Séance du 21 décembre 1999






CRÉATION DE LA CHAÎNE PARLEMENTAIRE

Adoption d'une proposition de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi (n° 142, 1999-2000), adoptée par l'Assemblée nationale, portant création de La Chaîne Parlementaire. [Rapport n° 147 (1999-2000)].
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Daniel Vaillant, ministre des relations avec le Parlement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le Parlement est un lieu de parole, une instance de débat, un forum. Il doit être transparent et son action doit encourager la participation des citoyens au débat politique.
Les médias doivent contribuer à créer le lien entre élus et citoyens, à élargir l'espace du forum au-delà de l'enceinte du Parlement.
Un Parlement transparent est nécessaire à une démocratie moderne.
En souhaitant replacer le Parlement au centre de la vie politique, le Gouvernement conduit par Lionel Jospin entend combler le fossé qui s'est peu à peu creusé entre les élus et les citoyens. La création d'une chaîne parlementaire ne peut que contribuer à appuyer cette revalorisation du Parlement, entreprise depuis 1997.
Tels sont les principes qui ont guidé les auteurs de la proposition de loi tendant à créer La Chaîne Parlementaire, qui doit permettre d'adapter le Parlement aux techniques modernes des mass media, de le rendre plus accessible et d'en faire l'un des facteurs de formation des citoyens au débat public.
La transparence de l'activité parlementaire est aujourd'hui plus qu'hier nécessaire, en raison de la suspicion croissante qui pèse sur les élus, tant nationaux que locaux.
Cette transparence est une conquête de la Révolution, un élément de notre héritage républicain. Louis XVI dut en effet renoncer à la disposition de sa déclaration du 23 juin 1789 aux termes de laquelle le public ne pouvait assister aux délibérations des Etats généraux.
Cette publicité des séances n'a de portée que si le droit du public d'assister à la séance s'accompagne de l'établissement d'un compte rendu officiel des débats, à la disposition de tous. L'administration de nos assemblées prit ainsi naissance dans le corps des secrétaires chargés, par le décret du 28 fructidor an III, d'établir le compte rendu des débats. Sommaires à l'origine, ils s'étoffèrent peu à peu.
A l'écrit, longtemps exclusif, s'est ajouté l'audiovisuel, accompagnant les premiers pas de la télévision : dès le 23 mars 1956, la télévision filme l'entrée en séance du président et le premier quart d'heure de séance ; en janvier 1957, l'installation d'équipements techniques est réalisée.
Il faudra cependant attendre 1982 pour que les questions au Gouvernement soient diffusées en direct sur France 3, et octobre 1993 pour que « Canal Assemblée nationale » retransmette intégralement, en direct ou en différé, les débats en séance publique. Le Sénat fit de même à partir d'avril 1996 et les deux assemblées se partagent depuis le « Canal Assemblées », diffusé en clair sur les bouquets TPS et Canal Satellite ainsi que sur les chaînes du câble.
C'est à une nouvelle étape que nous assistons, à une modernisation essentielle, nécessaire et attendue de la publicité des débats parlementaires, véritable principe constitutionnel.
Je souligne tout d'abord qu'elle résulte d'une initiative conjointe des présidents des deux assemblées, qui ont réussi à sortir ce projet du relatif enlisement dans lequel il était depuis 1992, malgré une tentative, sur l'initiative du Sénat, en mars 1997, lors de la discussion du précédent projet de loi sur l'audiovisuel.
Les deux assemblées connaissant des majorités politiques opposées, cet accord traduit sans aucun doute un fonctionnement harmonieux du bicamérisme, auquel nous sommes tous, monsieur le président, très attachés.
M. le président. Merci de le rappeler, monsieur le ministre !
M. Daniel Vaillant, ministre des relations avec le Parlement. Il n'était point besoin de le rappeler pour que ce soit sûr, mais je le fais bien volontiers.
J'ajoute, sur la méthode, qu'en cosignant la proposition de loi avec le vice-président du bureau chargé de la communication, le président du Sénat a entendu souligner le caractère collectif et concerté de cette démarche, quoi qu'il ait été dit ici et là récemment ailleurs que dans cette enceinte, à l'Assemblée nationale pour ne rien vous cacher : j'y étais !
La Chaîne Parlementaire sera citoyenne, indépendante et dotée d'un statut juridique original.
Elle sera, tout d'abord, une chaîne citoyenne. Au-delà de la simple retransmission des débats parlementaires, en séance publique ou en commission, La Chaîne Parlementaire aura en effet une nouvelle dimension civique, en proposant aux citoyens une information et une formation à la vie publique grâce à des émissions élaborées par des sociétés de programmes indépendantes avec, le cas échéant, des partenaires ou du parrainage, qui éclaireront les travaux des assemblées par des émissions d'accompagnement.
La Chaîne Parlementaire sera, ensuite, une chaîne indépendante. Le contrôle des bureaux des deux assemblées implique, en application du principe constitutionnel de séparation des pouvoirs, qu'ellle ne sera pas soumise à l'autorité du CSA.
L'autonomie de La Chaîne Parlementaire a d'ailleurs été affirmée dès la loi du 1er février 1994, qui donnait, pour la première fois, une base juridique à Canal Assemblées, qui n'est pas conventionnée par le CSA.
Autonomie ne signifie pas l'indépendance, puisque la chaîne fera naturellement partie du service public de l'audiovisuel, qui continuera à retransmettre les questions d'actualité. Elle sera, en outre, reprise gratuitement par tous les distributeurs du câble et du satellite, afin de lui donner une audience la plus large possible.
