Séance du 16 décembre 1998







M. le président. « Art. 24. - I. - Les dispositions de l'article 1er de la présente loi entreront en vigueur pour le premier renouvellement général des conseils régionaux qui suivra sa publication.
« II. - L'article 21 de la présente loi sera abrogé à compter de la date du prochain renouvellement général des conseils régionaux. Il cesse également d'être applicable à tout conseil régional renouvelé avant cette date. Il n'est pas applicable à la collectivité territoriale de Corse.
« III. - Les dispositions de l'article L. 4311-1-1 du code général des collectivités territoriales sont applicables dans les régions dont le budget ne peut être considéré comme adopté, à la date de promulgation de la présente loi, soit en application des deux premiers alinéas de l'article L. 4311-1-1 du code général des collectivités territoriales dans sa rédaction initiale, soit en application des quatre alinéas suivants.
« L'article L. 4311-1-1 du même code sera abrogé à compter de la date du prochain renouvellement général des conseils régionaux. Il cesse également d'être applicable à tout conseil régional renouvelé avant cette date. »
Par amendement n° 34, M. Paul Girod, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit cet article :
« I. - Les titres Ier et II et l'article 23 de la présente loi sont applicables à compter du prochain renouvellement général des conseils généraux.
« II. - L'article L. 4311-1-1 du code général des collectivités territoriales est abrogé à compter de la date du prochain renouvellement général des conseils régionaux. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Paul Girod, rapporteur. L'article 24 est relatif à l'entrée en vigueur de la loi. Nous avons déjà évoqué cette question dès le début de l'examen de ce texte. Ce fut l'occasion d'un débat en première lecture au cours duquel la commission des lois avait fait part de ses réflexions et de ses inquiétudes. A la suite de ce débat et des arguments échangés sur les différentes travées de notre assemblée, et avec le Gouvernement, les présidents de groupes de la majorité sénatoriale avaient décidé de déposer une motion tendant à opposer la question préalable.
Le Gouvernement nous avait expliqué qu'il était urgent de délibérer sur ce projet de loi qui, en réalité, comporte deux textes réunis, pour les besoins de la cause, en un seul : un texte sur le code électoral et un texte sur le fonctionnement des conseils régionaux, le second étant nécessaire pour mettre fin au désordre. Or, s'il y a désordre, c'est parce qu'on n'applique pas la loi qui a été votée au mois de mars dernier, et dont certaines dispositions ont été sanctionnées tout à l'heure par le Sénat qui a adopté une motion d'irrecevabilité constitutionnelle.
Puisqu'il y avait urgence sur la partie du texte relatif au fonctionnement, il devait également y avoir urgence sur la partie du texte relatif au code électoral. Le Gouvernement avait promis de réformer le code électoral aussitôt après les élections régionales. Il a déposé un texte. Dont acte !
Pour autant, il n'était pas obligé de hâter les choses de manière inconsidérée pour nous faire adopter ledit texte dans la mesure où les prochaines élections régionales n'auraient lieu qu'en 2004.
M. Guy Allouche. Le Gouvernement tient ses promesses !
M. Paul Girod, rapporteur. Non ! Il fait une promesse raisonnable et tient une promesse déraisonnable !
La promesse raisonnable était de déposer un texte. Ce qui est déraisonnable, c'est d'en empêcher la discussion sérieuse alors qu'il s'agit d'un sujet délicat.
M. Guy Allouche. C'est un engagement tenu !
M. Paul Girod, rapporteur. Non, le Gouvernement avait promis de déposer un texte. Il n'avait jamais dit qu'il en imposerait l'adoption aux forceps.
M. Claude Estier. Quand on dépose un texte, c'est pour le faire adopter, quand même !
M. Paul Girod, rapporteur. Mais pas n'importe comment, vous le savez aussi bien que moi !
M. Hilaire Flandre. Et pas sur n'importe quoi !
M. Paul Girod, rapporteur. Puis nous découvrons dans le dernier article du projet de loi que l'on veut rendre le code électoral applicable tout de suite, ce qui, entre nous soit dit, va créer des situations ubuesques.
