Séance du 29 novembre 1999







M. le président. Par amendement n° I-177 rectifié, Mme Beaudeau, MM. Loridant, Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 278 quater du code général des impôts est complété par les mots : "à l'exception de celles effectuées par les établissements publics de santé".
« II. - Pour compenser les pertes de recettes résultant du I ci-dessus, le taux prévu à la dernière ligne du tarif fixé à l'article 885 U du code général des impôts est relevé à due concurrence. »
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Cet amendement a pour objet d'exonérer totalement de TVA les achats de médicaments effectués par les établissements publics de santé.
Nos hôpitaux rencontrent de graves difficultés et, au cours des débats que nous avons eus lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, plusieurs d'entre nous ont insisté sur l'insuffisance de la dotation budgétaire allouée aux hôpitaux depuis des années. Puisque leurs recettes leur sont comptées, faisons en sorte que leurs dépenses soient réduites au minimum ! Il faut que les hôpitaux puissent continuer d'assurer dans les meilleures conditions possibles les soins et les traitements dus aux malades.
Enfin, je précise que cette disposition aurait un coût budgétaire limité, dans la mesure où la plupart des médicaments bénéficient déjà d'un taux de TVA de 2,10 %.
Par conséquent, nous vous proposons, mes chers collègues, d'adopter cet amendement, qui est favorable à nos hôpitaux sans remettre fondamentalement en cause la politique du Gouvernement en matière de santé.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Tout en comprenant les intentions des auteurs de l'amendement, la commission des finances considère que son dispositif n'est pas extrêmement clair. En effet, les collectivités publiques - donc les établissements publics hospitaliers - qui acquièrent des médicaments agréés sont d'ores et déjà soumises au taux de TVA super réduit de 2,10 %. Je me demande donc si la rédaction de l'amendement ne fragilise pas cette position.
Pour des raisons essentiellement techniques, la commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie. Le Gouvernement partage l'avis qui vient d'être formulé par M. le rapporteur général. J'ai peur que, loin de réduire - ce qui est l'objectif de Mme Beaudeau - le taux de TVA pour les médicaments, la rédaction actuelle de l'amendement n'accroisse en réalité ce taux de 2,10 % à 5,5 %. Or, c'est sans doute l'inverse que vous souhaitez, madame Beaudeau !
Dans ces conditions, je pense qu'il serait sage de vous laisser le temps de rédiger autrement votre amendement et - en attendant, je vous demande de le retirer -, afin de pouvoir, lors d'une lecture ultérieure, revenir à ce dispositif si vous le souhaitez.
M. le président. Madame Beaudeau, maintenez-vous l'amendement n° I-177 rectifié ?
Mme Marie-Claude Beaudeau. Chacun aura bien compris que l'objet de cet amendement était effectivement de réduire le taux de TVA sur les médicaments afin d'arriver à un taux zéro. Toutefois, effectivement, la façon dont nous l'avons présenté, en nous référant à l'article 278 quater du code général des impôts au lieu de viser l'article 280 octies dudit code, pose sans doute un problème.
J'accepte donc la proposition de M. le secrétaire d'Etat et je retire notre amendement jusqu'à ce que nous ayons trouvé un autre dispositif.
M. le président. L'amendement n° I-177 rectifié est retiré.
Par amendement n° I-173, Mme Beaudeau, MM. Loridant, Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 278 quater du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux de 5,5 % en ce qui concerne les opérations d'achat, d'importation, d'acquisition intra-communautaire, de vente, de livraison, de courtage ou de façon portant sur les prothèses auditives, les verres correcteurs de la vue, les montures, le matériel autre d'amélioration de l'audition et de la vision, prescrit médicalement.
« La liste des biens éligibles est fixée par décret. »
« II. - Les droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts sont relevés à due concurrence. »
La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Cet amendement a pour objet d'abaisser à 5,5 % le taux de la TVA appliquée aux prothèses auditives et aux verres correcteurs. Son adoption aurait pour avantage de réduire sensiblement le prix de produits aujourd'hui faiblement remboursés, tant par la sécurité sociale que par les régimes complémentaires.
Malgré les requêtes qui ont été exprimées par les associations concernées auprès des organismes sociaux pour assurer une prise en charge plus importante de ces produits, pourtant essentiels à la vie quotidienne de millions de Français, aucune initiative n'a été prise à ce jour.
Aussi, l'Etat, qui a la responsabilité de garantir l'accès à la santé de tous les citoyens, doit-il montrer l'exemple en facilitant l'acquisition de lunettes ou de prothèses auditives.
En outre, ce geste serait de nature à éviter des dépenses futures provoquées par le report, voire le renoncement à se munir de tels produits dans l'immédiat, entraînant une aggravation du handicap et le recours, à terme, à des prothèses plus coûteuses.
Dans un souci de justice et d'égalité de tous les assurés sociaux, nous vous demandons de voter cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement vise un certain nombre de dispositifs et d'appareillages médicaux. Or, d'ores et déjà, les appareils auditifs sont assujettis au taux réduit de 5,5 % pour une très large majorité d'entre eux.
Il serait possible, selon le droit communautaire, d'aller plus loin et de soumettre au taux réduit les verres correcteurs, les montures et l'ensemble des matériels d'amélioration de l'audition et de la vision.
Dans ces conditions, il me semble utile d'entendre l'avis du Gouvernement sur ce sujet.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Comme je l'ai expliqué cet après-midi, nous avons consacré les marges que nous souhaitions affecter à la réduction de TVA à l'abaissement du taux applicable aux travaux réalisés dans les logements.
L'application du taux réduit de la TVA aux lunettes correctrices serait, en effet, une bonne idée. Nous ne pourrons toutefois pas accéder cette année à une nouvelle baisse de TVA, dont le coût serait de 1,5 milliard de francs. Ce serait difficilement envisageable au regard des mesures fiscales que j'ai défendues cet après-midi et de l'effort de réduction du déficit budgétaire entrepris par ailleurs par le Gouvernement.
Quoi qu'il en soit, nous retenons cette idée comme étant un projet tout à fait justifié et mobilisateur, puisque aussi bien - M. le rapporteur général vient de l'exprimer avec une grande clarté - le travail a déja été fait sur les prothèses auditives, notamment depuis la parution de l'instruction administrative du 22 juin 1999 : l'ensemble de ces prothèses, lorsqu'elles bénéficient du marquage « Communauté européenne », relèvent du taux réduit de 5,5 %.
M. Foucaud ayant manifesté l'opinion du groupe communiste républicain et citoyen et ayant été rassuré sur la volonté du Gouvernement d'étudier cette mesure le moment venu, il serait bon qu'il retire maintenant son amendement.
M. le président. Quel est, dans ces conditions, l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Notre collègue a compris qu'il lui fallait prendre place dans la file d'attente concernant l'ensemble des produits, dispositifs et prestations de services auxquels il souhaite appliquer le taux réduit !
Compte tenu de ce qu'a indiqué M. le secrétaire d'Etat, la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Monsieur Foucaud, l'amendement est-il maintenu ?
M. Thierry Foucaud. J'avais cru comprendre l'année dernière que nous étions déjà dans la file d'attente qu'a évoquée M. le secrétaire d'Etat. Mais l'attente se fait un peu longue !
Au regard des explications données ce soir sur la TVA, je crois qu'il faut rappeler deux chiffres : le présent projet de budget fait apparaître 18 milliards de francs pour les baisses de TVA et 21 milliards de francs pour la baisse du déficit. Pourquoi ne pas prendre un peu sur le déficit pour satisfaire un certain nombre de revendications sociales légitimes ?
Tel est l'objet de cet amendement, que nous maintenons donc.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-173, repoussé par le Gouvernement et pour lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
Mme Marie-Claude Beaudeau. C'est cela la sagesse ! (Sourires.)
M. Michel Charasse. On n'a rien vu ! (Nouveaux sourires.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances après l'article 3. Par amendement n° I-109, MM. Ostermann, Braun, Cazalet, Chaumont, Gaillard, Oudin et Trégouët proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article 278 sexies du code général des impôts, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. ... - La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux de 5,5 % sur les opérations individualisées de construction, reconstruction, réhabilitation totale ou extension de casernements de gendarmerie réalisées par les collectivités locales et déclarées prioritaires et urgentes par le ministre de la défense mais ne faisant pas l'objet d'une subvention de la part de l'Etat.
« II. - La perte de recettes pour le budget de l'Etat est compensée par le relèvement à due concurrence des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts ainsi que par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés à l'article 403 du même code. »
La parole est à M. Ostermann.
M. Joseph Ostermann. Cet amendement, qui concerne la construction de casernements de gendarmerie, avait déjà été présenté l'année dernière.
Je me permettrai de rappeler rapidement l'évolution en matière de construction de casernements de gendarmerie : cette construction bénéficiait, avant 1994, d'une subvention de l'Etat et de la récupération de la TVA ; en 1995, elle bénéficiait d'une subvention de l'Etat mais plus de la récupération de TVA ; aujourd'hui, elle ne bénéficie plus ni de la récupération de la TVA ni d'une subvention de l'Etat, puisque les contraintes budgétaires imposées au département de la défense ne permettent plus ou permettent peu d'intervenir en faveur de la construction de gendarmeries. Par conséquent, une collectivité locale devant réaliser un casernement de gendarmerie doit être subventionnée par le département. Il s'agit quand même là d'une situation un peu particulière dans la mesure où la sécurité est une mission régalienne de l'Etat.
Par conséquent, l'amendement n° I-109 vise à prévoir une TVA à 5,5 % sur ces opérations.
M. Jacques Chaumont. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il apparaît légitime d'atténuer les efforts financiers réalisés en la matière par de nombreuses collectivités territoriales, et la mesure proposée est tout à fait correcte du point de vue du droit communautaire. Je rappelle que, l'an dernier, lors du débat budgétaire, nous avions adopté un amendement identique après avoir obtenu du Gouvernement une réponse qui n'était pas, à mon sens, d'une extrême clarté.
La commission des finances a donc émis un avis favorable sur cet amendement n° I-109.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement ne rejoint pas M. le rapporteur général et les auteurs de l'amendement dans leur élan. En effet, les travaux de construction ou ceux qui sont assimilables à une construction pour des gendarmeries sont exclus du champ d'application du taux réduit autorisé par la directive adoptée le 22 octobre 1999. Dès lors, l'application du taux réduit aux travaux visés par l'amendement est contraire au droit communautaire.
Je demande donc aux auteurs de l'amendement n° I-109 de bien vouloir retirer ce dernier.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-109.
M. Michel Charasse. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse. Sur le fond, l'amendement n° I-109 est sympathique et recouvre une réalité. Seulement, comme l'a dit M. le secrétaire d'Etat - c'est d'ailleurs bien ce que je craignais personnellement, ainsi que je l'indiquais en aparté à mes amis - la directive communautaire interdit ce genre d'opération puisqu'elle n'est pas applicable à ce type de travaux immobiliers. On a fait une dérogation récente pour les grosses réparations ou les réparations dans les appartements, mais pas à cet égard.
En réalité, je souhaiterais que M. le secrétaire d'Etat veuille bien nous répondre sur un point précis afin d'éclairer les choses, étant entendu que je ne pourrai bien sûr pas voter l'amendement n° I-109, dont l'adoption nous ferait condamner à Bruxelles.
La question se pose aujourd'hui de façon très simple. Les constructions de gendarmeries ne sont plus éligibles au fonds de compensation de la TVA. On procède quelquefois - mais pas tout le temps - avec une subvention de l'Etat et un loyer versé par la gendarmerie. Si l'administration des domaines, qui évalue les loyers de l'Etat, voulait bien désormais, au moins s'agissant des gendarmeries, donner les instructions nécessaires pour que le loyer soit calculé de manière à couvrir tous les ans l'annuité de remboursement de l'emprunt, le problème serait alors réglé et l'amendement de M. Ostermann ne se justifierait plus.
