procédure pénale, un article 803-1 ainsi rédigé :
« Art. 803-1 . - Dans les cas où, en vertu des dispositions du présent code, il est prévu de procéder aux notifications à un avocat par lettre recommandée ou par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, la notification peut aussi être faite sous la forme d'une télécopie avec récépissé. »
Sur cet article, je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 23 rectifié, M. Fauchon, au nom de la commission, propose, à la fin du texte présenté par cet article pour l'article 803-1 du code de procédure pénale, de remplacer le mot : « récépissé » par les mots : « avis de réception du destinataire ».
Par amendement n° 47, MM. Dreyfus-Schmidt, Badinter et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, à la fin du texte présenté par l'article 20 pour l'article 803-1 du code de procédure pénale, de remplacer le mot : « récépissé » par les mots : « accusé de réception du destinataire adressé, le cas échéant, par la même voie ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 23 rectifié.
M. Pierre Fauchon, rapporteur. L'article 20, dans un souci de simplification et de modernisation bien compréhensible, prévoit que certaines notifications peuvent être faites sous la forme d'une télécopie avec récépissé.
Nous nous sommes toutefois interrogés sur le sens du mot : « récépissé », car, actuellement, le récépissé est délivré par l'appareil émetteur de la télécopie. Nous avons abouti, après discussion, à la conclusion qu'il fallait être tout à fait clair et prévoir que c'est le destinataire qui envoie l'avis de réception, par fax ou par tout autre moyen.
Tel est le sens de cet amendement, qui ne contredit pas la position du Gouvernement mais vise à une sécurité plus grande.
M. le président. La parole est à M. Dreyfus-Schmidt, pour défendre l'amendement n° 47.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. L'amendement n° 23, avant sa rectification, prévoyait que la notification pouvait aussi être faite « sous la forme d'une télécopie avec accusé de réception du destinataire adressé par la même voie ».
Pour notre part, nous considérons qu'il est nécessaire - alors surtout que les notifications peuvent éventuellement faire courir les délais d'appel - d'avoir la preuve que celui auquel a été envoyé une télécopie a bien reçu celle-ci. Ce dernier doit donc pouvoir répondre non seulement par télécopie, mais également par lettre ou en signant, dans le cabinet du juge d'instruction où il peut éventuellement se trouver, un document indiquant qu'il a bien reçu notification.
C'est pourquoi nous avions proposé d'insérer les mots : « accusé de réception du destinataire adressé, le cas échéant, par la même voie », ce qui signifie que l'accusé de réception pouvait être adressé par une autre voie.
Nous en avons discuté en commission, et nous sommes très aisément parvenus à un terrain d'entente, en visant non plus l'« accusé de réception », mais l'« avis de réception du destinataire ».
Par conséquent, étant donné que nous acceptons le texte de l'amendement n° 23 rectifié - précisément parce qu'il a été rectifié - nous retirons l'amendement n° 47.
M. le président. L'amendement n° 47 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 23 rectifié ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Le projet de loi tend à généraliser la substitution de la télécopie aux envois par lettre simple ou recommandée dans diverses hypothèses, rappelées dans le rapport de la commission des lois.
M. le rapporteur et M. Dreyfus-Schmidt craignent que l'avocat destinataire de la télécopie ne la reçoive pas en main propre. Il est vrai qu'une télécopie peut très bien s'égarer dans le cabinet d'un avocat ou qu'une secrétaire peut oublier de la remettre, mais c'est très exactement la même chose pour une lettre simple ou recommandée avec accusé de réception, ce dernier étant évidemment signé non pas par l'avocat lui-même mais par son secrétariat ! Il n'y a donc aucune raison d'exiger un récépissé spécial lorsque l'envoi est fait par télécopie.
De plus, si nous retenions cette solution, il suffirait que le destinataire ne renvoie pas le récépissé, bien qu'ayant reçu le message, pour bloquer la procédure. Et il est évident que, dans ces conditions, les juridictions n'utiliseraient jamais ce mode de transmission, qui les mettrait à la merci du bon vouloir du destinataire.
Adopter cet amendement reviendrait à supprimer la disposition proposée par le Gouvernement, alors qu'elle est pourtant très utile et qu'elle permettra des économies substantielles, tout en donnant la possibilité aux avocats d'être avisés en temps réel, sans devoir subir les aléas des lenteurs de La Poste ou des grèves.
Je vous demande donc de ne pas adopter cet amendement.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Et s'il y a des erreurs dans la transmission ?
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 23 rectifié.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Quand le courrier arrive, on l'ouvre et on en prend connaissance. Mais c'est un ensemble, tout arrive en même temps. Alors que les télécopies peuvent arriver au milieu de la nuit, et l'on ne sait pas ce que ceux qui pourraient passer par là au petit matin vont en faire ! Ce n'est pas la même chose, et je le dis d'expérience.
De plus, il peut y avoir une erreur de numéro, on peut avoir envoyé la télécopie à l'ancien cabinet de l'avocat. Et permettez-moi de dire que, là aussi, j'en ai fait l'expérience personnelle. Celui qui reçoit un fax qui ne lui est pas destiné peut évidemment avoir le scrupule de le renvoyer à son destinataire, mais il peut aussi penser que ce n'est pas son affaire et le jeter.
On me dira qu'à ce moment-là il n'y aura pas accusé de réception. Encore faudra-t-il s'en rendre compte ! Le juge aura tendance à dire qu'il a envoyé la télécopie, sans aller vérifier que le récépissé porte le numéro erroné ou devenu inexact.
Il est donc prudent d'exiger ici un accusé de réception du destinataire d'une télécopie. Et il est évident que tous les avocats de France et de Navarre ne manqueront pas d'en accuser réception, s'ils l'ont reçu, parce qu'ils sauront que c'est la loi. Je pense même que le juge pourra leur envoyer en même temps un avis de réception qu'ils n'auront plus qu'à signer avant de le retourner !
M. Jean-Jacques Hyest. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Hyest.
M. Jean-Jacques Hyest. Je comprends le souci de la commission et celui de M. Dreyfus-Schmidt, mais, quand on envoie une télécopie, on sait que la copie a été transmise ! On ne peut pas trafiquer la machine, qui indique bien que la copie a été transmise à tel numéro. L'accusé de réception existe donc !
Demander un accusé de réception supplémentaire alourdirait la procédure, et n'offrirait pas plus de garantie qu'une lettre ordinaire : pas plus qu'une télécopie, on ne sait si une lettre est bien parvenue à destination.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Sauf si elle est recommandée avec accusé de réception !
M. Jean-Jacques Hyest. Je prétends que le système actuel de la télécopie - mais je ne suis pas un spécialiste - garantit la bonne transmission, et au bon destinataire, de la copie. Il serait un peu dommage, ne serait-ce que pour des raisons de rapidité, de ne pas utiliser la télécopie !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 23 rectifié, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 20, ainsi modifié.

(L'article 20 est adopté.)

Article additionnel après l'article 20