Séance du 25 novembre 1998







M. le président. « Art. 28. - I. - L'article 158 bis du code général des impôts est ainsi modifié :
« 1. Les dispositions de cet article sont regroupées sous un I.
« 2. Il est ajouté un II ainsi rédigé :
« II. - Par exception aux dispositions prévues au I, ce crédit d'impôt est égal à 45 % des sommes effectivement versées par la société lorsque la personne susceptible d'utiliser ce crédit n'est pas une personne physique. Cette disposition ne s'applique pas lorsque le crédit d'impôt est susceptible d'être utilisé dans les conditions prévues au 2 de l'article 146. »
« II. - Le premier alinéa du 1 de l'article 223 sexies du code général des impôts est ainsi modifié :
« 1. A la première phrase, les mots : "montant du crédit prévu à l'article 158 bis et attaché à ces distributions" sont remplacés par les mots : "crédit d'impôt calculé dans les conditions prévues au I de l'article 158 bis ". »
« 2. Après la première phrase, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
« Toutefois, le précompte est égal au crédit d'impôt calculé dans les conditions prévues au II de l'article 158 bis lorsque la société justifie qu'il est susceptible d'être utilisé. »
« 3. La dernière phrase est ainsi rédigée :
« Le précompte est dû au titre des distributions ouvrant droit au crédit d'impôt prévu à l'article 158 bis quels qu'en soient les bénéficiaires. »
« III. - 1. Les dispositions du I s'appliquent aux crédits d'impôt utilisés à compter du ler janvier 1999.
« 2. Les dispositions du II s'appliquent aux distributions mises en paiement à compter du ler janvier 1999. »
Je suis saisi de cinq amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° I-263, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose de supprimer cet article.
Par amendement n° I-66, MM. Badré et Fréville proposent :
I. - De compléter le texte présenté par le 2 du I de l'article 28 pour le II de l'article 158 bis du code général des impôts par une phrase ainsi rédigée :
« Lorsque les dividendes ont donné lieu au versement du précompte visé au 1 de l'article 223 sexies et que les produits distribués correspondant à ces dividendes n'ont pas été prélevés sur la réserve spéciale des plus-values à long terme, le crédit d'impôt de 45 % est complété par un crédit d'impôt compensatoire égal à 10 % dudit précompte. »
II. - En conséquence, de supprimer le 2 du II de cet article.
Par amendement n° I-85, MM. Deneux et Fréville proposent de compléter le texte présenté par le 2 du paragraphe I de l'article 28 pour le II de l'article 158 bis du code général des impôts par un alinéa ainsi rédigé :
« Le crédit d'impôt est égal à 50 % des sommes effectivement versées lorsqu'elles résultent de la détention de parts de sociétés coopératives, à l'exclusion du recours aux dispositions du deuxième alinéa de l'article 16 de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération. »
Par amendement n° I-138, M. Loridant propose de compléter le texte présenté par le 2 du II de l'article 28 pour insérer une phrase après la première phrase du premier alinéa du I de l'article 223 sexies du code général des impôts par les mots suivants : « ... par des personnes autres que des personnes physiques ou dans les conditions du 2 de l'article 146 du code général des impôts, éventuellement par voie de restitution. »
Par amendement n° I-137, M. Loridant propose, après le II de l'article 28, d'insérer un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Après le troisième alinéa de l'article 223 sexies du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L'impôt sur les sociétés restant dû après imputation de l'avoir fiscal visé au II de l'article 158 bis est réputé constituer un bénéfice soumis à l'impôt sur les sociétés au taux normal au sens du premier alinéa. »
La parole est M. le rapporteur général, pour défendre l'amendement n° I-263.
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission propose, cette fois-ci, la suppression de l'article 28, et je vais brièvement vous expliquer ses motivations.
Par cet article, le Gouvernement prévoit de réduire le montant de l'avoir fiscal de 50 % à 45 % du montant des produits distribués aux actionnaires personnes morales.
Pour mesurer l'effet de la mesure, il convient de rappeler que l'avoir fiscal n'élimine totalement la double imposition qui pèse sur les bénéfices distribués que lorsque deux conditions sont remplies simultanément : un avoir fiscal égal à la moitié des sommes distribuées, et un taux d'imposition des bénéfices des sociétés de 33,33 %. C'est en quelque sorte le point d'équilibre.