Par conséquent, je souhaiterais, pour ne pas donner le signe que le Sénat est divisé sur cet amendement, qui recouvre un vrai problème, que M. Ostermann le retire et que dans le même temps, M. le secrétaire d'Etat s'engage à nous apporter une réponse sur ce point particulier de calcul du loyer. Bien entendu, il ne le peut certainement pas ce soir.
Vous me direz, bien sûr, qu'une commune n'est jamais obligée de construire une gendarmerie, puisqu'il ne s'agit pas d'une compétence communale. Mais nous savons très bien comment les choses se passent : l'obligation, à défaut d'être juridique, est morale ; la gendarmerie engage des démarches, met en avant la nécessité de procéder à des réparations au sein de la caserne, etc.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous êtes un élu local et vous connaissez bien ces questions : je vous demande donc d'engager des réflexions sur ce sujet pendant la navette afin de pouvoir nous affirmer clairement que les loyers seront désormais calculés de manière à couvrir les annuités d'emprunt. Et le problème sera ainsi réglé.
En attendant, je serais heureux que M. Ostermann accepte de retirer son amendement. Je ne voudrais pas, en effet, que l'on donne le sentiment que le Sénat, ou plutôt le Parlement, en adoptant cet amendement, qui serait retiré ou rejeté au cours de la navette pour des raisons de directive européenne, n'a pas une vision claire de ce genre de difficulté.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini rapporteur général. S'agissant de la conformité au droit communautaire, j'ai une petite bible qui est le rapport fait au nom de la commission des finances par notre collègue Denis Badré. (Très bien ! sur les travées du RPR, du groupe des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Je me réfère à la fameuse annexe H, qui comporte une rubrique n° 9 ainsi libellée : « La livraison, construction, rénovation, transformation de logements fournis dans le cadre de la politique sociale ».
M. Michel Charasse. Il s'agit de logements !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Puis, à la page 40 dudit rapport, où est rappellée la discussion intervenue dans le cadre du projet de loi de finances pour 1999, le rapporteur s'exprime ainsi : « On pourrait donc en conclure implicitement qu'une telle mesure est eurocompatible, mais que son application effective se heurte à la réglementation actuellement en vigueur en France. Ainsi, seul le logement social peut bénéficier d'un taux réduit, mais l'appréciation du champ des logements sociaux relève de la souveraineté des Etats ».
Rendons à l'Europe ce qui lui appartient, conservons sur le plan national ce qui est de notre propre domaine, le domaine du législateur national. Il est tout à fait possible de considérer que les constructions de casernes de gendarmerie entrent dans le cadre de la politique sociale. Au demeurant, les logements de gendarmes sont bien des logements sociaux.
M. Michel Charasse. Pour la partie logement, mais pas pour la partie casernement !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Alors, au moins pour la partie logement !
M. Michel Charasse. Il vaudrait mieux que les loyers couvrent les annuités d'emprunts ! L'amendement de M. Ostermann ne règle pas le problème !
M. Auguste Cazalet. Il a raison !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat. M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Monsieur le rapporteur général, je maintiens que la directive du 22 octobre 1999 ne permet pas une pareille baisse du taux de la TVA pour les constructions de gendarmerie.
Par ailleurs, j'informe le Sénat que la Commission, dans un rapport qu'elle a adressée à l'ensemble des Etats membres en novembre 1997, a stigmatisé l'abus auquel procédaient certains Etats membres dans la notion extensive qu'ils avaient du logement social. Nous ne pouvons donc pas considérer qu'il s'agit, dans le cas d'espèce, de logements sociaux au sens classique du terme. La directive du 22 octobre 1999 s'applique par conséquent pleinement.
Mais je suis très sensible, comme toujours, à la sagesse exprimée par M. Charasse qui, à l'instant, vient de mettre le doigt sur une difficulté. Je tiens d'ailleurs à confirmer qu'une collectivité locale ou territoriale - commune ou département - construisant une gendarmerie pour le compte de l'Etat ne bénéficie pas du FCTVA,
Par conséquent, monsieur Charasse, je crois légitime et sage de procéder aux investigations nécessaires sur le point de savoir si le loyer auquel les gendarmeries sont louées par les collectivités territoriales qui en ont assuré la maîtrise d'ouvrage et la construction ne peut pas couvrir le montant exact des frais engagés par ces collectivités terrirotiales pour cette construction. Je vous donnerai une réponse le moment venu.
Sous le bénéfice de cette avancée obtenue par les sénateurs et après avoir répondu, je crois, avec grande précision et extrême rigueur, en allant dans votre sens, je vous demande, monsieur Ostermann, de bien vouloir retirer l'amendement n° I-109.
M. le président. Monsieur Ostermann, l'amendement n° I-109 est-il maintenu ?
M. Joseph Ostermann. Il faut répondre à la préoccupation soulevée dans cet amendement.
J'accepte de retirer cet amendement aujourd'hui. Mais soyez assuré, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'il réapparaîtra si nous n'obtenons pas de réponse satisfaisante.
M. le président. L'amendement n° I-109 est retiré.
Je suis saisi de neuf amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° I-108, MM. Ostermann, Braun, Cazalet, Chaumont, de Broissia, Joyandet, Leclerc, Murat, Oudin et Trégouët proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après le a quinquies de l'article 279 du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« ... Les prestations de restauration. »
« II. - Les pertes de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus à l'article 403 du même code. »
Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° I-79 est présenté par MM. Hérisson, Amoudry, Arnaud, Huchon, Louis Mercier et Fréville.
L'amendement n° I-135 est déposé par MM. du Luart, Bourdin, Clouet, Lachenaud, de Rocca Serra, Torre, Trucy et les membres du groupe des Républicains et Indépendants.
Tous deux tendent à insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le a quater de l'article 279 du code général des impôts est rétabli dans la rédaction suivante :
« a quater) La fourniture de repas à consommer sur place. »
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat du I ci-dessus est compensée à due concurrence par l'augmentation des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° I-175, Mme Beaudeau, MM. Loridant, Foucaud et les membres du groupe communiste, républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le a quater de l'article 279 du code général des impôts est rétabli dans la rédaction suivante :
« a quater) La fourniture de repas par les entreprises du secteur de la restauration traditionnelle et consommés sur place. »
« II. - Pour compenser les pertes de recettes résultant du I ci-dessus, le taux prévu à l'article 219 du code général des impôts est relevé à due concurrence. »
Par amendement n° I-81 rectifié bis, M. Hérisson, Mme Bocandé, MM. Ballayer, Baudot, Belot, Branger, Huriet, Amoudry, Arnaud, Huchon, Louis Mercier, Moinard, Marquès, Nogrix, Lorrain, Richert, Souplet et Fréville proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 281 quinquies du code général des impôts est rétabli dans la rédaction suivante :
« Art. 281 quinquies. - La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux de 14 % pour la fourniture de repas à consommer sur place. »
« II. - La perte de recettes est compensée à due concurrence par le relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° I-136, MM. du Luart, Bourdin, Clouet, Lachenaud, de Rocca Serra, Torre, Trucy et les membres du groupe des Républicains et Indépendants proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article 281 nonies du code général des impôts, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. ... - La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux de 14 % en ce qui concerne la vente à consommer sur place dans le secteur de la restauration. »
« II. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par l'augmentation des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° I-80 rectifié bis, MM. Arnaud, Barraux, Bécot, Bernardet, Branger, Dériot, Hérisson, Herment, Huchon, Huriet, Lesbros, Lorrain, Malécot, Marquès, Louis Mercier, Moinard, Richert, Souplet et Fréville proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel rédigé comme suit :
« I. - Il est inséré dans l'article 279 du code général des impôts un a sexies ainsi rédigé :
« a sexies) Les prestations effectuées par les traiteurs de réception dans la limite de 50 % de leur montant ».
« II. - La perte de recettes est compensée à due concurrence par le relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° I-103, MM. Leclerc et Murat proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel rédigé come suit :
« I. - Il est inséré dans l'article 279 du code général des impôts un a sexies ainsi rédigé :
« a sexies) Les prestations effectuées par les traiteurs de réception. »
« II. - La perte de recettes est compensée à due concurrence par le relèvement du taux prévu à l'article 978 du code général des impôts. »
Par amendement n° I-82 rectifié, MM. Arnaud, Barraux, Bécot, Bernardet, Branger, Dériot, Hérisson, Herment, Huchon, Huriet, Lesbros, Lorrain, Malécot, Marquès, Louis Mercier, Moinard, Richert, Souplet et Fréville proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel rédigé comme suit :
« I. - Il est inséré dans le code général des impôts un article 281 decies ainsi rédigé :
« Art. 281 decies. - La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux de 14 % sur les prestations effectuées par les traiteurs de réception. »
« II. - La perte de recettes est compensée à due concurrence par le relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Ostermann, pour défendre l'amendement n° I-108.
M. Joseph Ostermann. Cet amendement concerne les prestations de la restauration.
Le secteur de la restauration, en France, est soumis à deux taux de TVA différents : l'un de 5,5 % pour la vente à emporter et la livraison de repas à domicile, l'autre à 20,6 % pour la restauration à consommer sur place.
Cette situation engendre de graves inégalités au sein de la profession et entraîne de sensibles distorsions de concurrence. En outre, le taux de 20,6 % met en difficulté un certain nombre de restaurateurs qui se voient trop lourdement taxés et ne peuvent assurer ainsi la rentabilité de leurs équipements, notamment en zone rurale où les prix pratiqués sont bien souvent en deçà de ceux qui sont pratiqués par telle ou telle autre enseigne internationale.
Enfin, la coexistence de ces deux taux provoque parfois, au sein d'une même entreprise, des difficultés de comptabilité très difficilement gérables.
C'est pourquoi le présent amendement vise à assujettir le secteur de la restauration dit « traditionnel » au même taux de TVA que le secteur de la vente à emporter, soit 5,5 %.
M. le président. La parole est à M. Arnaud, pour présenter l'amendement n° I-79.
M. Philippe Arnaud. Cet amendement va dans le même sens que celui qui vient d'être exposé. Je tiens toutefois à ajouter que l'activité qui est visée est à forte densité de main-d'oeuvre. J'espère, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous considérerez cet amendement comme eurocompatible. (Sourires.)
M. le président. L'amendement n° I-135 est-il soutenu ?...
La parole est à M. Loridant pour présenter l'amendement n° I-175.
M. Paul Loridant. Cet amendement vise à fixer le taux particulier de TVA à hauteur de 14 % pour la fourniture de repas par les entreprises du secteur de la restauration traditionnelle et consommés sur place.
Depuis de nombreuses années, les organisations professionnelles de ce secteur d'activité manifestent avec force leur souhait de voir réduire ce taux de TVA, actuellement fixé à 20,6 %, alors que, pour les ventes à emporter, il est à taux réduit.
Il nous semble opportun de répondre à cette légitime demande émanant des professionnels.
En effet, plusieurs arguments plaident en faveur de l'adoption de cette disposition.
Il s'agit, tout d'abord, de placer notre pays en situation d'égalité de concurrence vis-à-vis de nos partenaires européens que sont l'Espagne, la Grèce, le Portugal, l'Irlande. Ces pays touristiques bénéficent déjà d'un taux réduit dans le domaine de la restauration.
Chacun reconnaîtra que l'art culinaire contribue pour beaucoup à faire de la France la principale destination touristique au monde.
Un autre argument en faveur de cet amendement est la création d'emplois. Ce secteur d'activité crée en effet, chaque année, de 10 000 à 18 000 emplois.