De même, les bureaux des assemblées ne manqueront pas d'appliquer, et de contrôler, les principes essentiels du droit de l'audiovisuel et un conseil de surveillance, composé à parité de députés et de sénateurs, sera constitué afin de contrôler l'organisation et la programmation de la chaîne et de statuer sur les litiges relatifs à la répartition du temps d'antenne. On devra veiller à ce que ce temps d'antenne respecte, outre la parité entre les deux assemblées, le pluralisme des groupes parlementaires.
La chaîne devra mettre en valeur la vie parlementaire dans son ensemble, et non tel ou tel parlementaire.
Par ailleurs, la chaîne sera soumise, en les adaptant, aux principes essentiels qui s'imposent aux chaînes thématiques, tout comme le code des marchés publics peut être appliqué avec certaines adaptations par les bureaux des assemblées, ainsi que l'a reconnu le Conseil d'Etat le 5 mars 1999.
Enfin, le statut juridique est original et justifie que l'on précise les dérogations apportées à la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication. Ce statut devra concilier l'autonomie éditoriale de la chaîne et le droit commun des sociétés, puisque la chaîne sera constituée de deux sociétés anonymes. La formule du groupement d'intérêt public, envisagée dans le projet de loi du précédent gouvernement, en 1997, s'est en effet révélée inadaptée.
Pour conclure, le Gouvernement veut saluer cette initiative parlementaire, dont il approuve le principe, et qui permet enfin de moderniser le cadre juridique et opérationnel d'une chaîne parlementaire.
Grâce à cette dernière, La Chaîne Parlementaire pourra débuter sa programmation au début de l'an prochain, et je souhaite, à titre personnel, bonne chance à l'équipe qui l'animera au Sénat, autour de Jean-Pierre Elkabbach, dont chacun connaît les grandes qualités et le professionnalisme.
Tel est, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le sentiment du Gouvernement sur cette heureuse initiative parlementaire. (Applaudissements.)
M. le président. Monsieur le ministre, à l'expression « conseil de surveillance », que vous avez utilisée dans votre discours, je préfère celle de « conseil d'orientation ». En effet, certains commentateurs pourraient laisser croire que nous voulons exercer une surveillance.
M. Claude Estier. C'est dans le projet de convention !
M. le président. Certes, mais la convention n'est pas la loi !
La parole est à M. le rapporteur.
M. Adrien Gouteyron, président de la commission des affaires culturelles, en remplacement de M. Jacques Valade, rapporteur. Monsieur le président, je veux, au début de mon exposé, rendre hommage à notre collègue Jacques Valade, qui, on le sait, a beaucoup travaillé sur le sujet qui nous occupe aujourd'hui. Le fait même que vous l'ayez invité à cosigner la proposition de loi que vous avez déposée sur le bureau du Sénat en est d'ailleurs le témoignage. Nous regrettons donc qu'il ne puisse pas participer à ce débat sur un texte qui concrétise un projet à l'élaboration duquel il a beaucoup oeuvré.
La présente proposition de loi traduit l'accord intervenu - vous l'avez rappelé, monsieur le ministre - entre les deux assemblées, après une réflexion commune poursuivie depuis plusieurs années, en vue de la création d'une chaîne parlementaire et civique.
Cette réflexion procédait d'un constat : la presse audiovisuelle, mais aussi la presse écrite, comme le soulignait, hier encore, en commission, notre collègue Michel Dreyfus-Schmidt, ne rendent pas compte de la réalité et de l'étendue du rôle de la représentation nationale. Nous en sommes tous conscients et nous le regrettons.
Quant à James Bordas, - il me permettra de le dire - il soulignait que l'image toujours anecdotique et volontiers elliptique donnée de l'institution parlementaire par les médias nuisait sans doute beaucoup au Sénat, dont le rôle est trop systématiquement méconnu, voire brocardé, mais plus profondément et plus gravement encore à la démocratie.
Combien de fois n'avons-nous pas entendu dire qu'un texte était adopté dès que l'Assemblée nationale en avait délibéré ? Plus grave, monsieur le ministre, il nous arrive même d'entendre qu'un texte est adopté dès que le conseil des ministres en a délibéré !
Cette réflexion invitait aussi le Parlement à renouer - vous l'avez signalé, monsieur le ministre - avec le devoir de communication que, dès 1789, s'étaient spontanément donné les premières assemblées parlementaires. C'est en effet dès 1789 que l'on avait prévu la rédaction du procès-verbal, son impression et sa diffusion. Il y avait donc, de la part des parlementaires de l'époque, un souci de communication qui mérite d'être signalé.
Bien entendu, à l'ère du « village global », la publicité des débats parlementaires ne peut être seulement assurée par l'ouverture au public des tribunes des hémicycles, ni par l'impression et la publication du procès verbal de nos séances ; elle passe par l'utilisation de la télévision et des nouvelles technologies de la communication et de l'information.
Elle passe donc par la création, qui nous est aujourd'hui proposée, d'un nouveau service public audiovisuel.
Si la définition de ce nouveau service public doit beaucoup aux travaux et aux expériences déjà menées par les assemblées, l'accord intervenu entre l'Assemblée nationale et le Sénat tend à lui donner un cadre juridique original, respectueux à la fois de l'autonomie du Parlement et, point essentiel, de la spécificité des deux assemblées.
Vous vous souvenez, mes chers collègues, que nous avions adopté, en 1994, un article inséré dans la loi de 1986 qui permettait déjà aux assemblées d'émettre, sous le seul contrôle de leur bureau, des programmes de compte rendu de leurs travaux.
