Séance du 27 octobre 1999







M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Herment pour explication de vote.
M. Rémi Herment. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, nous venons d'examiner une petite partie de la grande réforme du sport que nous attendons depuis longtemps. Nous l'avons fait dans la précipitation, sans réellement prendre en compte tous les paramètres, notamment en ce qui concerne le statut des clubs professionnels et leur accès au marché financier.
L'urgence n'est motivée que par une seule mesure, celle qui est relative au rétablissement des subventions publiques aux clubs professionnels. En effet, en l'absence d'un nouveau texte législatif avant le 1er janvier 2000, de nombreux clubs professionnels risqueraient de se trouver en situation de faillite. C'est le cas de ceux qui ne peuvent trouver des financements privés suffisants, tels que les clubs de basket, de handball, de hockey sur glace.
Dès lors, une question se pose : pourquoi ne pas avoir votée cette disposition au cours de la dernière session ?
En réalité, la présente proposition de loi a pour but sinon d'éluder, tout au moins d'expédier un débat sur l'avenir des clubs professionnels et sur leur éventuelle introduction en bourse. Il est regrettable de traiter un sujet si important de manière aussi rapide et superficielle.
Le sport a besoin d'une grande réforme qui prenne en compte l'évolution du contexte économique et des contraintes financières dans le respect de l'éthique. Je reste persuadé qu'il eût été préférable d'examiner un seul et unique texte traitant de tous les aspects du problème.
En voulant protéger les jeunes sportifs français, notamment en affirmant « l'interdiction de transactions commerciales portant sur les activités sportives d'un mineur », le texte ne répond pas de manière satisfaisante au problème. En effet, ces mesures, qui ne pourront s'appliquer que sur le territoire national ou à des contrats régis par la loi française, ne permettront pas de faire obstacle au débauchage de jeunes sportifs français par des clubs étrangers. Seule une solution européenne serait efficace.
Malgré ces critiques, je tiens à saluer l'excellent travail de notre rapporteur. Je partage ses réserves et adhère totalement à sa position et à sa passion sportive. C'est pourquoi mes collègues du groupe de l'Union centriste et moi-même voterons cette proposition de loi dans le texte résultant des travaux du Sénat.
M. le président. La parole est à M. Murat.
M. Bernard Murat. A l'issue de ce débat, on reste un peu sur sa faim. On en a « encore un peu sous la pédale », pour reprendre une expresssion propre au monde du cyclisme.
En fin de compte, il me semble que nous avons plus posé de problèmes que nous n'avons apporté de réponses véritables.
En tout cas, je pense, madame la ministre, que le Sénat vous aura donné satisfaction en vous permettant de disposer des mesures nécessaires pour avancer dans vos négociations avec vos homologues européens, notamment dans le cadre de la Commission européenne, s'agissant de l'évolution du sport professionnel.
Cela étant, le sport professionnel reste encore aujourd'hui, en France, une expression très limitée du sport en général et de l'action menée par les associations de bénévoles, qui représentent la véritable tradition sportive dans notre pays.
Finalement, madame la ministre, si j'ai le sentiment que nous avons souvent apporté des réponses dans le sens que vous souhaitiez, nous avons sans doute perdu une occasion - momentanément, je l'espère - d'engager l'examen d'une vaste loi d'orientation sur le sport en France, sur le comportement sportif à tous les niveaux.
On peut déplorer de la même façon l'absence d'une grande loi d'orientation sur les problèmes de santé.
Or nos gouvernants vont avoir de plus en plus à débattre d'une harmonisation au niveau européen mais aussi, bien évidemment, au niveau mondial. S'ils ne disposent pas d'une loi d'orientation définissant ce que nous voulons en matière de pratique sportive amateur, professionnelle, voire familiale, ils n'auront pas les outils nécessaires pour défendre ce qui doit être défendu, c'est-à-dire une sorte de spécificité française.
Je crois donc que nous avons fait un bon exercice de style cet après-midi, mais cet exercice de style appelle un travail de fond dans les semaines et les mois à venir. Croyez bien, madame la ministre, que le groupe du RPR, au nom duquel je m'exprime cet après-midi, sera à vos côtés pour oeuvrer dans cette direction.
M. le président. La parole est à Mme Luc.
Mme Hélène Luc. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, si la proposition de loi que nous nous apprêtons à adopter paraît peu dense de par le nombre des articles qui la composent, elle soulève, nous avons pu l'observer, bien des questions.
L'organisation commerciale des clubs sportifs, notamment, est une nécessité.
Ce qu'il faut « diaboliser », ce n'est pas tant l'argent dans le sport que les conséquences de l'application de la seule loi du marché pour l'ensemble du mouvement sportif.
A ce titre, le texte qui nous était proposé constituait un bon équilibre entre, d'une part, les activités commerciales des clubs et, d'autre part, les missions premières de ceux-ci, à savoir le sport et la compétition.
Outre les méfaits de la cotation boursière des clubs sportifs, méfaits que nous avons dénoncés, cette cotation détournerait, à n'en pas douter, les clubs sportifs de ces missions essentielles.
Pour ce qui est du transfert des joueurs, laisser les choses en l'état, au nom de la libre circulation des joueurs, n'est pas satisfaisant. Quoi qu'il en soit, se pose la question des clubs qui investissent dans la formation des sportifs et voient ensuite réduit à néant leur effort de formation.
Sur ce point, nous pensons qu'il convient d'infléchir la position de la Commission européenne, j'y insiste, madame la ministre, afin de parvenir à la moralisation de cette pratique des transferts.
Par ailleurs, nous sommes, pour notre part, favorables à une protection maximale des sportifs mineurs.
A ce titre, je me félicite de l'adoption, sur la proposition de notre commission, de l'article additionnel après l'article 6, qui vient renforcer encore cette protection.
Certes, nous devrons rester vigilants quant à l'application de cette loi, et nous pensons que le rapport des clubs sportifs à l'argent devra faire l'objet d'une attention toute particulière de la part de votre ministère.
Sous le bénéfice de ces remarques et compte tenu des heureuses modifications qui sont intervenues, notamment à l'article 7, nous voterons la proposition de loi telle qu'elle résulte des travaux du Sénat.
M. Adrien Gouteyron, président de la commission. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Adrien Gouteyron, président de la commission. Je veux tout d'abord me réjouir, madame la ministre, de la façon dont vous avez abordé ce débat. Au demeurant, nous avions déjà pu apprécier votre attitude très positive lors du débat sur le texte relatif à la lutte contre le dopage.
Je tiens également à remercier notre rapporteur, M. James Bordas, qui est pour beaucoup et dans la qualité du débat qui s'est déroulé ici cet après-midi et dans celle du travail que nous avons accompli.
J'espère que, lors de la rédaction des décrets d'application, l'état d'esprit qui a présidé à nos travaux se prolongera, de manière que lesdits décrets soient bien conformes tant à la lettre qu'à l'esprit des dispositions que nous avons votées. Cet esprit, nos débats ont permis de le préciser.
Cela dit, madame la ministre, de grandes questions restent posées, et au premier chef celle de l'insertion du sport dans la vie économique, notamment le problème de l'appel public à l'épargne, dont nous avons débattu mais que nous n'avons pas, à l'évidence, définitivement tranché. Nous n'aurons pas trop du temps qui nous reste d'ici à l'examen du texte dont vous allez sans doute nous parler tout à l'heure et qui sera soumis au Sénat au printemps prochain pour avancer dans notre réflexion sur ces questions.
Autre sujet que je retiens tout particulièrement : les rapports entre les clubs et leurs centres de formation, d'une part, et les jeunes dont ils ont la charge, d'autre part. Sont là mis en jeu des principes fondamentaux, et nous essaierons, sur ce point, d'aboutir en commission mixte paritaire à un texte qui tienne compte des observations qui ont été formulées dans notre assemblée.
C'est une petite étape qui est franchie aujourd'hui. Nous nous engagerons bientôt dans l'examen d'un texte d'une portée beaucoup plus vaste. Je souhaite que nous retrouvions alors l'esprit qui a prévalu lors de l'examen de la présente proposition de loi.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.

