Séance du 7 mars 2000







M. le président. « Art. 11. - L'article 18 de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 précitée est ainsi modifié :
« a) Le premier alinéa est précédé d'un "I. -" ;
« b) Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« Toute personne physique ou morale de droit privé, autre que celles visées à l'article 16, qui organise une manifestation sportive concernant une discipline qui a fait l'objet d'une délégation de pouvoir conformément à l'article 17 et donnant lieu à remise de prix en argent ou en nature, dont la valeur excède un montant fixé par arrêté du ministre chargé des sports, doit obtenir l'autorisation de la fédération délégataire concernée. » ;
« c) Supprimé ;
« d) Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Cette autorisation est demandée au moins trois mois avant la date fixée pour le déroulement de la manifestation. En l'absence de réponse dans un délai de un mois suivant la réception de la demande, l'autorisation est considérée comme accordée. » ;
« e) Les deux derniers alinéas sont remplacés par deux alinéas et un paragraphe ainsi rédigés :
« Cette autorisation est subordonnée au respect des règlements et règles techniques mentionnés au I de l'article 17 et à la conclusion entre l'organisateur et la fédération délégataire d'un contrat comprenant des dispositions obligatoires fixées par décret. Cette manifestation est inscrite au calendrier de la fédération délégataire.
« Les fédérations délégataires ne peuvent déléguer leurs compétences pour l'organisation de manifestations sportives nécessitant des conditions particulières de sécurité. Elles signalent la tenue de ces manifestations aux autorités détentrices des pouvoirs de police. Les manifestations concernées par les dispositions du présent alinéa sont précisées par arrêté du ministre chargé des sports.
« II. - Le fait d'organiser une manifestation sportive sans l'autorisation de la fédération délégataire dans les conditions prévues au I du présent article est puni d'une amende de 100 000 F.
« Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues à l'article 121-1 du code pénal, de l'infraction définie à l'alinéa précédent.
« La peine encourue par les personnes morales est l'amende, suivant les modalités prévues à l'article 131-38 du code pénal.
« Tout licencié qui participe à une manifestation n'ayant pas reçu l'autorisation de la fédération dont il est membre s'expose aux sanctions disciplinaires prévues par le règlement de cette fédération. »
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 6, M. Bordas, au nom de la commission, propose de supprimer cet article.
Par amendement n° 84, MM. Faure, Louis Boyer, Dufaut, Eckenspieller, Herment, Joly, Leclerc, de Montesquiou et Nogrix proposent de rédiger comme suit le texte présenté par le b de l'article 11 pour le premier alinéa de l'article 18 de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 :
« Toute personne physique ou morale de droit privé, autre que celles visées à l'article 16, qui organise une manifestation concernant une discipline qui a fait l'objet d'une délégation de pouvoir conformément à l'article 17 et donnant lieu à remise de prix en argent ou en nature dont la valeur excède un montant fixé par arrêté du ministre chargé des sports, doit obtenir l'agrément de la fédération délégataire concernée. »
Par amendement n° 60, MM. Lagauche, Collomb, Dreyfus-Schmidt, Hesling et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, dans le texte présenté par le b de l'article 11 pour le premier alinéa de l'article 18 de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984, de remplacer les mots : « concernant une discipline qui a fait l'objet d'une délégation de pouvoir conformément à l'article 17 » par les mots : « ouverte aux licenciés des fédérations mentionnées à l'article 17 ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 6.
M. James Bordas, rapporteur. L'article 18 de la loi de 1984 a créé une procédure d'agrément par les fédérations délégataires des manifestations sportives ouvertes à leurs licenciés et dotées de prix d'une valeur supérieure à 10 000 francs.
L'article 11 du projet de loi remplace cet agrément par une autorisation, ce qui n'est pas du tout la même chose, et impose l'autorisation même aux manifestations qui ne seraient pas ouvertes aux licenciés.
Ce débat avait déjà eu lieu en 1984 et le Sénat s'était opposé à l'autorisation, inventant cette procédure d'agrément qui, à l'usage, s'est révélée très utile. Il n'y a pas, aujourd'hui, plus de raison qu'en 1984 de faire de l'organisation de manifestations sportives une activité soumise à autorisation, ni de donner aux fédérations sportives un pouvoir de police qui ne peut appartenir qu'à l'Etat et qui est limité, dans ce cas, à la protection de la sécurité et de l'ordre public. Je crois d'ailleurs savoir que, cette fois-ci comme en 1984, le Conseil d'Etat a aussi été de cet avis.
D'autant plus que ce régime d'autorisation n'est pas très clair. Alors que l'autorisation est en principe un acte unilatéral, celle-ci serait subordonnée à la conclusion d'un contrat entre la fédération et l'organisateur. On nous a dit officieusement que ce contrat pouvait prévoir un partage des droits d'exploitation. Nous vous avons interrogée sur ce point, madame la ministre, mais vous ne nous avez pas répondu.
De même, nous nous étonnons de voir figurer à cet article des dispositions relatives aux matchs à risques organisés par les fédérations et recopiées de l'article 42-3 de la loi.
Nous notons aussi que ce système serait un peu absurde, car, si l'organisateur n'a pas l'autorisation, il devra faire une déclaration au préfet, qui, lui, ne pourra interdire la manifestation que si elle présente un risque pour la santé des participants. Mais l'organisateur qui aura passé outre à l'interdiction de la fédération pourrait tout de même être condamné pour cela à 100 000 francs d'amende, ou à 500 000 francs pour une personne morale.