Ce premier texte prévoyait déjà, à la suite d'un amendement de notre commission des affaires culturelles, que ces programmes puissent aussi porter sur le fonctionnement des institutions et faire place au débat public.
La Chaîne Parlementaire reprend et développe ce concept de chaîne « parlementaire et civique ». Cette chaîne représentera, à n'en pas douter, une innovation dans notre paysage audiovisuel.
Quand on parle de chaîne parlementaire, on se réfère, implicitement ou non, aux exemples étrangers, notamment à la chaîne américaine C-SPAN ou à la chaîne canadienne.
Mais ces exemples ne rendent pas compte, ou insuffisamment, du projet français, qui s'inscrit, tout en la renouvelant, dans notre tradition du service public.
Cela se marque, d'abord, dans la conception de la chaîne, qui doit remplir « une mission de service public, d'information et de formation des citoyens à la vie publique ».
Ses programmes comporteront, bien sûr, des retransmissions des séances publiques, des travaux des commission, des offices ou des délégations. Mais ils feront place aussi, comme le souligne l'exposé des motifs des propositions de loi, à des débats de société, à l'actualité, aux travaux des collectivités locales, des parlements étrangers et, bien entendu, du Parlement européen.
Dans le cadre de sa mission civique et éducative, la chaîne devra aussi prendre en compte des besoins de publics spécifiques : élus locaux, enseignants, étudiants, public scolaire. Elle devra être « interactive » et sera complémentaire des sites Internet des assemblées.
Ce projet de « chaîne thématique du débat public », émanant de la seule initiative parlementaire, se distingue donc de modèles étrangers, qui sont souvent d'initiative privée et qui, ailleurs, se limitent généralement à des retransmissions « brutes » des débats.
Les conditions de diffusion sont, elles aussi, conformes aux principes du service public, puisque cette diffusion devra être aussi large que possible et sera, bien entendu, gratuite pour les téléspectateurs.
Le texte proposé, reprenant en cela celui qui avait été voté en 1994, n'exclut aucun mode de diffusion : le câble, le satellite, mais aussi le hertzien numérique terrestre, qui pourra offrir, à l'avenir, d'intéressantes perspectives.
En attendant, la proposition de loi, comme le texte que nous avions adopté en 1997, fait obligation à tous les distributeurs de services câblés ou par satellite de transporter et de diffuser gratuitement la chaîne, ce qui lui assurera une audience potentielle de 20 % des foyers.
J'en viens à présent au cadre juridique, qui, comme je le disais tout à l'heure, doit permettre de respecter à la fois l'autonomie du Parlement et la spécificité de chaque assemblée.
Pour ce qui est des garanties de l'autonomie du Parlement, elles ne nécessitent pas de longs développements, car elles découlent simplement du respect des principes de séparation des pouvoirs et d'autonomie financière des assemblées.
Au nom de la séparation des pouvoirs la chaîne, comme déjà en 1994, ne sera pas soumise au contrôle du CSA.
Comment, d'ailleurs, ce contrôle pourrait-il fonctionner ? La fameuse règle des « trois tiers », appliquée par le CSA pour garantir le pluralisme et l'impartialité, est en effet bien moins exigeante, bien plus grossière que les règles applicables à la constitution des organes des assemblées et au déroulement de leurs débats.
Pour ce qui est des périodes électorales, des règles particulières seront prévues en application de la convention que passeront les deux asemblées pour règler les « affaires communes » de la chaîne ; elles devraient se traduire par des instructions du bureau de chaque assemblée. Notre collègue Serge Lagauche, en commission, a souhaité que ces règles soient clairement présentées et expliquées à l'opinion pour que celle-ci comprenne bien nos intentions.
Quant au contrôle financier, il sera assuré non pas par la Cour des comptes mais selon les règles garantissant l'autonomie financière du Parlement ; là encore, c'est ce que nous avions déjà prévu en 1997.
Je veux, en conclusion de ce rappel, mes chers collègues, insister - comme l'a fait en commission notre collègue Jean-Paul Hugot, qui rapporte habituellement sur ces dossiers de l'audiovisuel - sur le fait que ces règles particulières sont le reflet de l'autonomie reconnue au Parlement dans notre système démocratique et qu'elles ne sauraient, bien sûr, être étendues si peu que ce soit à d'autres chaînes publiques. Nous ne créons pas un précédent ; nous tenons compte de la spécificité et de l'autonomie du Parlement, autonomie qui est essentielle dans une démocratie. J'en viens à présent aux dispositions tendant au respect de la spécificité de chaque assemblée, et donc de la nôtre, monsieur le président.
On s'est rendu compte qu'il était indispensable que chaque assemblée ait une programmation autonome. Ce qui est prévu, c'est donc la mise en place de deux société de programme, créées et financées par chaque assemblée, et qui se partageront à parité le temps d'antenne.
Une convention conclue entre les deux assemblées leur permettra de régler les « affaires communes » - je l'ai déjà mentionné - comme, par exemple, la mise en commun des moyens techniques, notamment régie de production et régie finale, qu'elles financeront à parité, « l'habillage » de la chaîne et, surtout, le partage égal du temps d'antenne, apprécié, bien sûr, en nombre d'heures et de jours de diffusion, mais qui supposera aussi une répartition équitable - c'est au moins aussi important - des crénaux horaires les plus favorables, ce que l'on appelle, dans le jargon habituel, le prime time .
Ces missions communes seront donc assurées dans un cadre purement conventionnel, sans création d'entité juridique nouvelle.