(La proposition de loi est adoptée.)
Mme Marie-George Buffet, ministre de la jeunesse et des sports. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Marie-George Buffet, ministre de la jeunesse et des sports. Je tiens tout d'abord à remercier le président de la commission des affaires culturelles, M. Adrien Gouteyron, son rapporteur, M. James Bordas, et l'ensemble du Sénat : nous avons en effet, me semble-t-il, travaillé aujourd'hui de façon très constructive.
Même si, sur un certain nombre de points - je pense notamment à l'article 7 - nos approches n'ont pas été convergentes, je crois que l'objectif visé est le même et que nous pourrons trouver une solution.
Loin d'avoir été élaboré dans la précipitation, le texte que vous venez d'adopter est le fruit de plus de deux ans de discussions avec le mouvement sportif, dans l'ensemble de ses composantes, y compris sa composante professionnelle. Je vous laisse imaginer le temps que représentent les forums de concertation que nous avons organisés, pour rencontrer des centaines de dirigeants locaux du mouvement sportif, en particulier les innombrables dirigeants bénévoles des clubs.
Le travail parlementaire va se poursuivre avec l'examen d'un projet de loi portant sur l'association sportive, l'encadrement, les éducateurs, le rôle du mouvement sportif, celui des bénévoles, etc.
Avec ce futur projet de loi et le texte que le Sénat vient d'adopter, c'est l'ensemble de la loi de 1984 qui sera revu. En fait, nous disposerons, lorsque ces deux textes seront définitivement notés, d'une grande loi d'orientation adaptée aux besoins du sport d'aujourd'hui, le sport professionnel comme le sport amateur, le sport de haut niveau comme le sport accessible à tous.
Bien sûr, j'aurais moi aussi souhaité que ces différents textes soient regroupés, mais le calendrier parlementaire ne l'a pas permis, sans compter qu'il y avait des points à régler d'urgence. Cela ne nous a pas empêchés, je pense, de bien travailler.
Je note qu'un grand nombre d'amendements ont été adoptés après avoir recueilli un avis favorable ou un avis de sagesse de la part du Gouvernement. Cela montre que nous voulons tous ensemble non seulement faire avancer le sens du sport et son éthique mais aussi et surtout favoriser le développement du sport en général, à la fois le sport de haut niveau et le sport pour tous.
En effet, ne l'oublions jamais, ces deux aspects du sport sont liés. Nous avons besoin de championnes et de champions qui fassent rêver. Nous l'avons encore constaté tout récemment avec de très beaux résultats dans différents sports. J'ai, en cet instant, une pensée pour Félicia Ballanger, qui a remporté son neuvième titre, et pour Marion Clignet, qui, après avoir été absente des compétitions, a gagné deux médailles d'or.
A n'en pas douter, ces championnes et ces champions, en faisant rêver nos concitoyens, permettent le développement du sport. Inversement, le sport amateur, avec ses bénévoles, permet d'accueillir des enfants qui, demain, peut-être, seront des champions.

Cette cohésion, cette unité portée par le sens du sport et son éthique, je crois que, tous ensemble, nous l'avons bien défendue ajourd'hui. (Applaudissements.) 10