Séance du 10 mars 1999






SOMMAIRE


PRÉSIDENCE DE M. GÉRARD LARCHER

1. Procès-verbal (p. 0 ).

2. Rappel au règlement (p. 1 ).
MM. Hubert Haenel, le président.

3. Souhaits de bienvenue au lord-maire de Glasgow (p. 2 ).

4. Droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations. Adoption d'un projet de loi (p. 3 ).
Discussion générale : MM. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation ; Jean-Paul Amoudry, rapporteur de la commission des lois ; Jacques Pelletier, Robert Bret, Jacques Mahéas, Jean-Jacques Hyest.
M. le ministre.
Clôture de la discussion générale.

Article 1er (réservé) (p. 4 )

Amendement n° 1 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Réserve.
Réserve de l'article.

Intitulé du chapitre Ier (réservé) (p. 5 )

Amendement n° 4 de la commission. - Réserve.

Article 2 (p. 6 )

Amendement n° 2 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre, Jacques Mahéas, Robert Bret. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.

Article 3 et annexe (p. 7 )

Amendements n°s 3 rectifié de la commission et 42 de M. Bret. - MM. le rapporteur, Robert Bret, le ministre, Jacques Mahéas. - Adoption de l'amendement n° 3 rectifié supprimant l'article et l'annexe, l'amendement n° 42 devenant sans objet.

Intitulé du chapitre Ier (suite) (p. 8 )

Amendement n° 4 (précédemment réservé) de la commission. - Adoption de l'amendement supprimant l'intitulé.

Article 4 (p. 9 )

Amendement n° 5 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre, Robert Bret, Jacques Mahéas. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.

Article 5 (p. 10 )

Amendement n° 6 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre, Robert Bret, Jacques Mahéas. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.

Articles additionnels après l'article 5 (p. 11 )

Amendement n° 39 de M. Hérisson. - MM. Pierre Hérisson, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 40 de M. Hérisson et sous-amendement n° 48 rectifié de la commission. - MM. Pierre Hérisson, le rapporteur, le ministre, Robert Bret, Jacques Mahéas. - Adoption du sous-amendement et de l'amendement modifié insérant un article additionnel.
Amendement n° 41 de M. Hérisson. - MM. Pierre Hérisson, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Article 6 (p. 12 )

Amendement n° 7 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 8 rectifié de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 9 de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 7 (p. 13 )

Amendement n° 10 de la commission et sous-amendement n° 45 du Gouvernement. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption du sous-amendement et de l'amendement modifié.
Adoption de l'article modifié.

Article 8 (p. 14 )

Amendement n° 11 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendements n°s 12 de la commission et 47 du Gouvernement. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement n° 12, l'amendement n° 47 devenant sans objet.
Amendement n° 13 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre, Robert Bret. - Adoption.
Amendements n°s 14 de la commission et 43 de M. Bret. - MM. le rapporteur, Robert Bret, le ministre. - Adoption de l'amendement n° 14, l'amendement n° 43 devenant sans objet.
MM. Yves Fréville, le ministre.
Adoption de l'article modifié.

Article 9 (p. 15 )

M. Yves Fréville.
Adoption de l'article.

Article 10 (p. 16 )

Amendement n° 15 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.

Article 11 (p. 17 )

Amendement n° 44 de M. Fréville. - MM. Yves Fréville, le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 12 (p. 18 )

Amendements n°s 16 à 18 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption des trois amendements.
Adoption de l'article modifié.

Article 13 (p. 19 )

Amendements n°s 19 à 23 rectifié de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption des cinq amendements.
Adoption de l'article modifié.

Article 1er (suite) (p. 20 )

Amendement n° 1 (précédemment réservé) de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre, Robert Bret, Jacques Mahéas. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.

Article additionnel
avant le chapitre Ier du titre II (p. 21 )

Amendement n° 24 de la commission. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 14 (p. 22 )

Amendement n° 25 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre, Robert Bret, Jacques Mahéas. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 15. - Adoption (p. 23 )

Article additionnel avant l'article 16 (p. 24 )

Amendement n° 26 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre, Jacques Mahéas. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 16 (p. 25 )

Amendement n° 27 de la commission. - Adoption. Adoption de l'article modifié.

Article 17 (p. 26 )

Amendement n° 28 de la commission. - Adoption.
Amendement n° 29 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre, Jacques Mahéas. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE

Articles 18 à 20. - Adoption (p. 27 )

Article 21 (p. 28 )

Amendement n° 30 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre, Jacques Mahéas. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 22. - Adoption (p. 29 )

Article 23 (p. 30 )

Amendement n° 31 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre, Jacques Pelletier, Jacques Mahéas. - Adoption.
Amendement n° 32 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 24 (p. 31 )

Amendement n° 33 de la commission. - MM. le rapporteur, la ministre, Jacques Mahéas, Robert Bret. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 25 (p. 32 )

Amendement n° 34 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 26 (p. 33 )

M. Jacques Machet.
Amendement n° 35 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.

Article 27 (p. 34 )

Amendements n°s 36 de la commission et 46 du Gouvernement. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement n° 36 rédigeant l'article, l'amendement n° 46 devenant sans objet.

Article 28. - Adoption (p. 35 )

Vote sur l'ensemble (p. 36 )

MM. Jacques Mahéas, Robert Bret, François Trucy, Jacques Machet, Alain Gérard, Jacques Pelletier, le ministre, le rapporteur.
Adoption du projet de loi.

5. Dépôt d'un projet de loi (p. 37 ).

6. Dépôt d'une proposition de loi (p. 38 ).

7. Dépôt d'une résolution (p. 39 ).

8. Dépôt d'une proposition de résolution (p. 40 ).

9. Texte soumis en application de l'article 88-4 de la Constitution (p. 41 ).

10. Renvoi pour avis (p. 42 ).

11. Dépôt de rapports (p. 43 ).

12. Dépôt d'un avis (p. 44 ).

13. Ordre du jour (p. 45 ).



COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. GÉRARD LARCHER
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures cinq.)

1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

2

RAPPEL AU RÈGLEMENT

M. Hubert Haenel. Je demande la parole pour un rappel au règlement.
M. le président. La parole est à M. Haenel.
M. Hubert Haenel. Monsieur le président, mes chers collègues, au sein de la Cour de justice de la République, les juges parlementaires sont soumis, comme tous les magistrats professionnels et les jurés de cour d'assises, au strict respect du secret absolu du délibéré.
En application de l'article 2 de la loi organique du 23 novembre 1993, les juges parlementaires prêtent serment devant l'assemblée qui les a désignés : « Je jure et promets de bien et fidèlement remplir mes fonctions, de garder le secret des délibérations et des votes, et de me conduire en tout comme un digne et loyal magistrat. »
Le président de la Cour l'a solennellement rappelé lors de la dernière audience, le 26 février dernier : « Les quinze juges qui participent au délibéré sont tenus au secret le plus rigoureux, y compris les greffiers et les fonctionnaires assistant les juges. »
Les seules mentions concernant la majorité qui s'est prononcée en faveur de l'arrêt rendu hier, et figurant à la page 12 de la décision sont les suivantes : « Il a été voté par bulletin secret à la majorité absolue. » Puis, plus loin : « A la majorité absolue de huit voix au moins, il a été répondu négativement pour deux des prévenus » et « A la majorité de huit voix au moins, il a été répondu par l'affirmative pour le troisième prévenu ».
Depuis hier onze heures, parfois avant même que l'arrêt ne soit rendu public, à la suite d'indiscrétions, sans doute pour se disculper, se désolidariser, sous le couvert de l'anonymat, certains membres de la Cour ont, si l'on en croit la presse, révélé des parties entières du délibéré et du vote couverts par le secret absolu.
Les commentaires de la presse, tant audiovisuelle qu'écrite, indiquent dans quel sens tel ou tel membre de la Cour a voté. L'un ou l'autre membre de la Cour a même commenté et justifié publiquement l'arrêt rendu.
Monsieur le président, mes chers collègues, les juges sont ainsi, et de plus en plus, pesés, répertoriés, catalogués, soupçonnés et, bien sûr, déconsidérés.
On peut s'étonner et s'inquiéter de ces graves manquements, s'étonner et s'inquiéter que des membres d'une des plus hautes juridictions de la République aient pu ainsi trahir le secret des délibérés, alors que, à ma connaissance, de simples citoyens tirés au sort comme jurés d'assises ont depuis des décennies, à une ou deux exceptions près, respecté systématiquement le serment prêté et le secret absolu auquel ils sont tenus.
M. Alain Gournac. Eh oui !
M. Hubert Haenel. La décision rendue dans cette ambiance par la Cour de justice de la République prouve à quel point cette juridiction est politique et qu'elle est devenue, de fait, une juridiction d'exception.
Dorénavant, mes chers collègues, nous serons très mal placés et malvenus de nous étonner, de dénoncer même la violation du secret de l'instruction lorsqu'elle concerne un personnage politique, violation imputée, le plus souvent à tort d'ailleurs, à certains juges d'instruction, alors même que le secret de l'instruction, chacun le sait, n'est pas opposable à tout le monde, notamment pas au prévenu et à son avocat.
En conclusion, monsieur le président, dans cette affaire, le discrédit qui pèse sur la classe politique rejoint celui qui pèse déjà sur la justice et l'amplifie.
Tristes temps ! Pauvre République ! Pauvres prévenus ! Pauvres victimes. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je suis d'accord avec le début !
M. le président. Monsieur Haenel, acte vous est donné de ce rappel au règlement.

3

SOUHAITS DE BIENVENUE
AU LORD-MAIRE DE GLASGOW

M. le président. Mes chers collègues, je salue avec plaisir, au nom de la Haute Assemblée, la présence dans nos tribunes du lord-maire de Glasgow, venu à Paris pour recevoir un prix et qui nous fait l'honneur de sa visite. (M. le ministre, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et applaudissent.)