En revanche, l'autonomie de chaque assemblée se traduira par la création de deux sociétés de programme constituées et contôlées par chacune d'elle, La Chaîne Parlementaire-Assemblée et La Chaîne Parlementaire-Sénat.
Chaque assemblée sera l'unique actionnaire de « sa » société, dont les statuts définiront l'organisation : le texte prévoit seulement qu'elles auront chacune un PDG. Elles seront financées par des dotations annuelles de chaque assemblée et leurs comptes seront contrôlés par la commission spéciale chargée de vérifier et d'apurer les comptes. On connaît le dispositif. En tant que sociétés commerciales - il est bon de l'ajouter - elles auront, en outre, des commissaires aux comptes.
Pour notre collègue Jacques Valade, cette formule, qui sera certainement beaucoup plus facile à gérer que ne l'aurait été une structure commune aux deux assemblées, est aussi celle qui permettra le mieux de respecter la « personnalité » propre de chaque assemblée. Mais elle suppose un respect rigoureux du partage paritaire du temps d'antenne. (M. Gouteyron se tourne vers le président.) J'insiste sur ce point, monsieur le président, car je sais que c'est l'un de vos objectifs et l'une de vos préoccupations.
Or, de ce point de vue, nous le savons, l'expérience de Canal Assemblées a été décevante, car l'équilibre des temps de diffusion s'est dégradé en 1997 et 1998 au détriment du Sénat.
Certes, pour une chaine centrée sur la rediffusion brute des débats, cela peut s'expliquer par le fait que « l'événement » a souvent lieu à l'Assemblée nationale, par le fait aussi que les questions d'actualité appellent davantage l'attention du public et suscitent l'audience, et par le fait enfin que les déclarations de politique gouvernementale prononcées par le Premier ministre le sont à l'Assemblée nationale, même si elles sont lues ici par un membre du Gouvernement.
Mais, outre le fait que les débats du Sénat sont souvent plus approfondis et donc, au moins aussi intéressants que ceux de l'Assemblée nationale, la parité est essentielle, surtout compte tenu de la part que doivent prendre dans la programmation les émissions « civiques » et de débat. C'est d'ailleurs sur ce point que l'exigence de parité doit s'appuyer.
Elle devra notamment permettre à La Chaîne Parlementaire-Sénat, en cohérence avec le mode de désignation des sénateurs et conformément au rôle de représentation des collectivités territoriales que lui confère la Constitution, de donner toute sa place à un dialogue et à une interactivité accentués avec les élus locaux.
C'est pourquoi Jacques Valade accorde une particulière importance au principe du partage paritaire du temps d'antenne et à son inscription dans la loi. La commission partage, bien sûr, cette position.
La commission, mes chers collègues, a été sensible à l'importance de ce projet de chaîne parlementaire, qui pourra, nous l'espérons, nous y croyons même, jouer un rôle important dans la vie démocratique de notre pays. Elle a donc décidé, à l'unanimité, de suivre les recommandations de son rapporteur et de vous demander d'adopter la proposition de loi qui nous est soumise dans le texte issu des délibérations de l'Assemblée nationale. (Applaudissements.)
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Bon début du secrétaire général ! (Sourires.)
M. Adrien Gouteyron, rapporteur. Ça sera parfois plus difficile et moins consensuel !
M. le président. La parole est à M. Estier.
M. Claude Estier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous débattons ce soir, dans une certaine urgence - et je regrette que nous ne soyons pas plus nombreux étant donné le sujet qui nous occupe - d'une proposition de loi signée conjointement par les présidents des deux assemblées. « La belle unanimité que voilà ! », pourrait-on dire de prime abord.
Je constate néanmoins que cette unanimité est bien plus au niveau des présidents des deux assemblées qu'interne à l'opposition parlementaire, si j'en juge par la différence de ton entre la majorité sénatoriale et ses amis de l'opposition à l'Assemblée nationale, qui, d'une façon qui m'a beaucoup étonné, ont voté contre cette proposition de loi.
M. François Autain. Oui, c'est étonnant !
M. Claude Estier. Pour notre part, nous approuvons, bien sûr, l'idée d'une télévision qui puisse émettre sur l'ensemble des supports, hertzien terrestre, câble et satellite, et qui permette aux citoyens français de pénétrer au Parlement et de saisir, plus précisément que par les bribes d'informations qui leur sont servies dans les médias généralistes l'importance des travaux effectués par leurs représentants, le sérieux de ces travaux et leur profondeur.
Une telle entreprise, si elle est présentée de façon attractive et pédagogique, ne peut donc que contribuer à améliorer l'image des parlementaires ; je ne doute pas que les deux présidents, Jean-Pierre Elkabbach pour le Sénat et Ivan Levaï pour l'Assemblée nationale, choisis pour diriger les deux sociétés de programme composant La Chaîne Parlementaire, auront à coeur d'oeuvrer en ce sens, d'autant que ce sont, nous le savons tous, deux grands professionnels du traitement de l'information politique et parlementaire.
La Chaîne Parlementaire était depuis plusieurs années une sorte de serpent de mer dont il semblait que l'on ne verrait jamais le bout. Soudain, au début du mois de décembre, un texte commun est soumis aux deux assemblées pour qu'il soit voté à bref délai !
Je sais que ce vote est nécessaire pour créer officiellement les deux sociétés qui géreront La Chaîne et pour procéder au recrutement envisagé. Pourtant, dans la mesure où il semble bien que La Chaîne ne démarrera pas effectivement avant le printemps prochain, je regrette que nous n'ayons pas eu la possibilité de réfléchir davantage sur sa structure, sur ses missions, sur son mode de financement et sur ses modalités de contrôle, car certaines questions se posent à la lecture du texte de la proposition de loi, questions à propos desquelles il me semble indispensable de s'entourer de toutes les précautions.