Si, effectivement, ces emplois ont pour caractéristique d'être peu qualifiés et souvent sous-payés, nous pouvons penser qu'un taux réduit de TVA permettra, d'une part, de lutter contre le travail « au noir », et, d'autre part, de dégager des marges supplémentaires pour les salariés de la restauration.
Enfin, cette mesure fiscale serait particulièrement avantageuse pour les consommateurs, la plupart employés, ouvriers ou cadres, qui constituent l'essentiel de la clientèle des restaurants et cafés brasseries. Il n'est pas inutile de rappeler que 50 % des repas servis ont un prix inférieur à 50 francs. A défaut de payer moins cher, le consommateur pourra alors disposer d'un menu complet et de meilleure qualité.
Outre la nécessité de faire valoir le principe de non-discrimination au sein de l'Union européenne et de favoriser un secteur porteur d'emplois, il est plus que jamais indispensable de soutenir la gastronomie française à l'heure où va s'engager, à Seattle, le cycle des négociations de l'OMC, qui devraient permettre à la France de défendre son modèle agricole et alimentaire.
Cet amendement ne peut, par conséquent, que contribuer à préserver la culture du goût, de la convivialité, fondées sur des produits agricoles sains et de qualité.
Pour toutes ces raisons, nous vous invitons, mes chers collègues, à le voter le présent amendement.
M. le président. La parole est à M. Arnaud, pour défendre l'amendement n° I-81 bis.
M. Philippe Arnaud. Cet amendement tend à prévoir une TVA à un taux de 14 % pour la fourniture de repas à consommer sur place. Il s'agit d'un amendement de repli par rapport à l'amendement n° I-79, par lequel nous proposons un taux de 5,5 %.
M. le président. L'amendement n° I-136 est-il soutenu ?...
La parole est à M. Arnaud, pour défendre l'amendement n° I-80 rectifié bis.
M. Philippe Arnaud. Nous proposons un taux de TVA de 5,5 % pour l'ensemble des denrées alimentaires dès lors qu'il y a prestations, celles-ci étant le fruit d'activités d'entreprises à forte densité de main-d'oeuvre. Ce dispositif vise à éviter le recours au travail « au noir ».
M. le président. L'amendement n° I-103 est-il soutenu ?...
La parole est à M. Arnaud, pour présenter l'amendement n° I-82 rectifié.
M. Philippe Arnaud. Cet amendement vise à prévoir un taux de TVA de 14 % pour les prestations effectuées par les traiteurs. Il s'agit à nouveau d'un amendement de repli.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s I-108, I-79, I-175, I-81 rectifié bis , I-80 rectifié bis et I-82 rectifié ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ces amendements traitent d'un sujet extrêmement important.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. La bouche, ça compte !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il est bon de rappeler que la branche de la restauration représente 800 000 emplois dans ce pays, soit un pourcentage significatif de la population active.
Monsieur le secrétaire d'Etat, si l'on recherchait des baisses ciblées de TVA pour inciter à la création d'emplois, pourquoi ne pas avoir retenu le secteur de la restauration, plutôt que celui des logement ? Si je mets en balance ces deux secteurs d'activités, c'est parce que, en matière d'emploi, l'enjeu est exactement du même ordre.
En matière de services au logement, vous nous avez indiqué que l'on escomptait de la mesure envisagée de 35 000 à 45 000 créations d'emplois.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Soixante mille !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Pour la restauration, aux termes des analyses, la création de 40 000 à 50 000 emplois serait tout à fait concevable.
Du point de vue du coût pour les finances publiques, et ce n'est pas surprenant, l'ordre de grandeur est à peu près identique : un peu plus pour la restauration, de l'ordre de 22 milliards de francs, me dit-on, et 20 milliards de francs pour le logement.
Il est clair qu'en matière de restauration nous sommes face à une absurdité liée à la dichotomie entre, d'une part, les services de restauration rapide à emporter et de livraison à domicile, qui sont d'ores et déjà soumis au taux de 5,5 %, et, d'autre part, les restaurants traditionnels assujettis à la TVA au taux de 20,6 % à la vérité au taux de 17,5 % car il faut exclure le service de la base imposable en raison d'un texte ancien dont il est toujours fait application. Ce taux de 20,6 % s'applique également, sous conditions, à la restauration rapide sur place.
De nombreux rapports ont été faits sur ces sujets et j'ai notamment en mémoire celui de M. Edouard Salustro, à qui M. Jean Arthuis, alors qu'il était ministre de l'économie et des finances, avait confié une mission dans ce domaine.
Ces quelques chiffres et ce rappel montrent la très grande difficulté de la problématique des baisses ciblées de TVA.
Monsieur le secrétaire d'Etat, le Gouvernement en « mettant au pot » 20 milliards de francs a fait une baisse sur un secteur disposant, en effet, d'une capacité de créations d'emplois significative. Mais au nom de quoi faut-il considérer que les emplois à créer en matière de services au logement sont plus nobles, respectables, préférables en un mot, aux emplois susceptibles d'être créés dans la restauration ? C'est emplois contre emplois pour des branches d'activité de volume analogue, ce sont des mesures susceptibles d'avoir à peu près les mêmes effets sur la conjoncture économique et sociale.
Monsieur le secrétaire d'Etat, tous les amendements présentés ont des justifications extrêmement sérieuses et la commission des finances estime ne pas pouvoir choisir entre les uns et les autres.
La commission des finances estime également, M. Badré l'a montré avec beaucoup de pertinence tout à l'heure dans son intervention sur un article que, si le secteur des services au logement a été visé par la directive européenne du 21 octobre, c'est parce que tel a été le choix du Gouvernement français dans la négociation. Si le Gouvernement avait souhaité que le choix se porte sur la restauration, je pense, sincèrement, que c'est celle-ci qui aurait figuré sur la liste et non les services au logement.
M. Denis Badré. Ou les deux !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Oui, mais les deux, cela représente 40 ou 42 milliards de francs. Or un Gouvernement, même dans une période prospère, aura quelque difficulté à distribuer ainsi des dizaines de milliards de francs. N'oublions pas que notre pays enregistre toujours un solde budgétaire négatif de 215,4 milliards de francs.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il faut être objectif !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je crois qu'il faut être objectif, les uns et les autres.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Très bien !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Chacun sait que lorsqu'on crée un restaurant dans n'importe quelle commune - j'ai assisté, dans ma ville, à plusieurs créations de restaurant ces derniers temps - le minimum, pour un restaurant petit ou de taille moyenne, ce sont, dès le départ, six ou sept emplois créés. Chacun sait également que, dans cette branche, les emplois créés le sont souvent au bénéfice de personnes qui ont assez peu de formation professionnelle, assez peu de qualification, assez peu de spécialisation, et donc que ces emplois favorise l'insertion économique et sociale.
C'est en vertu de cette analyse que la commission s'en remet à la sagesse du Sénat sur tous les amendements qui sont présentés.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces amendements ?
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Je rejoindrai d'abord l'ensemble des orateurs et M. le rapporteur général qui, les uns après les autres, viennent de souligner l'importance du secteur de la restauration, auquel on peut adjoindre, dans le même raisonnement, le secteur de l'hôtellerie, dans l'économie nationale.
Ce secteur est d'autant plus important que la France est devenue au fil des ans, et particulièrement au cours de ces dernières années, le premier pays touristique du monde, accueillant 65 millions à 70 millions de touristes par an.
C'est un secteur important également parce que l'hôtellerie - par ailleurs assujettie au taux de TVA de 5,5 % - plus la restauration représentent quelque 600 000 à 700 000 emplois. Il s'agit donc d'un secteur fondamental dans la bataille pour l'emploi, vous avez raison.
Le problème de la TVA au taux réduit a souvent été débattu ici : lors de la discussion des lois de finances initiales pour 1998 et pour 1999, MM. Strauss-Kahn et Sautter ont indiqué qu'en effet le Gouvernement était conscient qu'un travail devrait être engagé en vue de faciliter, pour les entreprises du secteur de l'hôtellerie et de la restauration, les recrutements de personnels, pour toutes les raisons excellentes qui viennent d'être développées par M. le rapporteur général.
Si nous avons choisi, dans un premier temps, de réduire le taux de TVA à 5,5 % pour les réparations et les travaux dans les logements, ce n'est pas parce que nous privilégions le secteur du logement au détriment de celui de la restauration, mais simplement parce qu'un certain nombre d'obstacles se sont dressés contre notre volonté de travailler également à la réduction de ce taux pour la restauration.
Je veux rappeler ici la vérité historique. Lorsque ce point est venu en débat au niveau européen - application du taux réduit de TVA aux services à forte intensité de main-d'oeuvre - la France ne s'est pas opposée, loin s'en faut, à la demande de certains Etats membres tendant à l'inscription de la restauration sur la liste que j'évoquais tout à l'heure, avant la suspension de séance, liste qui a été dressée par la Commission et par les Etats membres et qu'il a été difficile d'arracher à un certain nombre de nos partenaires.
Ainsi, nous nous sommes heurtés, en ce qui concerne l'extension du taux de 5,5 % à la restauration, à la très vive opposition de certains Etat membres - je pense à la Suède, au Danemark...
M. Jacques Oudin. Et à l'Allemagne ! M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. ... je pense également à l'opposition résolue de l'Allemagne - si bien que, dans le compromis que nous avons néanmoins réussi à conquérir - et vous savez combien cela a été difficile - lors du conseil ECOFIN du 8 octobre dernier, la restauration ne figure pas parmi les services éligibles à la baisse de la TVA, alors que nous étions disposés à l'y inclure.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cela vous a tout de même bien arrangés !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Par conséquent, sur le plan communautaire,...
M. Emmanuel Hamel. Encore et toujours !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. ... l'application du taux réduit de TVA aux prestations de restauration demeure, mesdames, messieurs les sénateurs, radicalement impossible du point de vue juridique...
M. Jacques Oudin. Politiquement impossible, mais pas juridiquement !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. ... sans contrevenir aux dispositions générales de la directive du 19 octobre 1992 relative au rapprochement des taux de TVA, qui ne nous permet pas, depuis 1992 déjà, d'appliquer un taux de TVA autre que le taux normal à la restauration.
Seuls les Etats membres qui, au 1er janvier 1991, appliquaient déjà un taux réduit à ces prestations ont été, à titre tout à fait transitoire - nous pourrions dire précaire - autorisés à le maintenir.
M. Denis Badré. C'est vrai !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. La France n'est pas dans ce cas.
Cela étant, je rappelle que nous ne sommes pas les seuls à nous trouver dans cette situation quelque peu ambiguë et en effet contradictoire avec les objectifs d'emplois qui sont les nôtres, étant donné, encore une fois, l'importance du secteur de la restauration et de l'hôtellerie dans notre magnifique pays. Huit autres Etats membres soumettent les opérations de vente à consommer sur place à des taux de TVA compris entre 15 % et 25 %.
Il n'y a donc pas d'exception française dans ce domaine. On peut le regretter et je préférerais que nous nous situions dans un autre cas de figure, bien entendu.
J'ajoute que les entreprises du secteur de la restauration bénéficieront par ailleurs pleinement de la suppression progressive sur cinq ans de la part salariale de la taxe professionnelle.
J'ajoute également qu'elles bénéficieront pleinement de la réforme des charges patronales, dont on sait qu'elles vont jouer beaucoup, si ce n'est à titre principal, dans des secteurs où, du fait des qualifications rappelées tout à l'heure par M. le rapporteur général, du fait de l'existence de salaires proches du SMIC, la réduction de la charge patronale de 21 000 francs par emploi et par an lorsqu'il y a aménagement et réduction du temps de travail ; c'est le cas du secteur de la restauration et de l'hôtellerie, qui sera probablement un des principaux bénéficiaires de la mesure.