4

DROITS DES CITOYENS
DANS LEURS RELATIONS
AVEC LES ADMINISTRATIONS

Adoption d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 153, 1998-1999) relatif aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations. [Rapport n° 248 (1998-1999).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi que je vous propose d'adopter est relatif aux « droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ».
Cet intitulé indique les intentions du Gouvernement en la matière. Les élus que vous êtes savent combien chaque citoyen souhaite que, pour ses diverses démarches, l'administration soit plus simple d'accès, plus rapide et plus lisible dans ses réponses, moins opaque dans son fonctionnement, bref, plus respectueuse de ses droits.
C'est cette volonté que met en exergue le terme de « citoyen », qui figure dans le titre du projet. Il s'agit en effet non pas d'octroyer des droits à un administré, même sous le nom d'usager, mais de respecter ceux que détient le citoyen dans un Etat démocratique. Toutefois, il est clair que, au-delà de cet affichage démocratique du terme de « citoyen », bien des dispositions de cette loi intéressant les usagers, y compris les non-nationaux, ou des personnes morales.
Des étapes ont déjà été franchies en la matière. Ainsi, au cours des années soixante-dix, le souci de conciliation s'est concrétisé par la création du médiateur, le souci de transparence, par la loi instituant la commission d'accès aux documents administratifs, la CADA, et le souci de clarté des réponses, par la loi sur la motivation des actes administratifs.
Des obligations nouvelles ont été imposées aux services de l'Etat pour en simplifier l'accès aux usagers : le décret du 28 novembre 1983 oblige les services à accuser réception, à retransmettre une demande mal dirigée, à entendre le point de vue de l'usager avant une décision défavorable ; la circulaire du Premier ministre du 30 janvier 1985 exige des services de l'Etat que les correspondances administratives comportent le nom du fonctionnaire chargé du dossier.
Mon ambition, que je souhaite aujourd'hui vous faire partager, est de franchir encore un pas, un pas qui s'inscrit dans la réforme de l'Etat voulue par ce gouvernement, ainsi que je l'avais annoncé dès le 5 novembre 1997 dans ma communication au conseil des ministres.
Je vous propose de faire ensemble ce pas, tout d'abord parce que, pour le citoyen, l'administration est un ensemble de services publics, le plus souvent gérés par l'Etat ou les collectivités locales, mais qui peuvent l'être également par des organismes de droit privé.
Notre système administratif est divers, sa gestion est multiforme ; notre pays a besoin de cette souplesse. Mais, trop souvent, selon la nature juridique du gestionnaire du service public concerné, les procédures, les règles applicables, les obligations ne sont pas les mêmes, ce qui, pour le citoyen est facteur de complexité.
J'ai souhaité unifier tout cela. Aussi le projet désigne-t-il, dès son article 1er, comme son champ d'application l'ensemble de ce que le langage courant dénomme « administration », sans considération de ses modalités multiples de gestion. C'est d'ailleurs pourquoi il faut aujourd'hui une loi, alors que le décret ou la circulaire suffisait pour les seuls services de l'Etat.
Aussi trouverez-vous dans ce projet des règles déjà appliquées par certains services mais pas encore par tous, comme la levée de l'anonymat ou la retransmission des demandes.
Je vous propose de faire un pas de plus, aussi, parce que à l'usage, il s'est révélé que certains des textes existants laissaient subsister des lacunes ou que, le temps passant, des ajustements étaient désormais nécessaires. Aussi est-il question, dans ce projet de loi, d'institutions déjà bien connues, comme le médiateur de la République, la commission d'accès aux documents administratifs ou la commission nationale de l'informatique et des libertés, la CNIL.
Un pas de plus, également, parce qu'on ne doit pas s'arrêter dans la simplification de l'administration pour l'usager. Des lois des années soixante-dix au décret de 1983, de la circulaire de 1985 au « renouveau du service public » voulu par Michel Rocard, en 1989, sans cesse des améliorations notables, réelles, ont été apportées. Mais sans cesse les exigences d'un pays moderne envers son administration se multiplient, nécessitant de nouvelles procédures. Il faut les gérer sans en faire supporter le poids au public.
Prenons un exemple : le respect de la date limite d'envoi de sommes ou de documents est calculé, aujourd'hui, selon des règles différentes par le fisc et par les URSSAF. Désormais, le cachet de la poste fera foi pour tous les services entrant dans le champ d'application du texte. Cela représente pour les entreprises, notamment pour les PME, un progrès considérable.
Le service public joue un rôle intégrateur pour toutes les populations, et plus encore envers celles qui sont en difficulté. Il faut donc en rendre l'accès aisé : le citoyen qui doit parcourir plusieurs guichets pour une même demande, qui ignore le devenir de son dossier jusqu'au jour de la réponse, ne trouve pas une bonne réponse à son attente.
J'ai l'intention de favoriser, par la création de maisons des services publics regroupant en un même lieu divers services d'usage courant, une plus grande accessibilité des services aux usagers. Grâce, en particulier, aux nouvelles technologies de l'information et de la communication, ces maisons pourront être reliées aux services gestionnaires des dossiers. Les usagers y obtiendront des réponses sur leurs droits et sur la situation de leur demande. Ils y trouveront l'aide nécessaire pour s'orienter à travers les procédures administratives ; où et quand s'inscrire, à qui demander, comment obtenir une prestation ? Ces maisons offriront un service public de proximité commode et performant.
Pour une part, les dispositions de cette loi ne sont pas une découverte pour vous : mon prédécesseur, Dominique Perben, vous avait proposé l'adoption de ce qui constitue aujourd'hui la dernière partie du projet, et vous l'aviez alors adopté. J'ai repris ces dispositions dès lors qu'elles participent de la volonté, qui est aussi la mienne, d'améliorer les relations des administrations et des citoyens. Mais vous remarquerez au passage que le texte a subi certaines modifications et qu'il contient des innovations que beaucoup d'élus m'ont réclamées et auxquelles le Gouvernement est très attaché.
Certains d'entre vous, lors des débats sur le projet de la loi relatif à l'amélioration des relations entre les administrations et le public, avaient regretté que ce texte n'aille pas plus loin. C'est ce que j'ai souhaité faire et je vous demande de souscrire aux innovations que je vous soumets aujourd'hui dans un texte revu et complété. Elles vont toutes dans le sens de la réforme de l'Etat.
Certaines améliorations sont directement inspirées par les débats qui ont eu lieu devant les deux assemblées. Ainsi, il est proposé que la direction des maisons des services publics soit assurée par un fonctionnaire sous statut, comme cela avait été demandé en 1997 par M. Jacques Mahéas, qui est présent aujourd'hui dans cet hémicycle.
Certaines dispositions nouvelles sont le fruit d'autres travaux : ainsi, c'est un rapport du Conseil d'Etat qui a fait ressortir la nécessité de mettre en cohérence les trois lois comportant pour les usagers le droit à communication de documents détenus par les administrations, à savoir la loi CADA, la loi CNIL et la loi sur les archives publiques. Parfois, les instances chargées de veiller au respect des droits des citoyens ont elles-mêmes proposé des réformes : c'est notamment le cas du médiateur de la République, qui a souhaité que l'existence de ses délégués sur le territoire soit établie par la loi. Vous savez, mesdames, messieurs les sénateurs, à quel point la présence de ces délégués sur le terrain est utile.
Enfin, toute une série de mesures, notamment celles qui figurent au titre Ier du projet de loi, traduisent la volonté de ce gouvernement de rendre plus transparentes et plus accessibles l'administration et ses règles.
Ainsi, les administrations devront organiser un accès simple aux normes de droit. Une des principales applications de ce principe vous est proposée à l'article 3 : il s'agit de la codification. Les élus que vous êtes savent l'immense utilité du code général des collectivités territoriales. Ce type de mise en ordre des textes en vigueur est devenu indispensable dans un pays comme le nôtre, où les normes de droit sont trop complexes et éparses pour que l'adage « nul n'est censé ignorer la loi » soit facile à respecter. Par l'article 3, le Gouvernement et le législateur manifesteront leur attachement à cette simplification du droit pour l'usager. L'adoption des codes a, certes, pris du retard, mais le Gouvernement vous proposera des mesures pour y remédier ; nous en reparlerons lors de l'examen de l'article 3.
L'obligation de faire figurer les noms de l'agent chargé du dossier et du signataire de la décision dans les courriers des administrations vise à rendre l'administration moins opaque, moins anonyme, oserai-je dire, pour l'usager, comme nous le réclamons tous depuis longtemps. Les procédures relatives à la transparence dans l'utilisation des fonds publics par les organismes qui en bénéficient, créées par les articles 10 à 13 du projet de loi, répondent à une exigence démocratique de nos concitoyens qui s'affirme chaque jour.
C'est donc d'un ensemble de réflexions, les vôtres, les nôtres, celles de spécialistes de ces questions, qu'est né le projet de loi qui vous est aujourd'hui soumis et qui a l'ambition de contribuer à la défense de notre service public comme à la modernisation de l'administration française, afin qu'elle soit à même de répondre toujours mieux aux besoins de la population et aux exigences de notre temps et ainsi, mesdames, messieurs les sénateurs, de contribuer au rayonnement de notre pays. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi soumis à notre examen vise à renforcer les droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations. Il s'inscrit dans le cadre de la nécessaire réforme de l'Etat et de sa modernisation.
S'il marque de réels progrès, ce projet de loi n'apporte, toutefois, qu'une réponse partielle à cet objectif de réforme de l'Etat, dès lors que celle-ci relève essentiellement du domaine réglementaire.
C'est ainsi que plusieurs séries de mesures récentes ont été prises, par circulaires du Premier ministre : celle du 26 juillet 1995, relative à la préparation et à la mise en oeuvre de la réforme de l'Etat et des services publics et celle du 3 juin 1998, relative à la préparation des programmes pluriannuels de modernisation des administrations.
J'évoquerai également le décret du 8 juillet 1998, qui a remplacé le commissariat à la réforme de l'Etat par la délégation interministérielle à la réforme de l'Etat, la DIRE, et le décret ayant créé la commission pour la simplification administrative.
Il faut, enfin, rappeler que la réforme de l'Etat nécessite des moyens financiers, tels ceux qui sont dévolus au fonds pour la réforme de l'Etat doté, pour 1998, de 112 millions de francs, et l'amélioration des relations entre le monde économique et les autorités administratives. Deux lois récentes poursuivent ce dernier objectif : la loi du 11 février 1994, relative à l'initiative et à l'entreprise individuelle et la loi du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier, le DDOEF, qui simplifie les formalités administratives incombant aux entreprises.
Noublions pas, non plus, que la réforme de l'Etat nécessite de nouveaux progrès qui doivent être faits sur le terrain de la déconcentration, sur l'initiative du pouvoir exécutif.
Ainsi, si certains aspects de la réforme de l'Etat relèvent du pouvoir du législateur - par exemple les dispositions soumises à notre discussion aujourd'hui - l'essentiel de l'initiative et de la responsabilité en cette matière relève bien du Gouvernement.
Le Parlement ne saurait, pour autant, se désintéresser de cette question essentielle, dont l'enjeu est renforcé en particulier par les progrès des technologies, et par l'évolution des attentes de nos concitoyens à l'égard de la puissance publique ; il s'agit, sur ce dernier point, d'aboutir à un juste équilibre entre une meilleure transparence et la nécessité de ne pas nuire à l'efficacité de l'action publique.
A cet égard, le titre du projet de loi soumis à notre discussion, en proposant que les droits du citoyen soient mieux reconnus, mieux affirmés, mieux assurés, ne doit pas faire oublier que ces droits sont assortis de devoirs.
Dans un souci de clarté, je classerai les 28 articles composant ce texte en trois catégories.
Il s'agit, tout d'abord, d'un train de mesures issues du projet de loi portant amélioration des relations entre les administrations et le public, dont l'examen, au Parlement, avait été interrompu avant l'adoption du texte en deuxième lecture au Sénat.
Ensuite, la deuxième catégorie comporte un ensemble de propositions nouvelles, visant utilement à améliorer la transparence administrative et à rapprocher le citoyen de l'administration.
Enfin, la troisième catégorie consiste en une série de mesures que votre rapporteur et votre commission des lois jugent d'une opportunité discutable.
Permettez-moi de commenter tour à tour ces trois blocs de dispositions.
Le projet de loi relatif aux droits des citoyens dans les relations avec les administrations reprend, pour près de la moitié de ses 28 articles, des mesures issues du projet de loi relatif à l'amélioration des relations entre les administrations et le public.
Sans nul doute, cet acquis facilitera-t-il la discussion du présent texte, puisque nous retrouvons, le ministre l'a rappelé, nombre de dispositions sur lesquelles nous nous étions prononcés, et dont je rappelle l'essentiel : la définition des autorités administratives au sens de la présente loi ; la réduction des délais dans lesquels les autorités administratives ordonnancent les sommes dont elles sont redevables au titre d'une condamnation pécuniaire ; la définition d'une demande adressée à l'administration ; l'obligation de délivrer un accusé de réception aux demandes présentées ; l'obligation de transmission à l'autorité compétente d'une demande adressée à tort à une autorité administrative ; la réaffirmation du principe selon lequel le silence gardé par l'administration au terme d'un délai donné vaut rejet de la demande, et la réduction de ce délai de quatre à deux mois, mais aussi, par exception à ce principe, la création d'un cadre légal permettant l'ouverture par décret de procédures de décisions implicites d'acceptation ; la substitution d'un cadre légal au régime jurisprudentiel actuel de retrait par l'administration des décisions implicites d'acceptation illégales ; l'institution d'une procédure contradictoire pour l'élaboration des décisions individuelles devant être motivées ; des dispositions relatives au médiateur de la République, notamment l'élargissement de ses compétences, la légalisation de la fonction de délégué ; la possibilité de création de maisons des services publics, et le régime juridique qui leur sera applicable.
Je tiens à commenter brièvement ce dernier sujet. Je rappellerai tout d'abord que, depuis le printemps 1997, le nombre d'expériences de ces établissements, passé d'une dizaine à 125 environ, permet de tirer les premiers enseignements d'une expérience qui devient significative, mais aussi que le projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire, adopté en première lecture à l'Assemblée nationale, a fixé le principe même des maisons des services publics ; enfin, qu'à l'heure où les collectivités locales déplorent un mouvement de transfert de charges de l'Etat vers les collectivités locales, la création des maisons des services publics ne doit pas devenir le moyen de faire payer le maintien de services publics de l'Etat par les collectivités locales.
Les conventions réglant le fonctionnement de ces établissements devront donc y prendre garde, et veiller aussi à ce que tel service abrité dans une maison des services publics exerce son activité dans le respect de la concurrence avec le secteur privé.
La Haute Assemblée apprécierait, monsieur le ministre, que vous vouliez bien lui apporter toutes assurances sur ces deux préoccupations : pas de nouveaux transferts de charges avec les maisons des services publics et respect de la concurrence à l'intérieur de ces nouveaux établissements.
Ces dispositions sont enrichies par une série de mesures nouvelles, utiles au progrès de la transparence : il s'agit de la généralisation de la levée de l'anonymat des agents des autorités administratives dans leurs relations avec le public et de la mise en cohérence des trois lois de 1978-1979 relatives à l'informatique et aux libertés, à l'accès aux documents administratifs, aux archives.
Une autre série de mesures utiles pour améliorer la transparence financière concerne l'extension du contrôle de la Cour des comptes et la création de procédures de transmission d'informations entre les juridictions judiciaires et les juridictions financières, ainsi que l'harmonisation des pratiques diverses concernant la certification de la date à laquelle une personne a présenté une demande à l'administration ou a rempli une obligation.
Enfin, d'autres mesures prévues par le projet de loi paraissent d'une opportunité discutable, car soit elles sont dépourvues de portée normative, soit elles édictent des obligations dont les conséquences ont été insuffisamment évaluées et dont la portée n'a pas été définie.
Ainsi, le projet de loi affiche l'objectif d'un accès simple aux règles de droit. Or rendre compréhensible la règle de droit constitue l'une des principales missions de l'administration, laquelle est au service du citoyen. Ménager un accès simple au droit constitue un objectif, j'en suis persuadé, qui fait l'unanimité entre nous. Mais, pour autant, la loi doit-elle rappeler un postulat qui doit guider au quotidien toute l'action administrative ?
La commission des lois proposera de supprimer cet article dépourvu de tout contenu normatif. Elle regrette que la rédaction du projet de loi soit parfois en contradiction avec l'objectif affiché du Gouvernement de rendre le droit plus accessible au citoyen.
En effet, l'étude d'impact met en évidence la prolifération du droit applicable - 8 000 lois et 80 000 décrets sont actuellement en vigueur - et la confusion qui en résulte pour le citoyen. Selon les termes du rapport du Conseil d'Etat de 1991 consacré à la sécurité juridique, « lorsque le droit bavarde, le citoyen ne lui prête plus qu'une oreille distraite ». Peut-on, dans le même temps, déplorer la « dégradation de la norme due au développement des textes d'affichage » et soumettre au Parlement des dispositions qui n'ont aucune portée normative ?
De même, en son article 3, le projet de loi soumet au vote du Parlement l'objectif de codification de textes législatifs dans une vingtaine de domaines, à une échéance fixée.
Cet article a le très grand mérite de souligner la nécessité de poursuivre le processus de codification des textes législatifs et réglementaires. La codification constitue en effet une condition de réalisation de l'Etat de droit car elle facilite l'accès des citoyens à l'ordonnancement juridique en vigueur.
Le Sénat, particulièrement sa commission des lois, est fortement attaché à la codification, et en a apporté maintes preuves, par exemple récemment lors de l'élaboration du code général des collectivités territoriales ou du code de commerce.
Mais force est de dire que cet article ne résoudra pas le problème du blocage du processus de codification constaté depuis février 1996. En effet, la loi ne peut apporter une solution juridique à un problème essentiellement politique ; il appartient non pas au Parlement, mais au Gouvernement, et à lui seul, d'inscrire la codification à l'ordre du jour des travaux du Parlement : ainsi le veut la Constitution.
La codification, selon nous, mérite mieux qu'un article, j'allais dire, de pur affichage, dont le caractère constitutionnel est de surcroît très discutable, car il constitue une injonction à légiférer. La codification appelle un engagement politique solennel du Gouvernement en sa faveur, et c'est cet engagement, monsieur le ministre, que la Haute Assemblée attend que vous preniez ici, devant elle.
Une autre disposition est constestable : l'obligation de consultation systématique du public sur les opérations de travaux publics.
Ni le dispositif du projet de loi, ni son étude d'impact ne définissent clairement la portée de cette obligation nouvelle ou n'évaluent le coût d'une telle mesure pour l'administration.
Instaurer une telle obligation risquerait de paralyser les administrations et les collectivités. Une formulation trop imprécise du droit à la transparence peut aller à l'encontre de l'efficacité de l'action publique et du but affiché du présent projet de loi, qui vise à améliorer le service rendu au citoyen.
De plus, les autorités administratives sont déjà très largement confrontées aux blocages de toutes sortes qu'engendrent des recours incessants et manifestement abusifs devant les tribunaux de la part d'associations qui, toutes, ne sont pas animées du sentiment désintéressé de la défense de l'intérêt général.
La proposition tendant à généraliser l'obligation de consultation prévue à l'article 5 nous paraît inopportune ou, du moins, prématurée, dans la mesure où une expertise est engagée sur les conditions d'exercice des procédures de consultation et d'enquête publique prévues par notre droit. Il paraît utile d'en attendre les résultats avant de légiférer sur ce point.
Enfin, voici le dernier exemple d'une obligation dont les effets n'ont pas été mesurés et dont le contenu n'est pas précisé dans l'étude d'impact : l'obligation pour les organismes aidés ou subventionnés sur fonds publics de tenir leurs comptes à la disposition du public.
Cet article crée une contrainte supplémentaire pour les entreprises privées dont les comptes sont déjà contrôlés et déposés au registre du commerce et des sociétés. Faut-il leur imposer une obligation supplémentaire, lourde de conséquences pratiques : quid du local, d'une personne à l'accueil, de personnels à disposition ? Quel est le coût de cette mesure ? Cela n'est précisé nulle part.
Il semble donc nécessaire de délimiter plus précisément le champ d'application de cet article et de le circonscrire au cas des associations relevant de la loi 1901, comme l'a proposé le comité central d'enquête sur le coût et le rendement des services publics dans son rapport du mois de mars 1998.
Tels sont, monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les éléments d'appréciation portés par la commission des lois sur le projet de loi relatif aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations.
La commission des lois vous propose des modifications substantielles de ce texte afin d'en supprimer certaines dispositions sans caractère normatif et sans utilité tangible et qui ouvriraient le champ à un véritable contentieux ainsi que des dispositions dont la portée n'a pas été suffisamment évaluée.
Elle vous propose d'adopter ces modifications avec les autres dispositions du texte qui apportent une réelle amélioration des procédures administratives. (Applaudissements.)
M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe socialiste, 26 minutes ;
Groupe de l'Union centriste, 19 minutes ;
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 11 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 9 minutes.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Pelletier.
M. Jacques Pelletier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi que le Gouvernement soumet aujourd'hui à notre examen relève, pour une large part, d'un consensus qu'il convient d'apprécier à sa juste valeur.
Monsieur le ministre, vous me permettrez de saluer l'intelligence de la démarche gouvernementale. Ce projet de loi contient en effet de nouvelles améliorations par rapport au texte original. Par ailleurs, ses auteurs n'ont pas hésité à reprendre, parfois in extenso, certains articles du projet de loi relatif à l'amélioration des relations entre les administrations et le public qui avait été présenté par votre prédécesseur, monsieur le ministre.
Ainsi que vous l'avez rappelé, vous avez choisi de réintroduire des dispositions qui étaient à l'époque en instance de dernière lecture, mais qui n'ont jamais été adoptées en raison de la dissolution de l'Assemblée nationale.
Nos concitoyens comprendront que ce débat n'a d'autre objet que de leur faciliter la vie quotidienne, et ce, quelles que soient les opinions des gouvernements ou des parlementaires qui le défendent.
Pour ma part, je suis particulièrement heureux de participer à ces travaux qui, souvent, répondent à des préoccupations légitimes que j'avais connues en ma qualité de médiateur de la République.
Parce qu'elle répond à la multiplicité croissante des demandes qu'entraîne la diversité, elle aussi croissante, des situations des Français, l'administration est devenue un instrument particulièrement complexe.
Il s'agit non pas de critiquer cet état de fait inéluctable, mais simplement d'agir afin que cette complexité ne porte pas atteinte à la qualité des relations que l'administration entretient avec les usagers.
Le titre II du projet de loi va incontestablement dans le sens d'une nécessaire clarification des pratiques administratives, et ce, avec pour unique objectif de faciliter les échanges entre les citoyens et les autorités concernées.
Je présenterai maintenant cinq observations.
Première observation, je me félicite de voir enfin validée par la loi l'expression connue de tous : « le cachet de la poste faisant foi ». Contrairement à toute attente, j'ai découvert que cette règle, que je croyais communément admise par l'ensemble des administrations, coexistait en réalité avec d'autres modes de preuve.
Chacun peut mesurer l'ampleur des confusions entraînées par ces divergences : alors que l'administration fiscale s'attache au cachet de la poste, les URSSAF s'intéressent, elles, à la date de réception.
C'est sur la base de ce constat que j'avais présenté une proposition de réforme en 1997 visant à soumettre chaque administration à la règle unique selon laquelle le cachet de la poste fait foi. Je me réjouis de la voir aboutir aujourd'hui.
Deuxième observation, la modification de la loi du 16 juillet 1980 relative aux astreintes prononcées en matière administrative, et proposée par l'article 15, s'inscrit dans le même cadre procédural et me satisfait tout autant.
Cet article donne en effet un écho favorable à la proposition de réforme que j'avais formulée en 1994, qui visait à rendre la procédure d'astreinte applicable à la provision accordée par le juge des référés.
Troisième observation, l'article 4 du projet de loi, que la commission des lois propose à juste titre de déplacer avant l'article 16, relève incontestablement de l'amélioration au quotidien des relations entre les citoyens et leurs administrations.
L'une des critiques les plus souvent formulées à l'encontre de l'administration concerne la prétendue impersonnalité avec laquelle les fonctionnaires gèrent les demandes et les dossiers des usagers.
Je ne crois pas que cette critique s'adresse aux personnels eux-mêmes. Elle résulte en réalité d'un état de fait qui conduit les administrations à ne pas toujours distinguer l'identité de l'agent qui gère une situation. C'est ainsi que l'usager a le sentiment d'être en relation non pas avec un individu, mais avec un système, ce qui est très mauvais.
Le projet de loi met un terme à cette pratique qui, en dehors de la discourtoisie qu'elle peut faire ressentir, ne correspond pas aux aspirations d'une société moderne attachée à la prédominance des rapports humains.
Quatrième observation, l'inscription dans le projet de loi du principe selon lequel les autorités devront délivrer un accusé de réception aux auteurs des demandes qui leur seront adressées concourt également à l'humanisation des rapports entre l'administration et nos concitoyens.
Il semble en effet légitime que les citoyens soient en mesure de connaître le cheminement des démarches qu'ils accomplissent.
Il convient d'ailleurs de rapprocher cette disposition de celle qui vise à assurer la transmission de la demande à l'autorité compétente en cas d'erreur de l'expéditeur.
Les gouvernements qui se sont succédé ont parfaitement saisi la nécessité d'informer les usagers en prévoyant, à cette occasion, que l'intéressé devra être avisé de la réorientation de son dossier. Ces démarches sont très positives, et j'y souscris pleinement.
Cinquième observation, enfin, les dispositions visant à clarifier les procédures de décisions implicites, qu'elles soient de rejet ou d'acceptation, participent à l'ambition contenue dans l'intitulé du projet de loi. Je souhaite évidemment que, à l'avenir, les décisions implicites d'acceptation soient de plus en plus nombreuses. Il en va de même pour ce qui concerne la formulation par l'intéressé d'observations préalables à la décision.
Parmi toutes ces propositions, auxquelles j'adhère, je m'étonne que le Gouvernement n'ait pas souhaité reprendre le principe de la déclaration unique de changement d'adresse auprès de La Poste.
Lorsqu'une personne physique aurait eu à communiquer sa nouvelle adresse aux autorités administratives, ainsi que les lois ou règlements l'y obligent, cette formalité aurait été accomplie par la déclaration de ce changement à La Poste, à charge pour celle-ci de transmettre cette information.
Cette disposition à laquelle j'étais très favorable me semblait de nature à satisfaire les aspirations des citoyens qui auraient ainsi évité une multiplication des démarches bien souvent source d'erreur ou d'omission. Monsieur le ministre, j'aimerais entendre vos observations sur ce point, car cette mesure s'inscrit dans le même ordre d'idées que les dispositions relatives aux maisons des services publics, sur lesquelles je reviendrai dans un instant.
Quoi qu'il en soit, l'ensemble des mesures que vous nous proposez assureront, j'en suis sûr, un traitement des demandes empreint de plus de compréhension, de plus d'information et de plus de dialogue.
L'élément qui, à mon sens, constitue l'avancée la plus innovante figure dans le titre IV du projet de loi, relatif aux maisons des services publics.
Il n'est nullement besoin de démontrer les avantages des dispositions qui y sont contenues. L'usager pourrait désormais se rendre à un guichet unique dont le préposé serait habilité à traiter l'ensemble des demandes formulées, quelle que soit l'administration concernée.
Il s'agit d'un progrès extraordinaire pour l'ensemble de nos concitoyens qui, bien souvent, se heurtent à des difficultés d'ordre purement matériel dans l'accomplissement de leurs démarches administratives, surtout lorsqu'ils sont en situation d'exclusion.
Cette mesure leur permettra de faire l'économie de déplacements multiples. De plus, de telles dispositions faciliteront la tâche des administrations concernées, dans la mesure où le taux d'erreurs incluses dans les demandes des administrés diminuera.
Il est vrai que la gestion commune, au sein d'une seule structure, de services publics relevant de l'Etat pour les uns, des collectivités territoriales pour les autres, voire des organismes de sécurité sociale ou d'autres services publics, ne sera pas sans entraîner des difficultés internes à l'administration. Ces difficultés résultent des conséquences budgétaires de cette nouvelle répartition, des nécessités de la formation des agents uniques ou encore du choix des communes d'accueil des maisons de services publics.
Pour importantes que soient ces considérations, elles ne sauraient, selon moi, constituer un frein à la mise en application des dispositions contenues dans le projet de loi. Notre seul souci est d'assurer à nos concitoyens les conditions d'un service public plus accessible.
C'est cette seule perspective qui me guidera lors du vote sur les articles 24 à 26 de ce projet de loi.
Enfin, j'en viendrai aux dispositions du projet de loi relatives au médiateur de la République.
Cette institution, je le rappelle, a pour objet de faciliter les relations entre les citoyens et les administrations.
C'est la raison pour laquelle il me semble primordial que ses travaux soient mieux connus du public. A cet égard, la faculté de rendre publiques les propositions de réforme, à défaut de réponses satisfaisantes, s'avère particulièrement intéressante.
Je regrette que le Gouvernement n'ait pas souhaité réintroduire les dispositions figurant dans le projet de loi examiné en 1997 et aux termes desquelles le médiateur aurait pu disposer du pouvoir de provoquer l'inspection ou le contrôle d'un service public dont il aurait constaté le fonctionnement défaillant. Cette mesure me semblait s'inscrire pleinement dans le cadre de la transparence souhaitée par le Gouvernement.
Quant au voeu du Gouvernement de ne pas rouvrir le débat de l'élargissement de la saisine du médiateur à d'autres élus que les seuls parlementaires, je rappelle qu'une large discussion a déjà eu lieu sur ce sujet.
J'avais proposé que les députés européens et les présidents de conseils généraux ou régionaux puissent aussi saisir le médiateur. En effet lorsque l'institution a été créée en 1973, les parlementaires européens n'étaient pas élus au suffrage universel direct et la décentralisation n'avait pas encore eu lieu.
Voilà deux ans, l'Assemblée nationale et le Sénat n'ont pas accepté cette proposition, revenant ainsi aux principes de la loi originelle de 1973 sur le médiateur.
Par ailleurs, les parlementaires souhaitaient comme dans beaucoup d'autres pays, élire le médiateur. Le Gouvernement n'avait pas voulu accéder à cette demande, mais M. Pleven, le garde des sceaux de l'époque, avait proposé en contrepartie que le médiateur ne puisse être saisi que par leur intermédiaire. C'est ainsi que les députés et les sénateurs sont les seuls à pouvoir transmettre les dossiers au médiateur.
Certains de nos collègues qui se souviennent de cette discussion originelle n'ont pas souhaité étendre la saisine à d'autres personnes.
Néanmoins, je pense très sincèrement, mes chers collègues, que l'institution du médiateur de la République continuera dans l'avenir à monter en puissance et que se posera nécessairement un jour - peut-être lointain, du reste - la question de la saisine directe du médiateur. C'est à mon avis inéluctable à terme.
Pour conclure sur le thème du médiateur de la République, j'ajoute que la reconnaissance législative des délégués constitue une avancée fondamentale pour l'institution, puisque, à la demande du médiateur, ces derniers pourront officiellement instruire certaines réclamations et participer au règlement des difficultés dans leur ressort géographique.
Cette modification de la procédure actuelle permettra incontestablement d'accélérer le traitement des dossiers, et ce au bénéfice exclusif des administrés. Elle permettra - enfin ! - d'ouvrir la voie à la nomination de délégués dans les territoires d'outre-mer ce qui, jusqu'alors, était impossible. Je me suis cassé les dents pendant plusieurs années pour que des délégués soient nommés dans les territoires d'outre-mer. Je ne vois pas pourquoi il n'était pas possible légalement de les nommer. Ce projet de loi va le permettre ; j'en suis très heureux pour mon successeur.
Monsieur le ministre, comme vous l'aurez compris, j'adhère pleinement aux objectifs que vous cherchez à atteindre avec ce projet de loi. Ainsi que j'ai eu l'occasion de vous le signaler, je regrette que certaines mesures envisagées voilà deux ans n'aient pas été reprises aujourd'hui. Je serai donc heureux d'entendre vos explications à ce sujet.
Quoi qu'il en soit, et parce qu'il constitue un réel progrès pour l'ensemble de nos concitoyens, avec mes collègues du groupe du Rassemblement démocratique et social européen, je voterai le texte qui nous est présenté aujourd'hui. (Applaudissements sur les travées du RDSE et sur les travées socialistes, ainsi que sur certaines travées de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le texte que nous examinons aujourd'hui et qui est relatif aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations s'inscrit dans la rénovation de l'Etat et de la vie publique engagée par le Gouvernement. Ce texte vient compléter les projets de Mme Voynet sur l'aménagement du territoire, celui de M. Chevènement sur l'intercommunalité, ainsi que votre projet relatif à l'intervention économique des collectivités locales, monsieur le ministre.
La liste est longue. Elle argue de la volonté gouvernementale de moderniser, de démocratiser, la vie de l'Etat et de ses administrations. « Rendre les administrations plus accessibles, plus proches, plus transparentes, plus simples et plus efficaces », tel est l'objectif du Gouvernement, auquel nous souscrivons entièrement.
Les services publics sont au coeur du développement de la France. Ils sont porteurs d'efficacité, de protection et de cohérence sociale, et demeurent des atouts décisifs au service de l'emploi, du dynamisme de notre pays et de sa modernisation. Ils sont également l'une des assises du sentiment de citoyenneté et du principe d'égalité.
Nos concitoyens savent d'ailleurs combien l'administration, et plus généralement tous les services publics, est indispensable à la cohésion de notre société et permet à l'Etat d'assumer les responsabilités qui sont les siennes au coeur du pacte républicain.
L'expression forte du mouvement de 1995 en témoigne, ainsi que les multiples mouvements sociaux actuels qui portent l'exigence d'un service public de qualité et riche en emplois.
Le récent rapport Roche et les attaques récurrentes contre les fonctionnaires, émanant notamment de la majorité sénatoriale, me conduisent ici à réaffirmer que si l'administration souffre de lenteur, ce n'est pas parce que ses agents ne font pas leur travail, c'est parce que, faute de moyens et d'effectifs suffisants, ils manquent de temps.
Ils sont les premiers à souhaiter pouvoir rendre un meilleur service à l'usager.
Vous ne cessez, messieurs de la majorité sénatoriale, de pester contre le nombre trop important de fonctionnaires et contre le coût qu'ils représentent pour le budget de l'Etat. Or nous ne pouvons que constater les manques d'effectifs, par exemple dans la police, dans l'enseignement ou dans le secteur de la santé.
Peut-on prétendre à l'amélioration des réponses apportées aux attentes de nos concitoyens dans ces secteurs sans envisager d'y développer les emplois ? Nous ne le pensons pas.
Ces missions de service public font partie des fonctions régaliennes de l'Etat. L'Etat se doit donc de défendre ses services publics et de les développer afin qu'ils répondent mieux encore aux besoins de nos concitoyens.
Il faut, selon nous, un Etat volontariste, qui impulse une dynamique nouvelle, et non un Etat amenuisé, qui laisse à la dérive un nombre croissant d'individus. Il faut une fonction publique correctement rémunérée, formée et respectée.
Je tiens ici à saluer les propos de M. le ministre, dans un article du Monde du 3 mars 1999 : « Cessons de critiquer sans nuances ce corps social qui, très souvent, doit assumer en première ligne les dysfonctionnements de notre société, pour mettre en oeuvre la solidarité nationale et lutter contre l'exclusion. Tout au contraire, parlons du sens des responsabilités et de l'attachement des fonctionnaires aux valeurs de la République ».
M. Jacques Mahéas. Bonne citation !
M. Robert Bret. Sans aucun doute, votre projet de loi, monsieur le ministre, est beaucoup plus ambitieux que le texte relatif à l'amélioration des relations entre les administrations et le public, qui avait vocation à rationaliser les missions de l'administration. Aujourd'hui, on nous présente un texte dont l'objectif est de permettre au service public de répondre mieux encore aux besoins des usagers.
J'en arrive aux différentes mesures qui nous sont ici proposées.
Nous constatons d'abord que la grande innovation de ce texte est de soumettre l'ensemble des autorités administratives - Etat, collectivités territoriales, établissements publics à caractère administratif, organismes de sécurité sociale et autres organismes chargés de la gestion d'un service public administratif - aux dispositions du présent projet de loi et pas uniquement aux mesures édictées par le décret du 28 novembre 1983.
La commission des lois nous propose de ne soumettre l'ensemble des autorités administratives qu'aux dispositions relatives aux procédures et aux régimes des décisions administratives.
Cette proposition nous semble très restrictive. Nous nous y opposerons.
Le titre I a pour objet d'améliorer la transparence et l'accès aux règles de droit.
Ainsi, nous nous félicitons de l'obligation faite aux autorités administratives d'organiser un accès simple aux règles de droit, mais aussi du devoir de consultation du public pour la quasi-totalité des constructions d'ouvrage public. Ces dispositions contribuent à la démocratisation de la chose publique. Nous avons besoin de plus de transparence !
L'article 3 légalise le principe de codification auquel les communistes - et ils ne sont pas les seuls - sont attachés. Ce principe améliore en effet la maîtrise des règles de droit par nos concitoyens, qui sont, en vertu de l'adage : « nul n'est censé ignorer la loi », tenus de la connaître.
En revanche, je souscris aux propos du rapporteur, qui s'interroge sur la faisabilité de codifier 24 codes d'ici à la fin de la législature. C'est pourquoi nous proposons un amendement qui prend en compte le facteur temps.
Monsieur le rapporteur, cette solution nous semble plus constructive que les amendements de suppression préconisés par la commission des lois.
Les articles 6 à 9 opèrent une modernisation et une harmonisation des lois informatiques et liberté d'accès aux documents administratifs et aux archives. Ces dispositions nous semblent opérer un bon équilibre entre les droits à l'information, à la communication, à la transparence, et les droits protecteurs de la vie privée et du secret.
Le chapitre III du titre I traite de la transparence financière. Nous nous félicitons de ces mesures que nous revendiquons depuis plusieurs années et nous ne sommes que très peu étonnés du choix de la commission des lois de ne soumettre que les associations aux dispositions de l'article 10. Si je n'ai pas bien compris, vous pourrez préciser les choses, monsieur le rapporteur.
Alors que nombre d'entreprises bénéficient de subventions publiques au titre de l'aide à l'emploi, les citoyens, eux, ne seraient pas en droit de contrôler l'utilisation de ces fonds et leur répercussion effective sur l'emploi. Nous ne sommes pas disposés à l'admettre.
Le titre II a pour objet d'améliorer les relations des citoyens avec les administrations.
Il reprend les dispositions du projet Perben, elles-mêmes issues du décret du 28 novembre 1983 relatif aux relations entre les administrations et les usagers.
Il en est ainsi de l'obligation pour les autorités administratives d'accuser réception des demandes des usagers, de leur obligation de transmettre au service compétent les demandes dont elles sont saisies à tort, et le droit pour tout citoyen d'être entendu par l'administration sur les décisions le concernant.
Il est également proposé de retenir le cachet de la poste comme règle de droit commun pour la recevabilité des demandes des usagers. Les délais de procédure sont accélérés.
La règle selon laquelle le silence de l'administration vaut rejet est maintenue. Cependant, le principe est posé de pouvoir inverser cette règle dans les cas prévus par décret en Conseil d'Etat.
Le rôle du médiateur de la République, dont je veux saluer l'efficacité et la compétence, est renforcé, c'est une bonne chose. Les délégués départementaux sont légalisés.
S'agissant des maisons des services publics, le projet de loi vise à donner un cadre législatif à diverses expériences menées depuis plusieurs années.
L'objectif visé est fort louable puisqu'il s'agit de réunir, en un seul lieu, différents services publics afin de faciliter les démarches des usagers. Cela répond aux attentes des associations que nous avions rencontrées lors de la préparation de la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions. Il est bon, en effet, de permettre aux plus défavorisés d'être soutenus dans leurs démarches administratives.
Alors que, depuis plusieurs années, on assistait à la disparition de nombreux services publics dans le monde rural et dans les quartiers périurbains, ce dispositif inverse la tendance.
Il est enfin proposé de rapprocher les services publics des usagers. C'est une très bonne chose.
Nous sommes d'autant plus satisfaits qu'à la lecture des dispositions de la loi sur l'aménagement du territoire l'objectif de rationalisation des services publics nous inquiétait, monsieur le ministre. Je préfère donc vraiment ce qui nous est proposé aujourd'hui.
Nous avons un autre sujet d'inquiétude : dans le projet de loi, il n'est pas prévu de financements nouveaux pour la mise en place des maisons des services publics. Mon ami Thierry Foucaud s'était d'ailleurs interrogé, lors de l'examen des crédits du ministère de la fonction publique, sur l'absence de moyens affectés à la création de ces maisons. Vous nous en préciserez les raisons, monsieur le ministre.
L'étude d'impact prévoit que les personnels de ces maisons seront détachés de leur administration. C'est un gage de la qualité des services rendus à la population et nous y sommes plutôt favorables.
C'est également une garantie quant aux compétences et aux statuts des agents, garantie qui ne serait plus si l'amendement de la commission venait à être adopté. Cela reviendrait à la situation actuelle, dans laquelle les employés de ces maisons sont des salariés précaires, mal payés, peu formés et confrontés à de graves problèmes.
Cependant, nous tenons à ce que ces détachements ne se fassent pas uniquement par redéploiement et que la mesure soit aussi créatrice d'emplois.
Il nous semble également dommageable que les frais de fonctionnement soient à la charge des collectivités locales, à qui l'Etat demande toujours plus d'efforts.
Le groupe communiste républicain et citoyen se prononcera pour ce texte si, toutefois, l'économie générale ne s'en trouve pas trop modifiée après la discussion des articles. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Traduction législative de la réforme de l'Etat, le projet de loi que vous nous proposez, monsieur le ministre, s'inscrit dans la continuité du renouveau du service public mis en oeuvre, voilà maintenant dix ans déjà, sous l'impulsion de M. Michel Rocard, alors Premier ministre.
Il se situe également dans le prolongement du projet de loi déposé lors de la précédente législature et présenté par votre prédécesseur : M. Dominique Perben. La manière dont il est complété par rapport au projet de loi de 1997 contribue à en faire un instrument de modernisation de l'administration et surtout d'amélioration des rapports entre les administrés et leur administration.
Tout le monde s'accorde à vouloir un Etat plus simple, plus proche et plus moderne. Tout le monde réclame des solutions pragmatiques pour que la machine administrative soit mieux équipée, plus rapide et plus lisible. Tous les acteurs de l'Etat, usagers comme fonctionnaires, sont convaincus du bien-fondé d'une réforme destinée à améliorer la qualité des services publics et à mieux répondre aux attentes des usagers.
Il s'agit d'une préoccupation majeure depuis plusieurs années, qui n'est d'ailleurs pas spécifique à la France. Chez nos voisins, le souci de la qualité de l'accueil et de la prestation est, lui aussi, à l'ordre du jour. Nous ne pouvons donc que nous réjouir d'examiner un texte dont le contenu participe directement à l'effort de transparence des administrations et d'amélioration des procédures.
A l'aube de l'an 2000, il est temps d'offrir aux citoyens une administration plus proche, plus accessible. Il est urgent de faciliter leurs démarches et tout bonnement leur vie. Il est vrai que bon nombre de ces démarches prennent, pour l'usager, l'allure d'un parcours du combattant ! C'est ce parcours qu'il s'agit de simplifier ; ce sont les formalités, les procédures, qu'il convient de réduire et d'alléger.
L'accès au service public n'est pas simple. L'accueil est souvent terni par des difficultés relationnelles. La proximité des services fait souvent défaut.
Quand ce ne sont pas spécifiquement des services publics, il s'agit de services parapublics ou considérés comme tels par les citoyens.
Dans le département dont je suis l'élu, à savoir la Seine-Saint-Denis, on voit se regrouper les ASSEDIC, l'ANPE, La Poste, France Télécom, la caisse d'allocations familiales, services qui sont plus éloignés du citoyen. Faisons en sorte que les autres services publics restent là où se trouve le public, là où la densité de population est forte.
Les délais d'attente aux guichets sont souvent insupportables et, lorsque l'usager privilégie le moyen de communication qui lui évite un déplacement, comme le courrier ou le téléphone, il risque, dans un cas, d'attendre longtemps la réponse à sa lettre, dans l'autre, d'entendre une musique dans le combiné avant d'être orienté vers le service approprié.
D'ailleurs, monsieur le ministre, je voudrais attirer votre attention sur ce dernier point. Autrefois, nos concitoyens attendaient avec impatience qu'un ou une standardiste veuille bien leur répondre. Actuellement, dès que le numéro est composé, une voix anonyme dit à l'intéressé que l'on s'efforce d'écourter son attente !... Et l'attente se poursuit.
Autrefois, nos concitoyens n'étaient pas très satisfaits d'attendre que quelqu'un veuille bien leur répondre, mais ils ne sont pas plus satisfaits maintenant, et en plus ils paient la communication. Il m'est arrivé d'attendre plus d'un quart d'heure avec la petite musique au bout du fil !
Je souhaiterais donc que vous donniez un certain nombre de consignes pour limiter l'utilisation de ces accueils automatiques lorsqu'ils ne rendent pas véritablement service.
Bref, même si les usagers apprécient les services de l'Etat et les fréquentent régulièrement, avouons que leurs frustrations sont quelquefois légitimes, d'où l'intérêt de ce projet de loi. L'administration, les « autorités administratives », comme il est dit dans l'article 1er, ne doivent plus être perçues comme un obstacle à la citoyenneté.
A cet égard, la nouvelle architecture du texte souhaitée par notre commission nous semble en contradiction avec l'objectif recherché. La rédaction du Gouvernement se révèle plus protectrice et plus explicite. Il s'avère en effet plus opportun de définir d'emblée ce qu'il faut entendre par administration au sens large du terme. Cette précision répond sans ambiguïté et d'entrée de jeu à la volonté de faciliter les relations des citoyens avec leur administration.
Les mesures proposées par le projet de loi tendent justement à rendre l'Etat plus accessible, à réduire la complexité des normes, à accélérer les décisions administratives, à accroître les pouvoirs du médiateur de la République et à renforcer l'assise juridique des maisons des services publics, dont le succès repose sur le service de proximité.
L'objectif visé correspond à de réels besoins : nous ne pouvons qu'y adhérer. Cependant, certains points méritent d'être clarifiés.
Du point de vue de l'usager, ce texte constitue un progrès indéniable : la fin de l'anonymat des administrations, l'accélération de la prise de décisions, l'accès plus facile aux documents administratifs, toutes ces dispositions, qui améliorent le traitement des dossiers et simplifient la vie des administrés, vont dans le bon sens. Elles répondent à des besoins réels et devraient satisfaire des attentes.
N'existe-t-il pas, toutefois, des risques de confusion et d'incertitude pour les usagers concernant, par exemple, la règle du silence de l'administration. Le silence gardé par l'administration pendant un délai de deux mois au lieu de quatre - c'est un progrès - vaut décision implicite de rejet de la demande, sauf dans les cas prévus par décret. Le simple citoyen aura du mal à s'y retrouver, notamment si le nombre de cas prévus par décret est important.
De même, la règle du « cachet de La Poste faisant foi », pour toute obligation de payer ou de remettre un document, imposée à un usager avant une date limite, met fin à une incertitude qui peut faire encourir à l'usager des pénalités de retard. Mais comment valider un document adressé par fax, par Internet ou tout autre procédé télématique ou informatique ?
S'agissant, par ailleurs, de l'obligation d'accuser réception des demandes et des réclamations, elle sera exigée de l'ensemble des autorités administratives, y compris donc des collectivités territoriales. Or, les maisons des services publics - sur lesquelles je reviendrai ultérieurement - peuvent servir de courroies de transmission des demandes. Quelle sera alors la date de référence portée sur l'accusé de réception ? Celle du dépôt du dossier au guichet d'accueil ou celle de sa réception par le service compétent ?
Vous avez beau prévoir, à l'article 18, qu'une autorité administrative saisie d'une demande ou d'une réclamation dont l'examen relève d'une autre est « tenue de la transmettre à l'autorité compétente et d'aviser l'intéressé de la réorientation de sa demande », une ambiguïté perdure quant à la date d'enregistrement. De surcroît, l'affaire se complique quand une décision implicite de rejet ou d'acceptation doit intervenir puisque le point de départ du délai au terme duquel la décision interviendra n'est pas le même. Dans ces conditions, les formalités sont-elles vraiment réduites ?
Mettons-nous maintenant à la place des agents des différents services impliqués par les dispositions de ce projet de loi. Qu'ils soient confrontés à des contraintes accrues ne fait aucun doute. Certes, c'est un moyen de les responsabiliser et de les valoriser dans leurs tâches. On peut toutefois craindre un surcroît de travail et un surcoût financier pour les collectivités locales.
Les mairies, en l'occurrence, représentent l'administration de proximité par excellence. Eu égard aux nouvelles obligations infligées aux services publics - accusé de réception, transmission à l'autorité compétente - les personnels des mairies peuvent redouter d'être envahis de dossiers, par exemple à l'occasion d'une contestation concernant la réalisation d'une opération d'aménagement ou d'infrastructure. C'est ainsi qu'il suffira que tous les membres d'une association de défense de l'environnement écrivent à une petite mairie pour que cela pose des difficultés.
Ces recours relatifs à la construction d'ouvrages publics pourront-ils être considérés comme abusifs ?
Autant nous approuvons l'effort d'amélioration de la vie quotidienne des administrés, autant nous nous interrogeons sur les moyens humains, matériels, financiers qui devront l'accompagner et sur les critères de gestion et de contrôle qui s'imposeront.
L'objectif recherché ne risque-t-il pas de dériver au détriment des usagers ? L'extension du régime de décision implicite d'acceptation, combinée à la réduction des délais de réponse, ne risque-t-elle pas d'inciter les services à rejeter des demandes, faute d'avoir les moyens et le temps de les examiner correctement ? Il en résulterait un mécontentement des usagers qui réclament une réponse rapide.
De même, le retrait pour illégalité, qui accorde un droit de repentir à l'administration et l'obligation pour un service de recueillir les observations des intéressés avant toute prise de décision peuvent se traduire par un climat de tensions aggravé. Dans ces conditions, on risque d'aboutir à l'effet inverse de l'objectif recherché, qui consiste à éviter des relations conflictuelles entre l'administration et ses administrés.
En ce sens, les dispositions relatives au médiateur de la République devraient constituer un plus, un double plus d'ailleurs : d'abord pour l'usager, qui pourra de plus en plus y avoir recours pour tenter de démêler des dossiers inextricables ; ensuite, bien sûr, pour le médiateur lui-même, dont les pouvoirs sont renforcés et dont la reconnaissance locale, par le biais des médiateurs départementaux, est confirmée.
Concernant l'article 23, je tiens à dire que nous approuvons l'amendement de la commission des lois qui tend à exonérer le médiateur européen et ses homologues étrangers de l'obligation de passer par l'intermédiaire d'un député ou d'un sénateur pour transmettre une réclamation au médiateur de la République.
Venons-en maintenant aux maisons des services publics. Ces lieux polyvalents, qui existent déjà à titre expérimental, devraient être généralisés pour, d'une part, pallier la fermeture de guichets de La Poste, des agences de l'ANPE ou des trésoreries en zones rurales, etc., et pour, d'autre part, renforcer la présence des services publics dans les banlieues.
Lors de l'examen du projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire, les députés ont adopté des dispositions encadrant la participation des collectivités locales au maintien des services publics sur leur territoire et permettant à plusieurs gestionnaires de services publics de s'associer pour mettre à la disposition du public des services « d'usage courant » dans un même lieu.
Les articles 24 et 25 du présent projet de loi définissent justement le régime juridique de ces maisons des services publics afin de conférer une base juridique à la coopération entre administrations et en vue de faciliter les démarches des usagers et de renforcer la présence des services publics sur le territoire. Pourquoi, en effet, multiplier les démarches et les heures perdues quand il est possible de réunir en une seule adresse plusieurs services ? Cette solution est séduisante, mais elle suscite beaucoup d'interrogations.
Les usagers attendent des services publics de proximité qu'ils soient capables de traiter pleinement leurs demandes. Or, quelles garanties auront-ils quant à la compétence des agents ? Auront-ils affaire à des agents derrière des guichets, renvoyant ailleurs le traitement des dossiers ? En un mot, s'agira-t-il d'un service public d'orientation ? Seront-ils, au contraire, assurés de la compétence du fonctionnaire qui les écoute ? Une formation polyvalente appropriée des agents concernés est-elle prévue ?
Quant à la formule du groupement d'intérêt public, destinée aux projets d'envergure, elle est souvent présentée comme une forme particulièrement souple de coordination d'activités. A ce propos, contrairement au texte initial proposé par M. Perben, nous nous réjouissons d'avoir obtenu des garanties. Il est désormais clairement stipulé que son responsable sera désigné parmi les agents soumis au statut général des fonctionnaires et que le personnel sera constitué d'agents mis à disposition ou en détachement. En outre, rien n'interdit de recruter des personnels de droit privé, des contractuels de type CES - contrat emploi-solidarité - comme c'est déjà souvent le cas.
M. Jean-Jacques Hyest. Vous oubliez les emplois-jeunes !
M. Jacques Mahéas. C'est là en effet une excellente mesure gouvernementale, que vous avez bien intégrée, même si, en un temps, vous l'avez largement critiquée !
En conséquence, si ce texte ne suscite pas de désaccord de fond au sein de cet hémicycle, beaucoup d'interrogations subsistent ; j'y reviendrai à l'occasion de l'examen des articles.
Au-delà de ces observations, qui ne manqueront certainement pas d'alimenter le débat, je conclurai sur l'intérêt immédiat de ce projet de loi.
Certes, il ne provoque en rien une révolution. Il représente cependant une étape décisive et obligée dans le processus de la réforme de l'Etat, pour éviter que la logique administrative ne s'appuie sur une réglementation complexe et tatillonne, qu'elle ne s'apparente à un millefeuille indigeste à l'heure d'Internet et de la banalisation de l'informatique.
Il est grand temps de simplifier les rapports entre l'Etat et l'usager, de faciliter les contacts humains avec les services publics. Ce texte est peut-être l'amorce de cette amélioration ! (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Hyest.
M. Jean-Jacques Hyest. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'ai l'impression que, pour une grande part, nous avons déjà débattu longuement de ces sujets lors de la discussion d'un précédent projet de loi - nous avions même été jusqu'à la deuxième lecture - qui n'a pu être définitivement adopté en raison de la dissolution.
Bien sûr, par rapport à ce texte, monsieur le ministre, vous apportez un certain nombre de compléments et d'éclaircissements, mais l'objectif essentiel reste le même : assurer la transparence des décisions administratives.
Je souhaiterais que les décisions implicites de rejet soient le moins nombreuses possible. En effet, c'est loin d'être toujours le cas, sauf dans des domaines précis, comme celui des permis de construire, ce qui oblige en fait l'administration à instruire les dossiers dans des délais raisonnables.
D'une manière générale, il n'y a rien de plus désagréable pour les administrés que d'attendre, même si des délais sont évidemment nécessaires, et de continuer à ignorer la décision de l'administration.
Je partage le sentiment de ceux qui disent qu'il n'y a pas lieu de crier en permanence haro sur le service public. Il reste que, par exemple en ce qui concerne l'anonymat, les décisions courageuses prises par différents ministres n'ont pas eu tous les effets escomptés. Nos administrés nous disent qu'ils ont encore affaire, dans l'administration, à des interlocuteurs qui refusent de décliner leur identité. Bien sûr, une certaine protection est parfois nécessaire, en particulier pour les personnels qui sont chargés des services de sécurité. Néanmoins, rien n'est plus déplaisant que de ne pas savoir à qui s'adresser pour demander des éclaircissements sur un dossier complexe.
Votre projet de loi, monsieur le ministre, contribue à améliorer les choses de ce point de vue, mais il faudra beaucoup de persévérance pour que cela soit diffusé partout.
A l'inverse, monsieur le ministre, certaines dispositions paraissent, en l'état, inquiétantes, et il convient qu'elles soient précisées.
La commission des lois a eu raison, à cet égard, d'insister sur l'existence de nombreux textes qui obligent à procéder à une consultation des citoyens et à réaliser des enquêtes.
Ainsi, s'agissant de la nécessité de consulter le public pour mettre en oeuvre une opération d'aménagement des infrastructures, je veux évoquer un exemple significatif. Lorsqu'un syndicat d'électrification est conduit, parce que c'est nécessaire, à réaliser des travaux, tendant notamment à installer des stations supplémentaires, cela suscite toujours des protestations. Faut-il vraiment effectuer des enquêtes avant toute opération de travaux publics ? S'il est nécessaire que la transparence des décisions prises par l'administration soit la plus large possible, veillons tout de même à ne pas paralyser totalement toute action de l'Etat ou des collectivités locales. Un certain équilibre doit être trouvé.
L'excellent rapport de notre collègue M. Amoudry montre qu'un certain nombre d'enquêtes et de procédures de consultation sont déjà prévues dans une multitude de domaines. Faut-il en ajouter ? Personnellement, je ne le pense pas. Des limites s'imposent.
Monsieur le ministre, vous le savez fort bien, de plus en plus d'associations se créent en déclarant se vouer à la défense de l'environnement ou à d'autres missions, mais qui n'ont en réalité d'autre but que d'introduire des recours et qui finissent par paralyser totalement l'action des autorités. Ainsi, dans mon département, une association s'est « spécialisée » dans la remise en cause des schémas directeurs et des plans d'occupation des sols. Elle introduit systématiquement des recours, et ce parfois sans la moindre justification ; mais tout est ainsi retardé de deux mois !
M. Jean Chérioux. Et cela coûte cher !
M. Jean-Jacques Hyest. Absolument ! Parce qu'il faut bien appliquer les procédures !
Ces associations attaquent aussi les permis de construire. Je tiens à votre disposition, monsieur le ministre, la liste des communes victimes - c'est bien le terme qui convient - de ces associations.
M. Jean Chérioux. Il faut y ajouter Paris !
M. Jean-Jacques Hyest. Oui, mais Paris peut se permettre d'entretenir d'importants services juridiques pour se défendre. Quand il s'agit d'une commune de 300 habitants, c'est un peu plus difficile !
M. Jacques Machet. Très bien !
M. Jean-Jacques Hyest. Monsieur le ministre, je crois qu'un problème se pose dans notre société, et qui ne touche d'ailleurs pas seulement les relations avec l'administration : à côté du contrôle de légalité ou du contrôle juridictionnel, qui doivent légitimement s'exercer, de plus en plus de particuliers s'érigent en censeurs de toute l'activité publique. Je crois qu'il s'agit là d'une dérive, et je ne parle même pas de celle qui consiste à porter plainte - c'est tellement facile ! - dès qu'on est mécontent. La procédure suit alors son cours mais, pendant ce temps, la nécessaire activité des services publics se trouve paralysée ! Je crois que l'examen de ce texte nous donne l'occasion d'attirer l'attention sur ce problème.
Développer les droits des citoyens, c'est très bien, mais je crois qu'il faut poser des limites afin d'éviter que ces pouvoirs donnés aux citoyens ne soient détournés et n'empêchent pas, en fin de compte, l'administration et les collectivités d'agir efficacement pour le bien des citoyens.
Je ne ferai que mentionner la mise en cohérence des dispositions relatives à l'informatique et aux libertés, à l'accès aux documents administratifs et aux archives. Je veux simplement souligner que la question des archives, qui n'est d'ailleurs pas de votre compétence directe, monsieur le ministre, pose un problème redoutable en raison du développement des supports informatiques. Il faut veiller, pour les générations futures, à ne pas perdre notre mémoire.
Un sénateur de l'Union centriste. Tout à fait !
M. Jean-Jacques Hyest. C'est une préoccupation que nous devons avoir, mais je sais que Mme la ministre de la culture - les archives sont placées sous sa responsabilité - la partage.
Certains se félicitent de l'article 10. Moi, je ne suis pas si enthousiaste.
Nous avions effectivement demandé que les associations qui bénéficient de fonds publics fassent l'objet d'un contrôle. D'ailleurs, elles peuvent d'ores et déjà faire l'objet d'un contrôle des chambres régionales des comptes - comme les associations qui font appel à la générosité publique - quand les fonds en question dépassent un certain seuil ; c'est une bonne mesure, qui va dans le sens de la transparence. Mais, de là à mettre à la disposition du public les comptes des entreprises, publiques ou privées, qui bénéficient de fonds publics, notamment pour leurs investissements ou au titre du développement économique, comme le souhaitent certains, c'est, à mon sens, un véritable détournement, qui pourrait susciter des difficultés, notamment s'il s'agit d'une société cotée en bourse.
Ou bien alors, disons carrément que l'on soumet à la Cour des comptes tous les marchés publics ainsi que tous les comptes des entreprises publiques ou des entreprises qui soumissionnent à des appels d'offre pour des marchés publics ! Mais ce serait aller vers une police financière, ce qui me paraît d'autant moins indispensable que tous les moyens existent d'ores et déjà pour vérifier que les fonds sont employés conformément à l'objet des subventions.
Sur les maisons des services publics, je constate que, décidément, on aime bien les maisons : il y avait déjà les maisons de justice, il y aura maintenant les maisons des services publics. Soit.
Cela étant, monsieur le ministre, au moins dans le secteur rural, nos concitoyens savent très bien où est la maison des services publics : pour eux, c'est la mairie. Ils savent que, à la mairie, on leur donnera certains renseignements ou qu'on les orientera vers le service public compétent, à condition qu'il ne soit pas trop éloigné, bien sûr.
Lorsque votre prédécesseur avait déjà fait cette proposition, je n'y avais guère été favorable. Certes, vous l'assortissez de quelques utiles précisions juridiques. Il reste que, selon moi, s'il faut des services publics de proximité, il serait surtout souhaitable de faire évoluer les administrations de façon que les citoyens puissent y avoir accès aux heures où ils sont disponibles.
Est-il bien normal qu'une sous-préfecture soit fermée à seize heures ? Est-il bien normal que, le samedi matin, on ne puisse pas faire appel aux services publics ? Je sais que remédier à ce problème figure au nombre de vos préoccupations, mais cela fait des années qu'on déplore cette situation sans jamais rien faire pour y changer quoi que ce soit !
Je n'ignore pas que les expériences de maisons des services publics ont donné de bons résultats, mais il faudrait surtout que les administrations s'adaptent aux besoins du public : pour moi, le service public, c'est d'abord le service du public !
C'est certainement un élément qui pourrait être intégré dans les négociations au sein de la fonction publique, car il existe une marge appréciable pour réaliser des avancées à cet égard.
Nos concitoyens se plaignent, et ils ont raison, car, lorsqu'ils ont besoin d'obtenir un passeport ou une carte grise, il n'est pas admissible que la sous-préfecture ferme avant même qu'ils quittent leur travail. Et ils peuvent s'estimer heureux quand elle n'est pas fermée entre midi et deux heures, en raison de cette tradition qui perdure chez nous et qui veut que l'on prenne deux heures pour déjeuner !
S'agissant du médiateur, j'approuve tout à fait les propositions qui nous sont faites.
Je dirai à M. Jacques Pelletier que nous avions déjà réfléchi à la possibilité de saisine par les présidents de conseils généraux et de conseils régionaux. Certains avaient même proposé que les maires des grandes villes puissent saisir le médiateur. A mes yeux, la dignité d'un élu ne se mesure pas à l'importance de la population qu'il représente. Si l'on devait s'engager dans la voie d'un tel élargissement de la saisine, il faudrait l'étendre à tout exécutif local. Cela ne nous a pas paru possible, même si les délégués sont des gens remarquables, qui valorisent beaucoup le travail du médiateur.
Nous nous sommes posé une question simple : est-ce qu'un citoyen n'a pas pu avoir accès au médiateur du fait du nombre limité de ceux qui peuvent le saisir ? Non ! Hier encore, j'ai entendu raconter une anecdote à la radio : une personne qui avait besoin du médiateur et à qui l'on avait dit qu'il fallait passer par un parlementaire a appelé le standard du Sénat ; un sénateur a accepté de faire jouer pour cette personne son pouvoir de saisine et elle a finalement obtenu satisfaction auprès des services fiscaux. Cela démontre à la fois l'efficacité du médiateur et l'ouverture d'une administration, celle des impôts, qui est souvent plus ouverte que d'autres, contrairement à ce que l'on dit.
Monsieur le ministre, ne voulant pas être méchant, je n'insisterai pas sur la question de la codification. Mais je ne comprends pas qu'on légifère sur des sujets qui donneraient une obligation au Gouvernement. Déposez donc des projets de loi de codification : la commission des lois du Sénat en est très friande ! Nous souhaitons, en effet, que, le plus tôt possible, un certain nombre de grands textes soient codifiés, mais ne vous rendez pas vous-même prisonnier d'une obligation, qui n'est pas assortie, au demeurant, de la moindre sanction. Ou bien alors, disons carrément que, dans dix ans, toutes les lois non codifiées seront caduques !
Votre intention est louable, monsieur le ministre, mais elle n'a aucune efficacité législative. On fait trop de lois qui ne sont pas de vraies lois. N'en rajoutons pas ! (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Les questions qui ont été soulevées, aussi bien par M. le rapporteur que les quatre autres intervenants, sont indiscutablement les plus importantes parmi celles qui vont être abordées au cours du débat.
Le texte que je vous présente est un texte de réforme de l'Etat. Comme les autres chantiers de cette réforme, il vise à améliorer le lien qui unit nos concitoyens avec leurs administrations. Pour cela, le citoyen a besoin de plus de simplicité des procédures, d'une meilleure compréhension du fonctionnement des services publics, d'une meilleure connaissance des règles qu'on lui applique, d'un accès plus commode aux services et aux procédures. Il y va de l'égalité entre les citoyens de ce pays.
Les objectifs que je viens d'énumérer ne relèvent pas tous de la loi.
Certains nécessitent des réorganisations, et les services centraux des ministères comme les services déconcentrés les ont entreprises.
Certains seront atteints grâce aux nouvelles technologies de l'information et de la communication, qui, il ne faut pas se le dissimuler, sont évidemment à l'arrière-plan de toutes nos réflexions présentes.
Ainsi, sur les sites internet des ministères, les principaux formulaires sont déjà accessibles et accompagnés d'explications sur les procédures.
D'autres objectifs, en revanche, justifient les mesures que je vous propose d'adopter.
Vous avez compris mon message et j'ai bien perçu le lien que vous avez établi entre mon souci d'un service public amélioré et la création des maisons des services publics. Celles-ci doivent contribuer, notamment en zone urbaine, à faciliter le contact avec les administrations. il est vrai que cette formule est d'abord adaptée aux banlieues, aux quartiers en difficulté, aux zones de fort peuplement, même si, dans des zones plus rurales, elles peuvent venir compléter harmonieusement le mouvement vers des structures intercommunales puissantes et structurées.
Je tiens à répondre aux inquiétudes qui ont été formulées à cette occasion par M. Bret, notamment à propos du coût, et par M. Mahéas : ces créations vont-elles reporter sur les collectivités les charges qui incombent à l'Etat ? Non, tel ne sera pas le cas, et je m'en expliquerai lors du débat sur les articles concernés, mais je veux d'ores et déjà souligner trois points.
Tout d'abord, les maisons des services publics sont des services publics à part entière, plus proches et plus polyvalents, répondant à des besoins ressentis par les acteurs locaux, et non l'amorce d'un service public à deux vitesses ou d'une version dégradée du service public.
Ensuite, elles sont créées sur l'initiative des acteurs locaux et l'Etat n'imposera rien à personne en la matière ; il encouragera les initiatives puisque, lors de l'installation d'un tel service, les fonds nationaux - le fonds pour la réforme de l'Etat, le FRE, et le fonds national d'aménagement et de développement du territoire, le FNADT - peuvent être sollicités pour financer, notamment, le matériel nécessaire et l'aménagement de locaux.
Enfin, les maisons des services publics n'engendreront pas de dépenses supplémentaires pour les acteurs du service public, y compris les collectivités qui seront libres d'adhérer à la convention fondatrice.
Pour leur fonctionnement, ces structures utiliseront des personnels mis à leur disposition par les signataires, qui rempliront des fonctions similaires à celles qu'ils occupent déjà, et leur installation, outre qu'elle pourra bénéficier d'aides de l'Etat, profitera des économies générées par la mise en commun de moyens.
Dans la mesure où plusieurs prestataires de services publics, notamment l'Etat, contribueront à la construction de ces structures d'accueil, chacun supportera un investissement moins lourd, ce qui permettra peut-être de consacrer davantage de ressources à l'équipement interne. On revient sur ces moyens de communication et de traitement de l'information, que nous évoquions déjà.
Au-delà des craintes exprimées ici et là, je vois dans les maisons des services publics une chance pour le service public d'aller vers des usagers qui en ont besoin. J'ajoute que les nouvelles technologies qui permettent la mise en commun de données leur permettront de rester reliées aux services « classiques ».
Je souhaite répondre maintenant à quelques remarques qui ont été formulées, car nous n'aurons pas forcément l'occasion d'y revenir au cours du débat.
Je répondrai tout d'abord à M. Pelletier, qui nous a parlé de façon tout à fait documentée...
M. Jean-Jacques Hyest. Et expérimentée !
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. ... et expérimentée du médiateur. Certes, tout n'a pas été fait, mais tout le monde est convaincu que cette institution continuera à s'ancrer plus encore à l'avenir dans notre paysage.
Toutes les réformes qu'il avait suggérées en son temps n'ont pas été retenues, mais certaines ont été prises en compte et cela va dans le bon sens.
Monsieur le sénateur, vous avez regretté que la formulation que vous proposiez initialement s'agissant du pouvoir du médiateur de provoquer l'inspection ou le contrôle d'un service public n'ait pas été retenue.
Je vous signale cependant que l'article 12 de la loi de 1973 modifié par la loi du 24 décembre 1976 prévoit déjà que les ministres et les corps de contrôle sont tenus de déférer à de telles demandes émanant du médiateur. Celui-ci dispose des instruments nécessaires pour agir dans le sens qui peut lui paraître utile dans ce domaine.
Vous avez évoqué la nécessité de pouvoir régler les problèmes d'information à toutes les administrations d'un changement d'adresse de l'usager. La question, il est vrai, n'est pas simple. Je la connais bien. Elle a fait l'objet d'une expérience par La Poste. Au départ, cette expérience a eu lieu sur un terrain facile, puisqu'elle concernait le seul département du Nord, de dimensions restreintes et à grande densité de population ; l'ambition n'était pas démesurée. Cependant, malgré cette limitation, l'expérience n'a pas encore pu aboutir. Mais, là encore, je crois que les progrès de la technologie, de l'information et des communications nous permettront d'aller plus loin dans l'avenir.
Je remercie M. Bret pour l'appréciation positive qu'il a portée sur certains propos que j'ai tenus dans un grand quotidien du soir. Il est clair qu'il est insupportable de voir les fonctionnaires faire l'objet de procès collectifs. J'ai cru bon de rappeler - vous y avez également fait allusion, monsieur le sénateur, - que les fonctionnaires sont en première ligne pour « encaisser », si vous me permettez l'expression, les dysfonctionnements de notre société.
La volonté dont l'Etat est porteur, accompagné en cela par l'ensemble des collectivités, est que les fonctionnaires améliorent sans cesse, parce que c'est naturel, leur efficacité au service des citoyens.
M. Hyest a abordé, peut-être de manière anticipée, le problème de la codification ; j'y reviendrai tout à l'heure.
M. Jean-Jacques Hyest. Je n'interviendrai pas à nouveau !
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Monsieur Hyest, vous avez fait une proposition qui m'a un peu amusé. Vous avez dit que, si l'on voulait forcer les choses, il n'y aurait qu'à décréter que toute loi non codifiée est caduque.
M. Jean-Jacques Hyest. Dans un délai donné !
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Le problème est qu'il y a des lois qui n'ont pas vocation à être intégrées dans l'un des codes actuellement programmés et elles disparaîtraient.
M. Jean-Jacques Hyest. Le code général des impôts n'est pas caduc ! (Sourires.)
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. S'agissant des autres points qui ont été abordés, nous y reviendrons lors de la discussion des articles. Je ne doute pas que nous partagions en la matière une même ambition d'ensemble et que nos débats seront fructueux.
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.