M. Patrice Gélard. In cauda venenum !
M. Paul Girod, rapporteur. Bien entendu, on avait probablement prévu qu'un conseil régional, Dieu sait lequel ? - monsieur le président, vous qui êtes plus haut que nous, vous avez peut-être des lumières sur la question -, ne pouvant plus fonctionner serait dissous, que l'on pourrait lui appliquer la nouvelle loi et que cela fonctionnerait beaucoup mieux pour certains, encore que, quelquefois, les choses se retournent...
Mais entre-temps se profile une décision du Conseil d'Etat visant - alors que la loi, si j'ai bien compris l'intention de ses auteurs, devrait être définitivement votée le 22 décembre et promulguée si cela est possible avant le 1er janvier - à annuler une élection dans un certain département.
Selon quel système sera organisé le scrutin si la loi est d'application immédiate et si l'annulation de l'élection dans ce département intervient après la promulgation de la loi nouvelle ? L'ancien système est mort ; les conseillers régionaux ne peuvent donc être élus dans une circonscription régionale.
Cela prouve bien que tout cela est fait dans des conditions circonstancielles excessives et que, dans cette affaire, il y a des arrière-pensées un peu partout.
De la même manière, il n'est pas raisonnable de prévoir des applications différenciées dans le temps avec un terme pour la partie du texte concernant le fonctionnement des conseils régionaux qui disparaîtra le jour du prochain renouvellement général des conseils régionaux. Il n'est pas raisonnable non plus de prévoir une application immédiate d'une loi électorale alors que le contentieux des élections précédentes n'est pas apuré.
Ces anomalies déjà, à elles seules, justifient l'amendement de la commission des lois qui prévoit de revenir à des notions plus sérieuses : application du nouveau système électoral au moment du renouvellement général de tous les conseils régionaux.
M. Jean-Patrick Courtois. Très bien !
M. Paul Girod, rapporteur. Si vous êtes tellement persuadé de l'efficacité de votre loi, rien ne vous empêche, monsieur le ministre, de déposer sur le bureau d'une assemblée un projet de loi de dissolution générale des conseils régionaux. En cette matière, seules les dissolutions affectant certains conseils régionaux sont du ressort du Gouvernement - elles sont prises en conseil des ministres - mais je vous rappelle qu'une dissolution générale est toujours possible par le biais de l'adoption d'une loi particulière, à condition que celle-ci soit de portée générale.
Par conséquent, je crois qu'il n'y a pas de raison d'accepter le dispositif qui nous est proposé, d'autant plus que nous nous trouverions, au cas où le nouveau système électoral serait applicable tout de suite et où une dissolution ponctuelle serait prononcée, avec des conseils régionaux administrant des collectivités identiques mais issus de systèmes d'élection différents, ce qui ne s'est jamais vu dans l'histoire de la République. On a même différé l'entrée en vigueur de réformes électorales concernant les villes nouvelles et un certain nombre d'établissements de cet ordre jusqu'au renouvellement des conseils municipaux, pour ne pas créer de distorsions.
Entre nous, comment pourrait-on concevoir, puisque cette loi est si bonne et que le conseil régional qui serait élu selon la nouvelle loi électorale serait si supérieur aux autres, qu'il soit traité de la même manière que les autres dans l'optique des contrats de plan ?
Il y a donc rupture de l'égalité, et c'est la raison pour laquelle la commission des lois propose au Sénat d'adopter l'amendement, qui tend à reporter l'entrée en vigueur des différentes parties de la loi, y compris du code électoral, au prochain renouvellement général des conseils régionaux. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim. Le Gouvernement est hostile à cet amendement, parce qu'il pense, et le texte le prévoit, que le principe de l'application immédiate d'une loi nouvelle est un principe général de la loi. En conséquence, pourquoi ne s'appliquerait-il pas aux dispositions relatives au fonctionnement des conseils régionaux et à l'élection de ceux-ci ?
M. Girod demande quel système serait appliqué en cas d'annulation des élections dans un département pour de nouvelles élections. Le Conseil d'Etat sera consulté.
Nous sommes dans l'hypothèse d'une annulation d'élections dans un département particulier. Les membres du conseil régional, élus dans les autres départements, conserveront leur mandat. Le mode de scrutin pour les nouvelles élections sera celui qui était en vigueur le 15 mars 1998, c'est-à-dire le jour où avaient eu lieu ces élections.
