Séance du 9 novembre 1999







M. le président. La parole est à M. Delfau, auteur de la question n° 622, adressée à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Gérard Delfau. Je souhaitais attirer l'attention de M Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, sur l'inquiétude qu'a suscitée l'annonce faite en interne par le directeur de la comptabilité publique d'un plan de fermeture des perceptions et d'une réorganisation des services déconcentrés du ministère. Je vous sais gré, madame la ministre de la culture, de bien vouloir vous faire son porte-parole sur cette question.
En effet, sur les 4 000 établissements financiers locaux 1 000 seraient menacés, c'est-à-dire ceux qui comptent au plus trois fonctionnaires. Cette tentative de désengagement de l'Etat et cette nouvelle atteinte au service public méconnaîtraient le rôle du percepteur de proximité dans la collecte des impôts. Le ministère pourrait-il communiquer au Parlement le taux de rentrée de la collecte en fonction des strates de communes ?
Notre expérience ne démontre-t-elle pas que l'agent qui connaît la population a une efficacité économique supérieure à celui qui est perdu dans l'anonymat des villes ? Et que dire de son efficacité sociale que connaissent bien les élus ?
S'agissant des municipalités, il n'a pas échappé au ministère des finances que le rôle de conseil auprès des maires et des secrétaires de mairie s'est considérablement accru depuis les lois de décentralisation et en fonction d'une inflation réglementaire et législative préoccupante, sans parler d'une dérive procédurière qui fragilise l'élu. Une fois de plus, supprimer un tel service public reviendrait à éloigner l'Etat et à laisser démunies des communes petites et moyennes, qui n'ont pas accès à des services privés spécialisés, en raison de la modicité de leur budget.
Cette orientation est d'autant plus choquante que, par une pente naturelle, les fonctionnaires ont tendance à se regrouper dans les services centraux de leur administration : niveau national, régional et départemental, selon une sorte de reconcentration qui viole l'esprit des lois Defferre, bien oubliées aujourd'hui. Je crains d'ailleurs à ce sujet que le projet de fusion de la direction des impôts et de la direction du Trésor n'aboutisse à accentuer encore cette tendance à l'éloignement du service public.
C'est pourquoi je demande à M. le ministre de l'économie et des finances, par votre entremise, madame la ministre, d'ouvrir une discussion avec le Parlement avant d'entreprendre une telle démarche, et de fournir, dans ce débat, les éléments chiffrés que j'ai évoqués.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le sénateur, vous attirez l'attention de mon collègue sur le plan de fermeture des perceptions.
Avec quelque 3 800 trésoriers, le réseau du Trésor public est caractérisé par une forte implantation sur tout le territoire national ; il en résulte, notamment, une part importante de petits postes : 25 % ont un effectif théorique, hors cadres A, inférieur ou égal à trois agents, et près de 50 % à cinq agents ou moins.
Tout en conservant sa caractéristique essentielle de réseau de proximité, le Trésor public doit cependant évoluer pour, justement, continuer à assurer l'accès du public à ses services.
Ainsi, la généralisation de la micro-informatique et le développement de procédures télégérées intégrées ont contribué à renforcer l'efficacité de ce réseau. Des redéploiements significatifs ont ainsi pu être opérés pour répondre aux nouvelles missions du Trésor public, tels le contrôle financier déconcentré de la dépense publique ou l'expertise économique et financière.
Ce sont ces mesures de modernisation, combinées à une adaptation progressive et concertée de son réseau, notamment avec les élus, qui permettent au Trésor public de rester un service public de proximité et de préserver le niveau de qualité de ses prestations, au bénéfice des usagers et des élus, conformément aux orientations gouvernementales en matière d'aménagement du territoire.
C'est pourquoi, contrairement à ce que laisse entendre la question que vous venez de poser, il n'y a pas de plan national de fermetures de postes.
Enfin, s'agissant de la collecte de l'impôt, l'outil statistique organisé pour donner des informations précises sur les taux aux différents stades de la procédure, permet d'établir, outre les taux nationaux, des taux par département, sans prendre en compte les strates des communes. Ils seront transmis directement à l'intervenant, accompagnés de commentaires complétant cette information d'éléments sur les enjeux financiers respectifs de chaque département.
Tels sont, monsieur le sénateur, les éléments que, au nom de mon collègue, je souhaitais vous transmettre.
M. Gérard Delfau. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau. Madame la ministre, je vous remercie d'abord d'avoir indiqué, au nom de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, qu'il n'y a pas de plan national de fermeture des perceptions. Cette annonce est importante dans cet hémicycle, car ce n'est pas ce que l'on m'avait répondu quand j'avais posé la question au mois de septembre dernier à l'échelon de mon département et de ma région. Cela signifie en tout cas que le Gouvernement n'a pas la volonté de se désengager systématiquement. De ce point de vue, votre réponse me satisfait pleinement.
Cela étant, je voudrais que le ministère de l'économie et des finances accepte de dialoguer vraiment avec les élus locaux. A ce titre, je présenterai deux remarques.
En premier lieu, la machine, fût-elle micro-informatique, ne remplace pas l'homme ou la femme. La relation établi avec l'élu local conforte le tissu social conformément à une certaine conception de la citoyenneté. Fermer des établissements locaux irait à l'encontre de cette orientation de votre gouvernement, du gouvernement que je soutiens.
En second lieu, il est important que le ministère de l'économie et des finances, qui est si bien pourvu en matériel informatique, nous communique les chiffres que j'ai demandés, c'est-à-dire le taux de rentrées fiscales par strate de communes et non par département, puisque les chiffres par département sont parfaitement aléatoires et ne présentent strictement aucun intérêt, en tout cas pour les parlementaires que nous sommes. Il est en effet à peu près avéré que plus on rapproche la perception de l'impôt du terrain, mieux l'impôt rentre, et que plus on l'éloigne, moins la fiscalité est opératoire.
Encore faudrait-il pour apporter cette démonstration que le ministère de l'économie et des finances joue franc jeu avec le Parlement.

SITUATION DE LA POSTE EN MILIEU RURAL