Séance du 18 mai 1999







M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Pastor pour explication de vote.
M. Jean-Marc Pastor. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voici arrivés à la fin de l'examen, en nouvelle lecture, d'un texte important, sur lequel nous aurons, à l'évidence, à revenir dans les mois qui viennent puisque son article 65 fait obligation au Gouvernement de présenter un rapport au Parlement.
Tout ce qui concerne la fiscalité, les droits à produire, tout ce qui est lié à la gestion des critères de qualité devra donc faire l'objet d'un débat important au sein de cet hémicycle.
Le dépôt d'un rapport amènera également la profession à participer à l'élaboration d'un texte à nos yeux fondamental.
A l'issue de la première lecture, notre groupe s'était abstenu, en soulignant les points positifs résultant du débat au sein de notre Haute Assemblée mais aussi un certain nombre de contradictions qui nous conduisaient à ne pas pouvoir accepter la totalité du texte.
Aujourd'hui, les choses se présentent de façon différente, en raison de la manière dont s'est déroulé le débat.
Tout d'abord, je note que beaucoup moins d'amendements ont été déposés. Cela signifie qu'indirectement notre assemblée a accepté bon nombre de modifications apportées par l'Assemblée nationale. On sent donc un rapprochement entre les deux assemblées.
Je relève que ne sont remis en cause ni les CTE, ni cette forme d'agriculture contractuelle proposée aujourd'hui par cette loi d'orientation, ni les éléments essentiels qui constituent les critères de qualité.
Le seul point d'achoppement porte sur la maîtrise des structures foncières, car, là, deux conceptions de l'agriculture s'affrontent.
En guise de conclusion, permettez-moi une image, mes chers amis : évitez de jeter des lapins libres dans un champ libre où il y aurait, demain, des renards libres ! Dans un an, je vous le demande, qui gagnerait ? (Exclamations sur les travées du RPR.)
S'agissant du foncier, méfions-nous de la trop grande liberté, car on sait très bien à quoi elle aboutit : c'est le plus fort qui gagne. Et, dans ce cas, le débat sur l'installation, nous ne l'aurions même plus !
Voilà ce sur quoi nous nous opposons vraiment et qui fait que, comme en première lecture, nous nous abstiendrons.
M. Hilaire Flandre. Je suis tout à fait d'accord avec vous, mon cher collègue !
M. le président. La parole est à M. Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cette deuxième lecture, bien que brève, n'aura pas été inutile, ne serait-ce que parce qu'un certain nombre d'amendements ont été votés à l'unanimité.
Cependant, comme en première lecture, la majorité sénatoriale a jugé bon tout à la fois d'affaiblir les aspects les plus novateurs de ce projet de loi et de le compléter, par ailleurs, d'un certain nombre de mesures, notamment d'ordre fiscal, qui auraient pour effet, à mon avis, d'accélérer les inégalités entre les exploitations et de favoriser la concentration des activités sur certaines parties du territoire.
Le texte issu des travaux du Sénat s'inscrit davantage dans une perspective d'anticipation et d'adaptation de notre politique agricole aux critères libéraux développés par la Commission de Bruxelles.
Je ne vois pas, en effet, dans les propositions de notre rapporteur, ni même dans les propos tenus par nos collègues de la majorité sénatoriale, la moindre critique sur le modèle d'agriculture productiviste qui a prévalu pendant près de quarante ans et qui nous conduit aujourd'hui à déplorer la disparition à une vitesse accélérée des petites et moyennes exploitations mais aussi la baisse de pouvoir d'achat des agriculteurs et des retraités agricoles.
J'observe, de la même manière, que tout à la fois vous souhaitez, mes chers collègues, favoriser l'installation des jeunes, en écartant par la même occasion ceux qui n'ont pas d'origine agricole, et soutenir les agriculteurs sur le départ, alors qu'à aucun moment je ne vous ai entendus évoquer ne serait-ce que l'ébauche d'une éventuelle modification des règles du jeu économique, qui constituent pourtant le coeur des problèmes que rencontrent les intéressés.
En quelque sorte, vous effleurez les véritables questions sans jamais oser les traiter au fond et, finalement, vous contribuez à mettre en place une agriculture à deux vitesses.
En conséquence, notre groupe renouvellera ce soir son vote défavorable de la précédente lecture, même si les velléités de la majorité sénatoriale ont été, cette fois, plus atténuées.
M. le président. La parole est à M. César.
M. Gérard César. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voici arrivés au terme de l'examen de ce projet de loi en nouvelle lecture.
Après que la majorité plurielle de l'Assemblée nationale eut remis en cause, conformément à sa position en commission mixte paritaire, l'essentiel des avancées que notre Haute Assemblée avait obtenues lors de l'examen de ce projet de loi en première lecture, et sur lesquelles la quasi-unanimité des organisations agricoles avaient émis un avis favorable, nous avons dû, de nouveau, sous l'impulsion de notre éminent rapporteur, notre collègue Michel Souplet, compléter et renforcer le dispositif proposé.
Les modifications que nous avons apportées aujourd'hui étaient également indispensables après les décisions prises à Berlin, le 26 mars dernier, afin d'adapter le monde agricole français au nouveau contexte européen et mondial. Nécessaires, en effet, car, en s'engageant dans un système de modulation des aides et en brouillant la frontière entre le financement communautaire et le financement national, le Gouvernement a ouvert la porte aux évolutions qu'il aurait dû contrecarrer avec ce projet de loi d'orientation.
Dans la perspective du lancement des négociations sur l'Organisation mondiale du commerce et l'élargissement de l'Union européenne aux pays d'Europe centrale et orientale, le contrat territorial d'exploitation du Gouvernement affaiblit les chances de pérennité et de développement de notre agriculture.
Le groupe du Rassemblement pour la République votera ce texte tel qu'il vient d'être amendé, car il montre les voies et les moyens pour que notre agriculture réponde aux enjeux européens et mondiaux auxquels elle est confrontée.
Ces voies et moyens, pour répondre à notre sympathique collègue Jean-Marc Pastor, avaient fait l'objet d'un courrier de notre groupe à l'attention des organisations professionnelles et des responsables des collectivités locales, c'est-à-dire à l'attention des secteurs et des acteurs concernés du monde rural.
Je rappelle qu'il est de notre devoir d'informer largement. C'est un des fondements de la démocratie, mais c'est aussi le devoir du Sénat. (Très bien ! sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
M. Jean-Marc Pastor. Le groupe socialiste s'abstient.

(Le projet de loi est adopté.)

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