Je ne reviens pas sur le problème de la parité entre les assemblées qui vient d'être excellement évoqué par M. Gouteyron, mais je veux soulever deux autres questions, et d'abord la question du contrôle.
Le contrôle sera exercé par les bureaux des deux assemblées, à l'exclusion du CSA, mais cela, mes chers collègues, n'est pas sans comporter de risque pour l'opposition de chacune des deux assemblées !
A défaut de contrôle par une autorité indépendante, il faut au moins espérer - soyons optimistes - que les bureaux des assemblées sauront, s'il en est besoin, faire respecter le pluralisme, particulièrement en période électorale.
Je tiens à vous dire que nous serons, en ce qui nous concerne, très vigilants à cet égard.
M. le président. Le président aussi !
M. Claude Estier. Je vous remercie, monsieur le président, d'abonder dans mon sens.
M. Adrien Gouteyron, rapporteur. C'est notre intérêt à tous !
M. Claude Estier. La Chaîne Parlementaire ne sera pas non plus soumise au contrôle de la Cour des comptes en vertu du principe selon lequel les assemblées parlementaires échappent elles-mêmes à ce contrôle. Soit ! Mais j'observe que si la chaîne reçoit une dotation propre, financée dans le collectif budgétaire pour 1999 sur les fonds alloués à chaque assemblée, elle percevra néanmoins d'autres ressources puisqu'elle sera autorisée à avoir recours au parrainage. Dès lors, les ressources de La Chaîne Parlementaire ne sont plus uniquement constituées par les fonds propres des assemblées, échappant normalement au contrôle de la Cour des comptes en vertu du code des juridictions financières.
Le recours au parrainage ou au partenariat permettra incontestablement d'apporter des ressources supplémentaires - je suis certain qu'elle en aura besoin - à La Chaîne Parlementaire ; mais c'est une disposition à double tranchant qui comporte des risques en matière d'indépendance des programmes par rapport aux pressions pouvant être exercées par les candidats au parrainage, au sein des assemblées ; nous connaissons bien le rôle que jouent certains lobbies autour de nous...
Voilà les quelques réserves ou observations que m'inspire la proposition de loi dont nous débattons ce soir ; il était, je le répète, nécessaire au Parlement français de se doter d'une structure permettant de mieux faire connaître son activité à l'ensemble des citoyens qu'il représente, et la télévision constitue assurément le meilleur moyen pour ce faire. Il a, tout à l'heure, été fait allusion à ce qui s'est passé en 1789, j'ignore ce qui se serait produit si la télévision avait alors existé...
M. Michel Pelchat. La Révolution n'aurait pas eu lieu !
M. Claude Estier. Quoi qu'il en soit, compte tenu de toutes ces observations, je tiens à vous assurer que le groupe socialiste votera en faveur de la proposition de loi qui nous est soumise. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. Pelchat.
M. Michel Pelchat. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, aujourd'hui, nous discutons d'un problème important touchant à l'instruction civique, qui, s'il est vrai qu'elle fait à nouveau l'objet d'une attention particulière, a été pendant de trop nombreuses années ignorée par l'éducation nationale. Pour autant, la vie civique demeure peu médiatisée et les initiatives, les débats, et les politiques publics sont souvent très mal connus. La transparence de la vie politique et sa réhabilitation auprès de nos concitoyens nécessitaient donc une information accrue.
Pour ce faire, la télévision, cet extraordinaire moyen de communication, paraissait, à juste titre, être le vecteur privilégié d'information des citoyens, ainsi que le moyen de toucher le plus large public possible.
Une chaîne civique s'imposait donc afin de marquer un nouveau pas dans le retour à une vie civique plus active et plus dynamique. Tel est l'objet de La Chaîne Parlementaire que cette proposition de loi vise à créer. Que les maîtres d'oeuvre de cette chaîne en soient félicités !
Je ne reviendrai pas sur l'organisation générale de cette chaîne, très bien analysée par notre collègue Adrien Gouteyron. Je féliciterai, simplement, ceux qui ont participé, pour le Sénat, aux négociations relatives à la création de cette chaîne d'avoir obtenu la parité d'antenne entre les deux assemblées. Cette parité permettra non seulement de démontrer la complémentarité des deux assemblées parlementaires, mais aussi le rôle essentiel que joue le Sénat parfois tant décrié.
M. Daniel Vaillant, ministre des relations avec le Parlement. Oh !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'est sa politique qui est décriée !
M. Michel Pelchat. Pour autant, l'orateur qui m'a précédé l'a souligné voilà quelques instants, la large concertation qui a eu lieu au Sénat va nous permettre, au-delà de nos divergences politiques, de nous retrouver aujourd'hui unanimes pour voter la création de cette chaîne. Je regretterai qu'il n'en ait pas été de même à l'Assemblée nationale.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Bravo !
M. François Autain. Ce n'est pas de notre faute !
M. Michel Pelchat. Je me féliciterai également de l'organisation bicéphale de cette chaîne propre à garantir son autonomie et la spécificité de chaque assemblée.
Je me réjouis que la séparation des pouvoirs soit respectée et que La Chaîne Parlementaire ne relève ni de l'autorité du Conseil supérieur de l'audiovisuel, ni de celle de la Cour des comptes.