Article 1er (réservé)



M. le président.
« Art. 1er. - Sont considérés comme autorités administratives au sens de la présente loi les administrations de l'Etat, les collectivités territoriales, les établissements publics à caractère administratif, les organismes de sécurité sociale et les autres organismes chargés de la gestion d'un service public administratif. »
Par amendement n° 1, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Monsieur le président, la commission demande la réserve de cet amendement jusqu'après l'examen de l'article 13.
En effet, le choix de faire figurer la définition des autorités administratives en tête du projet de loi n'apparaît pas pertinent : cet emplacement suggère que l'ensemble des dispositions du projet de loi sont relatives à ces autorités, ce qui est loin d'être le cas, puisque seuls onze articles sur vingt-huit y font référence, huit d'entre eux figurant au titre II.
En outre, les trois autres articles visant ces autorités semblent devoir être soit supprimés, soit modifiés en faisant disparaître la référence à ces autorités administratives.
Aussi la commission vous propose-t-elle, par cet amendement, de supprimer l'article 1er, afin d'en transférer le contenu sous un article additionnel placé en tête du titre II.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur cette demande de réserve ?
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Il est certain que la réserve demandée par M. le rapporteur est le prélude d'autres amendements qui ont été déposés sur les articles 2 et 3. Dans un souci de cohérence de la discussion, cette demande de réserve me paraît regrettable. Je m'en remets donc à la sagesse de la Haute Assemblée.
Par ailleurs, j'indique d'ores et déjà que je suis défavorable à cet amendement.
M. le président. La réserve est ordonnée.