Il faudrait, de plus, modifier toute la loi sur le dopage, qui s'applique aux manifestations organisées ou agréées par les fédérations.
Mieux vaut donc en rester à l'agrément, qui permet tout de même, je le rappelle, aux fédérations d'interdire à tous leurs licenciés de participer à une manifestation non agréée. Cela paraît suffisant pour éviter le téléscopage avec une compétition officielle ou pour couper court à l'organisation d'une manifestation purement commerciale qui n'aura aucun intérêt pour ses organisateurs si elle ne rassemble que des sportifs amateurs et inconnus.
C'est pourquoi nous proposons de supprimer l'article 11 du projet et de ne pas modifier l'article 18 de la loi de 1984.
M. le président. La parole est à M. Faure, pour présenter l'amendement n° 84.
M. Jean Faure. Je ne voudrais pas être en contradiction avec la commission, mais, après consultation des responsables de haut niveau du sport français, il nous est apparu que la rédaction proposée consistait à fonder l'agrément des manifestations sur la notion du champ d'agrément de la délégation de la fédération concernée plutôt que sur la notion de licenciés, afin d'éviter que des manifestations sportives importantes soient organisées hors du contrôle des fédérations sportives.
L'application cumulative des deux critères imposant à un organisateur de solliciter l'agrément de la fédération délégataire maintient les possibilités de contournement déjà constatées. Il est apparu que des organisateurs d'un circuit professionnel privé esquivaient cette obligation en fermant l'accès de leur compétition aux licenciés de la fédération concernée. L'une des deux conditions prévues par le dispositif n'étant pas couverte, l'organisateur est donc libre d'organiser toute manifestation. Cette pratique a causé un préjudice important à certaines disciplines, certains des meilleurs sportifs français préférant ne plus se licencier plutôt que de risquer de ne pas être admis dans les étapes françaises de ces circuits.
La solution préconisée consiste à fonder le processus d'agrément de la manifestation non pas sur la notion de licenciés, mais sur celle du champ de la délégation de la fédération concernée. Au-delà d'un certain montant de prix - qui pourrait être relevé dans des proportions importantes pour éviter que ne tombent sous le coup de ces dispositions des manifestations secondaires - la fédération conserverait ainsi la maîtrise de l'organisation des manifestations sportives des disciplines entrant dans le champ de la délégation de pouvoir qu'elle a reçue du ministère chargé des sports et dont elle édicte les règles techniques.
M. le président. La parole est à M. Lagauche, pour défendre l'amendement n° 60.
M. Serge Lagauche. Cet amendement vise à faire reposer l'obligation d'obtenir une autorisation pour l'organisation de manifestations sportives à la condition de leur ouverture aux licenciés. Il n'est donc pas utile de donner un pouvoir à la fédération de la discipline concernée pour des manifestations qui ne relèvent pas de sa compétence.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n° 84 et 60 ?
M. James Bordas, rapporteur. La commission propose la suppression de l'article 11 ; elle est donc défavorable aux amendements n°s 84 et 60.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 6, 84 et 60 ?
Mme Marie-George Buffet, ministre de la jeunesse et des sports. Je suis sensible à l'argumentation développée par M. Faure. En effet, dans certaines pratiques sportives, notamment le surf, évoqué à l'instant, des licenciés sont confrontés à ce problème.
Il me semble nécessaire qu'un dispositif d'autorisation délivrée par la fédération délégataire soit prévu par la loi, tout en admettant, après le mini-débat qui vient d'avoir lieu, qu'il convient d'en revoir la rédaction.
En conséquence, le Gouvernement est, bien entendu, défavorable à l'amendement n° 6 et s'en remet à la sagesse du Sénat sur les amendements n°s 84 et 60.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 6.
M. Jean Faure. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Faure.
M. Jean Faure. Vous comprendez mon embarras, monsieur le président, car j'aime travailler en parfaite harmonie avec la commission, et en particulier avec son rapporteur, qui est un homme brillant et très éclairé.
Cela étant, cher rapporteur, si nous supprimons cet article, il n'y aura plus de discussion possible en commission mixte paritaire. Adopter le texte que je propose permettrait d'approfondir la réflexion en commission mixte paritaire sur un dispositif que le mouvement sportif appelle de ses voeux.
En conséquence, si M. Bordas, tout en respectant, bien sûr, la mission qui lui a été confiée par la commission, pouvait ne pas emporter complètement l'agrément du Sénat sur son amendement, j'en serais très heureux ! (Sourires.)
M. le président. Voilà qui est parfaitement exprimé !
M. Serge Lagauche. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lagauche.
M. Serge Lagauche. Nous nous associerions à un accord qui permettrait la réouverture de la discussion sur ce point en commission mixte paritaire. M. James Bordas, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. James Bordas, rapporteur. La suppression de l'article ne clot pas le débat. Nous n'arriverons pas en commission mixte paritaire les mains dans les poches mais avec un article supprimé ; nous pourrons toujours essayer de convaincre nos collègues de l'Assemblée nationale que cette suppression est fondée.
Quant à l'amendement n° 84 de M. Faure, il reprend pratiquement le texte adopté par l'Assemblée nationale.
M. Jean Faure. Modifié !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 84, repoussé par la commission et pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 60 n'a plus d'objet.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 11, ainsi modifié.

(L'article 11 est adopté.)

Article additionnel après l'article 11