Je fais confiance à la sagesse des élus nationaux des deux assemblées pour gérer, dans la pluralité, la clarté et l'honnêteté la plus grande les moyens de cette chaîne, moyens financiers certes, mais aussi les moyens d'informer nos concitoyens de nos travaux.
Il me paraît bon néanmoins que La Chaîne Parlementaire soit soumise à un conseil de surveillance constitué d'élus nationaux. Je suis sûr qu'il veillera non seulement à l'adéquation des programmes aux missions dévolues à La Chaîne Parlementaire, mais aussi au respect du pluralisme. Je fais confiance, je le répète aux élus nationaux qui siègeront au sein du conseil de surveillance.
Souhaitons que La Chaîne Parlementaire soit un formidable moyen d'informer, de valoriser les institutions nationales et, pour sa partie Sénat, de mieux faire appréhender les travaux de notre Haute Assemblée, comme l'a rappelé M. Adrien Gouteyron.
Je regrette toutefois que notre pays soit très en retard en matière d'équipement numérique hertzien. Aujourd'hui, nous le savons, cette chaîne sera reçue potentiellement par 20 % de notre population. Avec un taux d'audience de 15 %, seuls 3 % de la population pourront suivre les programmes de cette chaîne. Demain, grâce au numérique hertzien, 100 % de la population pourraient être initialisés. Je n'ai pas besoin de vous faire la démonstration de l'impact que pourrait avoir cette chaîne : elle pourrait être regardée par tous les enfants, dans toutes les écoles, pendant les heures ouvrables, par tous les collégiens, tous les lycéens et dans les universités. On voit bien toute l'importance démultipliée à l'infini que pourrait avoir cette chaîne Parlementaire et son impact effectif sur l'éducation civique de nos concitoyens lorsque notre pays sera doté d'un réseau numérique hertzien.
Au-delà de ces remarques, avec mes collègues du groupe des Républicains et Indépendants, je voterai la proposition de loi de M. le président Christian Poncelet et de notre collègue Jacques Valade visant à créer cette chaîne Parlementaire et à lui donner tous les moyens pour qu'elle puisse fonctionner. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. Maman.
M. André Maman. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon propos n'a qu'une ambition : recentrer et clarifier un débat que la politique, sinon la polémique, semble avoir égaré. La Chaîne Parlementaire aura eu bien du mal à voir le jour. Et rien ne lui aura été épargné.
De l'initiative du président René Monory en 1992, auquel je tiens à rendre ici un hommage appuyé, jusqu'à l'examen de cette proposition de loi, le chemin a été bien long.
Certains continuent de penser que la naissance de cette chaîne est entourée d'une certaine opacité. Pour eux, toute la réflexion a été menée dans un secret entretenu, sans garantie d'impartialité et d'objectivité.
J'estime pour ma part que, si nous voulons aboutir, il faut dépasser ces critiques tout en réaffirmant quelques principes fondamentaux.
Comme notre excellent rapporteur M. Gouteyron l'a dit, La Chaîne Parlementaire ne peut pas être une chaîne de droite ou une chaîne de gauche, elle ne peut être une chaîne partisane au service d'une autorité quelconque ou d'un clan. Elle doit assurer une information impartiale et objective sur les travaux parlementaires, respecter l'autonomie du Parlement et la spécificité de chacune des deux assemblées. Elle doit aussi être civique et aider à la formation des citoyens à la vie publique.
Comment pourrait-on imaginer un seul instant qu'un si bel instrument d'instruction citoyenne soit accaparé par quelques-uns ?
Un accord politique était nécessaire pour que cette chaîne puisse voir le jour. Je me réjouis que les deux présidents des assemblées concernées aient pu le trouver.
Le groupe de l'Union centriste, favorable à la création de cette chaîne, estime qu'il est primordial qu'elle respecte, dans le cadre de sa mission de service public, le pluralisme des groupes politiques. C'est une garantie majeure de sa crédibilité.
N'oublions pas que LCP est une chaîne publique, car elle est financée avec de l'argent public. Cela lui impose des obligations et des devoirs.
Il est également très important, cela a déjà été mentionné, que l'Assemblée nationale et le Sénat disposent du même nombre d'heures et de jours de diffusion, les meilleurs créneaux horaires, c'est-à-dire les heures de grande écoute, devant être équitablement répartis. Il en va du respect du bicamérisme, garanti par notre Constitution.
Nous croyons également que cette chaîne constitue un défi que les parlementaires, tous ensemble, doivent relever. Pour y parvenir, il va nous falloir mobiliser toute notre énergie et toute notre vigilance. C'est une chance pour nous de mieux faire connaître nos travaux.
Nous avons déjà parlé du public des écoles. De plus en plus souvent nous voyons des groupes d'écoliers, d'élèves, d'étudiants, français et étrangers d'ailleurs, qui viennent voir ce que fait le Sénat, qui viennent se renseigner.
Je note pourtant que la majorité des Français ne savent pas encore qu'il existe des sénateurs représentant les Français de l'étranger. Chaque fois que j'en parle, mon interlocuteur est étonné et demande des explications. C'est absolument incroyable, puisque des sénateurs représentent les Français de l'étranger depuis quarante-cinq ans !
L'enjeu est de susciter l'intérêt des spectateurs. Comme les débats risquent de les ennuyer, il va falloir capter leur attention. Pour être compétitive avec les autres chaînes, LCP devra faire un réel effort sur les aspects pédagogiques et didactiques de ses programmes.
Son rôle sera de privilégier autant l'information citoyenne que l'information civique ; c'est fondamental.
