Séance du 2 février 1999







M. le président. « Art. 41 bis . - I. - L'article L. 642-4 du code rural est ainsi rédigé :
« Art. L. 642-4 . - L'utilisation d'indication d'origine ou de provenance ne doit pas être susceptible d'induire le consommateur en erreur sur les caractéristiques du produit, de détourner ou d'affaiblir la notoriété d'une dénomination reconnue comme appellation d'origine contrôlée ou enregistrée comme indication géographique protégée ou comme attestation de spécificité, ou, de façon plus générale, de porter atteinte, notamment par l'utilisation abusive d'une mention géographique dans une dénomination de vente, au caractère spécifique de la protection réservée aux appellations d'origine contrôlées, aux indications géographiques protégées et aux attestations de spécificité.
« Pour les produits ne bénéficiant pas d'une appellation d'origine contrôlée ou d'une indication géographique protégée, l'utilisation d'une indication d'origine ou de provenance doit s'accompagner d'une information sur la nature de l'opération liée à cette indication, dans tous les cas où cela est nécessaire à la bonne information du consommateur.
« Toutefois, cette disposition ne s'applique pas aux vins, aux vins aromatisés, aux boissons aromatisées à base de vin, aux cocktails aromatisés de produits viti-vinicoles ainsi qu'aux spiritueux.
« Tout opérateur utilisant une indication d'origine ou de provenance pour une denrée alimentaire ou un produit agricole non alimentaire et non transformé doit disposer des éléments justifiant cette utilisation et être en mesure de les présenter à toute réquisition des agents visés à l'article L. 215-1 du code de la consommation.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application du présent article. »
« II. - L'article L. 643-4 du code rural est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation aux dispositions du premier alinéa, pour les produits de la pêche maritime, un décret en Conseil d'Etat définit les conditions dans lesquelles un label agricole ou une certification de conformité peut comporter une mention géographique qui n'est pas enregistrée comme indication géographique protégée ou reconnue comme appellation d'origine contrôlée, ainsi que les modalités de l'information des consommateurs prévue à l'article L. 642-4. »
« III. - Le premier alinéa de l'article L. 643-5 du code rural est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Seuls peuvent être agréés les organismes accrédités par une instance reconnue à cet effet par l'autorité administrative. »
« IV. - Sans préjudice des dispositions prévues aux articles L. 621-1, L. 621-2 et L. 621-3 du code rural, des groupements d'intérêt public dotés de la personnalité morale et de l'autonomie financière peuvent être constitués, soit entre des personnes morales de droit public, soit entre une ou plusieurs d'entre elles et une ou plusieurs personnes morales de droit privé pour exercer ensemble, pendant une durée déterminée, des activités d'intérêt commun concernant le développement et la promotion des produits agricoles et agro-alimentaires.
« Les dispositions de l'article 21 de la loi n° 82-610 du 15 juillet 1982 d'orientation et de programmation pour la recherche et le développement technologique de la France sont applicables aux groupements prévus par le présent article. »
Par amendement n° 290, MM. Bizet, Althapé, Bernard, Besse, Braun, Cazalet, César, Cornu, Courtois, Debavelaere, Doublet, Dufaut, Esneu, Flandre, Fournier, François, Gaillard, Gérard, Gerbaud, Goulet, Gruillot, Hamel, Hugot, Jourdain, Larcher, Lassourd, Lauret, Leclerc, Le Grand, Martin, Murat, Ostermann, de Richemont, Rispat, de Rohan, Taugourdeau, Vasselle, Vinçon, Vissac et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent, dans le premier alinéa du texte présenté par le I de cet article pour l'article L. 642-4 du code rural, de supprimer les mots : « , notamment par l'utilisation abusive d'une mention géographique dans une dénomination de vente, ».
La parole est à M. Bizet.