TITRE Ier

DISPOSITIONS RELATIVES À L'ACCÈS
AUX RÈGLES DE DROIT ET À LA TRANSPARENCE

M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le titre Ier.

(Le titre Ier est adopté.)

Chapitre Ier

Dispositions relatives à l'accès aux règles de droit

M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Monsieur le président, je demande également la réserve de l'amendement n° 4 tendant à supprimer la division « chapitre Ier » et son intitulé, jusqu'après l'examen de l'article 13.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement, sur cette demande de réserve ?
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Le Gouvernement s'en remet également à la sagesse du Sénat.
M. le président. La réserve est ordonnée.

Article 2



M. le président.
« Art. 2. - Les autorités administratives sont tenues d'organiser un accès simple aux règles de droit qu'elles édictent. Les modalités d'application du présent article sont déterminées, en tant que de besoin, par décret en Conseil d'Etat. »
Par amendement n° 2, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. L'article 2 tend à confier aux autorités administratives le soin d'organiser un accès simple aux règles de droit qu'elles édictent. Cet article n'est pas normatif ; il s'agit simplement de la déclaration d'un objectif qui ne peut qu'être approuvé.
Toutefois, il est regrettable que la loi doive rappeler l'un des devoirs essentiels de l'administration. Cette disposition d'affichage va à l'encontre de l'objet même du projet de loi, qui tend à améliorer la qualité et l'accessibilité du droit en vigueur.
En outre, et surtout, la notion d'« accès simple » n'est définie ni dans le dispositif du projet de loi ni dans l'étude d'impact. Or, quand la loi énonce un principe, elle doit en définir le contenu.
Maintenir une telle disposition serait de nature à tromper les administrés en leur laissant croire qu'elle détermine en leur faveur une sorte de droit de créance sur l'administration, droit à géométrie variable puisque son contenu n'est pas défini. De plus, il serait dépourvu de sanction.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Le Gouvernement partage l'avis de la commission sur un point : l'activité administrative ne se justifie que par le service rendu au citoyen. C'est d'ailleurs ce principe qui sous-tend l'ensemble du projet de loi.
La prolifération et la superposition de textes souvent techniques et difficilement lisibles rendent, en pratique, très difficile leur compréhension par les citoyens.
Pour répondre à M. le rapporteur, je dirai qu'assurer un accès simple au droit c'est faire en sorte que la technicité des textes juridiques ne constitue pas un obstacle à leur accès pour le citoyen. C'est non pas le contenu de la règle qui est ici en cause, mais plutôt l'architecture des textes qui, procédant par substitution ou référence, est peu lisible pour le non-initié.
Pourquoi recourir à la loi ? Tout simplement parce que, je le rappelle, aux termes de l'article 1er, toutes les autorités publiques seront tenues de souscrire à ces principes, y compris les collectivités locales.
De ce principe, le Gouvernement envisage des applications très concrètes : l'accès simple au droit, dont les autorités publiques auront la charge, pourra se traduire par des modalités de publication ou de libre consultation. Il pourra prendre d'autres formes : mise à disposition des codes et des principaux textes dans des bases de données accessibles au public, par Internet, par exemple ; rédaction plus lisible des modifications apportées aux textes en vigueur ; mise à disposition du public des études d'impact préparées en même temps que les nouveaux textes, etc.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est attaché au maintien de ce principe législatif.
Tout à l'heure, nous allons évoquer la codification. Il ne me paraîtrait pas incongru que cet article 2 figure tout à fait au début d'un code de l'administration.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 2.
M. Jacques Mahéas. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Bien évidemment, nous sommes contre la suppression de cet article 2. Il nous paraît important d'obliger ou, tout au moins, d'inciter les administrations à organiser un accès simple aux règles de droit. Un décret précisera les conditions d'application de cette disposition.
Contrairement aux affirmations de M. le rapporteur, cet article a un contenu : il s'agit du programme de codification des textes législatifs prévu à l'article 3. L'accès aux formulaires administratifs sur Internet, par exemple, se développe de plus en plus. Il est donc important de donner des signes, tant à l'administration qu'aux usagers.
M. Robert Bret. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret. Nous voterons contre la suppression de cet article 2. En effet, supprimer le principe général d'accès aux règles de droit ne permet pas d'améliorer la connaissance du droit par nos citoyens : celle-ci ne peut être effective si l'administration ne divulgue pas l'information. C'est un principe essentiel.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 2 est supprimé.

Article 3 et annexe



M. le président.
« Art. 3. - Les textes législatifs sont regroupés dans des codes thématiques. Cette codification se fait, en principe, à droit constant.
« Avant la fin de la présente législature, les textes législatifs relatifs aux domaines énumérés en annexe à la présente loi feront l'objet d'une codification. Dans le même délai, il sera procédé à la refonte des codes dont la liste figure en annexe à la présente loi.
« Le Gouvernement déposera chaque année sur le bureau de chaque Assemblée un rapport sur l'état d'avancement de la codification. »
Je donne lecture de l'annexe :

I. - Codes nouveaux


Code de l'administration ;
Code de la communication et du cinéma ;
Code de la défense ;
Code de l'éducation ;
Code de l'énergie ;
Code de l'entrée et du séjour des étrangers ;
Code de l'environnement ;
Code de la fonction publique ;
Code de justice administrative ;
Code de la magistrature ;
Code monétaire et financier ;
Code du patrimoine ;
Code de la recherche.


II. - Codes à refondre


Code de l'artisanat ;
Code de l'action sociale ;
Code de commerce ;
Code des marchés publics et autres contrats d'intérêt général ;
Code de l'organisation judiciaire ;
Code de la route ;
Code rural (achèvement des livres VI, VII et IX) ;
Code de la santé publique.



Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 3 rectifié, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de supprimer cet article et l'annexe.
Par amendement n° 42, M. Bret et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, au début du deuxième alinéa de l'article 3, de remplacer les mots : « Avant la fin de la présente législature, » par les mots : « Dans les 10 ans à compter de la promulgation de la loi n° relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration, ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 3 rectifié.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Il s'agit de supprimer l'article 3.
Cet article définit un programme de codification des textes législatifs devant être adoptés avant la fin de la présente législature. Comme je l'ai dit tout à l'heure, cet article a le mérite de souligner l'importance de la codification, élément essentiel d'un Etat de droit dans la mesure où la codification facilite l'accès des citoyens à l'ordonnancement juridique en vigueur.
Le Sénat, et en particulier sa commission des lois, attache une très grande importance à la codification, comme en témoignent les travaux qu'il a menés lors du débat sur le code général des collectivités territoriales ou sur le code de commerce. Il regrette vivement que ce processus soit interrompu depuis deux ans. Or l'article 3, force est de le constater, n'apporte aucune solution. En effet, seule la volonté politique du Gouvernement d'inscrire des projets de loi de codification à l'ordre du jour des assemblées est susceptible de remédier à ce blocage. L'affichage d'un objectif n'est pas du ressort de la loi.
Au surplus, cet article est inconstitutionnel car il est contraire au principe selon lequel le Parlement ne peut se lier lui-même par une injonction à légiférer, puisqu'il n'est pas maître de l'ordre du jour prioritaire.
J'ajouterai que, dans son premier rapport public 1989-1990, la commission supérieure de codification écrivait elle-même : « Point n'est besoin, pour entreprendre un travail de codification, d'une habilitation du Parlement au Gouvernement, qui n'a pas de portée juridique et s'insère mal dans le cadre constitutionnel issu de la Constitution du 4 octobre 1958. »
C'est la raison pour laquelle, comme je l'ai dit tout à l'heure, je demande, au nom de la commission des lois, un engagement solennel du Gouvernement en faveur de l'inscription à l'ordre du jour des assemblées des projets de loi de codification.
M. le président. La parole est à M. Bret pour présenter l'amendement n° 42.
M. Robert Bret. Il s'agit d'un compromis entre la rédaction initiale et l'amendement de suppression présenté par la commission.
Certes, monsieur le rapporteur, il est techniquement impossible d'atteindre l'objectif de cet article. Vous soulignez d'ailleurs dans le rapport écrit qu'il ne peut y avoir plus de quatre codifications par an. C'est également l'avis de M. Fabius, président de l'Assemblée nationale.
L'annexe de l'article 3 dresse la liste des textes qui devront faire l'objet d'une codification. Quelque vingt et un codes sont concernés. Il ne nous semble pas opportun de supprimer cet article. Il y va de la transparence et du développement de l'accès au droit.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous proposons que les codes cités en annexe soient adoptés par le Parlement dans les dix ans à compter de la date de promulgation de la présente loi.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 42 ?
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. La commission émet un avis défavorable, car cet amendement est contraire à celui qu'elle a présenté.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 3 rectifié et 42 ?
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Le programme de codification a connu des retards, c'est indéniable. Toutefois, cela ne signifie en rien que le Gouvernement se désengage de cette politique. Il attache une grande importance à la codification, qui constitue à ses yeux un instrument essentiel de transparence et de clarification du droit. M. le Premier ministre a déjà eu l'occasion de le souligner.
Plusieurs reproches sont faits à cet article.
Le premier, c'est d'être un article purement déclaratif. Je ne suis pas certain qu'il n'ait qu'un caractère déclaratif. Cette volonté de mettre en code de manière systématique l'ensemble des textes législatifs et réglementaires n'est pas, me semble-t-il, une simple pétition de principe, benoîte et sans conséquence particulière.
On lui reproche également de constituer une injonction à légiférer. Cette critique ne me paraît pas fondée. Le Parlement peut légitimement se fixer un programme pour légiférer sans que cela s'interprète comme une atteinte à la séparation des pouvoirs.
Je comprends parfaitement les critiques portant sur le calendrier ; l'article peut sans doute être amélioré à cet égard. Il est exact, en effet, qu'il faut forcer la cadence parce qu'un travail considérable a été ou est effectué. Des dizaines de codes sont quasiment prêts â être soumis à l'approbation du Parlement. Or on sait très bien que, lorsque les délais d'attente sont trop importants, le travail fait se périme. Il est facile de dire : le Gouvernement n'a qu'à amputer le reste de son programme législatif pour faire examiner les projets de loi de codification. Ce serait acculer le Gouvernement à des choix, en l'occurrence déchirants, dans lesquels l'intérêt national ne trouverait pas nécessairement son compte. Il est préférable de s'interroger sur la manière d'être plus efficace dans la validation des codes. Pour ma part, j'ai demandé à M. le Premier ministre d'envisager la possibilité d'adopter certains codes par ordonnance, si le Parlement l'y autorise. M. le Premier ministre a consulté sur ce point M. le Président de la République, et je crois pouvoir dire que ce dernier ne s'opposera pas à cette procédure, à savoir le recours à l'article 38 de la Constitution.
En ce qui concerne la codification à droit constant, le projet de loi se borne à rappeler que, par définition, la codification concerne le droit existant. La mention « en principe » montre bien que des exceptions sont possibles et que, de ce fait, le Parlement ne se lie pas lui-même.
Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 3 rectifié.
S'agissant de l'amendement n° 42, dont le sort est étroitement lié au vote qui interviendra sur l'amendement de la commission, nous ne sommes pas opposés à l'examen éventuel de la réalité de tel ou tel délai ou programme, mais je crois qu'il faudra que nous connaissions auparavant la position de la Haute Assemblée sur l'amendement n° 3 rectifié.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Je voudrais apporter deux précisions à la suite des propos qu'a tenus à l'instant M. le ministre.
Tout d'abord, si nous sommes tous d'accord sur la nécessité de sortir de la situation actuelle, nous pensons, pour notre part, que ce n'est pas ce texte qui permettra de trouver la porte de sortie, et c'est la raison pour laquelle nous demandons instamment au Gouvernement de nous annoncer un calendrier précis et des mesures fortes.
Vous nous avez fait part, monsieur le ministre, de l'initiative tendant à essayer de trouver une solution par le biais de l'article 38 de la Constitution et au moyen d'ordonnances. A titre personnel, je ne suis pas opposé à cette démarche.
Toutefois, il ne faut pas mésestimer la difficulté juridique de l'exercice. Conformément à la loi d'habilitation adoptée par le Parlement, le Gouvernement légifère par voie d'ordonnance. Mais entre la date de la publication au Journal officiel de l'ordonnance et l'adoption du projet de loi de ratification, l'ordonnance a simple valeur d'acte réglementaire. Portant sur des lois qui préexistent, ce n'est peut-être pas aussi évident qu'il y paraît.
En tout cas, monsieur le ministre, je vous remercie des précisions que vous nous avez apportées.
Par ailleurs, pour étayer les éléments juridiques qui ont été pris en compte par la commission, je rappellerai à la Haute Assemblée, en contrepoint à l'analyse juridique faite par M. le ministre voilà quelques instants, que nous nous appuyons sur une réponse faite à notre collègue M. Georges Gruillot par M. le Premier ministre, le 5 octobre 1995 : « Le recours à une loi de programme - de codification - aurait l'intérêt de soumettre ce programme de travail à l'approbation solennelle de la représentation nationale. Cependant, ce procédé pourrait être regardé comme une injonction à légiférer contraire au principe de séparation des pouvoirs tel que l'entend le Conseil constitutionnel. »
Cette décision du Conseil constitutionnel soulignait que « la référence faite à une réforme législative dont le Parlement sera saisi avant le 31 décembre 1990 a le caractère d'une injonction adressée au Gouvernement de déposer un projet de loi ; une telle disposition ne trouve de base juridique ni dans l'article 34, ni dans aucune des autres dispositions de la Constitution ».
Voilà donc la base du raisonnement juridique de la commission.
J'ajoute que, s'agissant de la fixation de la méthode de travail et de la codification à droit constant, cela reviendrait pour le Parlement à se lier lui-même et à restreindre juridiquement sa marge de manoeuvre, ce qui paraît, là aussi, contraire à la Constitution, laquelle lui confère le droit d'amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 3 rectifié.
M. Jacques Mahéas. Je demande la parole contre cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Nous sommes opposés à la suppression de l'article 3. Puisque nous sommes le législateur et puisque nous voulons donner à nos concitoyens la possibilité de consulter des codes qui soient à jour, je ne comprends pas que nous n'incitions pas nous-mêmes et le Gouvernement à agir sinon au plus vite, du moins dans un délai raisonnable.
Certes, nous avons pris du retard en ce qui concerne le chantier de la codification. Les délais devront certainement être prolongés. D'ailleurs, nous ne sommes pas opposés à étudier favorablement le délai proposé par les membres du groupe communiste républicain et citoyen. Néanmoins, ce n'est pas une raison pour supprimer purement et simplement cette disposition qui est un élément majeur et fondamental pour que nos concitoyens puissent accéder au droit.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?
Je mets aux voix l'amendement n° 3 rectifié, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 3 et son annexe sont supprimés et l'amendement n° 42 n'a plus d'objet.

Intitulé du chapitre Ier (suite)



M. le président.
Nous en revenons à l'amendement n° 4, qui a été précédemment réservé.
Par amendement n° 4, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de supprimer la division et l'intitulé du chapitre Ier.
Il s'agit d'un amendement de conséquence.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux vois l'amendement n° 4.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, la division et l'intitulé du chapitre Ier sont supprimés.

Chapitre II

Dispositions relatives
à la transparence administrative

Article 4



M. le président.
« Art. 4. - Toute personne a le droit de connaître, dans ses relations avec l'une des autorités administratives mentionnées à l'article 1er, le prénom, le nom, la qualité et l'adresse administratives de l'agent chargé d'instruire sa demande ou de traiter l'affaire qui la concerne ; ces éléments figurent sur les correspondances qui lui sont adressées.
« Les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables dans les cas où des motifs intéressant la sécurité publique ou la sécurité des personnes rendent nécessaire le respect de l'anonymat.
« Toute décision prise par l'une des autorités administratives mentionnées à l'article 1er comporte, outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci. »
Par amendement n° 5, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit cet article :
« Dans ses relations avec une personne morale chargée d'une mission de service public, toute personne a le droit de connaître l'identité, la qualité et l'adresse administratives de l'agent chargé d'instruire sa demande ou de traiter l'affaire qui la concerne. Si des motifs intéressant la sécurité publique ou la sécurité des personnes le justifient, l'anonymat de l'agent est respecté. Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du présent article. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. L'article 4 énonce le principe de la levée de l'anonymat des agents des autorités administratives dans leurs relations avec les administrés. La commission propose d'étendre l'application de ce principe à tout organisme chargé d'une mission de service public, au lieu d'en réserver l'application aux seuls organismes chargés d'un service public à caractère administratif, en renvoyant ses modalités de mise en oeuvre à un décret en Conseil d'Etat.
Cet amendement prévoit, en outre, de transférer les dispositions figurant au troisième alinéa de cet article, qui concernent les décisions des autorités administratives, en tête du chapitre II du titre II du projet de loi, relatif au régime de ces décisions.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Le Gouvernement émet un avis défavorable. En effet, cet amendement crée un champ d'application spécifique à l'article 4, ce qui nuit à la cohérence d'ensemble du projet de loi en ce qui concerne les obligations imparties à l'administration.
Les services publics industriels et commerciaux fonctionnent dans des conditions très proches des relations commerciales, ce qui donne à leurs échanges avec les citoyens concernés un tout autre caractère que celui qui existe lorsqu'il s'agit de services publics administratifs.
Cet article traite globalement de la levée de l'anonymat dans l'administration. Il n'est donc pas opportun de renvoyer à un autre article du projet de loi les dispositions relatives à la levée de cet anonymat en ce qui concerne les signataires des décisions.
Enfin, le renvoi à un décret d'application ne présente pas d'utilité, car l'essentiel figure dans la version proposée par le Gouvernement.
Dès lors que le principe de la levée de l'anonymat est posé, il n'est pas souhaitable d'encadrer trop étroitement les modalités concrètes de sa mise en oeuvre, compte tenu de la grande diversité - évidente - des situations envisageables. Il appartient à chaque autorité administrative de prendre les mesures adéquates pour assurer, en fonction des caractéristiques du service qu'elle rend, la transparence recherchée.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 5.
M. Robert Bret. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret. La rédaction qui est proposée par M. le rapporteur reprend l'esprit des deux premiers alinéas de l'article 4, sauf qu'il n'est plus expressément indiqué que ces éléments figurent sur les correspondances adressées aux usagers. Cela sous-entend que les administrés devront effectuer une demande pour connaître l'agent chargé d'instruire leur dossier, au lieu d'en être informés systématiquement.
Par ailleurs, la notion de personne morale chargée d'une mission de service public est plus large que la notion d'autorités administratives telles qu'elles sont définies dans l'article 1er du projet de loi.
Nous sommes donc contre cet amendement.
M. Jacques Mahéas. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Le groupe socialiste se prononcera contre cet amendement, ne serait-ce que par cohérence, puisque l'amendement n° 5 vise à tirer les conséquences de la nouvelle architecture voulue par la commission des lois.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Je tiens à préciser que l'inscription sur les correspondances relève des modalités, et donc du domaine réglementaire. Voilà pourquoi l'amendement n° 5 fait référence à un décret en Conseil d'Etat.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 4 est ainsi rédigé.

Article 5



M. le président.
« Art. 5. - Le maître de l'ouvrage au sens de la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre privée procède à une consultation du public sur l'opération envisagée. Un décret en Conseil d'Etat fixe les règles applicables à la procédure de consultation, en fonction de la nature de l'ouvrage et des personnes concernées, et les catégories d'ouvrages qui, en raison de leur nature ou de leur faible importance, ne donnent pas lieu à consultation. »
Par amendement n° 6, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Nous revenons, avec cet amendement, sur un sujet qui a déjà été longuement explicité : je veux parler de l'obligation créée par le projet de loi de consulter le public sur quasiment toutes les opérations d'aménagement ou d'infrastructure, au sens de la loi du 12 juillet 1985.
L'article 5 pose une obligation générale alors même que l'étude d'impact annexée au projet de loi n'en définit pas la portée exacte.
De plus, les conséquences concrètes d'une telle obligation pour l'administration ne sont pas évaluées, d'où le risque de paralyser l'activité de cette dernière et des collectivités.
Enfin, l'obligation se superpose au droit actuellement en vigueur, en matière d'enquête publique ou de consultation du public, qui assure la protection de l'environnement, de la propriété privée et des intérêts des habitants des communes, etc.
Il paraît donc hasardeux et pour le moins prématuré de créer une obligation légale supplémentaire sans en avoir apprécié toutes les conséquences. Je rappelle qu'une expertise technique est actuellement en cours sur l'ensemble des procédures spéciales existantes.
Pour toutes ces raisons, et considérant comme prématurée l'institution d'une obligation générale de consultation, la commission des lois vous propose de supprimer l'article 5, mes chers collègues.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Le Gouvernement souhaitait, en déposant ce projet de loi, améliorer la transparence de la maîtrise de l'ouvrage public en instituant une consultation obligatoire des personnes concernées lorsqu'une telle consultation n'était pas déjà prévue par ailleurs. Il est vrai que cette préoccupation pourrait justifier un réexamen de la totalité des règles en vigueur en matière de consultation du public. C'est d'ailleurs à cette fin qu'une étude sur les enquêtes publiques et les modalités des débats publics a été récemment confiée au Conseil d'Etat par le Premier ministre.
Dans ces conditions, le Gouvernement, rejoignant la commission, considère qu'il est préférable, à ce stade, de surseoir à légiférer en la matière. Les modalités de refonte de la législation pourront être utilement examinées à la lumière des propositions du Conseil d'Etat. Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur l'amendement n° 6.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 6.
M. Robert Bret. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret. La consultation du public avant la réalisation d'un ouvrage public est gage, à mon avis, non seulement de démocratie mais aussi d'efficacité pour parvenir au meilleur choix.
Dans le département des Bouches-du-Rhône, que je représente, et notamment à Marseille, nombre d'erreurs en termes d'équipements et de réalisations - je pense notamment aux rocades, aux pénétrantes autoroutières, qui ont massacré l'environnement et le cadre de vie - auraient pu être évitées si la population avait été consultée.
La suppression de l'article 5 ne peut donc nous satisfaire.
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Monsieur Bret, le Gouvernement, en acceptant la suppression de cet article, ne renonce pas à l'objectif qu'il s'était fixé. Il s'agit simplement d'attendre que le Conseil d'Etat ait effectué l'état des lieux, si je peux m'exprimer ainsi ; si l'amendement n° 6 est adopté, cette préoccupation sera donc non pas abandonnée, mais mise en réserve.
M. Jacques Mahéas. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Les explications fournies par M. le ministre nous donnent satisfaction. En fait, une étude plus large va être effectuée, avec le Conseil d'Etat comme maître d'ouvrage, si je peux dire. (Sourires.) Il nous paraît donc nécessaire de surseoir pour l'instant à cette consultation, même si j'ai bien compris que notre collègue M. Bret souhaitait que, dans certains cas de gros aménagements urbains, le public soit consulté.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 5 est supprimé.