Aujourd'hui, la seconde de ces deux conditions n'est plus remplie. En effet, à la suite de la loi portant mesures urgentes à caractère fiscal et financier, dite MUFF, votée à l'automne 1997, le taux de l'impôt sur les sociétés a été porté à 41,66 %. L'avoir fiscal de 50 % n'efface donc plus totalement l'impôt sur les sociétés subi par les bénéfices distribués, et les dividendes font donc l'objet d'une taxation supplémentaire au taux de 7,3 % entre les mains des actionnaires, ce qui doit naturellement réjouir Mme Beaudeau et les membres de son groupe.
Conformément aux dispositions de la loi dite MUFF, le taux de l'impôt sur les sociétés sera ramené à 40 % en 1999. C'est une promesse tenue.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Merci !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Mais mieux aurait valu ne pas augmenter ce taux à 41,66 %.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Nous avons été à bonne école !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cela va réduire de 7,3 % à 6 % l'impôt supplémentaire payé par les actionnaires.
Loin de se satisfaire d'un tel allégement d'impôts, le Gouvernement nous propose aujourd'hui de diminuer, en contre-partie, le montant de l'avoir fiscal pour les seuls actionnaires personnes morales, ce qui devrait conduire à péréniser le prélèvement supplémentaire qu'ils doivent acquitter.
C'est donc, en quelque sorte, je le souligne, une sorte de manquement à la parole donnée lorsque le Gouvernement avait présenté l'augmentation du taux de l'impôt sur les sociétés comme une mesure temporaire. En effet, il en reprend, dans une situation certes particulière,...
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Vous parlez du gouvernement de M. Juppé ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Non, je parle de celui de M. Jospin !
Vous aviez bien indiqué que le prélèvement sur les sociétés prévu dans la loi dite MUFF serait modéré.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. On l'a fait pour 1999, vous le reconnaissez vous-même.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Tout à fait, mais ce que je veux dire, monsieur le secrétaire d'Etat, c'est que, dans ce cas particulier, vous reprenez d'une main une partie de ce que vous avez donné de l'autre, en ce qui concerne les actionnaires personnes morales.
Je pense avoir montré par ces quelques chiffres qu'en accroissant la double imposition qui touche les revenus distribués cet article aura pour conséquence d'annuler en partie la baisse de l'impôt sur les sociétés, ce que la commission des finances ne peut pas admettre.
Le Gouvernement oublie en outre que les PME qui réalisent moins de 50 millions de francs de chiffre d'affaires n'ont pas été touchées...
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Eh oui !
M. Philippe Marini, rapporteur général. ... par les contributions exceptionnelles à l'impôt sur les sociétés de 15 %, puis de 10 %. Mais cette mesure de faveur, que vous leur avez consentie en 1997, se retourne maintenant contre elles avec l'article 28. Elles seront directement pénalisées par la baisse de l'avoir fiscal sans compensation d'aucune sorte.
Il s'agit d'une petite mesure anti-PME, certes, mais d'une mesure anti-PME tout de même ! Par ailleurs, elle institue un traitement différencié entre les actionnaires, selon qu'ils sont personnes morales ou personnes physiques, et une distorsion avec le précompte qu'il est proposé dans le texte, sous réserve d'ajustements difficiles à mettre en oeuvre, de calculer toujours au taux de 50 %.
Le Gouvernement rend ainsi encore plus complexes, mes chers collègues, un mécanisme qui ne se distinguait déjà pas par sa simplicité. Il m'a fallu une analyse approfondie pour en décrypter, avec l'aide précieuse des services de la commission, les détours quelque peu confus.
Enfin, la mesure proposée, qui a vraiment tout pour nous plaire, est rétroactive, puisqu'elle s'appliquerait à des distributions qui ont eu lieu en 1998 et qui ont été assorties d'un avoir fiscal à 50 %. Certaines d'entre elles ont pu déjà donner lieu au versement d'un précompte à 50 %.
On le voit bien, mes chers collègues, à partir de tous ces éléments que j'ai égrenés avec tristesse, la commission des finances ne peut que proposer la suppression de l'article.
M. le président. La parole est à M. Badré, pour défendre l'amendement n° I-66.
M. Denis Badré. Cet amendement vise à annuler, par un crédit d'impôt compensatoire de l'excédent du précompte, l'effet de la réduction de 50 % à 45 % du taux de l'avoir fiscal attaché aux dividendes distribués à des actionnaires autres que des personnes physiques. Il est donc motivé par le souci de respecter scrupuleusement le principe de l'égalité devant l'impôt.