C'est pourquoi, tout en regrettant avec vous que nous ne puissions pas aller plus loin pour des raisons communautaires, pour des raisons juridiques, pour un empêchement juridiquement dirimant,...
M. Emmanuel Hamel. Toujours des raisons communautaires !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. ... je demande aux différents auteurs des amendements de les retirer.
Je donnerai maintenant l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° I-81 rectifié bis, qui est un peu différent des autres.
Le régime de TVA applicable au secteur de la restauration est fondé sur la distinction entre les ventes de produits alimentaires, passibles du taux de 5,5 %, et les ventes à consommer sur place, passibles du taux de 20,6 %, chacun le sait.
Cette différence s'explique par le fait qu'un restaurateur ne livre pas un produit : il assure une prestation caractérisée par la pluralité des services offerts aux clients.
Cette analyse a été confirmée par la Cour de justice des Communautés européennes, qui a indiqué, dans un arrêt du 2 mai 1996, que la restauration devait être considérée comme une opération unique de prestation de services.
Ainsi, les traiteurs de réceptions, qui livrent des produits et dépêchent du personnel pour apprêter les repas, pour les servir ou pour effectuer des prestations d'entretien ou de nettoyage, réalisent bien des opérations de vente à consommer sur place, qui doivent être soumises au taux normal de TVA de 20,6 %.
En revanche, les livraisons à domicile de produits ou de plats préparés qui ne s'accompagnent d'aucune mise à disposition de personnel sont soumises au taux applicable aux produits physiques eux-mêmes, soit, en règle générale, le taux réduit de 5,5 %.
Je pense vous avoir donné ainsi tous apaisements.
J'invite donc les auteurs de l'amendement n° I-80 rectifié bis, qui ont été, je l'espère, rassurés et confortés dans le bien-fondé de leur demande, à retirer leur amendement, et je me prononce contre tous les autres amendements qui ont été défendus, excellemment au demeurant. Mais je n'y peux rien, c'est la règle communautaire.
M. Emmanuel Hamel. Libérez-vous-en ! (Sourires.)
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Nous devons la respecter !
M. Emmanuel Hamel. Ce n'est pas drôle !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Ce n'est pas facile de faire l'Europe ! Vous feriez mieux de nous aider, monsieur Hamel !
M. le président. Je vais mettre aux voix ces différents amendements.
M. Denis Badré. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Badré.
M. Denis Badré. Nous sommes tous d'accord, me semble-t-il, pour encourager un secteur aussi largement porteur d'emplois à un moment où nous livrons bataille précisément en faveur de l'emploi. Cela a été dit et répété sur tous les bancs de cette assemblée, et même repris par M. le secrétaire d'Etat.
J'insisterai sur un second argument qui milite en faveur de la réduction du taux de TVA applicable au secteur de la restauration.
Comme le rappelait à l'instant M. le secrétaire d'Etat, la question est de savoir où s'arrête le produit vendu et où commence le service rendu, sachant que, selon les formes de restauration, on a un peu plus de produits et un peu moins de services, ou un peu plus de services et un peu moins de produits.
Entre la restauration traditionnelle, la restauration collective, la restauration rapide et les plats livrés à domicile par des traiteurs, il existe aujourd'hui de vraies distorsions de concurrence, de vraies difficultés liées à la délimitation des différentes formes de restauration et de vraies erreurs à corriger. Il se pose de vrais problèmes auxquels il faut trouver de vraies solutions. C'est une raison de plus pour rechercher effectivement une solution à l'ensemble de la question posée.
A terme, la seule solution serait d'aligner l'ensemble de ces formes de restauration sur le taux réduit de 5,5 % ; cela me paraît tout à fait évident. Mais il est clair que, sur le plan budgétaire, on ne peut pas faire un très gros effort à la fois sur le bâtiment et sur la restauration. C'est pourquoi, comme je l'ai indiqué dans mon propos liminaire, la solution consisterait à demander, car nous en avons le droit, un second taux réduit de 14 % pour la restauration traditionnelle. Le coût budgétaire de l'opération serait ainsi ramené à 9 milliards de francs, ce qui est déjà plus supportable !
Encore aurait-il fallu, puisque l'annexe H interdit de passer au taux réduit pour la restauration, saisir l'opportunité de la directive sur les services à haute intensité de main-d'oeuvre. Vous n'y êtes pas parvenu. Nous nous sommes battus seuls et à vos côtés, depuis le mois de juin. Nous l'avons dit et répété au ministre chaque fois que nous l'avons auditionné en commission des finances. Je le lui ai moi-même rappelé chaque fois qu'il m'a été donné de le rencontrer lorsque je préparais mon rapport.
Malgré tout, la France s'est laissé enfermer, vous vous êtes laissé enfermer dans la définition d'une liste permettant d'appuyer la directive alors que nous préconisions la définition de critères. Ce dernier système, beaucoup plus souple, nous aurait permis d'élargir l'expérimentation. Cela n'a pas été possible. Je le regrette. A partir du moment où le principe de la liste a été retenu, vous n'avez pas pu y faire inscrire la restauration. Je le regrette également.
Les amendements qui nous sont présentés ne sont donc pas eurocompatibles, parce que nous n'avons pas pu faire en sorte qu'ils le deviennent à l'occasion de la directive dont il a été question cet été.
Monsieur le secrétaire d'Etat, dans la mesure où j'ai travaillé sur un rapport relatif à l'eurocompatibilité, il m'est impossible de voter l'un quelconque de ces amendements ; je me déjugerais. Je ne les voterai donc pas, tout en considérant que le problème reste entier et qu'il doit être traité.
Je vous demande donc à nouveau, monsieur le secrétaire d'Etat, comme je vous l'ai dit dans mon intervention liminaire, de tout faire pour trouver une nouvelle occasion, une nouvelle opportunité de rouvrir le dossier et de le traiter, éventuellement par étape, en passant par un taux intermédiaire de 14 %, qui permettrait de réduire le coût de l'opération et rendrait un peu moins intolérables les difficultés que rencontre l'ensemble du secteur.
M. Jacques Oudin. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Oudin.
M. Jacques Oudin. Nous assistons à un débat de haute tenue et de grande qualité sur la philosopie qui doit animer notre action en matière de TVA.
C'est vrai, des principes sont à définir, des orientations politiques sont à déterminer. Monsieur le secrétaire d'Etat, quand vous nous avez dit que, juridiquement, on ne le pouvait pas, je vous ai répondu que c'est parce que, politiquement, vous n'avez pas pu. L'historique de cette affaire est quand même intéressant.
Vous nous avez donné trois arguments.
D'abord, le taux de TVA pour l'hôtellerie est à 5,5 %, celui de la restauration à emporter est de 5,5 %. Dans ces conditions, pourquoi la restauration traditionnelle serait-elle au taux majoré ? C'est illogique et incompréhensible.
Ensuite, la France est, nous avez-vous dit, la première destination touristique mondiale. La première !
Enfin, la France est également une des grandes destinations gastronomiques du monde.
Forts de ces trois arguments, nous n'avons pourtant pas été capables d'infléchir la position de nos partenaires et de les convaincre que la restauration était capitale pour nous. Vous auriez pu évoquer, à la limite, le compromis de Luxembourg !. Si la restauration n'est pas un fleuron de la France...
Vous avez choisi le secteur du bâtiment. J'ai entendu les excellents propos de notre rapporteur général. Il est vrai qu'il y avait un choix à faire. Nous ne partageons pas complètement celui que vous avez fait. N'ayant pas eu l'honneur de rédiger le rapport que M. Badré a réalisé sur l'eurocompatibilité, je voterai les amendements, et je le ferai en pleine conscience. Pourquoi ?
Tout à l'heure, monsieur le secrétaire d'Etat, vous nous avez expliqué d'une manière parfaitement limpide et claire qu'en abaissant le taux de la TVA dans le domaine du bâtiment vous aviez pour objectif de créer des emplois et de développer le chiffre d'affaires de ce secteur d'activité. Je ne suis pas certain que vous perdiez 20 milliards de francs en matière de recouvrement de la TVA dans le bâtiment. En effet, le chiffre d'affaires de ce secteur d'activité augmentant, les recettes de TVA vont elles-mêmes augmenter.
Pour la restauration, ce serait la même chose, monsieur le secrétaire d'Etat !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. On mangera plus ? (Sourires.)
M. Jacques Oudin. Combien de familles ne vont pas au restaurant parce que c'est trop cher ? Abaisser le taux de TVA permettrait d'accroître le chiffre d'affaires, de développer des emplois et donc d'augmenter les recettes fiscales de l'Etat. Je vous le dis, monsieur le secrétaire d'Etat, le choix que vous avez opéré est un choix incomplet !
Je ne mésestime pas les avantages liés à une baisse du taux de TVA dans le bâtiment. Mais je considère que nous n'avons fait qu'une partie du chemin et que, pour la France, renoncer à la restauration, c'est tout de même, à terme, un mauvais calcul !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Très bien !
M. Philippe Arnaud. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Arnaud.
M. Philippe Arnaud. J'ai présenté très brièvement tout à l'heure ces amendements, étant bien entendu que chacun en avait pris connaissance et en avait bien compris le sens. A l'occasion de ce débat, un certain nombre de problèmes de fond ont été évoqués, parmi lesquels celui de la qualification du principal et de l'accessoire.
En vertu d'un principe fondamental que personne n'a remis en cause, l'accessoire suit le principal. En matière de TVA, c'est donc bien le produit accessoire qui subit le taux de TVA du produit principal. En l'occurrence, pour un produit alimentaire, c'est le taux réduit à 5,5 % qui s'applique si le produit alimentaire est accompagné d'un service. Si le service de main-d'oeuvre étant lui-même soumis à un taux de TVA à 20,6 %, on considère que c'est le produit alimentaire qui devient l'accessoire par rapport au service.
Dès lors, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, en matière de restauration, qu'elle soit sur place ou à domicile, où est le principal ? N'est-ce pas le produit élaboré de restauration, le produit alimentaire, par rapport au service, à la main-d'oeuvre qui vient l'accompagner ? Lorsque les traiteurs à domicile apportent le produit alimentaire, les plats préparés, c'est cela qui importe. Le service de main-d'oeuvre n'est que l'accessoire permettant de consommer les produits alimentaires, qui sont le principal.
Je ne vous mets pas en cause, monsieur le secrétaire d'Etat, ni vous ni d'ailleurs aucun membre du Gouvernement. Mais sans doute y a-t-il eu, au fil des années, des dérives dans l'interprétation administrative, sinon je ne saurais m'expliquer cette confusion entre le principal et l'accessoire.
Monsieur le secrétaire d'Etat, il serait bon que vous nous disiez quel est d'après vous, dans ce domaine, le principal et quel est l'accessoire ? De cette réponse, nous pourrons en conclure quel taux de TVA doit suivre l'autre.
Par ailleurs, je crois avoir noté un large consensus entre nous, quelles que soient les travées, et vous-même afin de tout mettre en oeuvre pour régler ce problème, qui affecte effectivement des activités à forte densité de main-d'oeuvre, essentielles pour notre économie. Si le fait que ces amendements soient maintenus et votés au Sénat - même s'ils ne sont pas repris ensuite à l'Assemblée nationale - vous aidait, monsieur le secrétaire d'Etat, à convaincre nos partenaires, nous ferions une bonne oeuvre. C'est la raison pour laquelle je maintiens mes amendements.
M. Yann Gaillard. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Gaillard.
M. Yann Gaillard. La discussion est un peu compliquée dans la mesure où il nous est difficile de soutenir que le choix du bâtiment est mauvais ! A partir du moment où l'on ne peut pas baisser la TVA dans les secteurs à la fois du bâtiment et de la restauration, le choix est de la responsabilité du Gouvernement, ce qu'il a fait. Ce n'est pas à nous de dire qu'il aurait mieux valu choisir la restauration et laisser tomber le bâtiment. Deux arguments plaidaient toutefois en faveur de la restauration.