LCP doit relever un autre défi, celui qui est posé par le développement des technologies de l'information et de la communication.
A l'heure du « tout numérique », LCP ne peut pas concevoir son avenir sans l'intégration d'une indispensable composante interactive. A l'image des chaînes américaines C-SPAN, LCP devra aussi trouver des développements par le biais de l'Internet.
Il m'arrive très souvent de regarder les programmes de C-SPAN quand je suis aux Etats-Unis, pays où je réside d'ailleurs, et je suis surpris de la diversité des débats qui sont retransmis. Evidemment, aux termes de la Constitution, le Sénat américain a des pouvoirs plus grands que ceux du Sénat français. Sont ainsi retransmis des débats d'une importance extrême, au cours desquels il juge tout ce qui se passe dans le pays, qu'il s'agisse des différentes activités économiques ou de la nomination des ambassadeurs. Les débats sont donc très diversifiés et d'un grand intérêt. Il n'est pas rare que les Américains, y compris les jeunes, passent des heures devant leur poste de télévision à regarder ces programmes.
A l'image des chaînes américaines C-SPAN, disais-je, LCP devra aussi trouver des développements par le biais de l'Internet. Cela nous semble indispensable pour qu'elle puisse s'ouvrir sur le monde et permette ainsi à nos concitoyens expatriés de s'informer sur les travaux du Parlement français. Les Français de l'étranger veulent, eux aussi, savoir ce qui se passe au Sénat et nous posent, lors de nos déplacements à l'étranger, de très fréquentes questions à ce sujet.
Nous voterons donc cette proposition de loi, mais nous resterons vigilants, tant sur le plan du respect de l'expression de la pluralité politique que sur la maîtrise du coût financier d'une telle opération. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. Renar.
M. Ivan Renar. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, quelque soixante-dix ans après l'invention de la télévision, notre Parlement s'apprête à se doter d'une chaîne spécifique, La Chaîne Parlementaire.
Si le pouvoir politique a de tout temps utilisé les outils de communication mis à sa disposition dès leur émergence, parfois non sans dérives, notre Parlement, symbole d'une démocratie en mouvement, lieu d'élaboration plurielle de la loi, symbole encore de la diversité de sa composition politique, ne dispose pas au moment où nous parlons d'un instrument adapté à la valorisation de ses travaux, reflet du suffrage universel.
Depuis plusieurs années en effet, malgré de nombreuses séances de travail, auditions, parfois communes, nos deux chambres éprouvaient quelques difficultés à la réalisation d'une chaîne commune où l'accord conforme des deux protagonistes semblait incontournable et, en même temps, difficile à obtenir. Parallèlement, le service public de l'audiovisuel, prisonnier de l'audimat, a toujours eu des difficultés à oser la citoyenneté.
Où en sommes-nous aujourd'hui ?
Les difficultés que rencontraient l'Assemblée nationale et le Sénat pour réaliser une véritable chaîne commune ont conduit le Parlement à un compromis.
De fait, sous le vocable La Chaîne Parlementaire, deux sociétés distinctes vont voir le jour, chacune placée sous la responsabilité respective du bureau de l'Assemblée nationale et du bureau du Sénat.
Si les moyens de diffusion, la régie finale et la gestion des contrats de diffusion est commune, chacune des deux sociétés distinctes aura la charge de la ligne éditoriale des émissions Sénat et Assemblée nationale.
Les deux présidents de chaîne qui ont été choisis sont des professionnels de qualité qui ont fait leurs preuves. Cela laisse bien augurer des deux futures grilles de programmes.
Dès lors que La Chaîne Parlementaire remplit une mission de service public, d'information et de formation des citoyens à la vie publique, peut-être aurait-on souhaité que ces missions soient accomplies dans le cadre des missions plus générales de France Télévision, au moyen d'une chaîne spécifique. D'autres choix ont prévalu, lesquels résultent, à n'en pas douter, de l'autonomie même du Parlement, de la difficulté à trouver un accord entre les deux chambres et des carences du service public.
Dès à présent, les deux sociétés distinctes auront la complexe tâche de donner de notre Parlement une image conforme à la qualité des travaux qui s'y déroulent.
Le respect indispensable et permanent du pluralisme ira de pair avec la crédibilité de la chaîne, cela ne sera sans doute pas la tâche la plus facile, mais on pourrait tout aussi bien citer la diversité de nos travaux, l'apport et l'enrichissement des deux assemblées pour parvenir à une écriture la plus juste possible de la loi.
La proposition de loi qui nous est soumise prévoit que cette chaîne sera accessible par le plus grand nombre, c'est là un préalable apte à garantir la citoyenneté de cette chaîne. Sinon, en l'état actuel et avant l'arrivée du numérique hertzien, cette chaîne ne sera de fait disponible que sur le câble ou par voie satellitaire.
Il y a donc lieu d'oeuvrer pour cette raison - mais ce n'est pas la seule - au développement du numérique hertzien par le service public. Mais peut-être d'autres solutions sont-elles envisageables pour privilégier une égalité de traitement de nos concitoyens.
L'interactivité est souvent citée comme devant être l'un des axes forts de l'existence de cette chaîne. Peut-être les auteurs de la proposition de loi qui nous est soumise pourront-ils d'ores et déjà nous informer des moyens mis en oeuvre pour parvenir à associer le plus largement possible l'ensemble des publics de La Chaîne Parlementaire.
En ce qui concerne le Sénat, je pense en particulier aux 500 000 élus municipaux, dont nous sommes nous-mêmes les élus, pour qui la nouvelle chaîne pourrait être un outil précieux dans l'exercice de leur mandat.