Dans l'hypothèse d'une dissolution d'un conseil régional, qui est décidée par le conseil des ministres, en cas de blocage généralisé de l'institution, il me paraît alors tout à fait logique, le blocage résultant d'une situation politique, en particulier d'un mode de scrutin, que le renouvellement complet du conseil régional se fasse avec un mode de scrutin qui permette l'émergence d'une nouvelle majorité.
Telle est la logique du projet de loi, et je n'y vois aucune contradiction, ni aucune rupture d'égalité née du mode de l'élection.

(M. Jacques Valade remplace M. Jean-Claude Gaudin au fauteuil de la présidence.)PRÉSIDENCE DE M. JACQUES VALADE
vice-président

M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 34.
M. Guy Allouche. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Allouche.
M. Guy Allouche. Je regrette que l'on ne puisse pas avoir connaissance de l'avis du Conseil d'Etat sur ce projet de loi, car il aurait été intéressant sur cette disposition.
En général, la presse se fait toujours l'écho d'un avis, surtout lorsqu'il est favorable, du Conseil d'Etat sur tel ou tel projet de loi. Or, à ma connaissance, je n'ai rien lu de tel.
M. Hilaire Flandre. Pas de nouvelle, bonne nouvelle !
M. Guy Allouche. M. le ministre vient de nous donner une explication ; j'ose espérer que celle-ci tient compte de l'avis du Conseil d'Etat.
Monsieur le rapporteur, vous faites référence à ce qui s'est toujours fait. Mais si c'est pour faire toujours la même chose, à quoi servons-nous ? Pourquoi élaborer de nouvelles lois ? de nouvelles dispositions si, chaque fois que l'on veut faire autre chose pour tenir compte de situations contentieuses, conflictuelles, voire parfois dépassées, on nous dit que ce n'est pas dans les habitudes ?
Nous sommes là pour faire évoluer la loi et, selon mes modestes connaissances juridiques, le Conseil d'Etat dit le droit existant. Il n'est pas là pour faire le droit à notre place.
Nous sommes le législateur. Nous modifions les lois afin que le Conseil d'Etat puisse se prononcer différemment si, un jour, il est appelé à le faire.
Enfin, et ce sera ma dernière remarque, je veux bien vous suivre, monsieur le rapporteur, mais donnez-moi des arguments percutants à l'égard d'une opinion publique qui, depuis le mois de mars dernier, s'est aperçue qu'avec un mode de scrutin donné, celui que nous réformons, cela ne fonctionne pas dans certaines assemblées régionales.
M. Josselin de Rohan. C'est vous qui l'avez inventé !
M. Guy Allouche. Monsieur de Rohan, en 1986 et en 1992, le scrutin régional a bien fonctionné, puis, en 1998, le contexte politique a changé. Cela prouve que les modes de scrutin ne doivent pas être gravés dans le marbre ou coulés dans le bronze. (M. de Rohan s'exclame.)
Les modes de scrutin doivent évoluer avec la société et avec le contexte politique. Nous ne pouvons pas préjuger, aujourd'hui 16 décembre 1998, ce qui se fera dans dix ans ou dans quinze ans. Ni vous ni moi ne sommes en en mesure de le prévoir !
M. Josselin de Rohan. Voilà pourquoi votre fille est muette !
M. Guy Allouche. Les Français s'aperçoivent que, depuis plus de huit mois, un certain nombre de conseils régionaux ne fonctionnent pas, en raison d'un mode de scrutin inadapté. Si nous suivions M. le rapporteur, si ces conseils régionaux, à la suite de dysfonctionnements graves, devaient être dissous par décision gouvernementale, comment expliquer aux Français que les conseillers seront élus avec le même outil, alors qu'il ne convient plus ?
Nos concitoyens ne comprendraient pas, et nous serions taxés d'irresponsabilité.
Voilà pourquoi, mes chers collègues - et je ne veux pas anticiper sur une décision qui sera prise par le Conseil constitutionnel - lorsque les circonstances l'exigent, lorsque la preuve, ô combien éclatante a été faite qu'un mode de scrutin génère de graves dysfonctionnements au sein de certains conseils régionaux, il faut changer l'outil électoral.