Le premier est celui de l'emploi, bien sûr. Nous le savons tous, les emplois qui ont été créés aux Etat-Unis, des emplois non qualifiés surtout, l'ont été dans les secteurs de la restauration et de l'hôtellerie ! Toutes les études des économies le montrent. Cependant, il est vrai que le bâtiment, lui aussi, est intéressant sous l'angle de l'emploi.
Le second argument qui aurait pu faire pencher la balance vers la restauration, c'est la complexité incroyable du système que nous découvrons dans cette discussion - la restauration au restaurant, la restauration sur place, la restauration à emporter, les traiteurs qui livrent des plats tout préparés... - complexité qui rappelle la querelle des pâtissiers et des rôtisseurs au temps des corporations sous l'Ancien Régime !
Les choses sont ainsi : nous ne pouvons pas tout faire ; je ne sais même pas si nous pourrons voter ces amendements. Peut-être seront-ils retirés ? Certains le seront sans doute. Quoi qu'il en soit, monsieur le secrétaire d'Etat, nous vous demandons tous de nous promettre solennellement que le Gouvernement, à l'occasion de la prochaine étape, mettra la priorité sur la restauration, car je conçois mal les arguments politiques particuliers qui ont fait obstacle au choix de ce secteur !
Vous avez donc choisi le bâtiment. Vous ne pouviez certes pas tout faire. Alors battez-vous, l'année prochaine, pour la restauration et promettez-nous non seulement de tout faire, mais aussi de réussir !
M. Yves Fréville. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville. Notre collègue Jacques Oudin a posé le problème de la TVA dans toute son ampleur. Personnellement, je pense qu'il existe un trop grand écart entre le taux de 5,5 % et celui de 20,6 %.
M. Michel Charasse. A qui la faute ?
M. Yves Fréville. L'écart est de un à quatre, et cette différence si importante engendre des distorsions très difficilement corrigibles.
M. Michel Charasse. Vive Juppé !
M. Yves Fréville. Personnellement j'estime que cet écart n'est pas véritablement justifié.
On avance très souvent le caractère redistributif de la TVA. Certains estiment qu'un taux de TVA faible pour les produits de première nécessité induit automatiquement une redistribution en faveur de nos concitoyens ayant les revenus les plus faibles. Toutes les analyses économiques montrent que ce n'est pas vrai. D'ailleurs, lorsqu'on a étudié les effets de la baisse de la TVA à 5,5 % sur les dépenses de logement, on s'est aperçu que cette mesure n'avait pas nécessairement un caractère redistributif. La seule façon de résoudre le problème - mais cela relève d'une responsabilité générale et collective - consistera à réduire l'écart, ce qui rendra alors les distorsions supportables.
Nous allons peut-être traiter le problème de la restauration - et je m'en réjouirai - mais, en ce cas, nous verrons apparaître immédiatement deux ou trois autres professions qui montreront qu'elles ont tout autant besoin d'une main-d'oeuvre intensive que la restauration et le logement et qui demanderont à leur tour à bénéficier d'une telle mesure. Nous ne pourrons pas garder un système comprenant des écarts de taux aussi forts.
Par conséquent, je ne pense pas que la voie à suivre soit d'essayer de ramener le taux de TVA applicable à toutes les professions à main-d'oeuvre intensive au niveau le plus bas.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Très bien ! M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Le débat de qualité qui vient de s'instaurer mérite que des réponses soient apportées aux questions posées.
Nous sommes d'accord les uns et les autres sur le fait que la restauration est un secteur porteur pour la France. Expression de la culture française, c'est une fierté nationale. Le Gouvernement est donc disposé à tout faire pour sa défense. Puisqu'il faut que je prenne des engagements en jurant sur le Gault-Millau ou sur le guide Michelin, je vais le faire : nous prenons l'engagement de continuer à travailler dans le bons sens à cet égard.
Nous ne nous sommes pas laissé enfermer, comme je l'ai entendu dire tout à l'heure - le mot est d'ailleurs excessif - dans le choix d'une liste plutôt que dans celui de critères.
Nous avons amené nos partenaires à considérer comme nécessaire d'examiner ce que nous pouvions faire entre Européens pour favoriser l'emploi. Mesdames, messieurs les sénateurs, c'est déjà une victoire que d'avoir obtenu de nos quatorze partenaires de l'Union européenne la possibilité, pendant une période trop courte certes, mais c'est un premier pas, de réduire les taux de TVA pour favoriser l'emploi !
Nous en étions loin avant le traité d'Amsterdam, qui a été un moment fort de prise en considération de la problématique de l'emploi dans la politique éconmique et, aujourd'hui, dans la politique fiscale.
Nous pouvons donc considérer, les uns et les autres, en tant que Français au sein de cette Union européenne qui nous tient tous à coeur,...
M. Emmanuel Hamel. Ah non !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. ... que nous avons fait franchir des pas décisifs ; et c'est la France qui a amené le débat, et c'est la France qui a remporté une victoire au cours de la réunion du Conseil ECOFIN du mois d'octobre.
Les faits sont là : la construction européenne se fait à quinze, elle ne se fait pas en fonction des seules inflexions politiques et des seuls désirs politiques de la France ; nous avons nécessairement besoin de conclure des compromis. Ils ne sont pas satisfaisants à 100 %, certes, mais ils ne sont d'ailleurs pas plus satisfaisants pour nos partenaires, et je pense en particulier à ceux que j'ai cités tout à l'heure, qui étaient résolument opposés et qui ont failli nous conduire au blocage lorsque la France a exigé, par une action patiente et résolue, dont les mérites reviennent à Dominique Strauss-Kahn et à Christian Sautter, de faire parvenir l'Europe à un niveau de conscience supérieur de mobilisation en faveur de l'emploi.
J'ai maintenant quelques réponses plus précises à apporter.
Monsieur Arnaud, dès l'instant qu'il y a prestation de services, il ne s'agit plus d'une vente de denrées alimentaires et donc, en fonction des règles européennes, il n'est pas possible d'appliquer le taux de 5,5 %.
Aux termes d'un arrêt de la Cour de justice - M. Hamel m'excusera de citer cet arrêt qui fleure bon l'étranger -...
M. Emmanuel Hamel. C'est la démission de la France !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. ... l'arrêt Faaborg-Gelting Linien gegen Finanzamt Flensburg du 2 mai 1996 - voilà un bel arrêt ! - la restauration doit être considérée comme une opération unique de prestations de services.
M. Emmanuel Hamel. Nous sommes devenus des esclaves !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Monsieur Hamel, je pensais que vous aviez suffisamment d'humour...
M. Emmanuel Hamel. Nous avons perdu notre liberté !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. ... pour accepter que je cite un arrêt de la Cour de justice.
M. Emmanuel Hamel. Ce n'est pas supportable ! (M. Hamel se lève.)
M. le président. Monsieur Hamel, restez parmi nous !
M. Emmanuel Hamel. Non !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Monsieur, permettez que nous citions un arrêt de la Cour de justice sans que cela emporte votre ire !
M. le président. Monsieur Hamel,...
M. Jean Chérioux. Restez avec nous ! (M. Hamel quitte l'hémicycle.)
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. A M. Oudin, je dirai que l'hôtellerie figure bien sur la liste de l'annexe H de la directive, que la vente à emporter est assimilée à une vente de denrées alimentaires et figure à ce titre sur l'annexe H de la même directive, mais ce n'est pas le cas pour la vente à consommer sur place.
Tout cela est du pur droit communautaire et nous ne pouvons pas nous évader de ces règles même si nous souhaitons les faire bouger petit à petit dans le sens qu'ont souhaité unanimement les sénateurs.
Le Gouvernement prend en compte les objectifs ; il continuera à se battre, mais nous sommes dans une Union européenne à quinze, dont la France est certes un élément moteur et décisif, mais au sein de laquelle elle est obligée de tisser des compromis. Nous essayons de faire en sorte que ces compromis soient de plus en plus favorables à nos activités économiques. Nous voulons qu'un jour cette activité centrale du paysage économique français soit respectée à la hauteur des espoirs qu'elle porte en elle en matière d'emplois, à la hauteur de l'image qu'elle donne de la France, image qu'elle est mesure de porter non seulement au sein de l'hexagone, mais dans toute l'Europe et dans le monde entier. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur certaines travées du RDSE et de l'Union centriste.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-108.
M. Joseph Ostermann. Je demande la parole pour l'explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Ostermann.
M. Joseph Ostermann. Je ne reviens plus sur le vecteur d'emplois que sont l'hôtellerie et la restauration pour ne pas relancer le débat. Je dirai seulement que je suis étonné de ce qu'a dit M. le secrétaire d'Etat sur la position de l'Allemagne. Vivant en zone frontalière, j'ai pu me rendre compte que les Allemands font nettement plus pour leur gastronomie, pour leur restauration, pour leur hôtellerie que les Français. Je voulais l'affirmer ici.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. On y mange moins bien !
M. Joseph Ostermann. Mais non, ce n'est pas mauvais !
En tout cas, le Parlement s'honorerait aujourd'hui en votant l'amendement n° I-108, qui apporterait un soutien au Gouvernement. C'est la raison pour laquelle je le maintiens.
MM. Philippe Marini, rapporteur général, et Alain Lambert, président de la commission. Très bien !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Das ist eine gute Entscheidung !
M. le président. Monsieur Arnaud, maintenez-vous vos amendements ?
M. Philippe Arnaud. Compte tenu des explications de M. le secrétaire d'Etat, de sa volonté manifeste de faire aboutir cette affaire, mais également après avoir entendu les explications de Denis Badré et de la commission, je retire mes amendements, convaincu que les choses avanceront.
M. le président. Les amendements n°s I-79, I-81 rectifié bis , I-80 rectifié bis et I-82 rectifié sont retirés.
Madame Beaudeau, l'amendement n° I-175 est-il maintenu ?
Mme Marie-Claude Beaudeau. Oui, monsieur le président.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-108, repoussé par le Gouvernement et pour lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.

(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l'amendement.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 3, et l'amendement n° I-175 n'a plus d'objet.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° I-91, M. Angels, Mme Bergé-Lavigne, MM. Charasse, Demerliat, Haut, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le b decies de l'article 279 du code général des impôts est rédigé comme suit :
« b decies) Les abonnements relatifs aux livraisons d'électricité, de gaz combustible et d'énergie calorifique, distribuées par réseau public. »
« II. - Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées à due concurrence par une hausse des tarifs prévus à l'article 885 U du code général des impôts. »
Par amendement n° I-178, Mme Beaudeau, MM. Loridant, Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le b decies de l'article 279 du code général des impôts est ainsi rédigé :
« b decies) Les abonnements relatifs aux livraisons d'électricité, de gaz combustible et d'énergie calorifique, distribués par réseaux publics. »
« II. - La perte de recettes, résultant de l'abaissement du taux de TVA sur les abonnements aux réseaux de chaleur, est compensée par le relèvement à due concurrence du taux du prélèvement libératoire prévu au 2 de l'article 200 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Angels, pour défendre l'amendement n° I-91.
M. Bernard Angels. La loi de finances de 1999 a soumis au taux réduit de la TVA les abonnements relatifs aux distributions d'énergie et de gaz, mais elle n'avait pas étendu cette réduction aux réseaux de chaleur. Cela entraîne un traitement différencié des sources d'énergie qui nous semble inopportun.
De plus, comme de nombreuses communes sont équipées d'un réseau de chauffage urbain, leur appliquer également la baisse de TVA permettra de réduire la facture de chauffage pour environ 2,5 millions de personnes souvent modestes qui sont concernées par ce mode de chauffage.