Je pense également à la jeunesse dont l'approche de la politique, au meilleur sens du terme, pourra être facilitée et enrichie avec cette sorte de « point d'ancrage » que pourra constituer la nouvelle chaîne. L'expérience de « sénateurs juniors » avec les classes de troisième des collèges montre l'étendue des possibilités dans ce domaine.
Dans le même ordre d'idées, la possibilité de « partenariats » est évoquée ; c'est une notion assez floue pour laquelle nous souhaiterions bénéficier d'un supplément d'information.
Nonobstant ces quelques remarques, nous adopterons, avec la volonté déterminée de construire un nouvel instrument de la démocratie et de la citoyenneté, la proposition qui nous est soumise et qui vise à créer une chaîne parlementaire.
Pour autant, et avant d'en terminer, je voudrais rappeler que la démocratisation de l'institution parlementaire reste à conquérir, que la création d'une chaîne parlementaire ne pourra, à elle seule, contribuer à la mettre en oeuvre.
A ce titre, il nous appartient, à tous, d'oeuvrer au développement de nouvelles formes de citoyenneté participative où les parlementaires, nous n'en doutons pas, ont un rôle déterminant à jouer.
M. André Maman. Très bien !
M. Ivan Renar. La modernisation de nos institutions, la modification des modes de scrutin majoritaires qui mettent à mal certaines formes d'expression, pour parvenir au mode de scrutin plus juste qu'est par exemple la proportionnelle, la féminisation de la vie politique, l'accès du plus grand nombre aux mandats électifs restent encore au rang des travaux à réaliser pour que le Parlement reflète au mieux l'image de notre société contemporaine.
Dans ces domaines, également, La Chaîne Parlementaire - que j'aimerais voir sous-titrée « chaîne citoyenne » - aura son rôle à jouer.
En attendant, au nom du groupe communiste républicain et citoyen, je donne, ce soir, un avis favorable à sa création. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. Trégouët.
M. René Trégouët. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'image passive, passéiste dirai-je, de la télévision telle qu'on la concevait il y a encore quelques années, un émetteur, d'une part, des téléspectateurs passifs, d'autre part, va rapidement régresser pour laisser place à une télévisison interactive.
Or cette évolution du monde de la télévision est parfaitement compatible, homothétique pourrait-on dire, avec la mutation accélérée de notre société que nous vivons actuellement.
Nos concitoyens sont de plus en plus nombreux à rejeter les organisations pyramidales pour exiger un fonctionnement où chacun a un rôle actif à jouer.
Ce serait une erreur de croire que le Parlement pourrait être à l'abri de cette évolution fondamentale. Si nous faisons de La Chaîne Parlementaire une chaîne de type pyramidal, elle connaîtra inexorablement l'échec, car elle n'intéressera pas nos concitoyens. En revanche, si nous en faisons une chaîne interactive laissant beaucoup de place à l'expression des citoyens et si nous savons la marier harmonieusement avec les nouvelles technologies de l'information et de la communication, alors elle renforcera notre démocratie.
Parmi les nombreuses pistes qui restent à explorer entre le monde de la télévision et le monde de l'Internet, je voudrais citer deux voies qui pourraient éclairer avec force l'avenir.
Je pensais que M. Maman exposerait la première. J'espère qu'il ne m'en voudra pas de le faire à sa place, bien que je ne représente pas les Français de l'étranger. ( M. André Maman manifeste son accord.)
La technique nous permet maintenant de diffuser sur Internet les images et le son d'une chaîne de télévision. Si c'était le cas de La Chaîne Parlementaire, les Français de plus en plus nombreux qui habitent à l'étranger pourraient la regarder sur leur ordinateur et participer ainsi, malgré les distances, aux débats, lesquels se développeraient. Cela rapprocherait les membres de la communauté francophone dans notre monde, communauté qui, je tiens à le rappeler, représente 250 000 millions de personnes. Il faut donner cette ampleur à La Chaîne Parlementaire !
M. André Maman. Très bien !
M. René Trégouët. De plus, en rapprochant étroitement le monde de la télévision de celui de l'Internet, nous renforcerons une voie qui vient d'être ouverte par le Sénat, et cela pour la première fois non seulement en France, mais aussi en Europe.
Savez-vous, mes chers collègues, qu'à l'occasion du forum que Pierre Laffitte et moi-même avons ouvert en septembre dernier sur le site du Sénat pour permettre aux internautes d'enrichir la proposition de loi relative aux logiciels libres que nous avions déposée sur le bureau de notre Haute Assemblée voilà à peine trois mois, ce site a été consulté par 102 000 visiteurs ! Ce sont 1 403 contributions qui ont permis de modifier et de compléter notre texte d'origine.
Ces jours derniers, Pierre Laffitte et moi-même avons déposé une nouvelle proposition de loi concernant les logiciels libres qui tient compte des suggestions souvent très pertinentes des internautes. En allant sur le site Internet du Sénat, vous pourrez constater combien notre texte a été enrichi grâce à ce large débat.
Le monde de l'internet est encore tout petit. Ce nombre de visiteurs n'est rien à côté du nombre de ceux qui pourraient consulter La Chaîne Parlementaire si nous savions la marier subtilement aux nouvelles technologies pour en faire une chaîne totalement interactive !
Cela donnerait, j'en ai la conviction, mes chers collègues, une nouvelle approche du débat parlementaire. C'est bien dans ce sens que le groupe du RPR apportera son total soutien à cette chaîne parlementaire. (Applaudissements.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.

Article 1er