M. Jacques Larché, président de la commission. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jacques Larché, président de la commission. Je voudrais revenir très brièvement sur ce que disait M. le ministre voilà un instant quant aux perspectives éventuelles d'une annulation du scrutin régional dans un département.
Un journal, semble-t-il mieux renseigné que vous et moi, monsieur le ministre, indique ce soir que, confronté aux conséquences politiques de sa décision, le Conseil d'Etat s'interrogerait.
Je note, simplement en passant que, confronté à d'autres conséquences politiques d'une autre décision, lorsqu'il a procédé à l'annulation de l'élection d'un président de région, il n'a pas fait preuve des mêmes scrupules. Mais il s'agit là d'une simple constation.
Il n'en reste pas moins que nous sommes dans une impasse. Il ne s'agit pas d'un avis du Conseil d'Etat. Il est en train de statuer au contentieux. Je ne sais pas ce qu'il fera.
Mais admettons que, demain, il annule les élections dans l'ensemble du département des Bouches-du-Rhône et que cette loi soit en vigueur. Comment votera-t-on ? Suivant quelles modalités ? Quelle sera la loi applicable ?
Si, demain, l'élection est annulée dans un seul département, quelle décision prendrez-vous ? Par quel mécanisme résoudrez-vous ce problème ?
Le cas échéant, permettrez-vous une sorte de résurrection d'une loi caduque pour parvenir à régler la difficulté à laquelle vous serez confrontés ? Après tout, pourquoi pas ?
Vous n'êtes pas à cela près, me direz-vous. Mais je ne vois pas comment vous allez vous en sortir si tant est que le Conseil d'Etat - cela lui arrive quelquefois - ne vous rende pas le service que vous semblez attendre de lui.
M. Paul Girod, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur. M. Paul Girod, rapporteur. Sans vouloir faire de procès d'intention, je commence néanmoins à me demander si ce projet de loi n'avait pas cet unique objet : on cherchait au fond à savoir quel était le conseil régional que l'on voulait dissoudre, on avait tous les yeux braqués sur l'un d'entre eux, mais c'était peut-être vers un autre qu'il fallait regarder.
L'article 24 prévoit que les dispositions de l'article 1er de la présente loi entreront en vigueur pour le premier renouvellement général des conseils régionaux qui suivra sa publication.
M. Josselin de Rohan. C'est l'aveu !
M. Paul Girod, rapporteur. Il prévoit des dates précises pour toutes ces parties de la loi.
A contrario cela signifie que tout le reste de la loi s'applique immédiatement et que tout le système électoral ancien est balayé.
Par conséquent, s'il y a une annulation dans les Bouches-du-Rhône au 15 janvier et que la loi est en vigueur depuis le 13 janvier, il ne sera plus possible d'organiser des élections selon l'ancien système.
C'est à ce moment-là que le conseil des ministres constatera que le conseil régional de Provence-Alpes-Côte d'Azur est bloqué et que l'on aboutira à sa dissolution alors que l'on croyait que les arrière-pensées visaient un autre conseil régional.
Je commence à me demander si toute la loi n'est pas faite pour cela. J'en connais qui vont être contents !
M. Guy Allouche. Vous anticipez beaucoup !
M. Jean-Pierre Raffarin. L'un n'exclut pas l'autre.
M. Jean-Claude Gaudin. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Gaudin.
M. Jean-Claude Gaudin. Monsieur Allouche, quand il y a blocage dans des conseils municipaux, il arrive que le conseil des ministres procède à l'annulation et on organise de nouvelles élections en appliquant le système électoral. On ne refait pas un système électoral parce qu'il peut y avoir des difficultés.
J'ai présidé pendant douze ans la région que citait à l'instant M. le rapporteur - la région Provence-Alpes-Côte d'Azur - où je ne me suis pas représenté devant les électeurs parce que je souhaitais, et chacun le savait en Provence, en particulier à Marseille, rejoindre la Haute Assemblée et j'ai été consterné par le débat portant sur la nécessité de rendre publique les réunions des commissions permanentes.