Articles additionnels après l'article 5



M. le président.
Par amendement n° 39, M. Hérisson propose d'insérer, après l'article 5, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article L. 421-9, il est inséré dans le code de l'urbanisme un article L. ... ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Les associations de défense de l'environnement qui forment un recours contre un permis de construire doivent justifier, à peine d'irrecevabilité du recours, qu'elles remplissent les conditions posées par l'article L. 252-1 du code rural, sauf lorsqu'elles agissent pour la protection de leurs propres intérêts patrimoniaux. »
La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson. L'amélioration des droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations devrait se traduire par une plus grande sécurité des décisions prises par l'administration - notamment, les collectivités territoriales - en particulier celles qui touchent à l'utilisation et à l'occupation des sols.
Or, dans de nombreuses régions et villes françaises, les maîtres d'ouvrage publics ou privés ne peuvent plus désormais engager de projets, répondant pourtant aux besoins de l'ensemble des citoyens, sans que des riverains groupés en association cherchent par tous moyens à en obtenir l'annulation. Cette situation contraint de plus en plus de communes à se doter de conseils juridiques, dont les coûts sont supportés par l'ensemble des citoyens. Notre collègue M. Hyest a fait référence à cela tout à l'heure.
Parallèlement à cet état de fait, s'est fait jour une nouvelle pratique particulièrement condamnable, le chantage au désistement d'instance : certaines associations de protection de l'environnement intentent systématiquement des recours contre les permis de construire afin de monnayer ensuite auprès des maîtres de l'ouvrage le retrait de ces recours, démontrant ainsi leur motivation réelle, qui est la défense d'intérêts particuliers et non le souci collectif de protection de l'environnement.
Face à ce constat, l'amendement n° 39 vise à ce que seules les associations agréées de défense de l'environnement puissent ester en justice contre les permis de construire. Il leur faudrait justifier de trois ans d'existence et de l'exercice d'activités désintéressées pour la nature, l'environnement ou le cadre de vie, comme cela est exigé des associations se portant partie civile devant les juridictions répressives.
Cette mesure ne limiterait en aucune manière le droit pour une personne lésée d'agir en justice ni celui de constituer une association ; son but est d'éviter la confusion entre, d'une part, les associations réellement soucieuses sur le long terme de l'environnement et, d'autre part, celles qui sont constituées uniquement en vue de défendre des intérêts individuels face à un projet de construction.
L'obligation d'agrément serait bien entendu supprimée au cas où l'association exercerait une action en justice pour la protection de ses propres intérêts patrimoniaux.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. La commission voit dans cet amendement la création d'une inégalité de traitement entre associations au regard du droit à ester en justice.
Par ailleurs, l'amendement n° 39 est contraire au droit en vigueur tel qu'il résulte de l'article L. 252-4 du code rural, qui dispose que « toute association ayant pour objet la protection de la nature et de l'environnement peut engager des instances devant les juridictions administratives pour tout grief se rapportant à celle-ci. »
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Le Gouvernement partage l'avis défavorable de la commission.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 39, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 40, M. Hérisson propose d'insérer, après l'article 5, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article L. 25, il est inséré dans le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel un article L. ... ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Lors du dépôt d'un recours pour excès de pouvoir contre une autorisation d'urbanisme formé par une association de sauvegarde de l'environnement, celle-ci doit consigner, sous peine d'irrecevabilité du recours, auprès du greffe du tribunal administratif, une somme dont le montant est fixé par le juge. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 48 rectifié, présenté par M. Amoudry, au nom de la commission, et tendant, après les mots : « celle-ci », à rédiger comme suit la fin du texte proposé par l'amendement n° 40 pour l'article additionnel à insérer après l'article L. 25 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : « , sous peine d'irrecevabilité du recours, consigne auprès du greffe du tribunal administratif une somme dont le montant est fixé par le juge. La somme consignée est restituée lorsque le recours a abouti à une décision définitive constatant que la requête n'était pas abusive. »
La parole est à M. Hérisson, pour défendre l'amendement n° 40.
M. Pierre Hérisson. L'article 88 du code de procédure pénale impose aujourd'hui aux personnes qui déposent une plainte avec constitution de partie civile devant les juridictions répressives de consigner une somme d'argent dont le montant est fixé par le juge d'instruction. Cette obligation permet d'éviter les procédures à la légère ou celles qui visent simplement à gagner du temps.
La mesure proposée s'inspire de cette obligation pour imposer la consignation d'une somme d'argent aux associations de sauvegarde de l'environnement lors du dépôt d'un recours pour excès de pouvoir devant le juge administratif. Ce dernier fixerait le montant de cette somme.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter le sous-amendement n° 48 rectifié et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 40.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. La consignation d'une somme fixée par le juge a pour unique objet de limiter les recours abusifs. Ce sous-amendement vise à prévoir la restitution de la somme consignée si la décision définitive constate que la requête n'était pas abusive. Cette disposition reprend les termes de l'article 88-1 du code de procédure pénale.
Sous réserve de l'adoption de ce sous-amendement, la commission émet un avis favorable sur l'amendement n° 40.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 40 et sur le sous-amendement n° 48 rectifié ?
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Le Gouvernement est défavorable à ces deux textes.
Loin de contribuer à améliorer le droit des citoyens, l'amendement n° 40 porte atteinte aux principes d'égalité et de gratuité de la justice, auxquels le Gouvernement est attaché.
Pour mieux faire comprendre la position du Gouvernement, j'évoquerai également l'amendement n° 41, qui sera examiné dans quelques instants par la Haute Assemblée. Cet amendement, déposé par M. Hérisson, mentionne la disposition réglementaire applicable en matière d'amende pour recours abusif. Sachez que le Gouvernement n'est pas hostile au fait que le Sénat puisse débattre de l'abus de droit en matière contentieuse, que ce soit sous forme d'amende ou de cautionnement. Mais ce projet de loi ne porte pas sur la procédure contentieuse et ne se prête donc pas à une telle discussion. J'ajoute que ces amendements n'ont guère de lien avec l'amélioration des droits des citoyens.
M. le président. Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 48 rectifié.
M. Robert Bret. Je demande la parole contre le sous-amendement.
M. le président. La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret. De même que l'amendement n° 39 qui vient d'être adopté, les amendements n°s 40 et 41 ainsi que le sous-amendement n° 48 rectifié restreignent les possibilités données aux citoyens d'ester en justice et, donc, de se défendre.
Par conséquent, nous voterons contre tous ces amendements.
M. Jacques Mahéas. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Alors que nous voulons établir une relation de confiance entre l'administration et l'administré, l'amendement n° 40 et le sous-amendement n° 48 rectifié n'ont d'autre objet que d'empêcher l'administré de s'exprimer. Cela me semble pour le moins une anomalie !
De plus, M. Hérisson et M. le rapporteur voudraient que les tribunaux administratifs suivent les mêmes règles que les tribunaux correctionnels. Cela me paraît tout à fait surprenant, car un recours administratif est à l'évidence d'une tout autre nature qu'une procédure pénale !
Pour ces différentes raisons, nous ne sommes favorables ni à l'amendement n° 40 ni au sous-amendement n° 48 rectifié.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 48 rectifié, repoussé par le Gouvernement.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, l'amendement n° 40, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 5.
Par amendement n° 41, M. Hérisson propose d'insérer, après l'article 5, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'auteur d'une requête jugée abusive par la juridiction administrative encourt l'amende des articles R. 88 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et 57-2 du décret n° 63-766 portant règlement d'administration publique pour l'application de l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945 et relatif à l'organisation et au fonctionnement du Conseil d'Etat. »
La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson. Il est un principe selon lequel l'exercice d'un droit ne doit pas être abusif. Cette règle n'est affirmée par la loi qu'à titre exceptionnel, mais elle est constamment appliquée par les tribunaux.
En matière administrative, des textes de nature réglementaire prévoient le prononcé d'un amende en cas de requête abusive auprès des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Or les montants aujourd'hui prévus sont si dérisoires - le taux le plus élevé est de 20 000 francs - qu'ils ne peuvent compenser les conséquences souvent extrêmement lourdes d'un recours abusif pour l'ensemble de la collectivité et qu'ils ne présentent aucune proportionnalité entre le tort causé et sa sanction.
En outre, le coût de recouvrement de cette somme par la collectivité est supérieur au montant obtenu, dans la plupart des cas, ce qui retire toute efficacité à cette mesure.
Enfin, cette disposition ne remplit pas sa fonction dissuasive face aux requérants de mauvaise foi : ceux-ci disposent souvent de moyens importants et, en tout état de cause, les avocats négligent, du fait de son trop faible montant, à en demander l'application en justice.
Aussi, il est proposé que le législateur puisse débattre de cet élément afin qu'il soit procédé à une modification des décrets visés.
A cet effet, avec le présent amendement, nous rappelons l'existence d'une peine d'amende en cas de recours abusif devant les tribunaux administratifs, les cours administratives d'appel et le Conseil d'Etat.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable, en soulignant en particulier que, comme l'indique le dernier alinéa de son exposé des motifs, il n'est procédé dans cet amendement qu'à un simple rappel du droit existant pour ce qui est des amendes infligées pour recours abusif devant la juridiction administrative.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Comme je l'ai dit précédemment, monsieur le président, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 41, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 6



M. le président.
« Art. 6. - La loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés est ainsi modifiée :
« 1° Les dispositions de l'article 28 sont remplacées par les dispositions suivantes :
« Art. 28 . - I. - Au-delà de la durée nécessaire à la réalisation des finalités pour lesquelles elles ont été collectées ou traitées, les informations ne peuvent être conservées sous une forme nominative qu'en vue de leur traitement à des fins historiques, statistiques ou scientifiques. Le choix des informations qui seront ainsi conservées est opéré dans les conditions prévues à l'article 4-1 de la loi du 3 janvier 1979 sur les archives.
« Le décret en Conseil d'Etat prévu à l'article 33-1 précise les mesures nécessaires pour que les informations ainsi conservées ne puissent être traitées dans des conditions autres que celles définies au II ci-après.
« II. - Les informations ainsi conservées, autres que celles visées à l'article 31, ne peuvent, sauf accord exprès des intéressés, faire l'objet d'un traitement à d'autres fins qu'à des fins historiques, statistiques ou scientifiques, à moins que ce traitement, dans l'intérêt des personnes concernées, ne soit autorisé par la commission.
« Lorsque ces informations comportent des données mentionnées à l'article 31, un tel traitement ne peut être mis en oeuvre, sauf accord exprès des intéressés, que pour des motifs d'intérêt public et dans l'intérêt des personnes concernées, par décret en Conseil d'Etat sur proposition ou avis conforme de la commission. »
« 2° Il est inséré, après l'article 29, un nouvel article 29-1, ainsi rédigé :
« Art. 29-1. - Les dispositions de la présente loi ne font pas obstacle à l'application, au bénéfice de tiers, des dispositions du titre premier de la loi du 17 juillet 1978 relatif à la liberté d'accès aux documents administratifs et des dispositions du titre II de la loi du 3 janvier 1979 sur les archives.
« En conséquence, ne peut être regardé comme un tiers non autorisé au sens de l'article 29, le titulaire d'un droit d'accès aux documents administratifs ou aux archives publiques exercé conformément aux lois du 17 juillet 1978 et du 3 janvier 1979. »
« 3° Il est inséré, après l'article 33, un nouvel article 33-1, ainsi rédigé :
« Art. 33-1. - Les modalités d'application du présent chapitre sont fixées par décret en Conseil d'Etat pris après avis de la commission. »
« 4° La dernière phrase du deuxième alinéa de l'article 40-3 est remplacée par les deux phrases suivantes :
« La demande d'autorisation comporte la justification scientifique et technique de la dérogation et l'indication de la période nécessaire à la recherche. A l'issue de cette période, les données sont conservées et traitées dans les conditions fixées à l'article 28. »
« 5° Dans la première phrase de l'alinéa premier de l'article 45, est ajoutée la référence aux articles 28 et 29-1. »
Par amendement n° 7, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de supprimer le second alinéa du paragraphe I du texte présenté par le 1° de cet article pour l'article 28 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel, qui a pour objet d'éviter une redondance.
Le décret en Conseil d'Etat prévu à l'article 33-1 de la loi relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés s'applique à l'ensemble du chapitre concerné, en particulier à la définition des conditions dans lesquelles les données nominatives pourront faire l'objet d'un traitement ultérieur à des fins historiques, statistiques ou scientifiques.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Aux termes du nouvel article 33-1 de la loi sur la CNIL, auquel il est fait référence dans le troisième alinéa du présent article 6, un décret en Conseil d'Etat doit définir les modalités d'application de l'ensemble du chapitre concerné. Dès lors, il est exact que la précision figurant au deuxième alinéa du texte proposé par l'article 28-I n'est pas strictement indispensable du point de vue juridique.
Je tiens cependant à rappeler que cette précision est d'une importance particulière, puisqu'elle porte sur les garanties entourant la conservation des informations nominatives. Voilà pourquoi le Gouvernement avait estimé utile de l'inscrire dans le texte, au prix, il est vrai, d'une certaine redondance.
Quoi qu'il en soit, le Gouvernement s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée sur cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 7, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 8 rectifié, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit le paragraphe II du texte présenté par le 1° de l'article 6 pour l'article 28 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés :
« II. - Les informations ainsi conservées, autres que celles visées à l'article 31, ne peuvent faire l'objet d'un traitement à d'autres fins qu'à des fins historiques, statistiques ou scientifiques, à moins que ce traitement n'ait reçu l'accord exprès des intéressés ou soit autorisé par la commission dans l'intérêt des personnes concernées.
« Lorsque ces informations comportent des données mentionnées à l'article 31, un tel traitement ne peut être mis en oeuvre, à moins qu'il n'ait reçu l'accord exprès des intéressés, ou qu'il ait été autorisé, pour des motifs d'intérêt public et dans l'intérêt des personnes concernées, par décret en Conseil d'Etat sur proposition ou avis conforme de la commission. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Il s'agit là aussi d'un amendement rédactionnel : nous proposons de mettre sur le même plan les deux conditions dans lesquelles il peut être procédé à un retraitement des données nominatives qui n'aurait pas une fin historique, statistique ou scientifique : soit le traitement a recueilli l'accord des intéressés, soit il est autorisé par la CNIL ou par décret en Conseil d'Etat, dans l'intérêt des personnes concernées.
Indépendamment de cette explication, je voudrais connaître le point de vue de M. le ministre sur la compatibilité des dispositions modifiant la loi relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés avec la directive européenne du 24 octobre 1995, laquelle devait être transposée en droit interne pour le 24 octobre 1998. Pourriez-vous nous informer sur le calendrier de cette transposition, monsieur le ministre ?
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 8 rectifié.
En ce qui concerne la précision demandée par M. le rapporteur, je peux indiquer que le projet de loi est prêt.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 8 rectifié, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 9, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit le dernier alinéa, 5°, de l'article 6 :
« 5° Dans le premier alinéa de l'article 45, les références : "27, 29" sont remplacées par les références : "27, 28, 29, 29-1". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel. Le premier alinéa de l'article 45 de la loi sur la CNIL ne comporte qu'une phrase !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 9, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 6, modifié.

(L'article 6 est adopté.)

Article 7



M. le président.
« Art. 7. - Les dispositions de l'article 226-20 du code pénal sont remplacées par les dispositions suivantes :
« Art. 226-20 . - I. - Est puni de trois ans d'emprisonnement et de 300 000 francs d'amende le fait de conserver des informations sous une forme nominative au-delà de la durée prévue à la demande d'avis ou à la déclaration préalable à la mise en oeuvre du traitement informatisé, sauf si cette conservation est effectuée à des fins historiques, statistiques ou scientifiques dans les conditions prévues par la loi.
« II. - Est puni des mêmes peines le fait de traiter des informations nominatives conservées au-delà de la durée mentionnée au I à des fins autres qu'historiques, statistiques ou scientifiques, sauf si ce traitement a été autorisé dans les conditions prévues par la loi. »
Par amendement n° 10, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit le texte présenté par cet article pour l'article 226-20 du code pénal :
« Art. 226-20. - I. - Le fait de conserver des informations sous une forme nominative au-delà de la durée prévue par la demande d'avis ou la déclaration préalable à la mise en oeuvre du traitement informatisé est puni de trois ans d'emprisonnement et de 300 000 francs d'amende, sauf si cette conservation est effectuée en vue de leur traitement à des fins historiques, statistiques ou scientifiques dans les conditions prévues par la loi.
« II. - Le fait de traiter des informations nominatives conservées au-delà de la durée mentionnée au I à des fins autres qu'historiques, statistiques ou scientifiques est puni des mêmes peines, sauf si ce traitement a été autorisé dans les conditions prévues par la loi. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 45, présenté par le Gouvernement, et tendant, dans le deuxième alinéa de l'amendement n° 10, à supprimer les mots : « en vue de leur traitement ».
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 10.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. C'est encore un amendement rédactionnel : il s'agit de se conformer à la rédaction du nouveau code pénal.
M. le président. La parole est à M. le ministre, pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 10 et pour défendre le sous-amendement n° 45.
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. La formulation proposée ne pose pas de problème en soi, à l'exception, toutefois, d'un ajout inapproprié qui introduit une confusion s'agissant du code pénal.
L'article 7 est organisé de façon à réprimer, dans le paragraphe I, les infractions en matière de conservation des informations nominatives et, dans le paragraphe II, les infractions en matière de traitement de ces mêmes informations.
Dès lors, ajouter dans le paragraphe I, comme le propose la commission, une référence au traitement aboutit à interdire toute conservation qui n'aurait pas comme finalité un tel traitement. Or tel n'est pas le but recherché par elle, je le sais, car il peut être utile de conserver des informations sans nécessairement avoir en vue dès l'archivage l'éventuel traitement futur des informations qui résultera, le jour venu, des travaux des chercheurs.
Donc, le Gouvernement peut se rallier à la proposition de la commission, à la condition que cette dernière accepte son sous-amendement n° 45.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ce sous-amendement ?
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 45, accepté par la commission.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, l'amendement n° 10, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 7, ainsi modifié.

(L'article 7 est adopté.)

Article 8



M. le président.
« Art. 8. - Le titre Ier de la loi du 17 juillet 1978 relative à la liberté d'accès aux documents administratifs est ainsi modifié :
« 1° Au premier alinéa de l'article 1er, les mots : "de caractère non nominatif" sont supprimés.
« 2° Le deuxième alinéa de l'article 1er est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Sont considérés comme documents administratifs, au sens du présent titre, tous dossiers, rapports, études, comptes rendus, procès-verbaux, statistiques, directives, instructions, circulaires, notes et réponses ministérielles qui comportent une interprétation du droit positif ou une description des procédures administratives, avis, prévisions et décisions, dès lors qu'ils émanent des administrations de l'Etat, des collectivités territoriales, des établissements publics ou des organismes, fussent-ils de droit privé, chargés de la gestion d'un service public. Ces documents peuvent revêtir la forme d'écrits, d'enregistrements sonores ou visuels, de documents existant sur support informatique ou pouvant être obtenus sans un traitement automatisé spécial.
« Ne sont pas considérés comme documents administratifs, au sens du présent titre, les avis du Conseil d'Etat et des juridictions administratives, les documents de la Cour des comptes mentionnés à l'article L. 140-9 du code des juridictions financières et les documents des chambres régionales des comptes mentionnés à l'article L. 241-6 du même code et les documents d'instruction des réclamations adressées au Médiateur de la République. »
« 3° L'article 2 est ainsi rédigé :
« Art. 2. - Sous réserve des dispositions de l'article 6, les autorités mentionnées à l'article 1er sont tenues de communiquer les documents administratifs qu'elles détiennent aux personnes qui en font la demande, dans les conditions prévues par le présent titre.
« Le droit à communication ne s'applique qu'à des documents achevés. Il ne concerne pas les documents préparatoires à une décision administrative tant qu'elle est en cours d'élaboration. Il cesse de s'exercer lorsque les documents font l'objet d'une diffusion publique ou qu'ils ont été réalisés afin d'être vendus.
« L'administration sollicitée n'est pas tenue de donner suite aux demandes abusives, notamment par leur nombre, leur caractère répétitif ou systématique. »
« 4° L'article 4 est ainsi rédigé :
« Art. 4 . - L'accès aux documents administratifs s'exerce :
« a) par consultation gratuite sur place, sauf si la préservation du document ne le permet pas ;
« b) sous réserve que la reproduction ne nuise pas à la conservation du document, par la délivrance d'une copie facilement intelligible sur un support identique à celui utilisé par l'administration ou sur papier, au choix du demandeur dans la limite des possibilités techniques de l'administration et aux frais de ce dernier, sans que ces frais puissent excéder le coût de cette reproduction, dans des conditions prévues par décret. »
« 5° Les deux premiers alinéas de l'article 5 sont remplacés par les trois alinéas suivants :
« Une commission dite "commission d'accès aux documents administratifs" est chargée de veiller au respect de la liberté d'accès aux documents administratifs et aux archives publiques, dans les conditions prévues par le présent titre et par le titre II de la loi n° 79-18 du 3 janvier 1979 sur les archives. Elle émet des avis lorsqu'elle est saisie par une personne qui rencontre des difficultés pour obtenir la communication d'un document administratif ou pour consulter des documents d'archives publiques, à l'exception des documents mentionnés au 3° de l'article 3 de la loi du 3 janvier 1979. La saisine de la commission pour avis est un préalable obligatoire à l'exercice d'un recours contentieux.
« Elle conseille les autorités compétentes sur toute question relative à l'application du présent titre et des dispositions susmentionnées de la loi du 3 janvier 1979. Elle peut proposer, à la demande de l'autorité compétente ou à son initiative, toutes modifications de ces textes et toutes mesures de nature à faciliter l'exercice du droit d'accès aux documents administratifs et aux archives publiques et à renforcer la transparence administrative.
« La commission établit un rapport annuel qui est rendu public. Ce rapport retrace notamment les principales difficultés rencontrées par les personnes, au regard des différentes catégories de documents ou d'archives. »

« 6° Il est inséré après l'article 5 un article 5-1 ainsi rédigé :
« Art. 5-1. - La commission d'accès aux documents administratifs exerce également les compétences définies à l'article 5 en ce qui concerne l'accès aux documents administratifs prévu par les dispositions suivantes :
« - l'article L. 2121-26 du code général des collectivités territoriales ;

« - l'article L. 28 du code électoral ;
« - le b de l'article L. 104 du livre des procédures fiscales ;
« - l'article 5 de la loi du 1er juillet 1901 et l'article 2 du décret du 16 août 1901 ;
« - l'article 79 du code civil local d'Alsace-Moselle ;
« - les articles L. 213-13 et L. 332-29 du code de l'urbanisme. »
« 7° L'article 6 est ainsi rédigé :
« Art. 6-I. - Ne sont pas communicables les documents administratifs dont la consultation ou la communication porterait atteinte :
« - au secret des délibérations du Gouvernement et des autorités responsables relevant du pouvoir exécutif ;
« - au secret de la défense nationale ;
« - à la conduite de la politique extérieure de la France ;
« - à la sûreté de l'Etat, à la sécurité publique ou à la sécurité des personnes ;
« - à la monnaie et au crédit public ;
« - au déroulement des procédures engagées devant les juridictions ou d'opérations préliminaires à de telles procédures, sauf autorisation donnée par l'autorité compétente ;
« - à la recherche, par les services compétents, des infractions fiscales et douanières ;
« - ou, de façon générale, aux secrets protégés par la loi.
« II. - Ne sont communicables qu'à l'intéressé les documents administratifs :
« - dont la communication porterait atteinte au secret de la vie privée et des dossiers personnels, au secret médical et au secret en matière commerciale et industrielle ;
« - portant une appréciation ou un jugement de valeur sur une personne physique, nommément désignée ou facilement identifiable ;
« - faisant apparaître le comportement d'une personne, dès lors que la divulgation de ce comportement pourrait lui porter préjudice.
« Les informations à caractère médical ne peuvent être communiquées à l'intéressé que par l'intermédiaire d'un médecin qu'il désigne à cet effet. »
« 8° L'article 6 bis est abrogé.
« 9° L'article 13 est complété par une deuxième phrase ainsi rédigée :
« Les documents administratifs non communicables au sens du présent titre peuvent être communiqués dans les conditions et délais fixés par les articles 6 et 7 de la loi du 3 janvier 1979 sur les archives. »
Par amendement n° 11, M. Amoudry, au nom de la commission, propose a la fin de la première phrase du premier alinéa du texte présenté par le 2° de l'article 8 pour remplacer le deuxième alinéa de l'article 1er de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978, de remplacer les mots : « dès lors qu'ils émanent des administrations de l'Etat, des collectivités territoriales, des établissements publics ou des organismes, fussent-ils de droit privé, chargés de la gestion d'un service public » par les mots : « qui émanent de l'Etat, des collectivités territoriales, des établissements publics ou des organismes de droit public ou privé chargés d'une mission de service public ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Il s'agit d'un amendement purement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Le Gouvernement ne souhaite pas modifier le champ d'application de la loi du 17 juillet 1978. Cette loi, qui a reconnu une véritable liberté publique, fait aujourd'hui l'objet d'une définition précise quant à sa portée, grâce à la jurisprudence de la commission d'accès aux documents administratifs, sous le contrôle du Conseil d'Etat.
Dans ses propositions, qui tiennent compte du rapport Combarnous, le Gouvernement n'a pas jugé utile de toucher à ce champ.
Il est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 11, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 12, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit le texte présenté par le 3° de cet article pour l'article 2 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 :
« Art. 2 . - Sous réserve des dispositions de l'article 6, les documents administratifs sont de plein droit communicables aux personnes qui en font la demande.
« Le droit à communication ne s'applique qu'à des documents achevés, ce qui exclut les documents préparatoires aux décisions administratives tant qu'elles sont en cours d'élaboration. Il ne s'exerce plus lorsque les documents font l'objet d'une diffusion publique. Il ne s'applique pas aux documents réalisés dans le cadre d'un contrat de prestation de service.
« L'administration sollicitée n'est pas tenue de donner suite aux demandes abusives, en particulier par leur nombre, leur caractère répétitif ou systématique. »
Par amendement n° 47, le Gouvernement propose, à la fin du troisième alinéa du 3° de l'article 8, de remplacer les mots : « ou qu'ils ont été réalisés afin d'être vendus » par une phrase ainsi rédigée : « . Il ne s'applique pas aux documents réalisés par l'administration dans le cadre d'un contrat de prestation de service pour le compte d'une ou plusieurs personnes déterminées. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 12.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. C'est un amendement rédactionnel qui a un double objet : il s'agit, d'une part, de réaffirmer le principe de la communication de plein droit des documents administratifs et, d'autre part, de préciser la notion de document réalisé afin d'être vendu. Il peut s'agir, par exemple, de documents statistiques élaborés par l'INSEE ou de prévisions météorologiques de Météo France, tous documents destinés à être vendus à des personnes privées.
M. le président. La parole est à M. le ministre, pour défendre l'amendement n° 47 et pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 12.
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Le Gouvernement propose de reprendre partiellement la rédaction de la commission des lois s'agissant des documents réalisés afin d'être vendus.
Cette rédaction précise, en effet, de façon pertinente ce que le Gouvernement entend par « documents destinés à être vendus », à savoir les rapports et études de toutes sortes que l'administration réalise sur la base d'une commande particulière et qu'elle facture dans des conditions spécifiques. Destinés à leur seul commanditaire, ces documents doivent être distingués de ceux qui font l'objet d'une commercialisation dans le public.
Afin de délimiter clairement cette catégorie de documents, le Gouvernement propose toutefois de compléter la rédaction de la commission en précisant que ces documents sont destinés à des commanditaires individualisés.
Le Gouvernement est, dans ces conditions, défavorable à l'amendement de la commission.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 47 ?
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement, car celui de la commission est plus global.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 12, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 47 n'a plus d'objet.
Par amendement n° 13, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de supprimer la seconde phrase du troisième alinéa du texte présenté par le 5° de l'article 8 pour remplacer les deux premiers alinéas de l'article 5 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Par cet amendement, la commission propose à la Haute Assemblée de supprimer des dispositions inutiles.
En effet, le rapport public annuel de la commission d'accès aux documents administratifs a déjà une existence légale. Le contenu peut en être laissé à l'appréciation de la CADA.
En pratique, on voit mal comment le rapport pourrait ne pas faire état de l'exercice par la CADA des nouvelles missions qui lui sont attribuées par le présent projet de loi, en particulier s'agissant des principales difficultés rencontrées par les personnes pour accéder aux documents administratifs et aux archives publiques.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Le Gouvernement considère que la loi pourrait utilement inviter la commission d'accès aux documents administratifs, la CADA, à faire figurer dans son rapport des analyses qualitatives permettant d'apprécier l'effectivité du droit d'accès et, par suite, de favoriser une évolution positive de ce droit.
Cela étant dit, le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 13.
M. Robert Bret. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret. La suppression proposée amoindrit le rôle de garant de la liberté d'accès aux documents de la CADA. Ainsi qu'il ressort de la discussion ; cela semble contraire aux objectifs de transparence de ce projet de loi.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 13, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 14, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de supprimer les deux derniers alinéas (9°) de l'article 8.
Par amendement n° 43, M. Bret et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, dans le texte présenté par le 9° de l'article 8 pour compléter l'article 13 de la loi du 17 juillet 1978 relative à la liberté d'accès aux documents administratifs, de remplacer les mots : « peuvent être communiqués dans les conditions et délais » par les mots : « deviennent consultables dans les conditions et au terme des délais ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 14.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Cet amendement tend à supprimer les deux derniers de l'article 8. En effet, selon ces dispositions, les documents non communicables, au sens de la loi du 17 juillet 1978, c'est-à-dire ceux qui, par exemple, portent atteinte au secret des délibérations du Gouvernement ou au secret de la défense nationale, « peuvent être communiqués » dans les conditions prévues par la loi du 3 janvier 1979 sur les archives, qui prévoit différents délais spéciaux dérogeant au délai de droit commun de trente ans selon la nature des documents en cause.
Ces dispositions pourraient introduire une confusion puisque les deux lois ne font pas référence aux mêmes notions : documents non communicables pour l'une, documents soumis à des délais spéciaux pour l'autre. Trente, soixante ou cent ans après la date de l'acte, il s'agit non pas d'un droit à communication du document mais d'un droit à consultation des archives.
M. le président. La parole est à M. Bret, pour défendre l'amendement n° 43.
M. Robert Bret. Cet amendement tend à lever l'ambiguïté rédactionnelle de l'alinéa 9°. Effectivement, la rédaction sous-entend que les documents archivés sont communicables, alors que la loi sur les archives organise la consultation des documents administratifs.
Notre amendement permet non seulement de rester dans l'esprit de la loi du 3 janvier 1979, relative aux archives, mais aussi de réaliser la nécessaire harmonisation avec le texte sur l'accès aux documents administratifs.
Voter notre amendement serait, mes chers collègues, plus constructif que voter l'amendement de la commission.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 43 ?
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. La commission émet un avis défavorable, tout en soulignant que l'objectif visé par l'amendement n° 43 est atteint, quant au fond, par l'amendement n° 14 de la commission qui, dans un même souci de clarification, vise à supprimer l'alinéa 9° de l'article.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 14 et 43 ?
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 14.
Bien qu'il soit sensible à l'argument selon lequel la disposition en cause serait redondante par rapport à la loi sur les archives, il souhaite cependant son maintien.
En effet, dans la ligne du rapport du Conseil d'Etat, il est souhaitable que chacune des lois de transparence fasse clairement apparaître son articulation avec les autres textes.
En revanche, le Gouvernement émet un avis favorable sur l'amendement n° 43, qui tend à lever l'ambiguïté rédactionnelle de l'alinéa 9°.
Effectivement, la rédaction sous-entend que les documents archivés sont communicables, alors que la loi sur les archives organise la consultation des documents administratifs.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 14, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 43 n'a plus d'objet.
Je vais mettre aux voix l'article 8.
M. Yves Fréville. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville. Je souhaite attirer l'attention du Gouvernement sur cette catégorie de documents administratifs assez spécifique que sont les procès-verbaux d'examen et les copies des étudiants, documents administratifs nominatifs qui, à la suite d'un arrêt du Conseil d'Etat, sont, pour ce qui est des copies des étudiants, également devenus des documents administratifs communicables.
Soit une université qui organise des examens concernant 2 000 ou 3 000 étudiants. Si chacun d'eux rend cinq ou six copies, cela fait 24 000 copies à communiquer aux intéressés, et ce, naturellement, dans un délai très bref.
Or, le texte de loi qui nous est proposé organise la communication. Celle-ci peut se faire soit par voie coutumière, soit par envoi, remise de photocopie ou tout autre moyen.
Monsieur le ministre, nous touchons là à l'absurde, car l'on peut ainsi bloquer le fonctionnement d'une université.
Voilà pourquoi j'aimerais connaître votre sentiment sur le statut de ces documents administratifs de type particulier.
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Je n'ai pas préparé de réponse particulière sur ce point. J'observe simplement que les documents auxquels il est fait référence sont, certes, communicables mais aux seuls étudiants concernés. Cela se pratique couramment, ce n'est pas un élément nouveau.
Cela étant, je promets à M. Fréville qu'une réponse plus précise...
M. Yves Fréville. Pas de photocopie ! (Sourires.)
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. ... lui sera apportée plus avant dans l'examen de ce projet.
M. Yves Fréville. Merci !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article 8, modifié.

