Séance du 24 mars 1999






ÉVÉNEMENTS AU KOSOVO

M. le président. Mes chers collègues, je vous indique qu'à l'issue de sa réunion la conférence des présidents a fait part au ministre des relations avec le Parlement de son souhait que le Gouvernement fasse une déclaration concernant les événements qui se déroulent actuellement au Kosovo.
Mme Hélène Luc. Je demande la parole pour un rappel au règlement.
M. le président. La parole est à Mme Luc.
Mme Hélène Luc. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, à l'heure où je prends la parole, l'OTAN s'apprête à bombarder le territoire de la Fédération yougoslave.
Il est encore temps, du moins je m'efforce de le croire, de faire triompher une démarche de paix sur une démarche de guerre, de s'opposer résolument à toute frappe de l'OTAN, pour éviter de nouvelles souffrances à des enfants, à des femmes, à des populations déjà tant meurtris.
Cette décision de l'OTAN brise la légalité internationale. Ce serait la première fois depuis la Seconde Guerre mondiale qu'un pays européen serait bombardé sans résolution du Conseil de sécurité de l'ONU.
De toute évidence, les Etats-Unis s'affirment comme les gendarmes de l'Europe, avec leur bras armé, l'OTAN. Les Etats-Unis mettent en cause, fondamentalement, le rôle de l'ONU.
Notre attitude à l'égard des autorités de Belgrade est sans ambiguïté : nous condamnons sans réserve la politique nationaliste des autorités yougoslaves. Elles ont entraîné leur pays dans une guerre civile qui risque à tout moment d'enflammer les Balkans. Elles portent une lourde responsabilité dans la crise du Kosovo, en alimentant par leur attitude la radicalisation du courant indépendantiste kosovar. Le nationalisme nourrit en effet le nationalisme.
Madame la ministre, nous avons soutenu toutes les initiatives de la France visant à faire reculer la haine et les violences nationalistes dans cette région. Nous avons approuvé les efforts déployés par le Gouvernement français et par le Président de la République en faveur d'une solution politique, notamment dans le cadre de la conférence de Rambouillet.
Nous avons condamné dès le début la pression militaire exercée par l'OTAN, plaçant la force comme moyen essentiel, voire unique, du rétablissement de la paix.
Nous contestons fondamentalement cette démarche.
Ce n'est certainement pas en ajoutant la guerre à la guerre que l'on créera les conditions de la paix. Cette intervention de l'OTAN renforcerait les extrémismes au détriment des forces pacifistes existant dans chaque camp.
Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen désapprouvent le choix de la France de participer à d'éventuelles opérations militaires. Ce regret est d'autant plus vif que cette attitude contredit la volonté d'une solution politique affirmée par les autorités françaises jusqu'alors.
Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen estiment qu'il est nécessaire et urgent de réunir, dans le prolongement de la conférence de Rambouillet, une conférence de tous les pays qui le souhaiteraient, placée sous l'égide de l'OSCE, l'organisation pour la sécurité et la coopération en Europe.
Dans l'immédiat, le groupe communiste républicain et citoyen demande, comme je l'ai proposé ce matin en conférence des présidents, l'organisation d'un débat au Parlement afin que ce dernier soit saisi, conformément à l'esprit de la Constitution, de l'engagement des forces armées de la France dans un conflit international.
M. le président. Mme Luc vient de renouveler en séance la question qui a été posée au Gouvernement à l'issue de la conférence des présidents.
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, M. le Premier ministre m'a demandé de vous confirmer que le ministre des affaires étrangères, M. Hubert Védrine, et le ministre de la défense, M. Alain Richard, se tiennent à la disposition des commissions des affaires étrangères et de la défense des deux assemblées pour les informer dans les meilleurs délais.
M. le ministre de la défense a d'ailleurs pris contact ce matin avec les présidents de ces commissions, afin qu'une date puisse être trouvée dans les tout prochains jours pour qu'il puisse être entendu par les représentants de la nation.
Par ailleurs, je suis en mesure de vous annoncer que M. le Premier ministre entend informer le Parlement, comme Mme Luc vient d'en exprimer le souhait, par une déclaration du Gouvernement suivie d'un débat, dès ce vendredi.
Cette réunion du Parlement traduit la volonté du Gouvernement d'associer étroitement les élus de la nation et de renforcer les droits et les responsabilités du Parlement, conformément aux engagements pris par M. le Premier ministre dans sa déclaration de politique générale.
Mme Hélène Luc. Je vous remercie, madame la ministre.
M. le président. Monsieur le président de la commission des affaires étrangères, pouvez-vous nous confirmer ce que vient d'annoncer Mme le ministre ? Des accords sont-ils passés pour une date de convocation de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées ?
M. Xavier de Villepin, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. J'ai en effet reçu un appel de M. le ministre de la défense ce matin, après la conférence des présidents. M. le ministre m'a confirmé qu'il viendrait devant notre commission la semaine prochaine.
Je lui ai fait part, à cette occasion, de l'inquiétude de nombreux parlementaires de tous les groupes politiques du Sénat, et de notre souci commun d'être tenus au courant des opérations, comme nous l'avions été durant la guerre du Golfe.
Il est très important, monsieur le président - je sais que c'est votre opinion - que nous soyons informés au mieux de ce qui se passe, étant donné les risques encourus par les pilotes français qui vont participer aux opérations.
M. le président. Madame le ministre, vous avez indiqué que M. le Premier ministre ferait une déclaration devant le Parlement. J'imagine aisément que soit le ministre de la défense, soit le ministre des affaires étrangères viendra devant le Sénat. (Mme le ministre fait un signe d'assentiment.) Je vais donc être amené à convoquer la conférence des présidents pour préparer ce débat.

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