C'est le cas, par exemple, en région parisienne, de grands quartiers d'immeubles de Sarcelles, Bagnolet, Massy, Antony.
Pour ces deux raisons, il serait logique et utile de passer au taux réduit l'ensemble des abonnements relatifs aux livraisons d'énergie distribuée par le réseau public.
Tel est l'objet de cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Beaudeau, pour défendre l'amendement n° I-178.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Notre amendement vise à baisser le taux de TVA sur les abonnements aux réseaux de chaleur.
La géothermie, notamment, est victime d'une discrimination inacceptable par rapport aux réseaux alimentés par l'électricité ou par le gaz. Cette injustice est d'autant plus inacceptable que la géothermie est la seule énergie propre à ne pas produire de gaz carbonique, générateur pour 70 % à 80 % de l'effet de serre.
La France s'est engagée, à Kyoto, à réduire la production de gaz carbonique de 10 % d'ici à 2010. Or, actuellement, la progression est de 5 %.
Réduire la TVA à 5,5 %, c'est donc appliquer les engagements internationaux pris par la France.
Je pense, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous serez sensible à cette proposition ! La refuser, ce serait précipiter les trente-neuf sites qui subsistent sur les soixante-dix que nous comptions il n'y a pas si longtemps à la fermeture, rendant nécessaire une reconversion des chaudières au fioul ou au gaz, donc de nouveaux investissements et de nouvelles pollutions.
Ce refus serait d'autant plus incompréhensible qu'elle n'engagerait pas des crédits importants : cette réduction permettrait une économie de 600 000 francs par site, soit au total 23 millions de francs, ce qui assurerait la justice fiscale tout en recourant à l'énergie propre.
L'eau chaude est une énergie du futur qui n'est pas encore performante ni même maîtrisée. Toutefois, il ne faut pas la condamner. Permettez-lui donc de pouvoir se perfectionner, pour devenir demain une source performante.
Il serait particulièrement inacceptable que les faveurs accordées aux cogénérateurs, qui seront désormais les concurrents directs d'EDF, ne se répercutent pas sur les clients domestiques dont les foyers sont reliés au réseau public alimenté par la cogénération ou la géothermie.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission partage le souci de développer les réseaux de chaleur pour des raisons tant sociales qu'environnementales évidentes. Mais il est clair que cette proposition ne peut connaître d'effets pratiques à l'heure actuelle, compte tenu du droit communautaire en vigueur.
Nous soutenons la demande formulée et nous encourageons le Gouvernement à faire évoluer la législation communautaire sur ce point, mais l'avis de la commission ne peut être favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est très sensible à l'objectif visé par l'amendement qui vient d'être défendu par M. Angels mais, contrairement aux fournitures de gaz et d'électricité, la distribution d'énergie calorifique par les réseaux de chaleur ne figure pas aujourd'hui - en disant cela, je m'engage à faire évoluer les choses - parmi les opérations que les Etats membres peuvent soumettre au taux réduit de la taxe sur la valeur ajoutée.
Par une lettre adressée par M. Strauss-Kahn à la Commission le 7 septembre 1998, le Gouvernement a demandé d'intégrer la fourniture d'énergie calorifique dans la liste communautaire des opérations éligibles au taux réduit. Par conséquent, l'affaire est en suspens ; nous ferons pression pour aller dans ce sens.
En attendant, le groupe socialiste a raison d'insister sur cette anomalie de notre droit fiscal. Mais, pour l'instant, je pense qu'il serait sage que ces amendements soient retirés.
M. le président. Monsieur Angels, maintenez-vous votre amendement ?
M. Bernard Angels. Je le retire, comptant sur la détermination du Gouvernement à régler le problème.
M. le président. L'amendement n° I-91 est retiré.
Madame Beaudeau, maintenez-vous votre amendement ?
Mme Marie-Claude Beaudeau. Je suis obligée de le maintenir, monsieur le président, car, si l'on attend trop longtemps, il ne restera plus aucun des trente-neuf sites dont j'ai parlé.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-178, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° I-83, MM. Badré, Jean Faure, Herment, Arnaud, Hérisson et les membres du groupe de l'Union centriste proposent, après l'article 3, d'insérer un article additionnel rédigé comme suit :
« I. - L'article 279 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« i. Le droit d'utilisation d'installations sportives. »
« II. - La perte pour les recettes de l'Etat est compensée à due concurrence par l'augmentation des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° I-172, Mme Beaudeau, MM. Loridant, Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, après l'article 3, d'insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 279 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« ... - le droit d'utilisation des installations sportives. »
« II. - Le taux de prélèvement libératoire prévu au 6 de l'article 200 A du code général des impôts est relevé à due concurrence. »
Par amendement n° I-247, MM. Oudin, Braun, Cazalet, Chaumont, Delong, Joyandet, Ostermann, Trégouët, Murat proposent, après l'article 3, d'insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après le b decies de l'article 279 du code général des impôts, le c est rétabli dans la rédaction suivante :
« c) Le droit d'utilisation d'installations sportives. »
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I ci-dessus est compensée à due concurrence par un relèvement des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés à l'article 403 du code général des impôts. »
La parole est à M. Badré, pour défendre l'amendement n° I-83.
M. Denis Badré. Cet amendement eurocompatible vise à soumettre au taux réduit de la TVA le droit d'utilisation des installations sportives. Cette mesure, au coût limité, présente un intérêt évident, qui a d'ailleurs été reconnu, monsieur le secrétaire d'Etat, par votre collègue Mme le ministre de la jeunesse et des sports.
M. le président. La parole est à M. Loridant, pour défendre l'amendement n° I-172.
M. Paul Loridant. Il s'agit, par le présent amendement, d'appliquer le taux réduit de TVA au droit d'utilisation des installations sportives. En effet, à l'instar d'autres pratiques culturelles ou de loisirs, le sport devrait bénéficier d'un traitement fiscal identique.
Cette mesure aurait pour principal avantage de favoriser le développement d'un secteur qui contribue à resserrer le tissu social, fortement créateur d'emplois et favorable à l'aménagement du territoire.
A cet égard, le présent amendement permettrait de compenser en partie les pertes attendues avec le nouveau régime fiscal qui sera appliqué à partir du 1er janvier 2000 au secteur associatif, dont les ressources d'exploitation seront soumises au taux de TVA normal de 20,6 %.
Ensuite, la réduction de la fiscalité indirecte aurait pour conséquence induite un élargissement de l'assiette, donc de nouvelles recettes. En effet, nul doute que des tarifs réduits d'accès aux installations sportives susciteraient un regain d'intérêt pour la pratique sportive, notamment auprès des jeunes.
Enfin, les efforts accomplis par les localités et les municipalités pour attirer et populariser le sport et pour s'assurer une utilisation suffisante des équipements, dont les coûts sont souvent élevés, seraient confortés par cette mesure qui s'inscrit dans le cadre de la réglementation européenne en matière de TVA.
C'est pourquoi j'invite la Haute Assemblée à adopter cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Cazalet, pour défendre l'amendement n° I-247.
M. Auguste Cazalet. Cet amendement a également pour ambition de favoriser l'accès des jeunes aux installations sportives et à la pratique du sport, qui est un puissant facteur d'intégration, en appliquant le taux réduit de TVA au droit d'utilisation des équipements sportifs.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n° I-83, I-172, I-247 ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ces amendements ont été excellemment présentés. Il est clair que ces mesures sont conformes au droit communautaire puisque l'annexe H vise des prestations de ce type. Il est non moins clair qu'elles représenteraient un coût de l'ordre de 500 millions de francs.
Dans l'exposé des motifs de l'un des amendements, le coût budgétaire de cette mesure est qualifié de « limité ». Mais l'unité est quand même assez substantielle.
Je rappelle, enfin, que toutes les installations sportives à gestion associative, c'est-à-dire une large majorité d'entre elles, ou gérées directement par les collectivités territoriales sont hors du champ d'application de la TVA.
Par conséquent, la commission souhaite entendre l'avis du Gouvernement avant de se prononcer.
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Je rappellerai tout d'abord le droit fiscal en vigueur. Lorsque les activités sportives sont soumises à la TVA, elles le sont au taux normal. Ce sont toutes les activités à but lucratif, qu'il s'agisse de clubs de remise en forme, de clubs de golf, de clubs de tennis, etc.
Je rappellerai également, à la suite de l'excellente intervention de M. le rapporteur général, que le droit communautaire autorise, mais n'impose pas, l'application du taux réduit de TVA au droit d'utilisation d'installations sportives. En revanche, le droit communautaire fait obligation d'appliquer le taux normal de TVA aux prestations annexes, telles que la location de matériels ou les leçons d'enseignement sportif.
La mesure proposée tend à soumettre au taux réduit de TVA le droit d'utilisation d'installations sportives. A ce stade du débat, il importe de rappeler le traitement fiscal général dont bénéficient les associations.
En vertu de l'article 261.7.1°, paragraphe b , du code général des impôts, les associations ne sont pas soumises aux impôts commerciaux lorsqu'elles remplissent certaines conditions, pour être bref, lorsqu'elles sont désintéressées et qu'elles ne sont pas à but lucratif. Les critères d'appréciation du caractère lucratif ont d'ailleurs été précisés et assouplis - c'est ce qui nous intéresse ce soir -, par une instruction du 15 septembre 1998.
Par ailleurs, en application du même article, paragraphe a, du code général des impôts, les associations qui ne rempliraient pas toutes les conditions fixées par cette instruction sont susceptibles d'être exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée pour les services à caractère sportif qu'elles rendent à leurs membres.
Par conséquent, le droit en vigueur est déjà favorable à ces associations. L'instruction dont j'ai fait mention à l'instant est suffisamment libérale dans son texte et dans son esprit pour que nous ayons la sagesse d'en rester au droit positif existant.
M. Michel Charasse. Très bien !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Monsieur le rapporteur général, vous avez sollicité mon avis avant de vous prononcer. Compte tenu des apaisements que je viens d'apporter et des informations que je vous livre sur la situation fiscale des associations sportives, qui ne sont pas défavorisées, bien au contraire, je demande aux auteurs des amendements d'avoir la sagesse de les retirer. Dans le cas contraire, je demanderais au Sénat de les repousser.
M. le président. Quel est maintenant l'avis de la commission sur les amendements ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est un appel à la sagesse et la commission souhaite, précisément, s'en remettre à la sagesse du Sénat pour les amendements n° I-83 et I-247.
En revanche, elle émet un avis défavorable sur l'amendement n° I-172 en raison du caractère anti-démocratique et inacceptable du gage proposé !
M. le président. Monsieur Bradé, l'amendement n° I-83 est-il maintenu ?
M. Denis Badré. Je suis sensible aux arguments du secrétaire d'Etat : j'essaye donc d'être sage et je retire cet amendement.
M. le président. L'amendement n° I-83 est retiré.
Madame Beaudeau, l'amendement n° I-172 est-il maintenu ?
Mme Marie-Claude Beaudeau. Je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-172, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Monsieur Cazalet, l'amendement n° I-247 est-il maintenu ?
M. Auguste Cazalet. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° I-247 est retiré.
Je suis saisi de deux amendements présentés par M. Dreyfus-Schmidt et les membres du groupe socialiste et apparentés et qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-92 a pour objet d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le f de l'article 279 du code général des impôts est rédigé comme suit :
« f) L'ensemble des frais et honoraires exposés en justice ; ».