(L'article 8 est adopté.)

Article 9



M. le président.
« Art. 9. - La loi du 3 janvier 1979 sur les archives est ainsi modifiée :
« 1° Dans la première phrase de l'article 4, après les mots : "visés à l'article 3" sont insérés les mots : "et autres que ceux visés à l'article 4-1".
« 2° Il est inséré, après l'article 4, un nouvel article 4-1, ainsi rédigé :
« Art. 4-1 . - Lorsque les documents visés à l'article 3 comportent des informations nominatives collectées dans le cadre de traitements automatisés régis par la loi du 6 janvier 1978, ces informations font l'objet, à l'expiration de la durée prévue à l'article 28 de ladite loi, d'un tri pour déterminer les informations destinées à être conservées et celles, dépourvues d'intérêt scientifique, statistique ou historique, destinées à être détruites.
« Les catégories d'informations destinées à la destruction ainsi que les conditions de leur destruction sont fixées par accord entre l'autorité qui les a produites ou reçues et l'administration des archives. »
La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville. Il s'agit là d'une disposition qui, en ce qui concerne les documents administratifs, permettra la transposition de la directive européenne. A ce sujet, je m'étonne d'ailleurs que nous ayons à voter aujourd'hui sur ces dispositions alors que nous aurons à reprendre, bientôt, la totalité du texte.
Ce sur quoi je veux insister, c'est le tri qui sera fait des documents administratifs lorsqu'ils seront archivés, dirai-je pour simplifier. On distingue en effet la finalité administrative - le droit à l'oubli, en quelque sorte - et l'autre finalité, à savoir la recherche historique, scientifique ou statistique.
Le soin de faire ce tri est confié à une commission des archives. A cet égard, il ne faudrait surtout pas - vous me permettrez d'adresser cette recommandation au pouvoir réglementaire - que la direction des archives raisonne uniquement dans une optique historique. Nous avons en effet besoin, dans le domaine scientifique, notamment en matière de santé, d'utiliser ces documents pour des raisons qui n'ont rien d'historique.
Il convient que la commission qui sera chargée de faire le tri ne perde pas de vue cet aspect scientifique.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article 9.

(L'article 9 est adopté.)

Chapitre III

Dispositions relatives à la transparence financière

Article 10



M. le président.
« Art. 10. - Les comptes des autorités administratives mentionnées à l'article 1er et dotées de la personnalité morale sont tenus à la disposition du public, ainsi que ceux des organismes dont le budget annuel est supérieur à un montant fixé par décret en Conseil d'Etat et qui bénéficient, de la part de l'Etat ou d'une personne morale de droit public, d'aides ou de subventions supérieures à un seuil fixé par le même décret. Ce décret détermine également la nature et le contenu des documents mis à la disposition du public en application du présent article. »
Par amendement n° 15, M. Amoudry, au nom de la commission propose de rédiger comme suit cet article :
« Le premier alinéa de l'article 29 bis de la loi n° 84-148 du 1er mars 1984 relative à la prévention et au règlement amiable des difficultés des entreprises est complété par une phrase ainsi rédigée : "Le bilan et le compte de résultat sont déposés à la préfecture du département où se situe le siège de l'association pour y être consultés". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Cet article pose le principe général selon lequel les autorités administratives et les organismes aidés ou subventionnés sur des fonds publics tiennent leurs comptes à disposition du public.
Or, nulle part n'est défini ce que sont ces comptes, quels sont les organismes visés par cette obligation, ni quelles sont les conséquences concrètes d'une telle disposition. En particulier, rien n'est dit, à ce sujet, dans l'étude d'impact.
Concernant la publicité des comptes de l'Etat et des collectivités locales, l'article 10 n'apporte rien de nouveau. Il en est d'ailleurs de même s'agissant des comptes de la sécurité sociale et de ceux de la plupart des entreprises privées, dont les comptes annuels sont annexés au registre du commerce et des sociétés.
Restent dans le champ d'application de cet article les associations régies par la loi du 1er juillet 1901.
Conformément au rapport du comité central d'enquête sur le coût et le rendement des services publics, remis en mars 1998, et concernant le contrôle par l'Etat des associations subventionnées, la commission des lois propose de préciser le champ d'application de cet article en le rendant applicable expressément aux associations régies par la loi de 1901.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Limiter, comme le propose la commission, l'obligation de mise à disposition du public aux seules associations subventionnées constitue un recul par rapport à l'objectif d'informer de façon transparente le citoyen.
Il me paraît en effet légitime que les citoyens puissent, comme le prévoit la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, dans son article XIV, « constater par eux-mêmes la nécessité de la contribution publique et en suivre l'emploi ».
Les établissements publics nationaux et locaux, les associations, les entreprises bénéficiaires de fonds publics doivent être astreints à communiquer leurs comptes en contrepartie de l'aide publique qu'ils perçoivent. Cette contrainte n'est pas disproportionnée par rapport à l'avantage qu'ils retirent des fonds publics.
De manière concrète, les dispositions fixées par décret organiseront la mise en oeuvre de ce principe en conciliant l'impératif de transparence avec la recherche de la simplicité. Il n'est pas dans notre intention, au travers de ce texte, de compliquer la vie de tout un chacun !
Des seuils différenciés, qui seront fixés à l'issue d'une concertation appropriée, permettront d'atteindre ces objectifs sans contraindre à l'excès les acteurs économiques et sociaux.
Ainsi, pour illustrer mon propos, le décret d'application pourra prévoir plusieurs seuils en fonction du type d'organisme ou du type d'aide. Les seuils déjà prévus pour les associations aidées par les collectivités locales - 500 000 francs ou 50 % du budget - ou ceux qui sont prévus par la loi du 29 juillet 1993 - un million de francs - constituent une première indication. Ils peuvent sembler élevés ; il appartient aux concertations et à la discussion interministérielle sur les futurs décrets de déterminer les seuils pertinents.
S'agissant des modalités selon lesquelles ces comptes seront mis à la disposition du public pour être consultés, le décret s'attachera à définir la procédure la moins contraignante possible. Par exemple, les comptes des associations subventionnés pourraient être consultés auprès de l'organisme public qui a accordé la subvention.
Le Gouvernement est donc défavorable à l'amendement n° 15.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 15.
M. Robert Bret. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret. Tel que rédigé dans le projet de loi, l'article 10 aurait pour effet de soumettre l'ensemble des entreprises privées recevant une aide publique, par exemple au titre de la politique de l'emploi, à l'obligation de rendre leurs comptes publics. On comprend mieux, après avoir écouté M. le rapporteur, pourquoi la majorité sénatoriale refuse cet article !
Nous voterons donc contre l'amendement.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Je tiens à répondre à M. le ministre et à M. Bret qu'aux yeux de la commission il ne s'agit pas d'un recul puisque, conformément au droit existant, les comptes de la quasi-totalité des sociétés et entreprises sont consultables au registre du commerce. Donc, sur le fond, le présent texte n'apporte rien de plus.
Voilà pourquoi, dans l'optique que j'évoquais tout à l'heure, nous avons proposé de viser les associations de la loi 1901, d'autant que le rapport intitulé : « Le contrôle par l'Etat des associations subventionnées » constate l'insuffisance de transparence de certaines associations subventionnées sur fonds publics. Vingt-deux propositions ont été formulées ; cinq d'entre elles relèvent du domaine de la loi. En ce domaine, il y a donc matière à légiférer.
S'agissant des entreprises, ce que nous voulons éviter, c'est que celles qui n'ont pas l'obligation d'être inscrites au registre du commerce, certaines sociétés en nom collectif, donc les toutes petites sociétés, se voient imposer une obligation nouvelle qui serait extrêmement disproportionnée au regard de l'aide éventuelle qu'elles pourraient avoir reçue au titre de la politique de l'emploi ou pour toute autre raison.
La commission des lois n'a donc pas du tout l'intention, et encore moins la volonté, de faire preuve de partialité en la matière. Son analyse se fonde sur les textes en vigueur.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 15, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 10 est ainsi rédigé.

Article 11



M. le président.
« Art. 11. - L'article L. 111-7 du code des juridictions financières est complété par les mots suivants : "et sur les organismes qui sont habilités à recevoir des taxes parafiscales et des cotisations légalement obligatoires, de même que sur les organismes chargés d'une mission de service public habilités à percevoir des versements libératoires d'une obligation légale de faire". »
Par amendement n° 44, M. Fréville propose d'insérer, dans le second alinéa de cet article, après les mots : « taxes parafiscales », les mots : « , des impositions de toute nature ».
La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville. Je suis tout à fait d'accord avec le fond de l'article 11, mais je ne crois pas qu'il soit très bien rédigé.
La Cour des comptes peut contrôler les organismes qui sont habilités à recevoir des taxes parafiscales. Le malheur, c'est que l'expression « taxes parafiscales » a un sens très précis : ce sont les taxes qui figurent dans la liste insérée à l'état E de chaque loi de finances, et donc non pas celles que, dans le langage commun, on appelle « taxes parafiscales ».
Les taxes dont il est question sont des impositions de toute nature qui figurent d'ailleurs en annexe du fascicule « Voies et moyens » de la loi de finances chaque année.
Je souhaite tout simplement que les organismes qui reçoivent, pour reprendre les exemples donnés par M. le rapporteur, la taxe d'apprentissage ou, au hasard, la taxe pourvoyant aux dépenses de la chambre nationale de la batellerie artisanale ou tout autre financement tel que les congés individuels de formation des salariés sous contrat à durée indéterminée, gérés par les OPACIF, les organismes paritaires agréés au titre du congé individuel de formation, puissent être contrôlés par la Cour des comptes.
Je crois donc que, pour assurer l'efficacité de la mise en oeuvre de la mesure prévue à l'article 11, il conviendrait d'étendre son champ d'application non pas aux taxes parafiscales stricto sensu , mais aux impositions de toute nature visées dans l'annexe « Voies et moyens » des lois de finances.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Je crois que l'amendement de M. Fréville ouvre une perspective plus large que celle du projet de loi, et la mesure qu'il propose ne fait pas double emploi avec les dispositions de celui-ci. La Cour des comptes aura ainsi compétence pour contrôler les organismes bénéficiant des contributions votées par le Parlement. On ne peut que s'en féliciter, puisque cela permettra d'assurer à la fois l'application des dispositions légales et le bon usage desdites contributions.
Le Gouvernement est donc favorable à l'amendement n° 44.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 44, accepté par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 11, ainsi modifié.

(L'article 11 est adopté.)

Article 12



M. le président.
« Art. 12. - I. - Le titre IV du livre Ier du code des juridictions financières est complété par un article L. 140-10 ainsi rédigé :
« Art. L. 140-10 - Le Procureur de la République peut transmettre au Procureur général près la Cour des comptes, d'office ou à la demande de ce dernier, la copie de toute pièce d'une procédure judiciaire relative à des faits de nature à constituer des irrégularités dans les comptes ou dans la gestion de l'Etat, des établissements publics ou des organismes relevant de la compétence de la Cour des comptes. »
« II. - Le titre IV du livre II du même code est complété par un article L. 241-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 241-2-1 . - Le Procureur de la République peut transmettre au commissaire du Gouvernement d'une chambre régionale des comptes, d'office ou à la demande de ce dernier, la copie de toute pièce d'une procédure judiciaire relative à des faits de nature à constituer des irrégularités dans les comptes ou dans la gestion des collectivités ou organismes relevant de la compétence de cette chambre. »
« III. - Au titre Ier du livre III du même code, l'article L. 314-18 est complété par un quatrième alinéa ainsi rédigé :
« Le Procureur de la République peut transmettre au Procureur général près la Cour des comptes, ministère public près la Cour de discipline budgétaire et financière, d'office ou à la demande de ce dernier, la copie de toute pièce d'une procédure judiciaire relative à des faits de nature à constituer des infractions prévues et sanctionnées par les articles L. 313-1 à L. 313-14. »
Par amendement n° 16, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit le début du paragraphe I de cet article :
« I. - Dans le titre IV du livre Ier du code des juridictions financières, après l'article L. 140-1, il est inséré un article L. 140-1-1, ainsi rédigé :
« Art. L. 140-1-1 . - Le procureur de la République... ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel, qui modifie la place de cet article de procédure dans le code des juridictions financières.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 16, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 17, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit le premier alinéa du paragraphe II de l'article 12 :
« II. - Dans le chapitre Ier du titre IV de la première partie du livre II du code des juridictions financières, après l'article L. 241-2, il est inséré un article L. 241-2-1 ainsi rédigé : ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Il s'agit là aussi d'un amendement rédactionnel visant les divisions appropriées du code des juridictions financières.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 17, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 18, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit le premier alinéa du paragraphe III de l'article 12 :
« III. - Dans le chapitre IV du titre Ier du livre III du code des juridictions financières, l'article L. 314-18 est complété par un alinéa ainsi rédigé : ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Il s'agit encore une fois d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 18, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 12, modifié.
(L'article 12 est adopté.)

Article 13



M. le président.
« Art. 13. - I. - Le II de l'article 12 est applicable dans les territoires de Nouvelle-Calédonie et Polynésie française au contrôle des comptes et de la gestion des communes et de leurs établissement publics.
« 1° Pour son application dans le territoire de Nouvelle-Calédonie le II de l'article 12 est ainsi rédigé :
« II. - Le titre VI du livre II du code des juridictions financières est complété par un article L. 262-45-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 262-45-1 . - Le Procureur de la République peut transmettre au commissaire du Gouvernement de la chambre territoriale des comptes, d'office ou à la demande de ce dernier, la copie de toute pièce d'une procédure judiciaire relative à des faits de nature à constituer des irrégularités dans les comptes ou dans la gestion des collectivités ou organismes relevant de la compétence de cette chambre. »
« 2° Pour son application dans le territoire de Polynésie française, le II de l'article 12 est ainsi rédigé :
« II. - Le titre VII du livre II du même code est complété par un article L. 272-43-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 272-43-1 . - Le Procureur de la République peut transmettre au commissaire du Gouvernement de la chambre territoriale des comptes, d'office ou à la demande de ce dernier, la copie de toute pièce d'une procédure judiciaire relative à des faits de nature à constituer des irrégularités dans les comptes ou dans la gestion des collectivités ou organismes relevant de la compétence de cette chambre. »
« II. - Le II de l'article 12 est applicable dans la collectivité territoriale de Mayotte.
« Pour son application dans la collectivité territoriale de Mayotte, le II de l'article 12 est ainsi rédigé :
« II. - Au titre V du livre II du même code, l'article L. 250-1 est complété par un troisième alinéa ainsi rédigé :
« Le Procureur de la République peut transmettre au commissaire du Gouvernement de la chambre régionale des comptes, d'office ou à la demande de ce dernier, la copie de toute pièce d'une procédure judiciaire relative à des faits de nature à constituer des irrégularités dans les comptes ou dans la gestion des collectivités ou organismes relevant de la compétence de cette chambre. »
Par amendement n° 19, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de remplacer les trois premiers alinéas du paragraphe I de cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« I. - La sous-section 2 de la section 6 du chapitre II du titre VI de la deuxième partie du livre II du code des juridictions financières est complétée par un article L. 262-45-1 ainsi rédigé : ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 19, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 20, M. Amoudry, au nom de la commission, propose, à la fin du texte présenté par le troisième alinéa du 1° du paragraphe I de l'article 13 pour l'article L. 262-45-1 du code des juridictions financières, de remplacer les mots : « relevant de la compétence de cette chambre » par les mots : « mentionnés à l'article L. 262-44 ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de précision, car la procédure d'échange de pièces entre la chambre territoriale des comptes de Nouvelle-Calédonie et les juridictions judiciaires ne concerne que les communes, leurs établissements publics et les autres organismes soumis à leur contrôle et ne concernent donc pas la Nouvelle-Calédonie, les provinces et leurs établissements publics, puisqu'une telle disposition serait de nature organique.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. La remarque est fondée et l'avis du Gouvernement est favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 20, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 21, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de remplacer les deux premiers alinéas du 2° du paragraphe I de l'article 13 par un alinéa ainsi rédigé :
« II. - La sous-section 2 de la section 6 du chapitre II du titre VII de la deuxième partie du livre II du code des juridictions financières est complétée par un article L. 272-43-1 ainsi rédigé : »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 21, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 22, M. Amoudry, au nom de la commission, propose, à la fin du texte présenté par le troisième alinéa du 2° du paragraphe I de l'article 13 pour l'article L. 272-43-1 du code des juridictions financières, de remplacer les mots : « relevant de la compétence de cette chambre » par les mots : « mentionnés à l'article L. 272-42 ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Il s'agit encore d'un amendement de précision symétrique à l'amendement n° 20. La procédure d'échange de pièces entre la chambre territoriale des comptes de Polynésie française et les juridictions financières ne concerne que les communes, leurs établissements publics et les autres organismes soumis à leur contrôle et ne peut concerner le territoire de Polynésie puisqu'une telle décision serait de nature organique.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 22, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté,)
M. le président. Par amendement n° 23 rectifié, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de remplacer les trois premiers alinéas du paragraphe II de l'article 13 par un alinéa ainsi rédigé :
« III. - Dans le titre V de la première partie du livre II du code des juridictions financières, l'article L. 250-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé : »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 23 rectifié, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 13, modifié.

(L'article 13 est adopté.)

Article 1er (suite)



M. le président.
Nous en revenons à l'article 1er et à l'amendement n° 1, dont le vote a été précédemment réservé et qui, présenté par M. Amoudry, au nom de la commission, tend à supprimer l'article 1er.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Il s'agit en effet de l'amendement n° 1 réservé tout à l'heure. La commission propose d'insérer ici la définition des autorités administratives.
Le choix du Gouvernement de faire figurer cette définition en tête du projet de loi ne paraît pas pertinent à la commission. En effet, il suggère que l'ensemble des dispositions du texte sont relatives à ces autorités, ce qui n'est pas le cas puisque seuls onze articles sur vingt-huit y font référence, huit d'entre eux figurant au titre II. En outre, les trois autres articles visant ces autorités ont été, selon les décisions de la Haute Assemblée, supprimés ou modifiés en faisant disparaître la référence à ces autorités.
L'amendement n° 1 vise donc à transférer le contenu de l'article 1er dans un article additionnel placé en tête du Chapitre Ier du titre II.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Le Gouvernement a déjà dit combien la suppression des articles 2 et 3 lui paraissait néfaste : je ne peux donc qu'être défavorable à l'amendement n° 1.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 1.
M. Robert Bret. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret. La suppression de l'article 1er rend les dispositions du titre Ier inapplicables aux collectivités locales, aux établissements publics, à caractère administratif, aux organismes de sécurité sociale et aux organismes chargés de la gestion d'un service public administratif ; elles seraient uniquement applicables aux administrations d'Etat, ce qui restreindrait, on peut tous le constater, considérablement les avancés positives du projet de loi.
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Le déplacement de l'article 1er est la conséquence d'une amputation tout à fait regrettable du texte proposé par le Gouvernement.
L'article 1er avait été placé en tête du texte pour homogénéiser le champ d'application du projet de loi. En opérant comme le propose la commission, l'homogénéité est remise en cause alors que le Gouvernement souhaitait affirmer que la philosophie du projet de loi consiste à traiter globalement l'ensemble des services administratifs, c'est-à-dire l'administration telle qu'elle est perçue par les citoyens.
En outre, le champ d'application défini à l'article 1er concerne plusieurs articles du titre Ier que le Gouvernement souhaite maintenir.
M. Jacques Mahéas. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Il n'est pas nécessaire de chambouler le texte présenté par le Gouvernement ; il y a une cohérence, en effet, à admettre que les dispositions soient communes à toutes les administrations.
Je m'étonne que le fait de placer l'article 1er en tête du projet de loi gêne notre rapporteur. Qui peut le plus, peut le moins, pourquoi ne pas le maintenir en tête du projet de loi ?
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1, repoussé par le Gouvernement.

(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l'amendement.)
M. le président. En conséquence, l'article 1er est supprimé.

TITRE II

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RELATIONS
DES CITOYENS
AVEC LES ADMINISTRATIONS

Article additionnel avant le chapitre Ier du titre II



M. le président.
Par amendement n° 24, M. Amoudry, au nom de la commission, propose d'insérer, avant le chapitre Ier du titre II, un article additionnel ainsi rédigé :
« Sont considérées comme autorités administratives au sens du présent titre les administrations de l'Etat, les collectivités territoriales, les établissements publics à caractère administratif, les organismes de sécurité sociale et les autres organismes chargés de la gestion d'un service public administratif. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Il est défavorable, pour des raisons évidentes.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 24, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant le chapitre Ier du titre II.

Chapitre Ier

Dispositions relatives à l'amélioration
des procédures administratives

Article 14



M. le président.
« Art. 14. - Toute personne tenue de respecter une date limite ou un délai pour présenter une demande, déposer une déclaration, exécuter un paiement ou produire un document auprès de l'une des autorités administratives mentionnées à l'article 1er, peut satisfaire à cette obligation au moyen d'un envoi postal effectué au plus tard à la date prescrite, le cachet de la poste faisant foi. L'envoi par un procédé télématique ou informatique permettant notamment d'établir la date d'envoi et homologué à cette fin produit les mêmes effets. Ces dispositions ne sont pas applicables aux procédures pour lesquelles la présence personnelle du demandeur est exigée en application d'une disposition particulière.
« Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat. »
Par amendement n° 25, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit le premier alinéa de cet article :
« Toute personne tenue de respecter une date limite ou un délai pour présenter une demande, déposer une déclaration, exécuter un paiement ou produire un document auprès d'une autorité administrative, peut effectuer cette opération au plus tard à la date prescrite au moyen d'un envoi postal, le cachet de la poste faisant foi, ou d'un procédé télématique ou informatique homologué permettant de certifier la date d'envoi. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de simplification rédactionnelle.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Il sera malgré tout défavorable.
Le Gouvernement n'a pas d'objection de principe à une rédaction plus synthétique de l'article et n'insiste pas pour prévoir un décret d'application si le Sénat l'estime inutile.
Toutefois, la rédaction proposée présente, à mes yeux, deux inconvénients sérieux.
Tout d'abord, en précisant que la personne « peut satisfaire à son obligation au moyen d'un envoi postal », le Gouvernement souhaite indiquer clairement que l'envoi postal effectué à la date limite emporte libération de cette obligation. L'amendement, indiquant que la personne en question « peut effectuer cette opération » n'apporte plus cette clarification. A la limite, on pourrait lire l'amendement comme affirmant qu'il n'est pas interdit d'envoyer un courrier à l'administration par voie postale.
Ensuite, la dernière phrase du premier alinéa peut, certes, être considérée comme non indispensable juridiquement. Elle a néanmoins l'intérêt d'affirmer clairement les limites du droit ainsi ouvert et, en précisant que la présence du demandeur ne peut être exigée qu'en vertu du texte, d'encourager l'administration à mettre la pratique en accord avec le droit.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 25.
M. Robert Bret. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret. Le texte initial est plus précis. Avec cet amendement, nous en revenons au débat que nous avons eu précédemment. Il supprime la référence à l'article 1er et rend donc applicable l'article 14 uniquement aux administrations d'Etat.
M. Jacques Mahéas. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. La rédaction du projet de loi est beaucoup plus précise. Cet amendement, s'il était adopté, introduirait une simplification excessive.
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Il me paraît plus important et plus positif pour l'usager d'écrire qu'il a satisfait à son obligation « au moyen d'un envoi postal effectué au plus tard à la date prescrite » que d'écrire qu'il a procédé à l'opération ou effectué un envoi à telle date.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. L'obligation réside dans le fait de s'acquitter d'une formalité administrative au plus tard à une date prescrite, et non dans le fait d'utiliser l'envoi postal ou un procédé télématique. Notre rédaction a le mérite, comme vous le disiez, monsieur le ministre, d'une plus grande concision sans enlever quoi que ce soit à la nature des obligations des citoyens à l'égard des services publics.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 25, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 14, ainsi modifié.

(L'article 14 est adopté.)