La solution que je propose s'inspire d'ailleurs, pour atteindre cet objectif, du dispositif de remboursement du précompte prélevé sur les dividendes servis aux actionnaires non-résidents n'ayant pas droit au transfert de l'avoir fiscal. Elle ferait donc coup double en rétablissant aussi l'égalité entre résidents et non-résidents sur ce point.
M. le président. La parole est à M. Deneux, pour défendre l'amendement n° I-85.
M. Marcel Deneux. L'article 28 du projet de loi de finances prévoit de réduire de 50 % à 45 % des sommes nettes distribuées le montant de l'avoir fiscal attaché aux dividendes reçus par les sociétés, directement ou par l'intermédiaire de sociétés de personnes ou d'organismes de placement collectif en valeurs mobilières, et utilisés à compter du 1er janvier 1999.
Dans sa présentation, le 22 juillet 1998, des grandes orientations des finances publiques pour 1999, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie a déclaré avoir proposé cette réduction du taux de l'avoir fiscal des entreprises « afin que la fiscalité ne favorise pas les placements financiers spéculatifs des entreprises ». Or, les coopératives ne sont pas visées par cette proposition, car les personnes morales porteuses de parts sociales d'entreprises coopératives ne peuvent en aucune façon être concernées par de telles motivations.
En effet, d'une part, le fait d'être sociétaire d'une société coopérative implique par nature, l'existence d'un lien avec l'activité économique de cette société ; d'autre part, le capital des sociétés coopératives est composé presque exclusivement de parts sociales dont les caractéristiques sont fondalement différentes de celles des actions.
La combinaison de ces caractéristiques fait que le porteur de parts sociales d'une coopérative ne peut jamais espérer de profit spéculatif de sa souscription au capital social.
Il recevra au mieux un intérêt annuel limité, et il ne pourra céder ses parts qu'au prix où il les a achetées. En aucun cas il ne peut donc réaliser une plus-value sur ses parts sociales. Il ne peut pas non plus acquérir le contrôle de l'entreprise.
Dans ces conditions, il est légitime que les personnes morales détentrices de parts sociales d'entreprises coopératives non revalorisables continuent de bénéficier d'un avoir fiscal de 50 %.
M. le président. La parole est à M. Loridant, pour présenter les amendements n°s I-138 et I-137.
M. Paul Loridant. Je tiens d'abord à dire que je présente ces deux amendements à titre personnel, et qu'ils ne sauraient engager le groupe auquel j'appartiens.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ce sont plutôt de bons amendements !
M. Paul Loridant. Ces amendements techniques portent, il faut le reconnaître, sur un sujet particulièrement difficile.
L'amendement n° I-138 est un simple amendement de précision destiné à éviter des difficultés d'interprétation de l'article 28.
Quant à l'amendement n° I-137, je voudrais apporter les précisions suivantes.
L'article 28 de ce projet de loi de finances prévoit de réduire le taux de l'avoir fiscal attaché à certains dividendes : l'avoir fiscal passerait ainsi de 50 % du dividende à 45 %, afin d'alourdir la taxation de certains gains spéculatifs réalisés non pas par des personnes physiques, mais par des personnes morales, par des entreprises.
Cette disposition, dont je comprends tout à fait la motivation, pose toutefois des difficultés d'application. En effet, l'abaissement de l'avoir fiscal à 45 % du dividende conduit l'entreprise à payer un impôt complémentaire et donc à réduire le montant du dividende effectivement mis en distribution, quelle que soit la personne qui bénéficie de cette distribution.
Si l'objet est bien d'atteindre les sociétés qui procèdent à des placements que l'on peut qualifier de « spéculatifs », il convient, en revanche, de ne pas réduire en chaîne les sommes effectivement distribuées. C'est pourquoi une mesure de correction serait souhaitable. D'apparence complexe, elle est au fond très simple : il s'agit, non pas de revenir sur le dispositif proposé qui, à mes yeux, va dans le bon sens puisque l'entreprise reste redevable d'un impôt complémentaire sur le dividende perçu, mais de prévoir que cet impôt supplémentaire ne viendra pas en diminution de la masse distribuable aux actionnaires de cette société.
Il reste que, si le bénéficiaire de la nouvelle distribution est une personne morale, cette dernière ne bénéficiera que d'un avoir fiscal de 45 %. La pénalisation est donc maintenue, monsieur le secrétaire d'Etat, mais elle est mieux ciblée sur les seules sociétés réalisant des gains spéculatifs sur le marché boursier, et non pas sur des personnes physiques.