« II. - Les pertes de recettes pour l'Etat résultant des dispositions précédentes sont compensées à due concurrence par une augmentation des droits prévus à l'article 885 U du code général des impôts. »
L'amendement n° I-93 tend à insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après le f de l'article 279 du code général des impôts, il est inséré un nouvel alinéa ainsi rédigé :
« f bis) L'ensemble des frais et honoraires des affaires relevant du droit de la famille. »
« II. - Les pertes de recettes pour l'Etat résultant des dispositions précédentes sont compensées à due concurrence par une augmentation des droits prévus à l'article 885 U du code général des impôts. »
La parole est à M. Dreyfus-Schmidt, pour présenter ces deux amendements.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Ces amendements sont récurrents puisque nous avons eu l'honneur de les présenter au Sénat en 1995, 1996, 1998...
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Quelle constance !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il y en a deux. L'un suit toujours l'autre ; il en est « l'accessoire », si je puis dire, puisqu'il s'agit d'un amendement de repli. Le premier amendement tend à appliquer le taux de TVA de 5,5 % à l'ensemble des frais et honoraires auxquels peuvent être soumis les justiciables ; le second vise à appliquer ce taux de 5,5 % à l'ensemble des frais et honoraires des affaires relevant du seul droit de la famille.
Je rappellerai, une fois de plus, que la loi n° 77-1468 du 30 décembre 1977 instaurait la gratuité des actes de justice devant les juridications civiles et administratives. C'était l'aboutissement de très longs efforts.
Afin d'éviter un malentendu qui s'était instauré l'an dernier entre nous et M. le secrétaire d'Etat au budget, je dirai de nouveau qu'il ne s'agit nullement d'amendements « corporatistes », sous prétexte que j'ai eu l'honneur d'appartenir au barreau pendant quarante-quatre ans. Ces mesures ont simplement pour objet de défendre l'intérêt des justiciables.
Evidemment, les avocats peuvent avoir un intérêt au paiement de la TVA sur les frais et honoraires exposés en justice, puisqu'ils peuvent déduire celle-ci de leurs investissements et qu'ils ne paient pas la taxe sur les salaires.
En revanche, pour les justiciables, l'imposition à 20,6 % des honoraires et des frais de justice représente des sommes importantes. C'est différent en matière d'aide judiciaire où le taux de TVA s'élève à 5,5 %. Il s'agit de personnes qui gagnent au maximum la somme astronomique de 7 402 francs par mois ! Au-delà, le taux de 20,6 % est appliqué. On est bien loin de la gratuité de la justice !
Nous avions eu un espoir en 1995, lors du dépôt de nos premiers amendements, puisque M. le rapporteur général, qui se trouvait être, comme chacun le sait, M. Alain Lambert, aujourd'hui président de la commission des finances du Sénat, avait répondu ceci : « Il a semblé à la commission que la présente proposition de loi ne devait pas servir à modifier les règles qui s'appliquent en la matière autres que celles qui sont relatives au taux de la TVA. La commission s'est fixée ce principe et elle y reste fidèle. » - je remarque qu'aujourd'hui elle l'est moins - « A lui seul, il justifie le rejet de ces amendements. Néanmoins, elle n'a pas trouvé ces amendements indignes d'intérêt. Il lui semble que les dispositions qu'ils contiennent méritent d'être retenues. Aussi pourraient-elles être proposées au Sénat à l'occasion de l'examen du collectif ou, mieux encore, de la prochaine loi de finance. »
Ces propos remontent à 1995 ! Nous n'avons pas eu plus de succès en 1996 ni, je le répète, ensuite. Or, depuis, Mme le garde des sceaux a fait de nombreuses déclarations.
M. Philippe Marini, rapporteur général. En effet !
M. Michel Mercier. Intempestives !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Par exemple, lors de la rentrée solennelle du barreau de Paris, répondant aux multiples interrogations exprimées par le bâtonnier sur l'avenir de la profession, Mme Guigou a rappelé les réformes qu'elle s'apprétait à mener. A propos de la TVA, notamment, elle s'est engagée à présenter des « propositions pour que certains contentieux touchant les justiciables les plus défavorisés puissent bénéficier d'une taxe réduite » dans le cadre de l'abaissement envisagé pour le budget de 1999.
Le 25 avril 1998, devant le Conseil national des barreaux, Mme la garde des sceaux déclarait ceci : « En matière de TVA, je vous rappelle mon engagement à faire, dans le cadre du budget de 1999, des propositions visant à faire bénéficier certains contentieux d'une taxation réduite. »
Nous attendions donc des propositions. On va me rétorquer, je le sais, que c'est « euro incompatible ». C'est d'autant plus regrettable qu'un certain nombre de pays de la communauté en sont restés au taux de TVA de 5,5 % pour l'ensemble des frais de justice et des honoraires.
M. Michel Charasse. Au taux réduit !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Et certains, comme nos voisins belges, ne font supporter aucune TVA aux honoraires et aux frais de justice. Puisque l'on veut construire l'Europe, il faudrait au moins que la même règle s'impose à tous !
On parle des produits de consommation courante. Je suis en désaccord avec notre collègue M. Fréville, et je le lui ai dit, dans la mesure où il ne s'agit pas de redistribution de revenus. Il importe de faire en sorte que les personnes qui ne sont pas soumises à l'impôt sur le revenu, donc qui ont peu de moyens financiers, puissent au moins se nourrir en ne payant pas plus cher qu'ils ne le valent les produits de consommation courante. L'homme ne vit pas seulement de pain, il vit aussi de justice ! Il est normal que les justiciables soient traités de la même manière !
Nous avons tenu à insister une fois de plus auprès du Gouvernement, afin d'avoir notre carte de priorité dans la file d'attente.
Je suis sûr que la commission ne manquera pas d'appuyer cette demande pour qu'enfin l'on revienne à une justice gratuite.
M. Michel Charasse. Brillante plaidoirie !
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s I-92 et I-93 ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il convient en effet de faire figurer dans la file d'attente, avec une mention toute spéciale, les besoins manifestes que vous avez cités et que vous avez excellemment présentés, monsieur Dreyfus-Schmidt. Mais, de la même manière que les années précédentes, et pour les mêmes raisons, que je ne vais pas de nouveau détailler, je me dois de formuler un avis défavorable au nom de la commission des finances.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ? M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. M. Michel Dreyfus-Schmidt a instruit lui-même à charge et à décharge son amendement, avec le brio et la précision qu'on lui connaît.
S'agissant des justiciables les plus défavorisés, Mme le garde des sceaux a obtenu satisfaction, puisque sont soumises au taux réduit de la TVA les prestations pour lesquelles les avocats sont indemnisés totalement ou partiellement par l'Etat dans le cadre de l'aide juridictionnelle.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Non, non ! Cela existait depuis le début, en tout cas bien avant qu'elle soit garde des sceaux !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Elle avait donc déjà satisfaction lorsqu'elle s'est exprimée ainsi.
Les autres prestations des avocats relèvent du taux normal. Les frais facturés par l'administration judiciaire de l'Etat sont, en principe, hors du champ d'application de la TVA.
A charge et à décharge, disais-je. En effet, monsieur le sénateur, nous ne pouvons pas, en vertu du droit communautaire, appliquer un taux réduit de TVA à l'ensemble des frais de justice ; c'est regrettable. Vous avez cité l'exception belge. La Belgique devra se mettre en conformité avec le droit communautaire, quoi qu'il lui en coûte au regard de sa tradition et des usages qui prévalent dans ce pays.
Monsieur Dreyfus-Schmidt, j'ai bien écouté votre démonstration et, sur le fond, j'y souscris évidemment. D'ailleurs, qui ne souscrirait pas à cette noble ambition de rendre la justice plus accessible, notamment aux plus défavorisés, par un abaissement de la TVA ? Qui pourrait ne pas partager cet élan de générosité qui est le vôtre, ce souci de justice qui est le nôtre ?
Je dois néanmoins rappeler que les prestations pour lesquelles les avocats sont indemnisés totalement ou partiellement par l'Etat, dans le cadre de l'aide juridictionnelle, ont concerné plus de 700 000 dossiers l'an dernier.
Mais j'ai bien noté que vous plaidiez en la circonstance non pas pour les avocats mais pour les justiciables.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Bien sûr !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Je retiens donc que, sur le bureau, la pile des dossiers en attente qui devront être enfin traités comprendra aussi ce dossier-là.
Au bénéfice de cette attention particulière et de la convergence de notre approche, la vôtre personnellement, monsieur Dreyfus-Schmidt, et celle du groupe socialiste, et la nôtre, au Gouvernement, je vous demande de bien vouloir retirer ces amendements.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-92.
M. Michel Charasse. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse. Comme M. Dreyfus-Schmidt, j'interviendrai en même temps sur l'amendement n° I-93. Mais je souhaite surtout m'adresser au Gouvernement.
Je comprends très bien la position des uns et des autres.
M. Dreyfus-Schmidt fait preuve d'une belle constance et d'une belle persévérance dans ce domaine. C'est vrai qu'il y a sans doute quelque chose de préoccupant et d'anormal.
La position de M. le rapporteur général n'est pas anormale, celle de M. le secrétaire d'Etat non plus.
Il y a tout de même un point qui fait problème : dans son intervention, M. Dreyfus-Schmidt nous a signalé que certains pays - la Belgique - n'appliquaient pas de TVA sur les honoraires et que d'autres appliquaient des taux différents.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Tout à fait !
M. Michel Charasse. Je ne voudrais pas qu'en Europe il y ait deux poids et deux mesures, et que la France soit constamment acculée à des risques de procès - un jour sur la viande, le lendemain, ou la veille sur les oiseaux migrateurs... - mais que, en matière de TVA, chacun fasse ce qu'il veut. En somme, on applique ou on n'applique pas, et voilà !
Monsieur le secrétaire d'Etat, une chose est la file d'attente dont M. Dreyfus-Schmidt et M. le rapporteur général parlaient il y a un instant ; une autre chose est la situation actuelle. A défaut d'obtenir tout de suite que les avocats soient en bonne place dans la file d'attente, est-ce que le Gouvernement ne pourrait pas faire une démarche auprès de la Commission pour que les mêmes règles soient appliquées partout ? Il n'y a pas de raison pour qu'un certain nombre d'Etats passent leur temps à lancer des procédures contre la France - je pense en particulier à l'affaire des oiseaux migrateurs... éventuellement à celle de la viande... - pour nous contraindre à nous aligner sur le droit européen, au risque, sinon, d'une saisine de la Cour de justice des Communautés européennes, et que, dans un domaine fiscal aussi important et qui préoccupe tous les Etats - je veux parler des listes en matière de TVA - chacun se débrouille comme il peut. Cela ne peut pas marcher ainsi, monsieur le secrétaire d'Etat.
Par conséquent, je souhaite qu'une démarche très ferme soit effectuée par la France dans ce domaine et, pour ce motif-là, que M. Dreyfus-Schmidt retire ses amendements.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je note que Michel Charasse veut maintenant que je retire mes amendements. Je m'apprêtais à le faire, lorsque j'ai vu qu'il voulait m'apporter son aide, et c'est pourquoi je ne les ai pas retirés immédiatement.
Je dois dire que c'est habituel car déjà, le 25 novembre 1998, ici même, M. Michel Charasse avait tenu à m'apporter son appui. Aujourd'hui, il est intervenu sur un autre sujet.
Je voudrais lui répondre qu'au départ personne n'obligeait la France à fixer un taux de 18,60 %, que personne n'a obligé la France à appliquer un taux de 20,60 % ! C'est pour cette raison qu'il y a des différences.
Alors, c'est vrai, dans la construction de l'Europe, en particulier dans des matières aussi fondamentales et communes que la justice, il serait bon qu'il y ait une uniformisation de manière que les justiciables français ne soient pas pénalisés par rapport aux justiciables d'outre-Rhin ou d'outre-Manche.