Article 15



M. le président.
« Art. 15. - La loi n° 80-539 du 16 juillet 1980 relative aux astreintes prononcées en matière administrative et à l'exécution des jugements par les personnes morales de droit public est modifiée ainsi qu'il suit :
« I. - Au premier alinéa du I de l'article 1er, les mots : "quatre mois" sont remplacés par les mots : "deux mois".
« II. - Dans la dernière phrase du deuxième alinéa du I de cet article, les mots : "six mois" sont remplacés par les mots : "quatre mois".
« III. - Dans la première phrase du premier alinéa du II de cet article, les mots : "quatre mois" sont remplacés par les mots : "deux mois".
« IV. - Il est inséré, après l'article 1er, un article 1er-1 ainsi rédigé :
« Art. 1er-1 . - Les dispositions de l'article 1er sont applicables aux décisions du juge des référés accordant une provision. » - (Adopté.)

Chapitre II

Dispositions relatives au régime des décisions
prises par les autorités administratives

Article additionnel avant l'article 16



M. le président.
Par amendement n° 26, M. Amoudry, au nom de la commission, propose d'insérer, avant l'article 16, un article additionnel ainsi rédigé :
« Toute décision prise par une autorité administrative comporte, outre la signature de son auteur, la mention en caractères lisibles du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination qui transfère le dernier alinéa de l'article 4 dans le chapitre II du titre II du projet de loi relatif aux décisions des autorités administratives.
Ces dispositions permettent de tirer les conséquences au plan contentieux de l'absence de mention de l'auteur de la décision ou de son caractère illisible ou incomplet.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Lors de l'examen de l'amendement n° 5, le Gouvernement a déjà exprimé son désaccord à l'égard de la séparation de cette mesure des autres dispositions traitant de la levée de l'anonymat. Il est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 26.
M. Jacques Mahéas. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Etant donné qu'il s'agit d'une conséquence de l'architecture nouvelle de la loi, nous sommes défavorables à l'amendement n° 26 ainsi qu'à l'amendement n° 27.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 26, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 16.

Article 16



M. le président.
« Art. 16. - Sont considérées comme des demandes au sens du présent chapitre les demandes et les réclamations, y compris les recours gracieux ouhiérarchiques, adressées aux autorités administratives mentionnées à l'article 1er.
« A l'exception de celles de l'article 19, les dispositions des articles 17 à 22 ne s'appliquent pas aux relations entre les autorités administratives et leurs agents. »
Par amendement n° 27, M. Amoudry, au nom de la commission, propose, à la fin du premier alinéa de cet article, de supprimer les mots : « mentionnées à l'article 1er ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination, qui résulte du transfert de définition des autorités.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 27, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 16, ainsi modifié.

(L'article 16 est adopté.)

Article 17



M. le président.
« Art. 17. - Toute demande adressée à une autorité administrative mentionnée à l'article 1er fait l'objet d'un accusé de réception délivré dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Ce décret détermine les cas dans lesquels il n'est pas accusé réception des demandes en raison de la brièveté du délai imparti à l'autorité pour répondre, ou lorsque la demande n'appelle pas d'autre réponse que le service d'une prestation ou la délivrance d'un document prévus par les lois et les règlements.
« L'autorité administrative n'est pas tenue d'accuser réception des demandes abusives, notamment par leur nombre, leur caractère répétitif ou systématique.
« Les délais de recours ne sont pas opposables àl'auteur d'une demande lorsque l'accusé de réception prévu au premier alinéa ne lui a pas été transmis. Cette disposition n'est pas applicable lorsque la notification régulière d'une décision expresse intervient avant l'expiration du délai au terme duquel est susceptible de naître une décision implicite.
« Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux demandes dont l'accusé de réception est régi par des dispositions spéciales. »
Par amendement n° 28, M. Amoudry, au nom de la commission, propose, dans la première phrase du premier alinéa de cet article, de supprimer les mots : « mentionnées à l'article 1er ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. C'est également un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 28, repoussé par le Gouvernement.

L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 29, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de remplacer le troisième alinéa de cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
« Les délais de recours ne sont pas opposables à l'auteur d'une demande lorsque l'accusé de réception ne lui a pas été transmis ou lorsque le caractère irrégulier de ses conditions de délivrance a empêché le demandeur de faire valoir ses droits.
« Le défaut de délivrance d'un accusé de réception n'emporte pas l'inopposabilité des délais de recours à l'encontre de l'auteur de la demande lorsqu'une décision expresse lui a été régulièrement notifiée avant l'expiration du délai au terme duquel est susceptible de naître une décision implicite. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Le premier alinéa de cet amendement tend à prévoir une sanction similaire, c'est-à-dire l'inopposabilité des délais de recours à l'auteur de la demande, lorsque l'administration n'a pas délivré d'accusé de réception et lorsqu'elle a certes délivré un accusé de réception, mais sans respecter les prescriptions légales permettant au destinataire de la décision de faire valoir ses droits. Cet amendement reprend le dispositif résultant du décret du 28 novembre 1983.
Le second alinéa de cet amendement répond à un souci de clarification rédactionnelle.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Cet amendement ne paraît pas apporter de modifications substantielles sur le fond. Il introduit cependant une nouvelle condition qui n'est pas nécessairement très explicite pour les citoyens. En effet, la notion d'empêchement de faire valoir ses droits est subjective et est susceptible de provoquer des actions contentieuses inutiles.
En outre, il ne me paraît pas nécessaire que la loi prévoie de telles conditions dans la mesure où les caractéristiques de l'accusé de réception figureront dans le décret en Conseil d'Etat prévu par le premier alinéa de l'article 17.
Dans ces conditions, le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Nous proposons par cet amendement de hisser au niveau de la loi une disposition qui figure dans le décret de 1983 et, sauf si M. le ministre nous indique que ce décret a engendré un vaste contentieux, nous estimons que c'est judicieux. M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 29.
M. Jacques Mahéas. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Le premier alinéa de cet amendement est effectivement source de contentieux. Je partage l'avis de M. le ministre sur ce point.
Par ailleurs, selon moi, le second alinéa de ce texte relève plutôt du domaine réglementaire.
Pour ces deux raisons, nous voterons contre cet amendement.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 29, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 17, modifié.

(L'article 17 est adopté.)
(M. Jean Faure remplace M. Gérard Larcher au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE
vice-président

Articles 18 à 20



M. le président.
« Art. 18. - Lorsqu'une demande est adressée à une autorité administrative incompétente, cette dernière la transmet à l'autorité administrative compétente et en avise l'intéressé.
« Le délai au terme duquel est susceptible d'intervenir une décision implicite de rejet court à compter de la date de réception de la demande par l'autorité initialement saisie. »
« Le délai au terme duquel est susceptible d'intervenir une décision implicite d'acceptation ne court qu'à compter de la date de réception de la demande par l'autorité compétente.
« Dans tous les cas, l'accusé de réception est délivré par l'autorité compétente. » - (Adopté.)
« Art. 19. - Sauf dans les cas où un régime de décision implicite d'acceptation est institué dans les conditions prévues à l'article 20, le silence gardé pendant plus de deux mois par l'autorité administrative sur une demande vaut décision de rejet.
« Lorsque la complexité ou l'urgence de la procédure le justifie, des décrets en Conseil d'Etat prévoient un délai différent. » - (Adopté.)
« Art. 20. - Le silence gardé pendant deux mois par l'autorité administrative sur une demande vaut décision d'acceptation dans les cas prévus par décrets en Conseil d'Etat. Lorsque la complexité ou l'urgence de la procédure le justifie, ces décrets prévoient un délai différent. Ils définissent, lorsque cela est nécessaire, les mesures destinées à assurer l'information des tiers.
« Toutefois, ces décrets ne peuvent instituer un régime de décision implicite d'acceptation lorsque les engagements internationaux de la France, l'ordre public, la protection des libertés ou la sauvegarde des autres principes de valeur constitutionnelle s'y opposent, ou lorsque la décision présente un caractère financier. » - (Adopté.)

Article 21



M. le président.
« Art. 21. - Une décision implicite d'acceptation peut être retirée, pour illégalité, par l'autorité administrative :
« 1° Pendant le délai du recours contentieux, lorsque le régime qui lui est applicable a prévu des mesures de publicité ;
« 2° Dans le cas contraire, pendant un délai de deux mois à compter de la date à laquelle est née la décision. »
Par amendement n° 30, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de remplacer les deux derniers alinéas (1° et 2°) de cet article par trois alinéas ainsi rédigés :
« 1° Pendant le délai de recours contentieux ouvert aux tiers, lorsque des mesures d'information des tiers ont été mises en oeuvre ;
« 2° Pendant le délai de deux mois à compter de la date à laquelle est intervenue la décision ou, sans condition de délai, sur demande d'un tiers y ayant intérêt, lorsque aucune d'information des tiers n'a été mise en oeuvre ;
« 3° Pendant la durée de l'instance au cas où un recours contentieux a été formé. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Cet amendement reprend le dispositif qui avait été adopté en 1997 par l'Assemblée nationale et par le Sénat lors de l'examen du projet de loi relatif à l'amélioration des relations entre les administrations et le public.
Il vise à distinguer, en matière de retrait des décisions implicites d'acceptations illégales, selon que des mesures de publicité ont été ou non effectivement prises, et non selon que des mesures d'information des tiers étaient ou non prévues par le régime applicable à la décision en cause.
On peut, en effet, imaginer des cas où, des mesures de publicité n'étant pas prévues, des tiers ont été lésés. Dans cette hypothèse, il semble donc nécessaire de ménager une possibilité de retrait à la demande du tiers concerné.
Par ailleurs, conformément à la jurisprudence, il semble nécessaire de prévoir une possibilité de retrait lorsqu'une instance contentieuse est en cours afin d'éviter que des procédures ne se prolongent inutilement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Le Gouvernement aurait pu prendre à son compte les préoccupations de la commission, notamment pour prévoir le cas où les mesures d'information prévues ne sont pas mises en oeuvre, et ce même si l'ajout du 3° de cet amendement ne paraît pas essentiel, puisqu'il s'agit d'une règle générale bien établie par la juridiction administrative.
Cependant, le Gouvernement est opposé à cet amendement pour deux raisons.
Au 1°, la précision « recours ouvert aux tiers » est inutile et peut prêter à confusion. Ce qui est visé, c'est le délai de recours de droit commun ouvert à toute personne, y compris au bénéficiaire de la décision implicite. Certes, on imagine mal l'intérêt que celui-ci aurait à agir, mais cela ne doit pas conduire à suggérer dans la loi que les possibilités de recours sont restreintes.
Au 2°, par ailleurs, le Gouvernement ne souhaite pas prévoir la possibilité d'un retrait sans limitation de durée. La solution proposée par le projet, limitant à deux mois la durée pendant laquelle le retrait peut intervenir, maintient un équilibre entre le respect de la légalité et la sécurité juridique des usagers. Cette durée paraît être suffisante pour permettre aux tiers de faire valoir leurs droits. La jurisprudence du Conseil d'Etat encore récemment confirmée tend du reste à cantonner dans les mêmes limites les possibilités de retrait.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'amendement n° 30.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 30.
M. Jacques Mahéas. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Il semble qu'il y ait des conséquences trés dommageables pour les bénéficiaires d'une décision implicite d'acceptation qui n'aurait pas fait l'objet de mesures de publicité.
Si un tiers découvre cette décision implicite d'acceptation dans un délai qui peut être fort lointain, puisqu'il est illimité, et fait un recours, l'administration pourrait alors retirer la décision en question si elle est illégale.
Cela serait inacceptable. D'une part l'administration aurait un droit de repentir à vie. D'autre part, le bénéficiaire d'une décision implicite d'acceptation verrait celle-ci éternellement fragilisée et n'aurait droit à aucun recours et à aucun dédommagement.
J'attire votre attention sur les difficultés qu'entraînerait l'adoption de cet amendement.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Je précise que l'amendement de la commission des lois reprend la jurisprudence et ne concerne que les décisions implicites qui n'ont pas fait l'objet de mesures de publicité.
Nous prévoyons, certes, de donner en quelque sorte à l'administration un droit de repentir,...
M. Jacques Mahéas. Eternel !
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. ... certes éternel, de lui ouvrir la possibilité de retirer une décision illégale, mais uniquement à la demande d'un tiers qui a, de toute façon, un droit de recours contentieux sans limitation de délai.
Notre proposition vise en fait à permettre à l'administration qui a pu constater, sur la requête d'un tiers, l'existence d'une décision entachée d'illégalité, de retirer cette décision et d'éviter un recours contentieux.
Monsieur Mahéas, la position que nous défendons ne crée pas plus d'instabilité juridique que celle qui consiste à laisser les tiers intenter un recours contentieux. Nous permettons à l'administration de se repentir et, ainsi, nous évitons que les tiers qui découvrent une des décisions leur portant préjudice ne fassent des recours contentieux.
Il s'agit donc bien d'une mesure de simplification du fonctionnement de l'administration.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 30, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 21, ainsi modifié.

(L'article 21 est adopté.)

Article 22



M. le président.
« Art. 22. - Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix. L'autorité administrative n'est pas tenue de satisfaire les demandes d'audition abusives, notamment par leur nombre, leur caractère répétitif ou systématique.
« Les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables :
« 1° En cas d'urgence ou de circonstances exceptionnelles ;
« 2° Lorsque leur mise en oeuvre serait de nature à compromettre l'ordre public ou la conduite des relations internationales ;
« 3° Aux décisions pour lesquelles des dispositions législatives ont instauré une procédure contradictoire particulière.
« Les modalités d'application du présent article sont fixées en tant que de besoin par décret en Conseil d'Etat. - (Adopté.) »

TITRE III

DISPOSITIONS RELATIVES AU MÉDIATEUR
DE LA RÉPUBLIQUE

Article 23



M. le président.
« Art. 23. - La loi n° 73-6 du 3 janvier 1973 instituant un médiateur de la République est ainsi modifiée :
« 1° Il est inséré, après l'article 6, un nouvel article 6-1, ainsi rédigé :
« Art. 6-1. - Le médiateur de la République dispose, sur l'ensemble du territoire, de délégués qu'il désigne.
« Ces délégués transmettent au médiateur de la République les réclamations qui leur sont, le cas échéant, remises par les élus mentionnés au deuxième alinéa de l'article 6.
« Ils apportent aux personnes visées au premier alinéa de l'article 6 les informations et l'assistance nécessaires à la présentation des réclamations.
« A la demande du médiateur de la République, ils instruisent les réclamations qu'il leur confie et participent au règlement des difficultés dans leur ressort géographique. »
« 2° Le premier alinéa de l'article 9 est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :
« Lorsqu'une réclamation lui paraît justifiée, le médiateur de la République fait toutes les recommandations qui lui paraissent de nature à régler les difficultés dont il est saisi et, notamment, recommande à l'organisme mis en cause toute solution permettant de régler en équité la situation de l'auteur de la réclamation.
« Lorsqu'il apparaît au médiateur de la République qu'un organisme mentionné à l'article 1er n'a pas fonctionné conformément à la mission de service public qu'il doit assurer, il peut proposer à l'autorité compétente toutes mesures qu'il estime de nature à remédier à cette situation.
« Lorsqu'il lui apparaît que l'application de dispositions législatives ou réglementaires aboutit à des situations inéquitables, il peut suggérer les modifications qui lui paraissent opportunes.
« 3° La deuxième phrase du second alinéa de l'article 9 est complétée par les mots : "et ses propositions".
« 4° La seconde phrase de l'article 14 est complétée par les mots : "et fait l'objet d'une communication du médiateur de la République devant chacune des deux assemblées". »
Par amendement n° 31, M. Amoudry, au nom de la commission, propose d'insérer, après le premier alinéa de cet article, deux alinéas ainsi rédigés :
« 1° A - Après le deuxième alinéa de l'article 6, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le Médiateur européen ou un homologue étranger du Médiateur de la République, saisi d'une réclamation qui lui paraît entrer dans la compétence et mériter l'intervention de ce dernier, peut lui transmettre cette réclamation. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Il s'agit d'éviter que le médiateur européen ou les médiateurs étrangers, en particulier ceux des pays membres de l'Union européenne, saisis d'une réclamation relevant de la compétence du médiateur de la République, n'aient à passer par l'intermédiaire d'un parlementaire français pour la transmettre au médiateur français. Cela devrait permettre d'alléger la procédure de saisine entre les médiateurs. L'exigence selon laquelle la réclamation doit passer par un parlementaire est une spécificité française et britannique.
En réalité, c'est une forme de réciprocité que nous souhaitons instaurer avec l'accord de M. le médiateur de la République.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Cet amendement permet d'aligner la France sur la pratique retenue par la majorité des pays européens. En conséquence, le Gouvernement y est favorable.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 31.
M. Jacques Pelletier. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Pelletier.
M. Jacques Pelletier. Je remercie M. le rapporteur et la commission d'avoir proposé cet amendement. Je regrette d'ailleurs de ne pas y avoir pensé au moment où j'étais médiateur.
Il est vrai que le médiateur européen reçoit de temps en temps des réclamations qui ressortissent aux médiateurs nationaux et que, de même, les médiateurs nationaux reçoivent de temps en temps des réclamations qui ressortissent au médiateur européen.
Pour les médiateurs nationaux, envoyer ces réclamations au médiateur européen ne pose pas de problème, étant donné que la saisine est directe. Pour le médiateur européen à l'égard du médiateur français, c'est un peu différent, car il faut saisir ce dernier par l'intermédiaire d'un parlementaire.
Le médiateur européen est donc obligé d'envoyer le dossier à un parlementaire en lui indiquant la marche à suivre par une notice qui a été mise au point avec les services du médiateur de la République française et ceux du médiateur européen. Ce système est compliqué et engendre beaucoup de retard.
Cet amendement prévoit donc une bonne disposition qui s'appliquera, au plus, à quelque dizaines de cas par an. C'est peu au regard des cinquante mille réclamations que reçoit le médiateur. Ce dispositif ne va pas modifier profondément la loi, mais il est tout à fait utile.
M. Jacques Mahéas. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Monsieur le président, nous sommes favorables à l'adoption de cet amendement, car il prévoit une simplification administrative. Cette remarque vaut également pour l'amendement n° 32.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 31, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 32, M. Amoudry, au nom de la commission, propose :
I. - De compléter le texte présenté par le 1° de l'article 23 pour l'article 6-1 à insérer dans la loi n° 73-6 du 3 janvier 1973 instituant un médiateur de la République par un alinéa ainsi rédigé :
« Un député ou un sénateur, saisi d'une réclamation qui lui paraît entrer dans la compétence et mériter l'intervention du médiateur de la République, peut remettre cette réclamation à un délégué qui la transmet au médiateur de la République. »
II. - En conséquence, de supprimer le deuxième alinéa du même texte.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Cet amendement a pour objet de lever une ambiguïté.
En effet, la rédaction d'origine pourrait laisser penser que les délégués sont habilités à transmettre des réclamations au médiateur de la République sans que celles-ci passent par le filtre d'un parlementaire. Or cela est contraire à l'article 6 de la loi du 3 janvier 1973, qui exige cette intermédiation.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 32, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 23, modifié.

(L'article 23 est adopté.)

TITRE IV

DISPOSITIONS RELATIVES AUX MAISONS
DES SERVICES PUBLICS

Article 24



M. le président.
« Art. 24. - Afin de faciliter les démarches des usagers et d'améliorer la présence des services publics sur le territoire, une maison des services publics réunit des services publics relevant de l'Etat ou de ses établissements publics, des collectivités territoriales ou de leurs établissements publics, des organismes de sécurité sociale ou d'autres organismes chargés d'une mission de service public parmi lesquels figure au moins une personne morale de droit public.
« La maison des services publics fonctionne avec le concours d'agents mis à sa disposition par les personnes morales qui y participent ou d'agents détachés auprès de l'un des groupements mentionnés à l'article 25. Son responsable est désigné parmi les agents soumis au statut général des fonctionnaires.
« Les maisons des services publics sont créées par une convention entre les personnes morales mentionnées au premier alinéa, approuvée par le représentant de l'Etat dans le département.
« Cette convention définit le cadre géographique dans lequel la maison des services publics exerce son activité, les missions qui y seront assurées, les modalités de désignation de son responsable, les prestations qu'elle peut délivrer et les décisions que son responsable peut prendre dans le domaine de compétence de son administration ou signer sur délégation de l'autorité compétente. La convention prévoit également les conditions dans lesquelles les personnels relevant des personnes morales qui y participent exercent leurs fonctions. Elle règle les modalités financières et matérielles de fonctionnement de la maison des services publics.
« Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat. »
Par amendement n° 33, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de remplacer les deuxième, troisième et quatrième alinéas de cet article par quatre alinéas ainsi rédigés :
« La maison des services publics est créée par une convention qui est approuvée par le représentant de l'Etat dans le département.
« Cette convention définit les services publics qui y sont réunis, les missions qui leur sont confiées et le cadre géographique dans lequel elles sont assurées, les prestations susceptibles d'être délivrées, les conditions dans lesquelles les personnes morales parties à la convention mettent à la disposition de la maison des services publics des agents et des locaux, les conditions d'exercice par ces agents de leurs fonctions ainsi que les modalités financières et matérielles de fonctionnement de la maison des services publics.
« La convention fixe les modalités de désignation du responsable de la maison des services publics et définit les décisions qu'il peut prendre dans le domaine de compétence de l'administration dont il relève ou qu'il peut signer sur délégation de l'autorité compétente.
« Le responsable de la maison des services publics est désigné parmi les agents soumis aux dispositions de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Cet amendement est purement rédactionnel. Il reprend la rédaction de l'article 24 du projet de loi.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 33.
L'article 24 sur les maisons des services publics résulte d'une réflexion qui a été menée de manière approfondie. Sa rédaction a pris en compte, au terme d'une concertation avec l'ensemble des personnes concernées, les différents intérêts en présence, qu'il s'agisse des collectivités publiques, des services locaux, des agents ou des usagers.
L'équilibre auquel le Gouvernement est parvenu avec ce texte est différent de celui du projet de loi relatif à l'amélioration des relations entre les administrations et le public, particulièrement parce qu'il fait entrer davantage les maisons des services publics dans le droit public. En outre, la situation des agents qui relèvent du statut de la fonction publique est expressément protégée par le texte.
L'amendement n° 33 ne contribue pas à clarifier ces précisions introduites par le Gouvernement. C'est pourquoi ce dernier est défavorable à cet amendement, et il en sera de même pour les amendements n°s 34 et 35 présentés, respectivement, aux articles 25 et 26.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Je veux dire de nouveau à M. le ministre et à la Haute Assemblée que l'amendement n° 33 ne change pas une virgule sur le fond, et qu'il intègre bien l'ensemble des dispositions contenues dans l'article initial.
Nous avons seulement souhaité mettre l'accent sur l'aspect conventionnel et volontariste de la démarche visant à créer des maisons des services publics et sur la désignation des responsables de ces maisons.
En outre, cet amendement présente l'avantage de condenser et de fondre trois des alinéas de l'article 24 initial dans une rédaction qui est plus courte, peut-être plus lisible, et qui met l'accent sur l'aspect conventionnel du dispositig proposé. Mais, encore une fois, sur le fond, rien n'est changé.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 33.
M. Jacques Mahéas. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. S'agissant des maisons des services publics, un certain nombre d'inquiétudes ont été levées par rapport au projet de loi de votre prédécesseur, monsieur le ministre.
Comme je l'indiquais tout à l'heure à la tribune, un point essentiel pour le groupe socialiste est effectivement que ces maisons des services publics soient placées sous la responsabilité d'un fonctionnaire. Nous sommes donc très clairs de ce point de vue, et c'est vraiment à nos yeux la moindre des choses que de placer les maisons des services publics sous la responsabilité de personnes appartenant à la fonction publique.
Les modifications proposées par la commission des lois à l'article 24 nous paraissent donc en retrait par rapport au texte initial du Gouvernement. Sans vouloir vous faire de procès d'intention, monsieur le rapporteur, elles sont, nous semble-t-il, la porte ouverte aux emplois précaires, et c'est pourquoi nous pensons qu'un certain nombre d'interrogations demeurent.
Chacun prendra ses responsabilités, mais ce qui m'intéresse essentiellement, c'est que les maisons des services publics n'échappent pas à la responsabilité publique.
Nous voterons donc résolument contre cet amendement !
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Je souhaite attirer l'attention de la Haute Assemblée sur une précision qui pourrait lui avoir échappé et que l'amendement n° 33 a fait disparaître.
Il nous paraît indispensable de mentionner que les maisons des services publics fonctionnent avec le concours d'agents mis à leur disposition par les personnes morales qui y participent ou d'agents détachés auprès de l'un des groupements d'intérêt public qui sont mentionnés à l'article 25. Bien sûr, leur responsable est désigné parmi les agents soumis au statut général des fonctionnaires.
Ce sont ces notions de fonctionnement par mise à disposition ou détachement auprès des groupements visés à l'article 25 qu'il faut préserver, ce qui n'est pas le cas avec l'amendement n° 33.
M. Jacques Mahéas. Très bien !
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Voilà pourquoi le Gouvernement y est défavorable.
M. Robert Bret. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret. L'amendement n° 33 supprime la mise à disposition par les personnes morales parties à la convention des agents chargés du fonctionnement des maisons des services publics ainsi que l'obligation selon laquelle le responsable de ladite maison doit être un agent soumis au statut général des fonctionnaires.
Une telle suppression est grave, car ne seront plus ainsi garanties la compétence et la qualité des agents. De plus, un GIP ne pouvant recruter des personnels à durée indéterminée, l'adoption de cet amendement avaliserait la création d'emplois précaires. Nous voterons donc contre.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 33, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 24, ainsi modifié.

(L'article 24 est adopté.)

Article 25



M. le président.
« Art. 25. - Des groupements d'intérêt public dotés de la personnalité morale et de l'autonomie financière peuvent être constitués entre deux ou plusieurs des personnes morales mentionnées à l'article 24, dont au moins une personne morale de droit public, pour créer des maisons des services publics et exercer ensemble, pendant une durée déterminée, les activités prévues par cet article.
« La convention constitutive du groupement répond aux conditions fixées par les troisième et quatrième alinéas de l'article 24 et comporte les clauses fixées par un décret en Conseil d'Etat.
« Ces groupements sont soumis aux dispositions de l'article 21 de la loi n° 82-610 du 15 juillet 1982 d'orientation et de programmation pour la recherche et le développement technologique de la France. Ils sont soumis aux règles de la comptabilité publique et à celles du code des marchés publics.
« Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat. »
Par amendement n° 34, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de remplacer les trois premiers alinéas de cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Une ou des maisons des services publics peuvent être créées sous la forme d'un groupement d'intérêt public régi par les dispositions de l'article 21 de la loi n° 82-610 du 15 juillet 1982 d'orientation et de programmation pour la recherche et le développement technologique de la France et soumis aux règles de la comptabilité publique et du code des marchés publics, dans les conditions définies à l'article 24. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de simplification rédactionnelle, qui n'affecte en rien le fond du projet.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 34, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 25, ainsi modifié.

(L'article 25 est adopté.)

