Séance du 9 novembre 1999







M. le président. La parole est à M. Richert, auteur de la question n° 619, adressée à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. M. Philippe Richert. Je souhaitais attirer l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur le différend qui oppose la direction générale des impôts aux entreprises de chocolaterie à propos de la taxe sur la valeur ajoutée applicable au chocolat noir.
Selon les textes réglementaires, le chocolat noir est l'un des produits de chocolaterie taxé à 5,5 %. Or l'administration fiscale multiplie à l'encontre des entreprises de chocolat des redressements fiscaux arguant d'une TVA à 20,6 %, et réclame aussi des différentiels de TVA qui ne sont pas justifiés au regard des textes réglementaires. La conséquence de ces actions est de mettre gravement en péril ce secteur d'activité.
L'article 278 bis du code général des impôts soumet au taux de 5,5 % le chocolat, le chocolat de ménage et le chocolat de ménage au lait, tels qu'ils sont définis par le décret n° 76-692 du 13 juillet 1976, lorsque ces variétés de chocolat sont présentées en tablettes, y compris les mini-tablettes ou les « napolitains ». Les autres produits de chocolat sont soumis au taux de 20,6 %.
Tant les services de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes - la DGCCRF - que ceux de la Commission européenne confirment que le chocolat noir, dit amer ou fondant, est bien du chocolat, dès lors que sont respectées les normes de composition minimale fixées par le décret n° 76-692.
La juridiction administrative, en l'espèce le tribunal administratif de Strasbourg, par un jugement du 21 avril 1998, a confirmé à son tour cette interprétation, jugeant que « le seul fait, pour les tablettes de chocolat en litige, de présenter une teneur en beurre de cacao supérieure à 31 % ne saurait leur retirer la qualité de chocolat au sens de l'article 278 bis du code général des impôts. »
L'administration fiscale a fait appel du jugement du 21 avril 1998 devant la cour administrative d'appel de Nancy. Sans attendre, elle a multiplié les contrôles et les redressements, notamment auprès de petites entreprises chocolatières.
Il est évident que ces différentes interventions intempestives de l'administration fiscale ont pour conséquence de mettre dans des situations délicates un certain nombre d'entreprises, notamment les petites entreprises, qui travaillent dans le domaine du chocolat.
Je souhaite donc que le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie confirme clairement la position des tribunaux administratifs, qui est aussi celle de la Commission européenne et de la DGCCRF, et précise sans ambiguïté que le chocolat noir doit être taxé à 5,5 % ; cela éviterait à un certain nombre d'entreprises, notamment les petites, je le répète, d'être mises en difficulté.
M. le président. La parole est à Mme le ministre. Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le sénateur, vous avez devant vous une ministre s'exprimant au nom de Christian Sautter, qui vous prie de l'excuser de ne pas être présent, mais, en même temps, une ministre de la culture qui, par ailleurs, est concernée par la gastronomie et donc sensible aux arguments qui concernent la qualité du chocolat et en particulier des chocolats noirs à forte proportion de cacao.
Le chocolat est imposé au taux de la taxe sur la valeur ajoutée de 5,5 %, comme vous l'avez rappelé, ou au taux de 20,6 %, selon sa composition.
Le texte de référence pour appliquer le taux adéquat est un décret du 13 juillet 1976.
Il est vrai que, par deux jugements, auxquels vous avez fait référence, du 21 avril 1998, le tribunal administratif de Strasbourg a donné une interprétation concernant le chocolat noir contraire à la position de l'administration fiscale fondée sur le décret de 1976.
Mais ces deux décisions de justice, qui sont à ce jour les seules rendues en la matière, ont été déférées en appel.
Le Gouvernement ne se substitue jamais, lorsqu'il y a contentieux, au tribunal qui est saisi. Il convient donc d'attendre la décision de justice définitive pour être en mesure de régler la question que vous évoquez, question déjà ancienne, amplement débattue, mais importante évidemment pour toute l'activité chocolatière de fabrication, celles des grands groupes comme celles des petites entreprises.
Le fait que ces contentieux aient eu lieu à Strasbourg est évidemment porteur de sens, puisque s'y trouvent aussi bien la chocolaterie Suchard, la chocolaterie Schaal que les chocolateries Vosgiennes qui, pour être de taille moyenne, n'en sont pas moins très importantes pour l'emploi dans cette région.
M. le président. Il y a aussi la saucisse de Strasbourg. (Rires.)
M. Philippe Richert. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Richert.
M. Philippe Richert. Je suis sensible au fait que Mme le ministre prenne très à coeur cette question car, outre le chocolat, ce sont bien entendu des emplois et des entreprises qui sont concernés.
Madame le ministre, la question n'est pas d'attendre la décision définitive de justice. D'ailleurs, c'est une administration, donc en fait le Gouvernement, puisque celle-ci relève de sa responsabilité, qui a fait appel d'une décision de justice. Or cette décision de justice ne faisait que confirmer non seulement la position de la Commission européenne mais également celle de la direction générale de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes. Il y a donc un consensus, excepté de la part de l'administration fiscale, bras séculier du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.
Je le repète, ce sont des entreprises, notamment des entreprises alsaciennes, et en particulier certaines de celles que vous avez citées, qui sont en cause. Je souhaite que vous vous fassiez mon interprète auprès de votre collègue pour que cesse le harcèlement fiscal dont elles font l'objet. Je vous en remercie par avance, madame le ministre, je sais que les entreprises concernées ainsi que moi-même nous pouvons compter sur vous.

PLAN DE FERMETURE DES PERCEPTIONS