Sur l'aide juridictionnelle, je vous précise, monsieur le secrétaire d'Etat, que l'aide juridictionnelle totale est allouée jusqu'à un plafond de ressources mensuelles de 4 940 francs, auxquels s'ajouent quelque 562 francs par enfant, et l'aide juridictionnelle partielle jusqu'à un plafond de ressources mensuelles de 7 402 francs. Cela signifie que quelqu'un qui gagne par exemple à peine plus de 7 000 francs par mois ne bénéficie pas de l'aide juridictionnelle. Il devra donc, par exemple s'il divorce, non seulement régler la totalité des honoraires de son avocat, mais en outre acquitter une TVA de 20,60 %. C'est évidemment tout à fait anormal
M. Michel Charasse. On ne parle pas des PACSés, qui n'auront pas d'enfants !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'est pourquoi j'insisterai jusqu'à ce que j'obtienne gain de cause et, comme je suis sûr que vous commencez à être fatigués, les uns et les autres, de m'entendre sur ce sujet, je sais que vous ferez l'impossible pour m'y aider. (Sourires.)
Je retire donc mes amendements, comme je l'ai laissé entendre dès le début. J'ai remarqué que la commission a émis un avis défavorable au motif qu'ils sont euro-incompatibles, mais que, sur le fond, elle est favorable. Donc, à nous tous, nous devrions finir par y arriver !
M. le président. Les amendements n°s I-92 et I-93 sont retirés.
Monsieur Dreyfus-Schmidt, je vous invite d'ores et déjà à préparer vos amendements pour 2001 ! (Sourires.)
Par amendement n° I-271, M. Badré propose d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Au h de l'article 279 du code général des impôts, après les mots : "Les prestations de collecte, de tri et de traitement des déchets", sont insérés les mots : "avec apport volontaire par les usagers, et dans le cas des déchets".
« II. - La perte de recettes résultant du I pour le budget de l'Etat est compensée à due concurrence par l'augmentation des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Badré.
M. Denis Badré. Je ne voudrais pas qu'une sorte de pensée unique ou de paresse intellectuelle amène à considérer que collecte sélective signifie obligatoirement et exclusivement tri collectif obligatoire à domicile.
L'apport volontaire, en certains points de nos communes, de déchets triés au préalable est également sélectif et permet tout autant la valorisation. Son efficacité peut même être supérieure. Dans la forme obligatoire à domicile, en effet, les erreurs ou les refus se paient très cher, par le rejet de camions entiers.
L'apport volontaire est également plus respectueux de l'environnement, puisqu'il limite les circuits de ramassage, souvent bruyants et polluants.
Le coût de l'apport volontaire est moindre, puisqu'il évite la multiplication des poubelles, laquelle reste toujours coûteuse, qu'elle soit supportée par les habitants ou par la collectivité.
L'apport volontaire présente un autre avantage : il amène nos concitoyens à faire spontanément le choix de l'environnement plutôt qu'à y être contraints, ce qui sert toujours mieux la cause de l'environnement à laquelle vous me savez, mes chers collègues, très attaché.
Il faut surtout - nous sommes au Sénat - que la liberté de choix de nos communes soit préservée et qu'elles puissent retenir chacune la formule la plus efficace, la moins coûteuse et qui leur convienne le mieux. Dans ce domaine comme dans bien d'autres, nous savons qu'il y a pratiquement autant de situations que de communes.
Mon amendement tend donc à ce que la fiscalité ne défavorise pas l'apport volontaire par rapport au tri sélectif obligatoire à domicile.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est une excellente suggestion, qui vient à point nommé. Elle a donc suscité l'avis favorable de la commission.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. C'est un amendement intéressant pour l'environnement.
Je dois rappeler à M. Badré que l'article 31 de la loi de finances pour 1999 prévoit déjà l'application du taux réduit de la TVA aux prestations de collecte et de tri sélectif des déchets ménagers et assimilés ainsi qu'aux prestations de traitement de ces déchets lorsqu'elles portent sur des matériaux ayant fait l'objet d'un contrat conclu entre une commune ou un établissement public de coopération intercommunale et un organisme ou une entreprise agréés au titre de la loi de juillet 1975.
Le taux réduit s'applique quel que soit le mode de collecte, que celle-ci soit réalisée en porte-à-porte ou par apport volontaire.
L'instruction du 20 mai 1999 prévoit, dans sa section II : « Opérations concernées » que sont soumises au taux réduit de la TVA, « les prestations de collecte et de tri sélectif des déchets ménagers et assimilés. Cette collecte sélective peut être réalisée soit en porte à porte, soit en apport volontaire ». Il s'agit de l'apport volontaire par les citoyens qui déposent les déchets dans les conteneurs disposés à cet effet sur la voie publique.
M. Denis Badré. Tout à fait. C'est de cela qu'il s'agit.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Cette collecte est généralement opposée à la collecte traditionnelle, qui est une collecte de l'ensemble des déchets ménagers en mélange. Le tri sélectif a, par ailleurs, l'intérêt de séparer les déchets et ainsi de faciliter leur transport et leur élimination.
Par conséquent, monsieur le sénateur, je crois que vous avez satisfaction, en particulier depuis le 20 mai 1999, le dispositif que vous proposez ayant été spécifiquement mentionné dans cette instruction.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-271.
M. Denis Badré. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Badré.
M. Denis Badré. Oui, monsieur le président. J'ai bien entendu ce que vient de dire M. le secrétaire d'Etat. Alors que se développe actuellement un débat dans le pays sur le fait de savoir si effectivement les formules de tri sélectif obligatoire à domicile ne plafonnent pas dans leur efficacité et alors que l'on essaie de montrer que l'apport volontaire peut avoir les vertus pédagogiques que je soulignais tout à l'heure, les dispositions de l'instruction gagneraient à être énoncées clairement et explicitement dans la loi, même si, sur le fond, elles prouvent que M. le secrétaire d'Etat, qui les a citées, est bien d'accord avec moi.
Cette démarche s'impose aujourd'hui, raison pour laquelle je maintiens mon amendement si effectivement les formules de tri sélectif obligatoire à domicile ne plafonnent pas dans leur efficacité et alors que l'on essaie de montrer que l'apport volontaire peut avoir les vertus pédagogiques que je soulignais tout à l'heure, les dispositions de l'instruction gagneraient à être énoncées clairement et explicitement dans la loi, même si, sur le fond, elles prouvent que M. le secrétaire d'Etat, qui les a citées, est bien d'accord avec moi.
Cette démarche s'impose aujourd'hui, raison pour laquelle je maintiens mon amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-271, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 3.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° I-8, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 279 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« ... ° Les prestations obligatoires de services funéraires. »
« II. - Les pertes de recettes résultant pour l'Etat des dispositions du paragraphe I ci-dessus sont compensées à due concurrence par une hausse des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° I-174, Mme Beaudeau, MM. Loridant, Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 279 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« ... Les prestations de services funéraires. »
« II. - Les dispositions du dernier alinéa de l'article 978 du code général des impôts sont abrogées. »
La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre l'amendement n° I-8.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Par souci d'équité sociale, la commission propose cet amendement qui vise à réduire le taux de la TVA portant sur les prestations liées aux services extérieurs des pompes funèbres.
Cette mesure va manifestement dans l'intérêt des familles. La dépense relative aux prestations de services dont il s'agit qui intervient à un moment particulièrement éprouvant de l'existence, est en effet très lourde, et ce d'autant plus que le revenu des personnes est plus modeste.
Les services funéraires peuvent, en outre, être considérés comme des biens de première nécessité, car ils sont hélas ! indispensables et obligatoires.
Il s'agit d'une mesure manifeste de justice sociale dont le coût est estimé à 700 millions de francs. Parmi les quelques mesures auxquelles la commission des finances tient figure celle-ci, qui nous semble pouvoir être admise cette année compte tenu de la situation générale de l'économie et de l'état des rentrées fiscales.
M. le président. La parole est à Mme Beaudeau pour défendre l'amendement n° I-174.
Mme Marie-Claude Beaudeau. La fin du monopole reconnu aux pompes funèbres se justifiait, selon ses promoteurs, essentiellement par la baisse du prix des prestations de services funéraires qui en était attendue. Or, force est de le constater, bon nombre de familles modestes connaissent toujours de réelles difficultés pour financer les frais encore trop élevés des obsèques d'un proche.
Ces coûts, chacun le comprend bien, sont le plus souvent imprévisibles et il apparaît difficile pour les petits budgets de consacrer des sommes à une dépense supplémentaire, qui, évidemment, ne sera jamais anticipée.
Le Gouvernement s'est à plusieurs reprises montré sensible à cette question, sans toutefois annoncer encore de décision concrète, telle que la réduction à 5,5 % du taux de la TVA sur les services funéraires. Ce soir, je pense qu'il le fera.
Actuellement, je le rappelle, le transport de corps effectué par les prestataires agréés est d'ores et déjà soumis au taux réduit de TVA. Il est donc, somme toute, assez logique et cohérent d'étendre progressivement cette disposition à l'ensemble des prestations funéraires.
Le coût de cette mesure, qui n'atteindrait pas un milliard de francs, ne paraît pas, en outre, exorbitant. Il pourrait être compensé par les recettes supplémentaires que procurerait le recours par les familles du défunt, à des services peut-être plus onéreux, mais à la mesure de l'hommage qu'elles souhaitent rendre au disparu.
Si cette période est le plus souvent vécue comme une épreuve douloureuse par les familles, il est néanmoins légitime qu'elles cherchent à organiser des obsèques d'une grande dignité, dans le respect de la mémoire du disparu, en dépit de moyens financiers apparemment limités. Notre amendement vise à assurer l'expression réelle de cette aspiration légitime.
Il placerait enfin la France en conformité avec la réglementation européenne en matière de TVA, puisqu'une directive de 1977 autorise l'application d'un taux réduit lorsqu'il s'agit de services par les entreprises de pompes funèbres et de crémation.
J'espère donc que cette proposition du groupe communiste républicain et citoyen ne restera pas une fois de plus un voeu pieux et recueillera l'approbation du Sénat. Je crois qu'un vote unanime grandirait notre Haute Assemblée. Le Gouvernement s'honorerait s'il voulait bien l'accepter.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° I-174 ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il est défavorable, car le gage ne me paraît pas acceptable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n° I-8 et I-174 ?
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Ces deux amendements ne sont dépourvus ni d'une certaine logique, ni d'une certaine générosité.
Une chose m'étonne toutefois, monsieur le rapporteur général. Après avoir, au nom de la commission des finances, critiqué tout à l'heure cette sorte de file d'attente et cette somme d'objets fiscaux successivement susceptibles de bénéficier du taux réduit de la TVA, après vous être étonné de voir cette liste s'allonger strate après strate, voilà que vous participez à votre tour à ce mouvement funeste. (Sourires.)
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est la dernière étape !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Certes !
Malgré le désir de vous faire plaisir et de succomber à la générosité qui a inspiré ces deux amendements, je suis au regret de dire que nous avons naturellement été obligés de choisir. Il a fallu déterminer des priorités et se placer dans la perspective de l'emploi. Contraints de choisir, avec les 20 milliards de francs d'allégements de TVA, ceux que nous allions privilégier dans un premier temps, nous avons dû écarter une somme de petites mesures de ce type effectivement tout aussi légitimes les unes que les autres dans une perspective de générosité fiscale au service d'une cause sociale.
Je demande le rejet de ces deux amendements parce que nous avons opéré des choix dictés par une priorité qui s'appelle l'emploi.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Quel coeur de pierre ! (Sourires.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-8.
M. Michel Charasse. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse. Ce soir, on mange au restaurant, on trie ses ordures, on perd la vue, on a froid, on plaide, on meurt... Qu'est-ce qui manque ? (Sourires.)
M. le président. Vous avez oublié le chocolat, monsieur Charasse !
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Et la margarine !
M. Philippe Marini. rapporteur général. On participe à l'issue fatale !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-8, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 3, et l'amendement n° I-174 n'a plus d'objet.

Article 3 bis