M. Jean Bizet. Cet amendement tend à éviter que certaines marques déposées ne soient touchées par la loi car elles ne sont pas de nature à induire le consommateur en erreur. Chacun a en mémoire quelques dénominations telles que Chamonix pour les biscuits, Mont-Blanc pour les crèmes dessert ou Six de Savoie pour les spécialités fromagères.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Souplet, rapporteur. La commission n'est pas favorable à cet amendement. Certes, nous comprenons bien les explications données par M. Bizet, mais nous pensons que cette proposition porterait directement préjudice aux producteurs qui sont sous signe de qualité. Je souhaiterais le retrait de cet amendement.
M. le président. Monsieur Bizet, maintenez-vous l'amendement ?
M. Jean Bizet. Je souhaiterais d'abord connaître l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Je partage l'avis de M. le rapporteur, d'autant que les marques auxquelles M. Bizet fait allusion sont parfaitement protégées par la réglementation existante.
En revanche, l'adoption de l'amendement risquerait d'introduire une grande confusion en ouvrant des droits pour de nouvelles marques.
Je pense que la situation actuelle est satisfaisante et que cet amendement peut être retiré sans crainte.
M. le président. Monsieur Bizet, l'amendement est-il maintenu ?
M. Jean Bizet. Je le retire.
M. le président. L'amendement n° 290 est retiré.
Par amendement n° 291, MM. Bizet, Althapé, Bernard, Besse, Braun, Cazalet, César, Cornu, Courtois, Debavelaere, Doublet, Dufaut, Esneu, Flandre, Fournier, François, Gaillard, Gérard, Gerbaud, Goulet, Gruillot, Hamel, Hugot, Jourdain, Larcher, Lassourd, Lauret, Leclerc, Le Grand, Martin, Murat, Ostermann, de Richemont, Rispat, de Rohan, Taugourdeau, Vasselle, Vinçon, Vissac et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent, à la fin du troisième alinéa du texte présenté par le I de l'article 41 bis pour l'article L. 642-4 du code rural, d'ajouter les mots : « et aux dénominations définies par une réglementation ou par les usages. »
La parole est à M. Bizet.
M. Jean Bizet. Nous considérons que certaines dénominations de vente contenant une référence géographique sont devenues génériques et doivent donc être exclues du champ de l'article 41 bis, car elles ne sont pas susceptibles d'induire le consommateur en erreur. Il peut s'agir de dénominations définies par la réglementation ou par les usages.
Toutefois, dans la logique précédente, nous retirons cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 291 est retiré.
Par amendement n° 58, M. Souplet, au nom de la commission des affaires économiques, propose de rédiger comme suit le début du texte présenté par le II de l'article 41 bis pour compléter l'article L. 643-4 du code rural :
« Par dérogation aux dispositions du premier alinéa pour les produits agricoles, aquacoles et de la pêche maritime, ».
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 293, présenté par MM. César, Althapé, Bernard, Besse, Bizet, Braun, Cazalet, Cornu, Courtois, Debavelaere, Doublet, Dufaut, Esneu, Flandre, Fournier, François, Gaillard, Gérard, Gerbaud, Goulet, Gruillot, Hamel, Hugot, Jourdain, Larcher, Lassourd, Lauret, Leclerc, Le Grand, Martin, Murat, Ostermann, de Richemont, Rispat, de Rohan, Taugourdeau, Vasselle, Vinçon, Vissac et les membres du groupe du Rassemblement pour la République, et tendant, dans le texte proposé par l'amendement n° 58, à supprimer les mots : « agricoles, aquacoles et ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 58.
M. Michel Souplet, rapporteur. Cet amendement vise à réintroduire - celles-ci figuraient en effet dans l'avant-projet de loi du Gouvernement - les dispositions prévoyant la possibilité d'emploi d'une mention géographique qui n'est pas une IGP sur les produits sous label ou avec certificat de conformité.