Article 26



M. le président.
« Art. 26. - Des conventions régies par les dispositions des troisième et quatrième alinéas de l'article 24 peuvent également être conclues par une personne morale chargée d'une mission de service public avec l'Etat, une collectivité territoriale ou une autre personne morale chargée d'une mission de service public, en vue de maintenir la présence du service public en milieu rural ou urbain. »
La parole est à M. Machet.
M. Jacques Machet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'article 26, qui doit contribuer au maintien du service public en milieu rural, a notament vocation à servir de cadre aux agences postales communales.
Si les dispositions préconisées apportent un élément de réponse au flou juridique qui caractérise la situation actuelle de ces agences, elles risquent de créer des difficultés délicates d'application sur le terrain. En effet, au sein des agences postales communales, les tâches d'accomplissement du service public postal et celles qui relèvent des services financiers ne sont aucunement séparées : il s'agit d'une source potentielle de distorsion de concurrence.
Je crois donc nécessaire, monsieur le ministre, à la faveur de l'examen de cet article 26, que vous précisiez si ces maisons des services publics auront ou non vocation à abriter des activités concurrentielles.
M. Emmanuel Hamel. Bonne question !
M. le président. Par amendement n° 35, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit l'article 26 :
« Une convention régie par les dispositions des deuxième, troisième et quatrième alinéas de l'article 24 peut être conclue par une personne morale chargée d'une mission de service public avec l'Etat, une collectivité territoriale ou une autre personne morale chargée d'une mission de service public afin de maintenir la présence d'un service public de proximité. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination et de simplification rédactionnelle.
M. le président. Monsieur le ministre, vous avez émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Effectivement, mais, monsieur le président, je souhaiterais répondre à M. Machet, qui est intervenu sur les agences postales.
Il s'agit d'un débat que nous reprendrons certainement ici à l'occasion de l'examen du projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire. Si ce dernier projet et celui que nous examinons aujourd'hui avaient été examinés en ordre inverse par la Haute Assemblée, je vous aurais déjà donné un certain nombre d'indications.
Je ne vais pas reprendre l'ensemble des dispositions qui permettent de passer des conventions entre une collectivité et un organisme chargé d'une mission de service public pour maintenir ce dernier et qui pourraient effectivement s'appliquer dans un très grand nombre de cas entre une commune et La Poste. Je préciserai seulement que deux types d'inquiétudes peuvent se manifester.
La première concerne une question qui ne m'a pas été posée et que j'évoquerai donc rapidement.
Compte tenu de l'évolution du réseau rural, cette disposition ne va-t-elle pas inciter La Poste à exercer un chantage sur les petites communes, en menaçant ces dernières de perdre leur agence si elles ne paient pas, en quelque sorte ? C'est, certes, une vision un peu pessimiste des choses.
Je répondrai en disant que la consistance globale du réseau sera fixée par les contrats d'objectifs que La Poste, en l'occurrence - ce peut être un autre grand opérateur de réseau - passera avec l'Etat.
Nous savons bien - il ne faut pas l'oublier - que tous les points postaux ruraux ne pourront pas être maintenus en l'état et que des agences postales fonctionnent seulement quelques minutes par jour.
Dans l'exercice de fonctions antérieures, j'ai eu à étudier ces problèmes. Nous avons tenté diverses expériences pour essayer de maintenir ces agences par le biais de polyvalences diverses, pour nous apercevoir qu'elles se soldaient, en général, par des échecs, et que la seule polyvalence susceptible d'ancrer une agence postale là où l'activité proprement postale était trop faible résidait dans une certaine synergie avec la mairie de la commune. Il faut voir cela de manière positive.
Il est sûrement possible, au contraire, de signer une convention équilibrée dont le texte type est actuellement en cours de discussion avec l'Association des maires de France et la Fédération nationale des maires ruraux.
Chacun apportant sa part, il devient possible de maintenir des emplois, même statutaires, là où auparavant la mairie et La Poste, très péniblement, offraient un emploi de quelques heures par semaine. Soyons positifs !
Le second type d'inquiétude concerne la concurrence que La Poste pourrait faire aux organismes bancaires en général. Cela a déjà fait l'objet d'un débat dans les années 1992-1993.
Le Crédit agricole, par exemple, pourrait s'inquiéter d'un éventuel renforcement des agences postales. Soyons clairs : renforcées ou non, les activités financières de La Poste se dérouleront dans les conditions habituelles ; la création d'une agence postale communale ne les modifiera en rien. La possibilité pour une commune de passer convention ne modifiera pas les conditions d'exercice des activités financières de La Poste. Le respect des règles de concurrence, s'agissant des activités dans lesquelles elles pourraient s'appliquer, ne pâtira pas plus du fonctionnement d'une agence postale communale quelques minutes par jour au service des habitants que du fonctionnement actuel des agences postales.
L'existence d'un cadre juridique et d'une convention contrôlable devrait plutôt être considérée comme un élément de clarification du fonctionnement de ces mini-services postaux que comme une source d'inquiétude pour le monde bancaire.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 35, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 26 est ainsi rédigé.

TITRE V

DISPOSITIONS DIVERSES

Article 27



M. le président.
« Art. 27. - I. - Les articles 1er à 4, 6 à 8, 10, 14, 16 à 22 et 28 de la présente loi sont applicables dans les territoires d'outre-mer aux administrations de l'Etat et à leurs établissements publics.
« Pour leur application dans les territoires d'outre-mer, les références à la loi du 3 janvier 1979 contenues dans les articles 6 et 8 sont remplacées par les références aux dispositions applicables localement en matière d'archives.
« II. - Les articles 1er à 10, 14, 16 à 22, 24 à 26 et 28 de la présente loi sont applicables dans la collectivité territoriale de Mayotte. »
Sur cet article, je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 36, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit cet article :
« I. - Les articles 4, 6 à 8 et 28 ainsi que les articles du titre II à l'exception de l'article 15 sont applicables en Nouvelle-Calédonie et dans les territoires d'outre-mer aux administrations de l'Etat et à ses établissements publics. Pour leur application en Nouvelle-Calédonie et dans les territoires d'outre-mer, les références à la loi n° 79-18 du 3 janvier 1979 sur les archives sont remplacées par les références aux dispositions applicables localement en matière d'archives.
« L'article 10 est applicable en Nouvelle-Calédonie et dans les territoires d'outre-mer.
« II. - Les articles 4, 6 à 10, 14, 24 à 26 et 28 ainsi que les articles du titre II à l'exception de l'article 15 sont applicables dans la collectivité territoriale de Mayotte. »
Par amendement n° 46, le Gouvernement propose :
A. - Dans le premier alinéa du I de cet article, après les mots : « sont applicables », d'insérer les mots : « en Nouvelle-Calédonie et ».
B. - Dans le second alinéa du même paragraphe, après les mots : « Pour leur application », d'insérer les mots : « en Nouvelle-Calédonie et ».
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 36.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Cet amendement vise à réécrire l'article 27 pour tenir compte du fait que la Nouvelle-Calédonie n'est plus un territoire d'outre-mer et de la suppression des articles 2, 3 et 5.
M. le président. La parole est à M. le ministre, pour présenter l'amendement n° 46 et pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 36.
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Si le Gouvernement reconnaît qu'il y a lieu d'adapter la rédaction au nouveau statut de la Nouvelle-Calédonie, il ne peut accepter les modifications proposées par la commission, qui tire les conséquences des suppressions auxquelles elle a procédé. Il émet un avis défavorable sur l'amendement n° 36 et demande au Sénat d'adopter son amendement n° 46.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 36, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 27 est ainsi rédigé et l'amendement n° 46 n'a plus d'objet.

Article 28



M. le président.
« Art. 28. - Les articles 14 et 16 à 22 entreront en vigueur le premier jour du septième mois suivant celui de la promulgation de la présente loi. - (Adopté.)

Vote sur l'ensemble



M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Mahéas, pour explication de vote.
M. Jacques Mahéas. Il aurait été concevable que, dans cet hémicycle, un accord général pût se dessiner sur ce texte.
Bien sûr, le texte issu des travaux du Sénat contient des éléments qui sont pour nous des sources de satisfaction parce qu'ils vont dans le sens d'une plus grande transparence : levée de l'anonymat, amélioration des procédures, instauration de relations différentes entre l'administré et les administrations. Nous relevons également une avancée en ce qui concerne les pouvoirs du médiateur.
Il existe cependant deux points de divergence majeurs qui nous empêcheront de voter ce texte en l'état.
Le premier a trait à la cohérence du texte, qui se trouve gravement affectée par le déplacement du dispositif de l'article 1er.
Le deuxième point de divergence concerne les maisons des services publics. Les derniers amendements qui ont été adoptés à leur sujet par le Sénat modifient sensiblement la philosophie qui les sous-tend.
Compte tenu de cette coexistence de divers éléments positifs et de deux points extrêmement négatifs, le groupe socialiste s'abstiendra sur le texte tel qu'il résulte des travaux du Sénat. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret. Le groupe communiste républicain et citoyen s'apprêtait à voter ce projet de loi, qui vise à permettre aux services publics de répondre mieux encore aux besoins des usagers.
Je déplore profondément qu'aient été votés par la majorité sénatoriale de droite des amendements qui privent ce projet de loi de toute véritable force et qui constituent au contraire un facteur de régression.
C'est pourquoi nous nous abstiendrons.
M. le président. Monsieur Bret, je vous remercie d'avoir précisé : la majorité sénatoriale « de droite ». (Sourires.) Ce serait effectivement une nouveauté si elle était de gauche ! Mais cela peut arriver !
M. Jacques Mahéas. En effet !
M. Robert Bret. Pour ceux qui suivent nos débats, il peut être intéressant de le préciser, monsieur le président.
M. le président. Je pense que tout le monde est maintenant au courant ! (Nouveaux sourires.)
La parole est à M. Trucy.
M. François Trucy. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le texte que nous venons d'examiner n'est pas novateur dans la mesure où il reprend pour une grande part les dispositions du projet de loi relatif à l'amélioration des relations entre les administrations et le public, qui avait été présenté par le gouvernement d'Alain Juppé.
En 1997, l'examen par le Parlement de ce projet de loi intervenait dans le cadre d'un mouvement de réforme de l'Etat aussi ambitieux que mal compris. Les objectifs de cette réforme avaient pourtant été clairement fixés par le Premier ministre en juillet 1995.
Le changement de gouvernement n'a pas entamé la nécessité de réformer l'Etat, car une telle évolution est un besoin évident.
Ce qui a changé, c'est l'envergure de cette politique et la détermination à prendre les mesures, parfois difficiles mais indispensables, propres à moderniser véritablement toute l'organisation administrative de notre pays.
Pourtant, le présent projet de loi contient des dispositions intéressantes. Les améliorations apportées par le rapporteur, M. Amoudry, sont appréciables et reflètent un très gros travail.
Ainsi, contrairement aux inquiétudes exprimées par certains orateurs précédents, les maisons des services publics définies au titre IV du texte constituent un dispositif important pour les administrés. Assurant une administration de proximité polyvalente, ces structures offrent des aspects pratiques certains.
Leur implantation facilitera les démarches des usagers mais jouera aussi un rôle essentiel en matière d'aménagement du territoire.
Sauf à vous avoir mal écouté à l'instant, monsieur le ministre, dans votre réponse à M. Machet, j'ai trouvé un peu pessimiste votre vision de cette question. En effet, dans notre esprit, il ne s'agissait nullement de n'envisager qu'un dialogue entre une mairie et une poste. Les expériences réalisées dans certains départements ont bien montré qu'on pouvait y associer non seulement d'autres services publics, mais quelquefois aller plus loin, comme l'exemple de quelques pays européens le prouve.
Au-delà des mesures envisagées dans ce projet de loi, c'est toute une réforme de fond qui doit être engagée pour moderniser notre administration.
Les rapports récurrents et désagréables à entendre font en effet état de sureffectifs dans la fonction publique, chiffrés à 500 000 agents au minimum, ce qui représente un coût de l'ordre de 150 milliards de francs, là encore au minimum.
Même si ces chiffres méritent sans aucun doute d'être affinés, le constat est unanime : le poids considérable, tant humain que financier, de la fonction publique dans notre pays finit par constituer aujourd'hui un handicap pour sa propre évolution.
M. Jacques Mahéas. Et où supprimez-vous des fonctionnaires ?
M. François Trucy. Réformer l'Etat est impératif, et c'est un impératif constant.
Outre qu'elle appelle une volonté politique ferme et courageuse dans sa mise en oeuvre, cette réforme doit notamment repenser l'efficacité des agents en prévoyant une plus grande responsabilisation individuelle de ceux-ci - ils y sont favorables - et des incitations financières - je suis certain qu'ils y seraient également favorables.
Il est aujourd'hui indispensable de promouvoir, au sein du secteur public, une culture entièrement nouvelle et de mettre véritablement en oeuvre une politique de rémunération et d'avancement qui soit davantage fondée sur le mérite et le travail.
Pour éviter la sclérose, la fonction publique doit aussi reconsidérer l'organisation de ses propres structures, réduire le nombre des niveaux hiérarchiques, stabiliser, voire réduire le nombre de ses personnels.
Pourquoi les politiques de gestion des ressources humaines resteraient-elles éternellement l'apanage du secteur privé ?
Les missions doivent être redéfinies et un redéploiement des effectifs doit être organisé en conséquence.
Personne ne remet en cause la véritable richesse que constitue la fonction publique, la qualité et l'atout qu'elle représente pour notre société. Encore faut-il mieux utiliser cette richesse et cet atout en sachant adapter la fonction publique !
Voilà les quelques remarques que je tenais à faire au nom du groupe des Républicains et Indépendants, qui votera ce texte tel qu'il a été amendé par la Haute Assemblée.
M. le président. La parole est à M. Machet.
M. Jacques Machet. A l'issue de ces quelques heures de discussion, je crois pouvoir dire que ce projet de loi ressortit à ce qu'il est convenu d'appeler les « petits textes ». C'est pourtant par l'addition de petites mesures, portant sur ce qui peut apparaître comme des détails, que l'on réussit.
Le milieu rural est aujourd'hui gravement préoccupé par la désertification dont il est l'objet. Or il me semble que ce projet de loi, même s'il mérite d'être encore amélioré, est susceptible d'apporter une pierre appréciable à la lutte contre la désertification rurale. C'est pourquoi les sénateurs du groupe de l'Union centriste le voteront.
M. le président. La parole est à M. Gérard.
M. Alain Gérard. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, lancée en juillet 1995 par Alain Juppé et voulue ardemment par le Président de la République, la réforme de l'Etat trouve dans ce texte un début de consécration législative puisque ce projet de loi vise à améliorer les relations entre les citoyens et les administrations.
Le but de la réforme de l'Etat est simple : l'Etat doit être plus proche, plus efficace et plus moderne si l'on veut éviter que l'administration ne soit une entrave à l'initiative privée et ne décourage ceux qui ont besoin d'y recourir.
En effet, les relations entre les administrations et les usagers sont devenues extrêmement complexes. Les citoyens demandent toujours plus à l'Etat et, pourtant, leur administration, souvent, ne les satisfait pas. Cela tient à plusieurs raisons, auxquelles la complexité des procédures n'est pas étrangère.
Aussi, nous ne pouvons que nous réjouir que le Gouvernement ait repris un certain nombre d'articles du projet de loi « Perben » dans la rédaction adoptée en 1997 par la Haute Assemblée.
Il en est ainsi, notamment, des dispositions relatives à l'amélioration des procédures administratives, du régime des décisions prises par les autorités administratives, de celles qui concernent le médiateur de la République et les maisons des services publics.
Sur ce dernier point, monsieur le ministre, il faudra veiller très précisément aux conséquences des décisions d'implantation de ces maisons des services publics, qui ne doivent en aucun cas contribuer à accélérer la désertification de nos cantons.
De même, les maisons des services publics devront fonctionner dans le respect des règles de la concurrence, sans porter tort aux services proposés par les acteurs économiques du monde rural.
Par ailleurs, nous ne pouvons que nous féliciter des amendements adoptés par le Sénat qui tendent à supprimer les dispositions de l'article 2 dépourvues de tout contenu normatif, ainsi que celles de l'article 5 qui rendaient obligatoire la consultation du public sur les opérations de travaux publics.
A cet égard, il était en effet déraisonnable de soumettre l'ensemble des maîtres d'ouvrage à une obligation nouvelle sans en mesurer au préalable les conséquences concrètes.
M. le rapporteur a eu raison de souligner à ce sujet qu'une formulation trop imprécise du droit à la transparence peut aller à l'encontre de l'efficacité de l'action publique et de l'amélioration du service rendu aux citoyens.
Notre administration a toujours été un modèle pour l'étranger, et les agents publics montrent quotidiennement leur dévouement au service public et aux citoyens.
M. Emmanuel Hamel. Très bien !
M. Alain Gérard. Mais l'administration doit évoluer et s'adapter.
Ce texte contribue à cette nécessaire modernisation. C'est pourquoi le groupe du Rassemblement pour la République votera ce projet de loi tel qu'il ressort des travaux de la Haute Assemblée. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Pelletier.
M. Jacques Pelletier. Je n'étais pas favorable à la suppression des premiers articles qui a été décidée par notre assemblée. Je pense que cette suppression a rompu, au moins en partie, la cohérence du texte présenté par le Gouvernement.
Cela dit, la grande majorité des articles de ce projet de loi n'ont pas été modifiés, spécialement ceux qui concernent le médiateur de la République, une fonction qui m'est chère.
M. Emmanuel Hamel. On le comprend !
M. Jacques Pelletier. Ces articles ont même été améliorés par les amendements de la commission.
Globalement, ce texte est susceptible de faciliter la vie de nos concitoyens. Au demeurant, il pourra encore être amélioré au cours des lectures ultérieures. N'est-ce d'ailleurs pas l'utilité de la navette ?
Quoi qu'il en soit, à ce stade du travail parlementaire, le groupe du RDSE votera ce texte, malgré la suppression des premiers articles, que j'ai personnellement désapprouvée. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Je voudrais d'abord, en quelques mots, répondre à M. Trucy, duquel je me suis, semble-t-il, mal fait comprendre.
Je n'ai pas dit que les administrations de proximité polyvalentes étaient sans intérêt ; il en existe beaucoup d'intéressantes. Je voulais simplement indiquer qu'il ressort clairement qu'un seuil de fonctionnement viable peut être atteint lorsqu'on met en commun, dans les petites communes, les activités de gestion municipales et celles de La Poste. Il existe d'autres moyens, mais celui-ci est certainement efficace.
S'agissant du débat qui s'achève, je ne peux que me féliciter de la volonté de travail approfondi et précis qui s'est, comme d'habitude, manifestée ici et du climat dans lequel se sont déroulés les travaux de la Haute Assemblée.
J'ai noté avec intérêt que, sur les diverses travées de cette assemblée, aucune voix ne s'élevait contre la volonté de moderniser l'Etat.
Cette modernisation de l'Etat se fera avec ses agents, qu'il ne faut certainement pas critiquer de manière outrancière, voire même « sataniser », mais qui ont, je le rappelle, l'ardente et permanente obligation de chercher à mieux faire.
Quant à la réforme de l'Etat, n'engageons pas de querelles sur le jour où elle a commencé : elle a commencé avec l'Etat et elle ne cessera jamais puisque l'Etat existera toujours. Je souhaite que l'Etat soit non pas plus modeste, mais plus moderne.
L'essentiel du projet de loi qui a été soumis à votre Haute Assemblée a, si je puis dire, subi l'épreuve avec succès. Toutefois, un certain nombre de modifications ne peuvent pas satisfaire le Gouvernement. En effet, il s'agit de modifications substantielles qui affectent profondément la portée de ce texte, et dans un sens qui me paraît plutôt restreindre la volonté du Gouvernement de moderniser l'Etat d'assurer et un meilleur respect du citoyen dans ses relations avec l'administration.
J'évoquerai très brièvement les modifications essentielles.
La suppression de l'article 1er fait disparaître l'aspect unificateur pour ce que l'on appelle les services publics administratifs.
La suppression des articles 2 et 3 gomme complètement les dispositions concernant l'accès au droit et la codification.
En ce qui concerne l'article 10, même si je reconnais qu'il faut travailler davantage et préciser les modalités de cette transparence vis-à-vis du public pour les organismes de statuts divers qui reçoivent de l'argent public, supprimer complètement cet article me paraît regrettable, et limiter son champ d'application aux seules associations est excessif.
S'agissant, enfin, des maisons des services publics, je dirai avec la même franchise, que si l'on ne précise pas leur fonctionnement et la façon dont sera composé et traité leur personnel, nous risquons de rendre cette expérience stérile ou à tout le moins d'aboutirà de graves difficultés.
Je sais que le parcours parlementaire de ce texte n'est pas terminé, et que nous aurons l'occasion, par la suite, d'essayer de rapprocher les points de vue. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Je souhaite simplement, en écho à la déclaration de M. le ministre, préciser que nous n'avons pas du tout demandé la suppression de l'article 1er. Il s'agit simplement de le déplacer et de l'insérer à un endroit où il est ensuite fait référence aux autorités administratives, alors que, dans les articles qui suivent l'article 1er initial, il est question de la CNIL, de la CADA, et non pas de la définition des autorités administratives.
Par conséquent, il faut voir dans ce déplacement une mesure non pas fondamentale, mais d'ajustement et de cohérence.
Par ailleurs, en ce qui concerne les articles 2 et 3, reconnaissez que la commission des lois a travaillé sur la base du droit et qu'elle a tenu à ce que ne figure pas dans la loi des dispositions qui ne seraient pas applicables.
Nous comprenons les mesures proposées. Nous comprenons également, et nous les partageons, les objectifs du Gouvernement d'organiser un accès simple aux règles du droit et de procéder à la codification des textes législatifs. Mais nous pensons que cette terminologie n'a pas sa place dans la loi et que la réponse réside dans un engagement politique du Gouvernement.
Pour le reste, vous avez pu constater que nous avons travaillé assidûment et avec beaucoup de sérieux, comme à notre habitude, d'ailleurs, pour améliorer ce texte et faire en sorte qu'il participe de votre ambition de continuer à réformer l'Etat, à le moderniser et à simplifier les relations avec les citoyens. Tel est bien, en tout cas, le souci de la commission des lois. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)

5

DÉPÔT D'UN PROJET DE LOI

M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre un projet de loi relatif à l'élection des sénateurs.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 260, distribué et renvoyé à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

6

DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI

M. le président. J'ai reçu de Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Pierre Biarnès, Guy Penne et les membres du groupe socialiste et apparentés une proposition de loi relative aux circonscriptions électorales pour l'élection des membres du Conseil supérieur des Français de l'étranger.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 262 distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

7

DÉPÔT D'UNE RÉSOLUTION

M. le président. J'ai reçu, en application de l'article 73 bis, alinéa 8, du règlement, une résolution, adoptée par la commission des affaires économiques et du Plan, sur la proposition de règlement (CE) du Conseil portant organisation commune du marché vitivinicole (n° E 1134).
Cette résolution sera imprimée sous le n° 257 et distribuée.

8

DÉPÔT D'UNE PROPOSITION
DE RÉSOLUTION

M. le président. J'ai reçu de M. Paul Masson une proposition de résolution, présentée en application de l'article 73 bis du règlement, sur le projet de décision du Conseil déterminant les bases juridiques pour l'acquis de Schengen qui a été révisé à la suite de la réunion du groupe « Acquis de Schengen » des 14 et 15 mai (n° E 1219).
La proposition de résolution sera imprimée sous le n° 263, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

9

TEXTE SOUMIS EN APPLICATION
DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION

M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- proposition de règlement (CE) du Conseil portant ouverture et mode de gestion de contingents tarifaires communautaires autonomes pour certains produits de la pêche.
Ce texte sera imprimé sous le n° E 1226 et distribué.

10

RENVOI POUR AVIS

M. le président. J'informe le Sénat que le projet de loi (n° 220, 1998-1999), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale dont la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale est saisie au fond, est renvoyé pour avis, à sa demande, à la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.

11

DÉPÔT DE RAPPORTS

M. le président. J'ai reçu de M. Patrice Gélard un rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, relative au pacte civil de solidarité (n° 108, 1998-1999).
Le rapport sera imprimé sous le n° 258 et distribué.
J'ai reçu de M. Xavier de Villepin un rapport fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale (n° 250, 1998-1999), autorisant la ratification du traité d'Amsterdam modifiant le traité sur l'Union européenne, les traités instituant les Communautés européennes et certains actes connexes.
Le rapport sera imprimé sous le n° 259 et distribué.

12

DÉPÔT D'UN AVIS

M. le président. J'ai reçu de M. Philippe Marini un avis présenté au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation sur la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, relative au pacte civil de solidarité (n° 108, 1998-1999).
L'avis sera imprimé sous le n° 261 et distribué.

13

ORDRE DU JOUR

M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au jeudi 11 mars 1999, à neuf heures trente et, éventuellement, à quinze heures :
1. Discussion des conclusions du rapport (n° 125, 1998-1999) de M. André Jourdain, fait au nom de la commission des affaires sociales, sur sa proposition de loi (n° 394, 1997-1998) relative au multisalariat en temps partagé.

Aucun amendement n'est plus recevable.
2. Discussion des conclusions du rapport (n° 208, 1998-1999) de M. Jean-Paul Delevoye, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur la proposition de loi (n° 303, 1996-1997) de MM. Jacques Oudin, Charles Ceccaldi-Raynaud, Charles de Cuttoli, Luc Dejoie, Jean-Paul Delevoye, Patrice Gélard, Lucien Lanier, René-Georges Laurin, Paul Masson, Jean-Pierre Schosteck et Alex Türk visant à modifier l'article L. 255 du code électoral.
Aucun amendement n'est plus recevable.

Délai limite pour les inscriptions de parole
et pour le dépôt des amendements

Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification du traité d'Amsterdam, modifiant le traité sur l'Union européenne, les traités instituant les Communautés européennes et certains actes connexes (n° 250, 1998-1999) :
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 15 mars 1999, à dix-sept heures.
Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, relative au pacte civil de solidarité (n° 108, 1998-1999) :
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mardi 16 mars 1999, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 16 mars 1999, à dix-sept heures,
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.

(La séance est levée à dix-huit heures cinquante.)

Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON





ERRATUM
au compte rendu intégral de la séance du 2 mars 1999
CODE DE JUSTICE MILITAIRE

Page 1203, 1re colonne, dans le texte proposé par l'amendement n° 25 visant à insérer un article additionnel après l'article 27, à la cinquième ligne du deuxième alinéa :
Au lieu de : « le tribunal et le jury »,
Lire : « le tribunal proprement dit et le jury ».

NOMINATION DE RAPPORTEURS
COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES,
DE LA DÉFENSE ET DES FORCES ARMÉES

M. André Rouvière a été nommé rapporteur du projet de loi n° 239 (1998-1999) autorisant la ratification des amendements à la convention portant création de l'Organisation internationale de télécommunications maritimes par satellites (INMARSAT) relatifs à la création de l'Organisation internationale de télécommunications mobiles par satellites (ensemble une annexe).

COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

M. Louis Boyer a été nommé rapporteur de la proposition de loi n° 184 (1998-1999) de M. Serge Mathieu visant à améliorer le système de prévention et de réparation des risques professionnels.
M. Charles Descours a été nommé rapporteur de la proposition de loi n° 218 (1998-1999) de M. Jean Arthuis visant à instituer les plans d'épargne retraite.
M. Lucien Neuwirth a été nommé rapporteur de sa proposition de loi n° 223 (1998-1999) tendant à favoriser le développement des soins palliatifs et de l'accompagnement.

COMMISSION DES FINANCES

M. Denis Badré a été nommé rapporteur de la proposition de résolution n° 233 (1998-1999) de M. Denis Badré présentée en application de l'article 73 bis du règlement, sur la proposition de directive du Conseil modifiant, en ce qui concerne le taux normal, la directive 77/388/CEE relative au système commun de la taxe sur la valeur ajoutée (n° E-1193).