C'est de la folie ! Plusieurs sénateurs avant moi ont essayé de vous en convaincre, monsieur le ministre.
A partir du moment où la commission permanente décide d'attributions financières, quelquefois considérables, il n'est pas normal que ses débats soient publics.
Vous savez bien comment fonctionnent les assemblées régionales. Le conseil régional siège d'abord, avec les effets de manche des uns et des autres, parce que la presse est là.
A la réunion de commission permanente qui suit l'assemblée plénière, l'atmosphère est plus calme, plus raisonnable, avec un nombre plus restreint de conseillers régionaux. Un certain nombre de décisions sont prises alors et vouloir rendre cela public, c'est de la folie !
Mais tel n'était pas l'objet de mon intervention. Je souhaite rejoindre les propos de M. le président de la commission des lois et de M. le rapporteur.
On vient d'apprendre - c'est peut-être une bonne chose d'ailleurs - que le Conseil d'Etat entend se donner du temps avant de savoir s'il va annuler les élections régionales dans le seul département des Bouches-du-Rhône.
Un premier problème se pose : on fait sortir les quarante-neuf élus dont l'élection sera annulée si le Conseil d'Etat suit les conclusions du rapporteur...
M. Michel Charasse. Le commissaire du Gouvernement !
M. Jean-Claude Gaudin. ... effectivement, c'est le commissaire du Gouvernement, qui n'a d'ailleurs rien à voir avec le Gouvernement !
M. Michel Charasse. Absolument !
M. Jean-Claude Gaudin. On fait sortir ces quarante-neuf élus des Bouches-du-Rhône. Dès lors, dans la foulée, procède-t-on à l'élection d'un nouveau président, d'une commission permanente et, éventuellement, d'un bureau, comme le recommande le commissaire du Gouvernement ?
Si tel est le cas, les conseillers régionaux qui restent élisent un nouveau président, une nouvelle commission permanente et, éventuellement, un nouveau bureau. L'élection a lieu ensuite.
Imaginons que l'élection n'ait lieu que dans le seul département des Bouches-du-Rhône : quarante-neuf nouveaux élus viennent donc siéger au conseil régional. Mais qui dit que le président précédemment élu va démissionner ? Rien de tel n'est prévu dans la loi. A ce moment-là, vous êtes en situation de blocage. (M. Allouche s'exclame.)
J'ai bien compris que c'était ce qui inquiétait particulièrement nos collègues du groupe socialiste. En effet, en l'occurrence, le président sortant, qui m'a succédé et qui est le président actuel, est socialiste et il ne pourrait même plus prétendre à revenir, il serait exécuté. (M. Allouche proteste à nouveau.)
Qu'est-ce que cela veut dire ? Et quelle explication donne-t-on ?
Dans un conseil municipal, lorsqu'il faut élire un nouveau maire, il faut que le conseil municipal soit au complet.
M. Michel Charasse. Exact !
M. Jean-Claude Gaudin. Selon les conclusions du commissaire du Gouvernement en tout cas, il devrait être procédé à l'élection d'un nouveau président avec des conseillers régionaux sortants.
M. Michel Charasse. Avec les conseillers précédents !
M. Jean-Claude Gaudin. Nous demandons des explications. Nous voulons savoir.
A moins, comme vient de dire M. le rapporteur et si ce projet de loi n'était pas déféré au Conseil constitutionnel - ce qui ferait éventuellement gagner au moins un bon mois - que l'on adopte le scrutin inique et scandaleux que l'on est en train d'essayer de nous faire avaler, vous sanctionneriez les cinq autres départements de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, où les élections se sont, naturellement, bien déroulées.
Pour quelques difficultés, qui ne sont d'ailleurs pas assimilées à une tricherie, et qui se limitent au seul département des Bouches-du-Rhône, vous annuleriez les élections dans une région de 4,5 millions d'habitants.
Ce serait balayer d'un trait le vote des électeurs. A vrai dire, comme les résultats de ces élections ne nous avaient pas été très favorables, ils ne pourraient à l'avenir qu'être meilleurs.
