Séance du 3 juin 1999
M. le président.
La parole est à Mme Durrieu.
Mme Josette Durrieu.
Ma question s'adresse à M. le ministre de la défense.
L'Europe est une puissance économique, mais nous connaissons ses faiblesses :
absence de politique étrangère et de politique de défense, incapacité à
prévenir les crises et à intervenir seule dans les conflits régionaux.
Or le Premier ministre déclarait déjà, en juillet 1997 : « l'intensification
de la coopération en matière de sécurité et de défense s'impose dans la
construction européenne. Dans des pays qui vont jusqu'à battre ensemble
monnaie, on ne saurait avoir durablement des politiques de défense disjointes.
»
C'est sur fond de guerre, en Bosnie hier, au Kosovo aujourd'hui, que l'idée
fait son chemin. Saint-Malo, en décembre 1998, c'est le sommet
franco-britannique ; Toulouse, en mai 1999, c'est le sommet franco-allemand.
Et les déclarations se succèdent.
A Saint-Malo, il est déclaré : « L'Union doit avoir une capacité autonome
d'action appuyée sur des forces militaires crédibles afin de répondre aux
crises internationales. »
A Toulouse, les Allemands et les Français s'engagent à faire en sorte que
l'Union européenne se dote des moyens autonomes nécessaires pour décider et
agir face aux crises. Et, pour atteindre cet objectif, ils renforceront leur
coopération et leurs moyens opérationnels, ils planifieront le développement
commun de matériels d'armement.
Nous sommes à un tournant de la construction européenne. Aujourd'hui même,
vous l'avez dit tout à l'heure, monsieur le ministre, se tient, à Cologne, un
sommet européen des Quinze qui abordera sûrement les questions de défense et de
sécurité. Les obstacles sont encore nombreux.
Les Etats-Unis souhaitent sûrement garder leur hégémonie sur l'Europe.
Certains pays de l'Union se contenteraient du parapluie américain. D'autres
s'interrogent encore sur les conséquences politiques et financières d'une
autonomie. Quelques-uns, enfin, souhaitent garder leur neutralité.
J'en viens, monsieur le ministre, à mes questions.
M. Alain Gournac.
Ah !
Mme Josette Durrieu.
Que va proposer la France pour que l'Europe se dote d'une capacité de défense
autonome et crédible ?
Quel avenir pour l'Union de l'Europe occidentale et ses outils déjà
opérationnels : centre satellitaire, comité militaire, cellule de planification
?...
Enfin, l'élue des Hautes-Pyrénées que je suis...
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche. Oui !
Mme Josette Durrieu.
... tout comme M. le ministre de l'agriculture
(Exclamations amusées),
l'élue de Tarbes que je suis est préoccupée par le devenir du GIAT.
Nous vous demandons, monsieur le ministre de la défense, si cette nouvelle
phase de la construction européenne peut redonner une chance aux industries de
défense, notamment à l'armement terrestre. Je pense, bien sûr, au char Leclerc.
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Alain Richard,
ministre de la défense. Cette question porte sur un point majeur du
Conseil européen qui se tient en ce moment même, conseil que nous avons
activement préparé ces dernières semaines, autour du Président de la République
et du Premier ministre.
Au-delà, ce Conseil a été préparé par de nombreuses démarches concertées et
réalistes que vous avez rappelées, madame le sénateur, notamment le sommet
franco-britannique de Saint-Malo, le sommet franco-allemand de Toulouse et, il
y a quelques semaines, une recontre ministérielle de l'UEO à Brême, au cours de
laquelle des convergences significatives sont apparues.
Le Président de la République et le Premier ministre, qui font pleinement
confiance à la capacité de la présidence allemande pour parvenir à des
décisions, y exprimeront nos priorités.
La première est que les Européens décident de donner à l'Union des outils
concrets d'action militaire au service de la politique étrangère et de sécurité
commune, soit par transfert des éléments efficaces déjà existants dans l'UEO,
soit par apport volontaire des nations membres pour compléter le dispositif
militaire propre à l'Union. Cela rendrait possible un choix autre que le
recours aux moyens de l'Alliance.
La deuxième est de permettre à l'Union européenne, devant les situations de
tension ou les menaces de crise et dans le respect de la souveraineté de ses
membres, de décider de manière réaliste en laissant toute latitude aux
initiatives des Etats les plus déterminés et les mieux préparés, en fonction de
chaque situation concrète.
S'agissant de l'UEO, nous travaillons au coude à coude avec nos amis allemands
pour un transfert négocié des moyens de l'UEO vers l'Union européenne, en
maintenant - c'est important - les dispositifs de concertation avec les Etats
participant à l'UEO qui ne sont pas membres de l'Union européenne.
En ce qui concerne les alliances industrielles, parlant sous le contrôle
vigilant de M. le président quant au temps de parole dont je dispose, je ne
peux dire que des généralités.
Les conditions, tant politiques qu'industrielles, pour un développement
progressif d'alliances européennes par métier et par type de produit sont
maintenenant créées. Nous soutenons cette démarche, mais avec un souci
d'équilibre, de manière que ne s'établissent pas des dominations d'un Etat sur
les autres, d'une industrie sur les autres au sein de l'Europe.
Les grands groupes français d'industrie de défense sont maintenant préparés -
y compris le GIAT auquel vous vous intéressez, madame Durrieu - à entrer dans
ces alliances en y faisant pleinement valoir les capacités technologiques et
financières des industries françaises.
(Applaudissements sur les travées
socialistes.)
M. le président.
Merci, monsieur le ministre, d'avoir respecté votre temps de réponse.
PRISE EN CHARGE DES FRAIS D'AVOCAT
POUR LES GENDARMES MIS EN CAUSE
DANS LE DOSSIER CORSE