Enfin, cette mesure de correction a pour effet supplémentaire de faire entrer des recettes dans les caisses du Trésor puisque les actionnaires bénéficiaires d'un dividende non réduit du montant de l'impôt payé acquitteront alors un impôt sur le revenu supérieur.
Telles sont les considérations techniques qui me font proposer cet amendement I-137, qui, à mon sens, vient améliorer la rédaction du texte initial et qui, vous l'avez compris, monsieur le secrétaire d'Etat, vient conforter le texte contrairement à l'amendement de la commission des finances qui, lui, tend à supprimer l'article.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur Badré, nous nous trouvons dans la situation inverse de celle que nous avons connue à l'article précédent, puisque c'est maintenant la commission qui propose la suppression et vous qui proposez l'aménagement.
M. Denis Badré. C'est précisément ce que je me disais !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Au demeurant, nos aspirations sont tout à fait identiques.
M. Deneux a formulé une remarque tout à fait justifiée, mais son amendement sera satisfait par le vote de l'amendement de suppression.
Les deux amendements présentés par Paul Loridant sont extrêmement judicieux : ils soulèvent des problèmes tout à fait pertinents avec une grande finesse technique. Je regrette donc que, dans l'hypothèse où l'amendement de suppression serait voté, il subirait un sort défavorable...
M. Paul Loridant. L'Assemblée nationale y remédiera.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cher collègue, nous sommes au Sénat. Mais peut-être y aura-t-il effectivement un député qui exprimera les mêmes préoccupations que vous !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s I-263, I-66, I-85, I-138 et I-137 ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est défavorable, on le comprendra, à l'amendement de suppression totale, présenté par M. Marini, comme à l'amendement de suppression partielle, défendu par M. Badré.
Je ne vais pas reprendre l'explication du bien-fondé de l'article 28 ; je dirai simplement que le Gouvernement estime, avec la majorité plurielle qui le soutient, qu'il faut encourager les entreprises à se tourner - ce qu'elles font spontanément - vers des investissements productifs plutôt que vers des investissements financiers ; la création de 300 000 emplois intervenue cette année le montre à l'évidence. Mais, pour réduire certaines tentations exceptionnelles, la diminution de l'avoir fiscal rend un peu moins attractif l'investissement financier des entreprises non financières.
Je ferai deux remarques constructives à l'intention de M. le rapporteur général.
Tout d'abord, les PME distribuent des dividendes, c'est vrai, mais la plupart du temps elles le font à des personnes physiques et elles bénéficient, alors, de l'avoir fiscal inchangé de 50 %.
Ensuite, vous avez émis des critiques à l'encontre d'une légère rétroactivité. Bien qu'ayant été privé de la possibilité de participer à un certain débat qui s'est déroulé à l'Assemblée nationale, je peux vous dire que M. Sarkozy acceptait, lui, une petite rétroactivité ; vous pourrez donc dialoguer avec lui sur ce point.
A M. Deneux, je dirai en toute cordialité que, du point de vue fiscal, les sociétés coopératives sont exactement placées sur le même plan que les autres formes de sociétés. L'exception qu'il suggère ne paraît donc pas opportune au Gouvernement.
M. Loridant s'est placé dans un état d'esprit complètement différent. Il a, à titre personnel, proposé de très subtiles améliorations techniques. Je vais lui répondre rapidement ; un dialogue ultérieur pourra être engagé avec les spécialistes.
Je crois avoir compris l'intention de l'amendement n° I-138 : il s'agit d'abaisser le taux du précompte à 45 % lorsque l'avoir correspondant susceptible d'être utilisé par l'actionnaire ne s'élève plus qu'à 45 %.
L'article 28 tel qu'il est rédigé répond déjà à votre préoccupation, monsieur le sénateur.
A propos du même amendement, je vous indique que, dans la situation où la société distributrice aurait acquitté un excédent de précompte, cas qui peut se produire, elle serait en droit d'en demander la restitution, comme il en va de tout impôt payé à tort, dans les conditions prévues aux articles bien connus R. 196-1 et suivants du livre des procédures fiscales.
Il me semble donc, monsieur Loridant, que votre amendement n° I-138 est déjà exaucé.
Quant à l'amendement n° I-137, il me semble moins justifié que le précédent car, du fait de la réduction de 50 % à 45 % du taux de l'avoir fiscal, les sociétés devront acquitter un impôt supplémentaire qui devrait logiquement venir diminuer leur capacité de distribution.
La solution que vous préconisez par votre amendement autoriserait en réalité des sociétés à distribuer sans précompte d'autres bénéfices que ceux qui proviennent de dividendes perçus.