Mais il y a toutes les embûches scandaleuses que vous avez prévues entre les deux tours pour mettre la droite républicaine en difficulté avec le Front national. Monsieur le ministre, on revient toujours au même piège.
Sans anticiper sur cette éventualité, dont j'ose tout de même espérer qu'elle n'était pas dans l'esprit du Gouvernement, pouvez-vous nous dire comment on procéderait dans la région Provence-Alpes-Côte d'Azur si le Conseil d'Etat in fine décidait d'annuler les élections dans les Bouches-du-Rhône ? Qui sera le président de la région ?
Le premier vice-président assurera-t-il l'intérim ou faudra-t-il, comme le recommande - je le répète pour la troisième fois ! - le commissaire du Gouvernement, organiser une nouvelle élection ?
Et comment ferez-vous partir le président qui sera nouvellement élu lorsque les quarante-neuf nouveaux élus arriveront ?
C'est de la folie ! Et cela montre bien que les textes sont souvent flous et incomplets. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR, de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim. Monsieur Gaudin, le code général des collectivités locales prévoit qu'en cas de vacance du siège du président pour quelque cause que ce soit - prenons l'hypothèse que vous évoquez, mais qui n'est aujourd'hui qu'une hypothèse car, je le rappelle, le Conseil d'Etat n'a pas rendu sa décision - les fonctions de président sont provisoirement exercées par un vice-président, dans l'ordre des nominations et, à défaut, par un conseiller régional désigné par le conseil.
La logique fait que si le mandat du président est annulé par une décision en matière électorale, le premier vice-président, s'il n'est pas dans le même cas, prendra la succession et, si le premier vice-président est dans le même cas, on poursuivra la liste, dans l'ordre prévu par le code.
Par conséquent, le code a bien prévu cette situation, et c'est ainsi que s'exercera la continuité du conseil général dans l'attente qu'il soit à nouveau complété.
Quelle est la loi applicable ? C'est la loi qui a régi le scrutin annulé, c'est-à-dire la loi qui était en vigueur le 15 mars et qui est toujours en vigueur aujourd'hui.
M. Jacques Larché, président de la commission. Mais non !
M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim. J'indique que, dans mon esprit - le débat sera peut-être posé au niveau du Conseil d'Etat - il faut distinguer entre une annulation, partielle en l'occurrence, puisqu'elle ne porte que sur un des six départements composant la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, et une dissolution qui porterait sur l'ensemble du conseil régional.
Il s'agit là, me semble-t-il, d'une lecture claire du texte, mais qui demande à être confirmée. Sur ce plan, le Gouvernement ne peut pas se substituer au Conseil d'Etat.
M. Jean-Pierre Raffarin. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Raffarin.
M. Jean-Pierre Raffarin. Je voterai l'amendement n° 34 de M. le rapporteur.
Au fond, ce texte comporte deux parties complètement différentes. Monsieur le ministre, rien ne vous empêche de prendre votre temps pour les dispositions électorales. En revanche, si vous estimez que l'urgence est nécessaire pour l'article 49-3, progressons sur ce point, car on peut comprendre qu'il puisse y avoir désaccord. Le Sénat a dit ce qu'il en pensait. L'Assemblée nationale se prononcera et le Gouvernement décidera.
Sur la loi électorale, si vraiment, comme l'a dit hier encore, à RTL, M. le Premier ministre, il n'y a pas d'arrière-pensées, alors, monsieur le ministre, faites un geste ! En effet, si vous ne faites aucun geste sur ce texte, vous serez suspect aux yeux des Français de placer le Front national en arbitre (Protestations sur les travées socialiste.) , comme si vous tiriez profit de cette position.
Ce que je vous dis là vous sera répété à chaque instant lors de chaque élection, partout, parce que c'est la vérité !
M. Jean-Claude Gaudin. Très bien !
M. Jean-Pierre Raffarin. Faites un geste sur le seuil, sur l'urgence ou sur le scrutin à deux tours ou à un seul tour pour montrer la sincérité du Gouvernement ! Sinon, vous ne pourrez pas vous empêcher d'apparaître très suspect aux yeux des Français ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR, et de l'Union centriste.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 34, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 24 est ainsi rédigé.

Intitulé du projet de loi