Séance du 29 juin 1999







M. le président. « Art. 14. - I à IX. - Non modifiés .
« X. - Supprimé. »
Par amendement n° 11, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose de rétablir le paragraphe X de cet article dans la rédaction suivante :
« X. - Elle est signifiée au débiteur par acte d'huissier de justice. »
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. Après l'article 13, j'ai peur que l'article 14, qui a pourtant soulevé, lors de la première lecture, beaucoup de passions, provoqué de nombreux courriers et un émoi très compréhensible, puisqu'il vise à modifier la procédure d'opposition à un tiers détenteur afin de recouvrer les cotisations impayées des non-salariés, ne paraisse bien fade ! C'est pourtant un article à propos duquel les huissiers, notamment, nous ont abondamment sollicités, bientôt suivis par d'autres, comme l'Organisation autonome nationale d'assurance vieillesse de l'industrie et du commerce, l'ORGANIC, ou la Caisse autonome nationale de compensation de l'assurance vieillesse artisanale, la CANCAVA.
Je rappelle que la discussion n'avait pas été facile en première lecture, à l'Assemblée nationale, puisque Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, avait laissé entendre qu'une amélioration du texte serait proposée en nouvelle lecture.
Au Sénat, en première lecture, un débat assez long était instauré sur des amendements d'orientation contraire : certains défendaient les huissiers, alors que d'autres défendaient l'ORGANIC ou la CANCAVA ; au sein de ces dernières, les administrateurs étaient favorables au texte du Gouvernement, alors que certaines professions libérales y étaient défavorables. Tout cela nous avait paru assez complexe.
Nous étions parvenus à une situation équilibrée en prévoyant l'intervention d'un huissier au stade de la contrainte. Le dispositif proposé par le Gouvernement restait en l'état, mais nous apportions une garantie supplémentaire pour les assujettis, sans pour autant favoriser les mauvais payeurs, contrairement à ce que j'ai pu lire, ici ou là, après la prise de position du Sénat.
Je rappelle que, pour les débiteurs relevant du régime des non-salariés, la contrainte peut être actuellement soit notifiée par lettre recommandée, soit signifiée, alors qu'elle est déjà obligatoirement signifiée pour les débiteurs relevant du régime général et du régime agricole.
Dans le texte proposé par le Gouvernement, qui nous revient de l'Assemblée nationale, la procédure pourrait se résumer, en cas d'absence d'opposition de la part du débiteur, à un envoi de lettre recommandée éditée automatiquement par un système informatique, système qui, nous le savons, est sujet à caution et à contentieux.
L'intervention d'un huissier de justice, proposée par le Sénat, est motivée non par un désir de défendre cette profession, aussi noble soit-elle, mais par le souhait de rendre possible, à un moment qui n'est pas le plus critique, une intervention « humaine », moins mécanisée, qu'une lettre recommandée expédiée systématiquement lorsque les dettes ne sont pas payées.
L'amendement que nous avions présenté conciliait deux objectifs. Il visait, en premier lieu, à mieux assurer le prélèvement des cotisations à payer - le président que je suis du conseil de surveillance de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l'ACOSS, y était tout à fait attentif - afin de ne pas pénaliser ceux qui s'acquittent de leurs contributions sociales. En effet, ceux qui payent leurs cotisations payent un peu plus pour opérer une compensation avec ceux qui ne payent pas.
Cet amendement visait, en second lieu, à assurer un certain formalisme et à garantir à tous une procédure légale.
Il est regrettable que l'Assemblée nationale et le Gouvernement n'aient pas suivi, en nouvelle lecture, cette position, qui nous avait paru équilibrée. Je dépose donc à nouveau cet amendement. L'Assemblée nationale devrait, me semble-t-il, retenir ce dernier, car il n'est absolument pas politique. (Très bien ! sur les travées du RPR.)
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement émet un avis défavorable. En l'état actuel du droit, les organismes de non-salariés non agricoles peuvent notifier la contrainte par lettre recommandée - M. le rapporteur vient de l'indiquer - mais cela constitue un allègement du coût de la procédure pour le débiteur. Souvent, la procédure est engagée pour le prix que coûte l'huissier. L'adoption de cet amendement aboutirait donc à un doublement de la charge.
M. Charles Descours, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. Je voudrais que M. le secrétaire d'Etat nous donne des explications. Des contentieux considérables naissent à propos de lettres recommandées qui ne sont pas reconnues parce qu'elles ne sont pas arrivées : on les a données à la concierge, à l'employée de maison, à Dieu sait qui !
M. le secrétaire d'Etat nous explique que la situation qu'il propose tend à éviter des dépenses. Mais les procédures judiciaires ont également un coût !
Nous sommes pour une civilisation qui soit la moins déshumanisée possible, monsieur le secrétaire d'Etat !
M. Gérard Delfau. Avec des huissiers...
M. Charles Descours, rapporteur. C'est tout de même moins déshumanisé que la lettre recommandée éditée automatiquement par un système informatique ! (Sourires.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 11.
M. Philippe Marini. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. Je comprends la préoccupation de sécurité juridique de la commission, et je comprends l'argument pécuniaire et pratique de M. le secrétaire d'Etat.
Mais n'y a-t-il pas une autre solution qui ne fasse pas intervenir une procédure par un huissier et qui apporte le caractère de certitude de la transmission que l'on recherche ?
L'existence même de ce débat sur une question de procédure montre - car la question soulevée par la commission est une bonne question - que ce texte n'a pas été suffisamment fouillé dans tous ses détails et que des zones d'interprétation, de contentieux, ainsi que des difficultés d'application vont surgir. C'est évidemment regrettable ! C'est un exemple de plus de méthodes de travail qui ne sont pas bonnes en procédure d'urgence.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 11, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 14, ainsi modifié.

(L'article 14 est adopté.)

Article 20