Au surplus, votre amendement conduirait le Trésor à octroyer aux actionnaires personnes physiques de la société un avoir fiscal dont une partie ne correspondrait au versement d'aucun impôt, ce qui serait inacceptable.
Telles sont les quelques remarques assez techniques, mais qui rendent hommage à la qualité de votre réflexion, que je souhaitais faire sur vos deux amendements. Il me semble qu'après ces commentaires vous pourriez les retirer.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-263.
M. Thierry Foucaud. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la majorité de la commission des finances a décidé de remettre en question la réduction à 45 % de l'avoir fiscal des personnes morales.
Outre que l'application de cette proposition coûterait à peu près 1 milliard de francs, qu'il faudrait bien retrouver quelque part, elle ne nous paraît pas justifiée.
En effet, le taux de l'impôt sur les sociétés est, depuis 1993, fixé à 33,33 %.
Même lorsque l'on prend en compte les majorations exceptionnelles, on parvient pour 1999 à un taux d'environ 40 % pour les entreprises réalisant un chiffre d'affaires supérieur à 50 millions de francs et de 36,67 % pour les autres.
Rien donc, dans les faits, si l'on considère l'avoir fiscal comme la récupération d'une double imposition, ne justifie le maintien du taux de cet avoir fiscal à 50 %, taux d'imposition historique de l'impôt sur les sociétés.
Pour notre part, nous considérons l'article 28 comme un premier pas dans l'application réaliste du dispositif de l'avoir fiscal.
C'est d'autant plus vrai qu'il ne s'est produit qu'un accroissement du montant des dividendes versés dans la foulée du processus de réduction du taux de l'impôt sur les sociétés.
Rappelons que l'existence de l'avoir fiscal obère singulièrement l'efficacité économique et sociale de l'impôt sur le revenu comme celle de l'impôt sur les sociétés, d'autant que les dividendes versés par les entreprises privées ont atteint, en 1997, le montant historique de 500 milliards de francs.
Nous ne voterons donc pas l'amendement n° I-263 de la commission des finances.
M. le rapporteur général s'inquiétait tout à l'heure du désordre qui régnait au sein de la majorité dite « plurielle ». Je lui répondrai simplement que les amendements que je dépose visent à enrichir et non à affadir le texte.
En ce qui me concerne, je veux affirmer haut et fort que j'approuve et soutiens un gouvernement qui s'engage à créer des centaines de milliers d'emplois-jeunes, à instaurer les 35 heures et à augmenter les minima sociaux. Vous aurez bien évidemment compris, mes chers collègues, que je ne puis soutenir le contraire.
M. Jean-Pierre Demerliat. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Demerliat.
M. Jean-Pierre Demerliat. Le dispositif proposé par l'article 28 est sans conteste compliqué et son application n'ira pas sans poser de problèmes, s'agissant notamment des non-résidents mais aussi de la mesure prévue en matière de précompte. Ce n'est pourtant pas une raison pour rejeter cet article, bien au contraire.
Le Gouvernement, en présentant ce dispositif, a un double objectif : d'une part, celui de taxer les gains spéculatifs réalisés sur les marchés boursiers et, d'autre part, celui d'inciter les entreprises à orienter leurs ressources vers des investissements créateurs d'emplois. C'est la raison pour laquelle il a choisi de ne viser que les personnes morales. Nous ne pouvons que souscrire à ces deux motivations.
Au demeurant, en analysant l'évolution du prélèvement fiscal dans le cadre de l'impôt sur les sociétés intervenue depuis les trente dernières années, force est de constater que l'avoir fiscal a eu un impact disproportionné.
En effet, il a contribué non seulement à atténuer la double imposition résultant de l'application de l'impôt sur les bénéfices, ensuite sur les dividendes, mais aussi à effacer en quasi-totalité, voire en totalité, la taxation au titre de l'impôt sur les sociétés.
Je rappelle qu'il n'existe dans le droit communautaire aucun principe impliquant cette neutralisation. Il n'y a aucune raison de poursuivre dans ce sens. Il est donc tout à fait positif, sachant par ailleurs que l'impact de l'article 28 est limité, de réduire la portée de l'avoir fiscal. Le groupe socialiste ne peut que se féliciter du fait que le Gouvernement l'ait inséré dans le projet de loi de finances.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-263, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 28 est supprimé et les amendements n°s I-66, I-85, I-138 et I-137 n'ont plus d'objet.

Article 28 bis