Cette disposition est nécessaire car l'interdiction d'un nom géographique met les produits sous label et certification de conformité : en distorsion de concurrence avec les produits courants qui peuvent sans contrainte particulière utiliser un terme géographique sur leur étiquetage ou dans leur marque ; en concurrence déloyale selon que l'entreprise comporte ou non une mention géographique dans sa marque ou dénomination - marque Le Gall sur un beurre Label rouge, impossibilité de mettre la marque Paysan breton ; en porte à faux avec les réglementations nationales - viande bovine - ou communautaires - fruits et légumes - qui rendent obligatoire l'indication de provenance.
M. le président. La parole est à M. François, pour défendre le sous-amendement n° 293.
M. Philippe François. L'amendement de la commission des affaires économiques et du Plan a pour conséquence de rendre possible l'utilisation d'un signe de qualité avec un terme géographique voisin de celui d'une IGP ou d'une AOC, ce qui est source de concurrence déloyale.
A ce titre, il convient de préciser que les produits sans IGP ou AOP pourraient avoir des référentiels techniques différents. Par ce biais, on assisterait donc à un affaiblissement des produits IGP et AOC sur le marché et à un détournement subtil de notoriété par la création d'une confusion vis-à-vis du consommateur qui profiterait aux opérateurs ayant les capacités financières en matière de communication les plus fortes.
L'amendement de la commission des affaires économiques et du Plan n'est donc pas cohérent avec ce qui est exprimé dans le paragraphe I de l'article 41 bis . C'est la raison pour laquelle il vous est proposé ce sous-amendement, qui revient au texte tel qu'il a été adopté par l'Assemblée nationale.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 293 ?
M. Michel Souplet, rapporteur. Sagesse.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 58 et sur le sous-amendement n° 293 ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Je souscris totalement aux termes du sous-amendement n° 293, qui me conviennent très bien, alors que je suis beaucoup moins convaincu par l'amendement n° 58, qui vide de sa substance, comme le disait excellement M. François, le texte voté à l'Assemblée nationale.
M. Michel Souplet, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Souplet, rapporteur. Compte tenu de ce que vient de dire M. le ministre, je retire l'amendement n° 58.
M. le président. L'amendement n° 58 est retiré.
En conséquence, le sous-amendement n° 293 n'a plus d'objet.
Par amendement n° 509, MM. Gouteyron et Vissac proposent, dans le texte présenté par le II de l'article 41 bis pour compléter l'article L. 643-4 du code rural, après les mots : « pêche maritime, », d'insérer les mots : « et ceux bénéficiant de la dénomination montagne, ».
La parole est à M. Vissac.
M. Guy Vissac. Cet amendement tend à reconnaître plus commodément la dénomination « montagne ». Il vise à résoudre les difficultés posées par l'obligation de la procédure IGP, qui est longue, coûteuse en temps de travail et très lourde sur le plan administratif.
Il tend à apporter une solution à cette difficulté majeure, face à laquelle nombre de structures propriétaires de marques utilisant la provenance « montagne » préfèrent changer la dénomination commerciale de leur produit en supprimant le lien au terroir. Or ce lien au terroir de montagne est un excellent moyen d'éviter les délocalisations de productions, de motiver les producteurs pour qu'ils fournissent un effort de qualité et de faire connaître les productions de la montagne.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Souplet, rapporteur. La commission s'en remet à la sagesse du Sénat.
Il est vrai qu'il pourrait s'ensuivre une certaine confusion, mais nous sommes toujours très sensibles aux problèmes de montagne.
M. le présidnet. Quel est l'avis du gouvernement ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Le Gouvernement, pour sa part, est tout à fait opposé à cette proposition, et ce pour des raisons tout à fait identiques à celles que j'ai données tout à l'heure sur l'amendement n° 58, qui a d'ailleurs été retiré.
Si nous voulons défendre la montagne, il faut, au contraire, se montrer extrêmement exigeant s'agissant des liens au terroir de montagne.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 509, repoussé par le Gouvernement et pour lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.

(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l'amendement.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 41 bis, ainsi modifié.

(L'article 41 bis est adopté.)

Article 42